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Conflits hommes-faune sauvage en Inde du sud: déterminants spatiaux et socioculturels


par Paul Badaire
Le Mans Université - Master Gestion des Territoires et Développement Local 2018
  

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1.3. Dimension environnementale des conflits hommes-animaux sauvages

Les conflits entre des communautés humaines et des animaux sauvages s'inscrivant donc dans les caractéristiques sociétales et environnementales du système socio-écologique les englobant, Guerbois, Chapanda, et Fritz (2012) estiment que l'implantation de solutions efficaces pour faciliter la cohabitation est subordonnée à la compréhension de la spécificité du contexte local et des processus endogènes à l'oeuvre. Poinsot (2012) soutient en effet que la gestion de la faune sauvage implique la prise en compte de la diversité du milieu géographique. Outre le contexte sociétal, il estime que trois variables en interrelations et aux caractéristiques à la fois naturelles et sociales conditionnent l'intensité des conflits : les densités humaines et animales, les formes (contours et taille de l'aire protégée, couverture des sols...) et l'accessibilité (mesures d'aménagement humaines, topographie...). Les espèces animales concernées dans les conflits hommes-animaux sont, de plus, en grande majorité mobiles, et dotés d'une capacité à s'adapter aux contraintes du milieu. L'étude de leurs écologies dans le contexte de leurs territoires et leurs spatialisations sont donc également nécessaires pour appréhender correctement les tenants de ces conflits (Sitati et al., 2005).

Une variété de facteurs peut donc accroître (ou décroître) les risques de conflits. Ces facteurs s'inscrivent dans un territoire, un lieu et un espace aux caractéristiques particulières, et sont intimement liés à ces dernières. L'analyse des configurations spatiales à l'origine de ces conflits permet donc d'intégrer différents types de données (éthologiques, agro-écologiques, sociodémographiques, géographiques...) afin de mieux interpréter ces conflits et leurs causes. L'intérêt d'une telle étude est double : identifier les zones de vulnérabilité pour optimiser l'utilisation des moyens de réduction des conflits et déterminer les solutions les plus adaptées selon les situations.

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1.3.1. Dimension animale : des comportements et des préférences évolutives

Dans le cadre de leurs stratégies alimentaires, les animaux effectuent des choix qui visent à optimiser ces stratégies (Graham et al., 2010; Sitati et al., 2005; Sukumar, 1994). Les décisions prises découlent d'un arbitrage entre bénéfices possibles et risques perçus (Guerbois et al., 2012). Ce mémoire autour de l'AP d'Aralam dans l'État du Kerala au sud de l'Inde, se concentrera sur les dégradations agricoles par les espèces animales herbivores. L'accès à l'intérieur de l'aire protégée d'Aralam étant interdit, les conflits ont en effet pour principale cause la transgression de ses limites par la faune et sont en très grande majorité l'oeuvre d'herbivores qui viennent ponctuellement dans à la recherche de moyens de subsistance (Rajan, Madhusoodhanan, communications personnelles).

Plusieurs raisons ont été avancées pour expliquer ce qui attire les herbivores hors de leurs habitats naturels. En Inde, l'insuffisance de nourriture ou de sources d'eau à l'intérieur des AP est souvent proposée dans la littérature, par exemple à cause de la réduction de l'habitat naturel (Everard et al., 2017) ou de la propagation d'espèces végétales invasives non comestibles telle que le lantanier qui diminuent les sources de nourriture (Pant et al., 1999). L'expansion spatiale des activités humaines impacte ainsi l'habitat naturel de la faune sauvage et sa qualité. Cette constriction spatiale de l'habitat de la faune sauvage peut limiter fortement la disponibilité des ressources nécessaires pour la faune. DeFries, Karanth et Pareeth (2010) indiquent par exemple que les ressources hydriques dans une AP peuvent diminuer drastiquement si les sources sont situées hors de l'aire et ne font pas l'objet d'une gestion durable.

Les herbivores peuvent également être attirés par la valeur nutritive supérieure des cultures agricoles par rapport à celle des plantes sauvages, ainsi que par leur groupement spatial qui permet une quête de nourriture plus efficace (Sukumar, 1990). De même, certains types de récoltes semblent plus appétents selon les espèces animales, comme le bambou pour l'éléphant asiatique ou la canne à sucre pour le sanglier (Baskaran, 2013; Naughton-Treves, 1997). La proximité à des activités humaines peut donc provoquer des changements de comportements et d'habitudes alimentaires chez certains animaux.

Chaque espèce a également un type d'habitat qui lui est plus propice. Par exemple, le cervidé sambar (Rusa Unicolor) préfère les forêts denses et les terrains accidentés, mais a besoin d'espaces de végétation intermédiaire pour se nourrir (Pant et al. 1999) alors que l'éléphant asiatique préfère les espaces de végétation herbacée ouverts (Baskaran et al., 2013).

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D'une manière générale, les forêts secondaires sont très prisées pour leur diversité végétale (Sillero et al., 2006).

Les comportements individuels des animaux influencent aussi leurs stratégies alimentaires. Srinivasaiah et al. (2012) montrent ainsi que les éléphants mâles solitaires sont plus susceptibles de ravager les cultures humaines que les éléphants appartenant à un troupeau. Ces cultures présentant plus de risques pour les animaux (à cause de la proximité humaine) mais une qualité et une quantité de nourriture supérieure, ils estiment ainsi que éléphants mâles solitaires sont plus audacieux et ont une aversion inférieure au risque par rapport aux éléphants vivant en groupe, fondant ainsi leurs stratégies alimentaires sur le mode « high risk/high gain ».

Gubbi (2012) et Shivaraju (2016), dans des études au sud de l'Inde, montrent de plus l'influence du facteur temporel sur les comportements des animaux. Ils notent que la saison sèche (Mars-Avril) coïncide avec un accroissement des conflits à cause d'une moindre disponibilité en eau et ressources alimentaires. La période de récolte post-mousson en Novembre-Janvier de nombreuses cultures semble également être associée avec une recrudescence des raids sur les cultures agricoles.

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