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Conflits hommes-faune sauvage en Inde du sud: déterminants spatiaux et socioculturels


par Paul Badaire
Le Mans Université - Master Gestion des Territoires et Développement Local 2018
  

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1.5. La géographie et l'étude des relations hommes-animaux sauvages

Bien que les enjeux des conflits hommes-faune sauvage ne soient pas récents, les travaux scientifiques sur les conflits et la coexistence hommes-animaux ne se sont réellement multipliés sur la question que depuis une vingtaine d'années (Nyhus, 2016). Alors que l'étude des relations homme-faune relève de problématiques socio-écologiques et demande par essence une approche pluridisciplinaire, ce sont traditionnellement les sciences naturelles qui se sont attachées à étudier ces conflits (Carter et al., 2014). Cependant, ces approches ont tendance à omettre l'importance de l'aspect humain de ces conflits. En conséquence, les sciences sociales sont de plus en plus appelées à participer à ces recherches (Dickman, 2010). Nyhus (2016) propose ainsi le développement d'une nouvelle discipline l'anthrothérologie, qui réunirait les chercheurs de différents horizons pour traiter la coexistence et les conflits hommes-faune sauvage. D'une manière générale, les processus endogènes sous-tendant les relations entre les hommes et la faune et leur cohabitation sont encore très peu compris (Guerbois et al., 2012).

La géographie ne s'est cependant encore que peu attachée à étudier ce domaine (Marchand, 2013), malgré le fait que la notion d'espace et le concept de territoire soient centraux à ces conflits. Comme Emel et Urbanik (2010, p. 203) l'indiquent : « The contribution

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of geographers are unique precisely because of their emphasis on the historical and spatial contexts of specifics lives and relationships: in effect space, place, landscapes are instrumental to furthering the goals of Human-Animal studies », la géographie peut offrir un angle d'analyse particulièrement fructueux sur la question des relations entre hommes et animaux en étudiant la question à travers le prisme spatial. En effet, les relations entre les activités humaines, la faune sauvage et les paysages sont liés aux particularités du territoire dans lequel ils s'inscrivent (Bortolamiol et al., 2013; Wilson et al., 2015). Étant donné la mobilité et l'agentivité des animaux (Poinsot, 2012 ; Estebanez et al., 2013), il est, en outre, indispensable d'intégrer à la fois les perspectives humaines et animales et de spatialiser le milieu de vie de ces derniers afin de mieux saisir les processus sous-tendant leurs rencontres. Comprendre les interactions existantes entre les hommes, les animaux et l'espace qu'ils occupent conjointement est donc essentiel pour appréhender ces conflits et leurs tenants.

La géographie animale connaît un renouveau depuis 20 ans, notamment en France avec un numéro d'Espaces et Sociétés consacré à ce courant en 2002 ainsi qu'un numéro de Carnets de Géographes en 2013. Les significations de la vie sauvage pour les humains ont fait l'objet de nombreux travaux de la part de la géographie animale culturelle (Marchand, 2013). Cette dernière se focalise autour de deux grands thèmes : l'impact socioculturel des animaux dans la construction de l'espace et de la culture humaine, et l'évolution spatio-temporelle de la ligne de démarcation entre les hommes et les animaux (Johansson, 2009; Wolch et al., 2003). Par exemple, les travaux des géographes comme Mauz (2002) visent à déterminer la place de l'animal selon les humains, afin de définir la notion de conflit. Selon Blanc et Cohen (2002) et Lorimer et Srinivasan (2013), la géographie animale cherche à comprendre le monde du point de vue de l'animal et à déterminer les dynamiques sous-tendant la mobilité des animaux. La géographie humanimale d'Estebanez et al. (2013) met plus l'accent sur l'étude des relations entre hommes et animaux et la manière dans ces derniers transforment les sociétés humaines. En intégrant une dimension sociale et l'agentivité des animaux, la géographie animale permet donc d'aller plus loin que le seul point de vue écologique dans la compréhension de l'animal et de sa mobilité quand il entre en interaction avec les sociétés humaines.

De même, la question des conflits environnementaux et l'intégration de la dimension politique et des rapports de pouvoir sont des parties intégrantes du champ disciplinaire de la géographie (Chartier et Rodary, 2007; Marchand, 2013).

Selon Caloz et Collet (2011, p. 3), l'analyse spatiale correspond à « décomposer un phénomène de l'espace en ses éléments essentiels afin d'en saisir les rapports et de donner un

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modèle de l'ensemble ». Dans le cadre des conflits hommes-animaux, elle permet donc d'étudier les diverses variables géographiques influençant l'occurrence de déprédations agricoles et déterminer les règles reliant ces variables explicatives au phénomène à expliquer. L'analyse spatiale, qu'elle soit par le biais des statistiques ou de Systèmes d'Informations Géographiques (SIG), autorise la combinaison d'échelles différentes et de données provenant de différentes disciplines et peut ainsi offrir une connaissance plus approfondie des facteurs favorisant les incursions animales.

D'une manière générale, la géographie permet d'intégrer la dimension pluridisciplinaire des conflits hommes-animaux en les étudiant à travers le prisme spatial et du territoire (Bortolamiol et al., 2017; Marchand, 2013). Les concepts, les outils et les méthodes de la géographie peuvent ainsi aider tant au niveau de la compréhension des causes de ces conflits que de la mise en place de solutions (Sitati et al., 2005), d'autant plus que l'aménagement du territoire est souvent considéré comme une des causes principales (Nyhus, 2016).

En intégrant à la fois les dimensions sociales et environnementales du cadre territorial local, la géographie peut donc aider à la mieux comprendre les conflits entre les sociétés humaines et la faune sauvage en périphérie d'AP, ainsi que les processus à l'oeuvre les déterminants. Elle peut ainsi participer à révéler les configurations spatiales à l'origine de ces conflits et la complexité de la dimension sociale des conflits hommes-animaux.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote