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évolutions et perspectives de la littérature de jeunesse dite "engagée"

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par Caroline Lecomte
Université de Limoges - Master 2 Édition 2008
  

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2.4.3. Les réactions axiologiques

Cette opération est celle qui provoque un positionnement axiologique par lequel le lecteur va émettre des jugements moraux à propos des personnages et de leurs actes. Là encore, la singularité rentre en jeu car c'est bien avec sa propre sensibilité et son propre système de valeurs que le lecteur va penser et juger. Cette opération est très clairement inscrite dans les documents d'application et d'accompagnement pour la littérature au cycle 3 qui l'évoquent à travers le terme d'« interrogation essentielle ». Cette interrogation essentielle, entendons par là d'ordre axiologique ou éthique, est soulevée par le fait que:

« La littérature de jeunesse n'a jamais cessé de mettre enjeu les grandes valeurs, de montrer comment les choix qui président aux conduites humaines sont difficiles, et comment un être de papier (comme un être de chair) n'est jamais à l'abri des contradictions ou des conflits de valeurs qui guettent chacune de ses décisions. »38

Cette rencontre avec des personnages complexes, non manichéens, mais traversés par le bien et le mal amène l'enfant à s'y identifier ou à s'en distancier en fonction de son

38SCÉRÉN/CNDP, op. cit., p. 317.

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éthique personnelle. Cette dimension éthique est fondamentale dans l'acte d'appropriation de la littérature. Le lecteur s'identifie alors à des modèles qui tour à tour le fascinent ou le répulsent, ce qui le contraint à se forger des jugements moraux et à être un lecteur actif.

Libérés d'une vision édulcorée et réductrice de l'enfance, nombre d'auteurs à l'image de Marie-Aude Murail, ou d'éditeurs comme Christian Bruel et François Ruy-Vidal revendiquent la présence d'héros nuancés, capables du meilleur comme du pire, en somme authentiques et susceptibles d'interpeller le lecteur. C'est ce que soutient François Ruy-Vidal :

« Aller à contrecourant des conformismes, des frilosités, des craintes de l'écrit et plus généralement de l'imaginaire, c'est oser accéder à de véritables oeuvres, bien différentes de ces livres, manuels d'éducation civique ou morale. OEuvres avec des personnages denses, conflictuels, ambigus, sulfureux, capables de douter, de se tromper, de revenir en arrière, de n'être pas forcément porteurs de toutes les valeurs positives ou prétendues telles, d'un système social. Ne pas trouver d'échos intimes de ses propres fantasmes dans la littérature est sûrement plus traumatisant que de risquer, un jour, d'y trouver " quelque chose ". »39

L'enfant n'est pas un être naïf, innocent auquel il faudrait présenter un monde délavé. Il est lui-même en proie à ses démons et lui présenter une lecture aseptisée, fermant les yeux sur la part d'ombre qui traverse chacun de nous serait sûrement plus anxiogène que de lui soumettre une lecture affranchie des représentations et normes sociales.

Là encore, on saisit combien ces réactions axiologiques, provoquées par le récit littéraire sur le jeune lecteur, amènent ce dernier à se positionner par rapport aux personnages et, au-delà de ces derniers, par rapport aux autres et au monde.

À travers ces différentes étapes et postures, on observe que le processus d'appropriation d'une oeuvre passe par l'engagement du lecteur. Engagement qui

39PIQUARD Michèle, op. cit. p.318.

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l'amène à reconsidérer ses valeurs ou représentations, à émettre des jugements éthiques, à s'investir affectivement afin d'accéder conjointement à une meilleure compréhension de l'oeuvre, de soi et du monde, ce qu'Edwige Chirouter nomme le « saisissement ontologique ». Selon elle, ce moment est celui de « la rencontre entre la pensée du texte et la façon dont le lecteur s'approprie singulièrement cette pensée pour rendre son existence et le monde plus intelligible. »40 Si le texte aide l'enfant à résoudre ses conflits intérieurs, comme le disait Bettelheim, il semblerait qu'il puisse également l'aider dans son rapport à la réalité et au sens qu'il convient de lui donner.

Aujourd'hui, l'engagement du jeune lecteur dans la littérature est largement admis, la littérature se doit de répondre à cette disposition du jeune lecteur en étant elle-même engagée. Elle se doit de l'interpeller, de l'apostropher par le bais de sujet denses et problématiques qui le concernent. L'enfant étant largement considéré comme un sujet pensant et qui plus est comme un acteur social, tous les sujets sont susceptibles de le concerner. À cet égard, il ne semble plus y avoir de tabous en littérature de jeunesse. Il ne s'agit plus du contenu mais de la manière dont celui-ci est traité. C'est peut être ici que réside la seule limite en littérature de jeunesse, pas de dogmatisme.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway