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L'organisation internationale de la francophonie et la démocratie en Afrique noire francophone.


par Abdou-Ramane MAMA
Université d'Abomey-Calavi (UAC) - Master 2 Droit international et organisations internationales 0000
  

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CHAPITRE I :

L'engagement politique de l'OIF est un processus particulièrement récent. L'étape première de cette démarche doit être dédiée à François Mitterrand qui dès le premier sommet de la Francophonie tenu au Château de Versailles avait perçu l'intérêt de doter l'organisation d'une dimension politique de manière à l'adapter aux mutations actuelles dans le monde. Ainsi à l'issue de ce sommet, les Chefs d'Etat et de Gouvernement déclarent vouloir engager « une concertation permanente sur les grandes questions... et apporter par là une contribution significative à l'instauration d'un nouvel équilibre mondial»29. Mais le rubicond n'aura été franchi qu'avec les sommets de Cotonou en 1995, mais surtout ceux de Hanoi en 1997 et de Beyrouth en 2002. Par ailleurs les bouleversements politiques qu'a connu le monde dans les années 80 ont profondément impacté la politique internationale et incité les organisations internationales ; l'ONU en premier lieu à s'affirmer comme des actrices incitatrices à la gouvernance démocratique dans leurs Etats membres.

Nous trouvons alors pertinent de nous intéresser d'abord au processus par lequel la démocratie s'est imposée dans le concert des nations (Section I), et ensuite son adoption dans le cadre de l'OIF comme mode privilégié de gouvernance par la mise en place d'une architecture juridico- institutionnelle.(Section II).

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29 ACCT, acte de la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement ayant en commun l'usage du français, Paris, 17-19 février 1986, la documentation française, disponible sur www.francophonie.org/IMG/pdf/actesommeti19021986.pdf, Cité par CHABI Basile, L'organisation internationale de la Francophonie et la résolution des conflits en Afrique noire francophone, mémoire de Master, UAC, 2014, p.14.

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Section I : Une incitation au plan universel

Lorsque les fondateurs des Nations Unies ont rédigé la Charte, ils n'y ont pas inclus le mot « démocratie ». Et pour cause, en 1945, de nombreux Etats membres des Nations Unies n'avaient pas adopté la démocratie comme système de gouvernance. D'autres s'en réclamaient, mais ne la mettaient pas en pratique. Les conséquences des deux guerres mondiales avec leur lot de violations des droits humains ainsi que les bouleversements des années 1980 ont amené l'ONU à donner une impulsion particulière à la gouvernance démocratique en lançant un appel vibrant en direction des Etats et des organisations internationales (Paragraphe1). On comprend dès lors que l'OIF ne peut que réformer ses objectifs, elle qui, pendant longtemps, est restée cantonnée à son rôle classique de coopération culturelle et technique (Paragraphe2).

Paragraphe 1 : Une prise de conscience générale

Le rôle précurseur de l'ONU dans l'avènement et le développement de la démocratie est indéniable. S'il est vrai que l'invention de cette terminologie et sa conceptualisation remonte à la Grèce antique, son apparition dans la société moderne internationale comme modèle de gouvernance politique accepté dans le concert des Nations est dû d'abord à l'impulsion particulière que lui a accordée l'ONU. Ensuite, l'appel retentissant donné par cette organisation en direction des regroupements régionaux et sous régionaux a été décisif afin que ceux-ci s'engagent à encourager leurs Etats membres à adopter la démocratie comme mode de gouvernance politique. Il convient alors tout d'abord de préciser le rôle précurseur joué par l'ONU dans le développement de la démocratie (A). Ensuite, nous nous pencherons sur les efforts déployés par les organisations régionales en vue de rendre effectif cette nouvelle donne dans la vie politique de leurs Etats membres (B).

A- Un rôle pionnier des Nations Unies

L'organisation des Nations Unies est pionnière dans l'engagement des organisations internationales à oeuvrer pour le triomphe de la démocratie comme seul

modèle de gouvernance respectueux des droits de l'Homme et des libertés. Pourtant, à la lecture de sa Charte30 constitutive, aucune mention n'est faite par rapport à la démocratie.

En effet, étant donné que la Charte des Nations Unies est un instrument juridique universel dont le but principal se trouve être le « le maintien de la paix et de la sécurité internationale », elle n'a pas pour vocation en réalité à s'intéresser au modèle de gouvernance choisi par les Etats31. Le silence des rédacteurs de la Charte sur la question de la démocratie n'est pas anodin. C'était en effet le seul moyen de ne pas entrer en conflit au plan juridique avec la souveraineté des Etats membres32 . Toutefois, s'il est vrai que le caractère non exprès de la Charte sur la démocratie est clair, l'on ne saurait douter de ce que ses rédacteurs exprimaient le besoin pressant de satisfaire aux aspirations profondes des peuples notamment celles liées aux droits de l'Homme et aux libertés publiques.

Ainsi, il faut dores et déjà signaler que, bien que la Charte des Nations Unies ne mentionne pas le terme « démocratie », les premiers mots de son préambule, « Nous, peuples des Nations Unies », sont le reflet du principe fondamental de la démocratie, à savoir que la volonté des peuples est la source de la légitimité des Etats souverains et donc de l'ensemble des Nations Unies33. De plus, avec la Charte, les références sont constitutionnelles. Elles rappellent le long combat pour les libertés et la démocratie, la Grande Charte arrachée à Jean-sans-Terre34, les franchises établies au profit des bourgs et

30 La Charte des Nations encore appelée Charte de San Francisco a été adoptée le 26 juin 1945 à San Francisco aux Etats Unis. Elle est entrée en vigueur le 24 octobre 1945. Cette Charte définit les buts et les principes de l'ONU ainsi que la composition, la mission et les pouvoirs de ses organes exécutifs (le Conseil de Sécurité), délibératifs (l'Assemblée Générale), judiciaires (la Cour Internationale de Justice) et administratifs (le Conseil Economique et Social, le conseil de tutelle et le Secrétariat général). https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Charte_des_Nations_Unies

31KPOBIE Toa, Action internationale en faveur de la démocratisation du Togo, mémoire de DEA, Université de Lomé, 2012. Voir www.memoireoline.com/10/13/7479/m-Action-internationale-en-faveur-de-la-democratisation-dutogo2.html. Consulté le 28 avril 2018.

32 L'égalité souveraine des Etats membres est proclamée par la Charte en tant que principe fondamental de l'ONU. Aussi la Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les Etats, conformément à la Charte des Nations Unies adoptée par la résolution R/ 2625 XXV de l'Assemblée Générale de l'ONU lors de sa 1883eme séance plénière implique le droit qu'à chaque Etat de choisir librement et développer son système politique, social, économique et culturel.

33 « La démocratie et les Nations Unies », voir www.un.org > events > pdf.democracy. Consulté le 16/10/17.

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34 Jean-Sans-Terre fut roi d'Angleterre, seigneur d'Irlande et duc d'Aquilaine de 1119 à sa mort. Son règne à la tête de l'Angleterre a été caractérisé par la violence et une gestion solitaire du pouvoir. Il se considérait comme étant au-dessus des lois. Le 15 juin 1215 les barons réussissent à imposer au roi l'adoption de la grande charte (Magna Carta). L'objectif de la noblesse était d'imposer au roi le respect de la coutume et de ses droits féodaux.

les citoyens ; la montée de mouvement démocratique qui trouve enfin son expression sur le plan international35.

De ce point de vue, il faut reconnaitre que la Charte des Nations Unies est le premier instrument international de base de la démocratie dans la mesure où certains principes fondamentaux de la démocratie sont considérés par elle comme condition sine qua non pour la réalisation de certains buts. Ainsi, elle affirme son objectif de développer entre les Nations les relations amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité du droit des peuples et leur droit à disposer d'eux-mêmes36. De même, le principe de l'autodétermination des peuples qui constitue la racine mère de la démocratie trouve son fondement dans la Charte. Conscients du lien intrinsèque entre la démocratie et les droits de l'Homme, les rédacteurs de la Charte ont proclamé leur foi dans les droits fondamentaux de l'Homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l'égalité des hommes et des femmes37. Elles s'efforcent par ailleurs de développer et d'encourager le respect de ces droits de l'Homme et des libertés fondamentales pour tous sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion38.

L'enthousiasme que la Charte accorde à la démocratie sera davantage formalisé et développé à travers les Chartes internationales aux droits de l'Homme. Il s'agit d'abord de l'adoption le 10 décembre 1948 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme qui fixe des principes visant à protéger la dignité humaine. Cette déclaration adoptée par l'Assemblée générale , énonçait clairement le concept de démocratie en déclarant que « La volonté du peuple est le fondement de l'autorité des pouvoirs publics» 39 . La Déclaration énonce les droits essentiels à une véritable participation politique. Le rapport du Secrétaire Général des Nations Unies en 2005 énonce à cet effet que « depuis son adoption, elle a inspiré l'élaboration de constitutions à chaque coin du monde, et a

35 PELLET Alain, COT Jean-Pierre, FORTEAU Mathias, La Charte des Nations Unies. Commentaire article par article, Paris, 2e édition, Economica, p.2- 1571.

36 Voir art 1er paragraphe 2 de la Charte.

37 Voir le préambule de la Charte.

38 Voir art 1er paragraphe 3 de la Charte.

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39 ONU, Assemblée Générale, « Déclaration Universelle des Droits de l'Homme », R/217 (III) A. Paris, 1948, art.2 al 3.

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grandement contribué à faire enfin accepter la démocratie, partout dans le monde, en tant que valeur et principe universel»40.

Il s'agit ensuite du Pacte international relatif aux droits civils et politiques41 qui pour sa part pose les fondements juridiques des principes de la démocratie au regard du droit international. Le caractère contraignant de ce texte fait que les Etats qui l'ont adopté sont astreints à le respecter. Grâce à la diplomatie du Secrétaire Général des Nations Unies et l'action des ONG, le nombre des Etats partis à la convention est passé à 168 en juillet 2015 soit 85% des Etats membres des Nations Unies42.

Dans le but de donner un caractère solennel à la démocratie et au développement, l'ONU a mis en place des institutions chargées d'inciter les Etats à l'adoption des systèmes démocratiques et d'appuyer les processus de démocratisation dans les Etats. Il s'agit du Programme des Nations Unies pour le Développement, du Fonds des Nations Unies pour la Démocratie, du Département des Opérations de Maintien de la Paix, du Haut-commissariat des Nations Unies aux Droits de l'Homme, de l'Entité des Nations Unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes. Chaque année 1,5 milliards de dollars environ est versé par le biais du PNUD pour appuyer les processus démocratiques partout dans le monde43, ce qui fait de l'ONU l'un des principaux fournisseurs de coopération technique pour la démocratie et la gouvernance dans le monde.

Depuis 1988, l'Assemblée générale de l'ONU a adopté au moins une résolution par an relative à un aspect de la démocratie 44 . La démocratie est devenue un thème intersectoriel des documents issus des grandes conférences et réunions au sommet des Nations Unies depuis les années 90 et des objectifs de développement internationalement convenus qui en ont émané. Au Sommet mondial de septembre 2005, les Etats membres

40 Rapport du secrétaire général des Nations Unies, « dans une plus grande liberté », A /59/2005, paragraphe 148.

41 Le pacte international relatif aux droits civils et politiques a été adopté par l'Assemblée Générale le 16 décembre 1966 dans sa résolution 2200 A (XXI) et est entré en vigueur le 23 mars 1976. Il comprend les droits et libertés qui protègent les particuliers contre les ingérences de l'Etat, comme le droit à la vie, l'interdiction de la torture, de l'esclavage et du travail forcé, le droit à la liberté, etc. Il est complété par deux protocoles : celui du 16 décembre 1966 et celui du 15 décembre 1989 interdisant la peine de mort.

42 « La démocratie et les Nations Unies », voir www.un.org >events > pdf.democracy. Consulté le 16/10/17.

43 Ibidem.

44 Ibidem.

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ont réaffirmé que « la démocratie est une valeur universelle, qui émane de la volonté librement exprimée des peuples de définir leur propre système politique, économique, social et culturel et qui repose sur leur pleine participation à tous les aspects de leur existence»45.

Le Document final du Sommet mondial soulignait également que « la démocratie, le développement et le respect de tous les droits de l'homme et libertés fondamentales sont interdépendants et se renforcent mutuellement,»46 et a signalé que «quand bien même les démocraties ont des caractéristiques communes, il n'existe pas de modèle unique de démocratie» 47 . Les Etats membres ont résolu de faciliter un accroissement de la représentation féminine dans les instances gouvernementales de prise de décisions, y compris de leur garantir d'égales opportunités de participer pleinement au processus politique.

Les dirigeants du monde entier se sont engagés dans la Déclaration du Millénaire à ne ménager aucun effort pour promouvoir la démocratie et renforcer l'état de droit ainsi que le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ils ont décidé de lutter en faveur de la protection et de la défense pleine et entière partout dans le monde des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels universels et de renforcer la capacité de tous les pays à mettre en oeuvre les principes et les pratiques de la démocratie et le respect des droits de l'homme48.

Le désir de l'organisation des Nations Unies de faire de la démocratie un système politique accepté dans le concert des nations a conduit l'Assemblée Générale le 8 novembre 2007 à proclamer le 15 septembre journée internationale de la démocratie et invité les Etats membres, le système des Nations Unies, et les autres organisations régionales, intergouvernementales et non gouvernementales à oeuvrer à son expansion.

45 ONU, Assemblée Générale des Nations unies, document final du Sommet mondial de 2005, paragraphe 135, 2005, p. 32.

46 Ibidem, p.32.

47 Ibidem, p. 32.

48 Déclaration du Millénaire adoptée par la résolution A/55/2 de l'Assemblée Générale des Nations Unies. Disponible sur www.un.org/french/millénaire/ares552f.htm.

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C'est donc à dessein que cette impulsion donnée par l'ONU à la démocratie a suscité un écho à la fois régional et sous régional.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand