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Les garanties de l'indépendance du juge constitutionnel en République Démocratique du Congo.


par Dieu-Merci Wasingya Musonia
Université Catholique du Graben (UCG) - Graduate en Droit (Droit Public Interne et International) 2017
  

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Chapitre deuxième:

LE RENFORCEMENT DE L'INDEPENDANCE DU JUGE
CONSTITUTIONNEL

L'expression juge constitutionnel présente un double sens. Elle désigne d'abord la juridiction constitutionnelle. C'est dans ce sens que l'emploie le doyen Favoreu lorsqu'il oppose le statut du juge constitutionnel au statut du juge administratif.56 Mais cette expression peut également désigner un membre de la juridiction constitutionnelle. C'est dans ce sens qu'elle a été utilisée lors de la Table ronde internationale d'Aix-en-Provence de 1988, consacrée aux Juges constitutionnels.57

Comme on peut le voir, l'indépendance de la justice constitutionnelle qui découle de la séparation des pouvoirs n'est pas encore effective au Congo.58 La justice constitutionnelle, comme toute justice59, est soumise à l'exigence d'impartialité et d'indépendance renforcée. Charles Eisenmann soulignait au sujet de la Haute Cour constitutionnelle d'Autriche qu'« appelée à jouer dans une certaine mesure le rôle d'arbitre entre les parties, à assurer le règne du Droit jusque dans le domaine politique, l'impartialité de ses membres apparaît

56 L. FAVOREU, « Le juge administratif a-t-il un statut constitutionnel ? », Mélanges Auby, Paris, Dalloz, 1992, p. 111-128.

57 Table ronde internationale sur « Les juges constitutionnels », A.I.J.C. 1988, p. 81-228.

58À noter qu'en l'absence d'une indépendance effective du Pouvoir judiciaire, le droit fondamental du Congolais à un tribunal indépendant et impartial ne peut pas être effectivement garanti. Ce droit est reconnu par

les instruments internationaux ratifiés par le Congo (art. 10 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, art. 14 du Pacte II de l'ONU et art. 7 al. 1, let. d de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples pour le droit à une juridiction impartiale) et auxquels le Peuple congolais réaffirme son adhésion et son attachement dans le Préambule de la Constitution. On peut toujours l'invoquer dans un cas concret devant une juridiction compétente, pourvu que celle-ci soit effectivement indépendante. L'indépendance effective du Pouvoir judiciaire est une condition sine qua non d'exercice du droit à un juge indépendant et impartial et des autres droits fondamentaux figurant dans la Constitution et les instruments internationaux de protection des droits de l'homme liant le Congo.

59« De la justice de classe, fustigée par La Fontaine [...] à la justice actuelle soupçonnée aussi bien d'être `aux ordres' du pouvoir que d'être parfois trop influencée par la presse ou l'opinion publique et les effets possibles de ses décisions sur celles-ci, les critiques les plus acerbes formulées contre les décisions des institutions juridictionnelles ont trait à leur impartialité. C'est dire combien la nécessité d'un tribunal impartial est ressentie comme étant de l'essence même de la justice, ce qui fait de l'impartialité un composant majeur de l'éthique des juges » (Pierre CROCQ, « Le droit à un tribunal impartial », Droits et libertés fondamentaux, sous la dir. de Remy CABRILLAC, Marie-Anne FRISON-ROCHE et Thierry REVET, Paris, Dalloz, 9ème éd., 2003, p. 41 2).

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d'autant plus nécessaire qu'ils ont à se prononcer sur des questions plus brûlantes ».60

La Cour suprême du Canada a exprimé une telle idée dans son arrêt La Reine contre Lippé de 1991. Le juge Lamer, qui rédigea l'opinion de la Cour, soulignait que « la garantie d'indépendance judiciaire vise dans l'ensemble à assurer une perception raisonnable d'impartialité ; l'indépendance judiciaire n'est qu'un moyen pour atteindre cette fin. Si les juges pouvaient être perçus comme impartiaux sans l'indépendance judiciaire, l'exigence d'indépendance serait inutile. L'indépendance est la pierre angulaire, une condition préalable de l'impartialité judiciaire»61. Ces exigences prennent une ampleur particulière lorsqu'il s'agit du juge constitutionnel. Et pour celui-ci, le renforcement de son indépendance est la clé de voute de l'instauration de l'état de Droit.

Par ailleurs, la maîtrise de la juridiction constitutionnelle sur les règles qui la concernent découle également du contrôle qu'elle exerce sur règles dont elle n'est pas l'auteur. Sur ces règles, la juridiction constitutionnelle a en principe un véritable droit de veto. En outre, elle est compétente pour les interpréter, ce qui lui laisse une marge de manoeuvre appréciable. Aussi, prenant en compte le renforcement de son indépendance, une indépendance primordiale se veut au travers le rendement de leur fonction de juge constitutionnel. Ainsi, le renforcement de l'indépendance fonctionnelle est au rendez-vous. (Section 2).

Mais avant d'y arriver, nous avons, dans les lignes précédentes, souligné que la politisation des membres de la Cour sous examen constitue un problème majeur qui désoriente leur indépendance. Une indépendance organique est alors concevable. Il s'agit de la cooptation des membres de la cour constitutionnelle au sein du Conseil supérieur de la magistrature. (Section 1).

SECTION 1. LE RENFORCEMENT DE L'INDEPENDANCE ORGANIQUE

60C. EISENMANN, La justice constitutionnelle et la Haute Cour constitutionnelle d'Autriche, Paris, 1 928, rééd. Paris, Economica, 1 986, p. 1 75.

61La Reine c. Lippé[1 991 ], 2 R.C.S. 1 1 4.

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Les garanties conférées aux membres de la cour constitutionnelle ne sont pas toujours de nature à leur donner une véritable indépendance. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous avons estimé que leur indépendance soit renforcée. En revanche, l'indépendance du juge constitutionnel s'apprécie mieux par la cooptation de ses membres uniquement au sein du Conseil supérieur de la magistrature.

En outre, le mode de désignation des membres de la juridiction constitutionnelle constitue un maillon faible dans l'appréciation de l'indépendance des juges constitutionnels. Mais, il n'existe pas un mode particulier qui puisse conférer une indépendance sans conteste aux juges constitutionnels. Certains auteurs n'ont pas manqué à soulever la question de l'élection du juge constitutionnel (§1).En revanche, un danger de mandat impératif vis-à-vis de ses électeurs s'impose. Pour plus d'efficacité, un renforcement de l'indépendance à travers la cooptation des membres de la Cour au sein du conseil supérieur de la magistrature (§2) est concevable.

§1. L'élection des juges constitutionnels

Face à l'épineuse question de l'indépendance du pouvoir judiciaire, il est des auteurs qui ont préconisé que les juges constitutionnels soient élus. L'élection confèrerait aux juges une légitimité démocratique au même titre que les autres pouvoirs, notamment le Parlement et le Président de la République.

On pourrait envisager une telle solution pour les juges de la cour constitutionnelle, d'autant plus qu'elle aura rarement à trancher des litiges impliquant les citoyens. Le contrôle de constitutionnalité des lois, le contentieux de l'interprétation de la constitution, le contentieux de la répartition des compétences sont surtout des litiges interinstitutionnels. Seuls les litiges liés au contentieux des droits et des élections pouvaient concerner les citoyens.

Une telle solution ne va pas sans soulever des questions ou d'autres problèmes. D'abord le risque de la politisation des juges qui seraient alors amenés à battre campagne pour leurs élections, au suffrage direct ou indirect, et transformer leurs justiciables en mandants. Le juge risque alors de se trouver enfermé dans un mandat impératif vis-à-vis de leurs électeurs.

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Ensuite, le déplacement de la légitimité du juge. En effet, la légitimité du juge constitutionnel repose sur la connaissance du droit, sur son savoir et non sur le vote du citoyen. Ce qui fonde la légitimité du juge c'est le « Praetor novit jus ». Les élections risqueront d'affecter leur indépendance et leur impartialité lorsque leurs électeurs sont partie à un litige relevant de sa compétence.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus