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L'encadrement juridique des risques biotechnologiques

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par Faiza Tellissi
Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de tunis - Mastère en Droit 2002
  

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§ 2 : Un cadre juridique renforçant les capacités dans le but de sensibiliser et éduquer le public

Fidèle à ses engagements internationaux, la Tunisie a, dés septembre 1999, institué sous l'autorité du MEAT, un cadre national de sécurité biologique en mettant en place le Comité National pour les OGM, transformé progressivement en Commission Nationale sur la Biosécurité. Dés le départ, les travaux de la CNB se sont concentrés sur l'importance de la sensibilisation du public et de son éducation concernant les OGM et leurs risques potentiels.

A : Le cadre institutionnel de biosécurité en Tunisie

En Tunisie, la santé animale et la protection des végétaux est partagée entre plusieurs compétences.

Ainsi, la Direction Générale de la santé Animale (DGSA) s'occupe de la santé animale et doit assurer aux frontières le contrôle sanitaire des animaux et des produits animaux. Elle prépare aussi les projets de textes législatifs et réglementaires relatifs à la protection du cheptel et à l'utilisation des produits biologiques et pharmaceutiques à usage vétérinaire.

La Direction Générale de la Production Agricole (DGPA) a quant à elle, pour mission la protection des végétaux, le dépistage et l'identification des maladies des plantes. Elle exerce un contrôle phytosanitaire aux frontières avec un pouvoir de mise en quarantaine.

Concernant les problèmes liés à la santé humaine, ceux ci relèvent de la compétence de la Direction de l'Hygiène du Milieu et de la Protection de l'Environnement, placée sous la tutelle du Ministère de la santé publique. Parmi ses missions, figure la préparation de projets de textes législatifs et réglementaires relatifs à la sécurité sanitaire de l'homme.

Au niveau du MAERH, outre les directions rattachées à l'administration centrale qui veillent à la protection de l'environnement, il y a des organismes dont les missions sont directement reliées avec les problèmes environnementaux comme l'Agence Nationale de Protection de l'Environnement (ANPE), l'Office National de l'Assainissement (l'ONAS), et plus récemment le Centre international des Technologies de l'Environnement de Tunis (CITET), doté de laboratoires d'analyse et d'expertise.

Concernant les biotechnologies et particulièrement les OGM, la Commission Nationale sur la Biosécurité, dès le départ de ses travaux, a fait une mise au point sur les activités développés jusque là dans ce domaine. Ses réflexions ont porté sur les grandes lignes suivantes: l'inventaire des utilisations des biotechnologies en Tunisie; la prévention des risques biotechnologiques; l'élaboration d'un cadre juridique national pour la prévention des risques biotechnologiques; la formation et la sensibilisation du public.84(*)

Instance consultative placée sous l'autorité du MAERH, la CNB est chargée de délivrer des avis aux instances exécutives, après une étude des demandes au cas par cas, concernant les risques sanitaires et environnementaux relatifs aux OGM et leurs dérivés.

Elle est aussi chargée de vérifier et d'analyser l'évaluation des risques potentiels que présentent les OGM. Autre mission de la commission, consiste à établir la classe de risque.

De même, elle établit et met à jour régulièrement une liste des OGM soumis à un contrôle obligatoire. Enfin, elle est chargée d'accorder les agréments aux laboratoires spécialisés dans le domaine des nouvelles technologies et biotechnologies. Toutes ces missions impliquent des personnes compétentes pour les remplir.

La CNB est composée de 20 membres. La moitié de ses membres au moins, sont compétents en matière scientifique dans les domaines du génie génétique, de la santé des végétaux et des animaux, de la conservation et de l'utilisation durable de la diversité biologique, de l'environnement et de la santé humaine. Ces compétences sont des représentants de la commission dans leurs institutions de rattachement. Force est donc de constater l'affichage clairement scientifique de la CNB. Cette dernière comprend aussi des représentants des administrations centrales impliqués dans l'utilisation des OGM, des représentants d'associations de consommateurs et de protection de l'environnement, En outre, la commission peut faire appel si nécessaire à d'autres experts.

Un président est désigné par le MAERH parmi les membres de la Commission pour une période de 3 ans.

En outre, le secrétariat est assuré par le MAERH qui devra gérer l'ensemble des aspects administratifs de la commission. Il réceptionnera les dossiers techniques et les transmettra aussitôt au président de la Commission.

Dans la mesure où la CNB émet principalement des avis consultatifs sur la base d'une évaluation scientifique des risques, le rôle des «non experts» et plus précisément des représentants des associations, ne peut que soulever des questions85(*). Etant donné la minorité en nombre et leur compétences par rapport à une mission essentiellement scientifique de la CNB, quel regard ces derniers portent t ils sur la Commission?

En fait, le risque c'est qu'il y ait un décalage entre la dimension scientifique de l'activité de la Commission et la présence d'individus «non experts» dont la motivation n'est pas forcement d'entrer dans des considérations scientifiques.

Dans le cadre de sa mission, la CNB à pour mandat de formuler un avis sur un dossier donné. L'examen de chaque dossier est ainsi fondé sur le principe d'une évaluation au cas par cas. Cette perspective limite dés lors le périmètre des questions abordées. La discussion risque de se limiter à des aspects essentiellement scientifiques et techniques relatifs aux éléments dans le dossier. Les considérations d'ordre économique, social ou politique tout comme les effets à long terme sur l'environnement et la santé humaine risque de s'avérer peu à propos lors des séances dans la mesure ou ces questions se situent au delà de l'objet immédiat de la procédure d'examen. Ces propos révèlent le statut ambigu des représentants de la société civile dans les Commissions consultatives comme la CNB.

Les principaux écrits produits par la CNB sont les avis concernant les dossiers et les rapports annuels d'activités. Ainsi, la commission doit rendre un avis technique dans un délai qui varie en fonction de la demande déposée, et ce à partir de la date de sa réunion. Cet avis sera par la suite transmis aux différends ministères compétents.

Le projet de décret n°1 indique précisément le contenu de l'avis rendu par la Commission. Ainsi, ce dernier peut porter sur les différentes prescriptions techniques à observer, ainsi que sur les mesures de confinement à respecter et sur les mesures à prendre en cas d'accident.

Il précise aussi les informations devant être mises à la disposition du publique de toute installation d'utilisation confinée ou de dissémination volontaire d'OGM.

Concernant les importations d'OGM et ceux destinés à être transformés, l'avis mentionne l'utilisation spécifique qui en sera faite et les mesures de précaution à prendre.

En outre, la Commission rend annuellement des rapport d'activité qui contiennent un résumé du nombre de dossiers examinés ainsi qu'un résumé de l'ensemble des ses activité durant l'année écoulée. Le rapport comportera des remarques sur les diverses installations publiques et privées utilisant des OGM. De même, la Commission a la possibilité de faire, dans ces rapports, des propositions pour un meilleur contrôle du fonctionnement des ses installations, en se basant notamment sur les rapports d'activité remis chaque années par les utilisateurs d'OGM.

Outre le fait d'être consultée avant toute décision d'autorisation, la Commission a d'autres attributions. Elle peut aussi être consultée par le gouvernement sur la définition des politiques à suivre au niveau national et pour les conseils à donner aux organismes de réglementation des biotechnologies modernes. De même, les autorités administratives représentées dans la Commission peuvent la saisir pour un avis technique lorsqu'elles estiment qu'une nouvelle évaluation des risques est nécessaire.

En outre, la Commission peut à son tour saisir le MAERH concernant toute modification notable des conditions d'utilisation d'OGM, ayant préalablement été autorisés, et qui aurait des risques sur la diversité biologique, l'environnement et la santé humaine. Elle proposera à cette même autorité les nouvelles prescriptions techniques que l'utilisateur devra observer, la suspension et le retrait de l'autorisation accordée à l'utilisateur et la destruction des OGM.

B : La sensibilisation et l'éducation du public

Depuis les années 90, les controverses provoquées par l'irruption des OGM, dans les cultures, et les risques pour l'environnement et la santé humaine, enflent sur tous les continents. En Tunisie les biotechnologies prennent de l'essor et les OGM deviennent peu à peu une réalité pour le consommateur, l'agriculteur, l'industriel...

Les enjeux des OGM sont souvent mal compris parce que les questions qu'elles soulèvent sont complexes et qu'elles font référence à différentes disciplines dans les domaines des sciences, du droit ou encore de l'économie.

En Tunisie, ce sujet n'a fait l'objet d'aucun véritable débat public sauf entre spécialistes et dans des cercles restreints.86(*). En fait, nous pouvons souligner un manque d'information presque total chez le commun des personnes87(*).

Cependant, depuis 1999 la Tunisie, a mis en place la CNB qui a des le départ, insisté sur la l'importance d'une transparence vis-à-vis du public et a souligné la nécessité de l'informer, de le sensibiliser et d'assurer sa formation pour la prévention des risques biotechnologiques. Ainsi, afin de sensibiliser le public, il est nécessaire de maîtriser et de contrôler toute l'information disponible et de la mettre à la disposition du public à tous les niveaux.

Par contre, pour assurer son éducation, il est important de procéder à une modulation de celle-ci en l'orientant spécifiquement vers les groupes cibles considérés. L'information sur les OGM et la prévention des risques biotechnologiques est de plus en plus abondante et il est nécessaire de procéder régulièrement à sa collecte La Commission a souligné la nécessité de centraliser cette information sous la forme de base de données, afin de la rendre accessible à un public varié et élargi.88(*)L'idée de sensibilisation du public par des actions ciblées et spécifiques a été aussi retenue. Elle consiste notamment à tenir des séminaires de courte période, destinés à sensibiliser un public ciblé. Dans ces séminaires, plusieurs conférenciers spécialistes auront pour mission d'organiser des discussions, des tables rondes et des sorties sur le terrain.

De plus, une action horizontale auprès du public est indispensable afin de contrôler la qualité de l'information et de superviser sa bonne circulation. Cette action a aussi pour finalité d'orienter, si besoin est, les objectifs de la formation et la sensibilisation du public. En faite, cette action peut prendre différentes formes: d'enquêtes, études et sondages d'opinions auprès des groupes cible.

En sa qualité de pays signataire du Protocole, le principal objectif de la Tunisie, est de mettre en place un cadre national de biosécurité pour le renforcement des capacités et la formation.

En outre, le pays a élaboré un projet dans le cadre de l'appui à la mise en place du cadre nationale de biosécurité, dont une grande partie est consacré au renforcement des capacités afin d'assurer une meilleure prise de conscience du public par sa sensibilisation, son accès à l'information et sa formation a tous les niveaux. Nous pouvons noter que dans cette partie, le projet prévoit la création d'un centre d'échange pour la prévention contre les risques biotechnologiques.

Ainsi, la Tunisie qui sera dotée d'un cadre juridique nationale sur la biosécurité, se prépare déjà à faire les efforts nécessaires d'information, de sensibilisation et d'éducation du public afin de tirer le meilleur profit de cette innovation scientifique.

Certes il est important de sensibiliser et d'éduquer le public aux biotechnologies et à ses risques potentiels. Encore faut il qu'il puisse utiliser les information à bon escient. Si nous prenons le cas de l'étiquetage des aliments, celui-ci est la première interface entre l'industriel et le consommateur. L'étiquette placée sur un produit contient des informations concernant la composition des produits proposés aux consommateurs.

La nouvelle réglementation tunisienne sur les OGM stipule que «tout emballage contenant ou susceptible de contenir un OGM doit être aisément identifiable».Toutefois, plusieurs questions demeurent posées. La première question concerne les produits «non emballés» tels que les produits destinés à la restauration, contenant des OGM. Comment identifier ces produits?

En outre, la définition du terme «OGM» diffère d'un pays à l'autre. La deuxième question qui vient alors à l'esprit est la suivante: Quel type d'information va-t-on mettre sur l'étiquette? OGM, produit d'OGM ou produit contenant un OGM? Qu'en sera t il des produits importés? Garderont ils la définition de leur pays d'origine ou devraient t ils se conformer à la réglementation tunisienne?

Par cette brève revue des questions relatives à l'étiquetage des OGM, nous avons essayés de montrer quelques difficultés qui se présentent.

L'Organisation de Défense des Consommateurs (ODC) a-t-elle un rôle à jouer pour l'information et l'éducation du public?

Cette question a été posée à maintes reprises lors de séminaires ou colloques89(*). L'ODC, organisation non gouvernementale90(*), ayant pour mission d'assister, protéger, défendre les intérêts des consommateurs, ainsi que de les conseiller et les informer sur tout ce qui concerne leur sécurité et la bonne gestion de leurs ressources.

De même, celle-ci les représente à tous les niveaux et auprès de différentes instances. A travers des réunions publiques, des émissions radiophoniques, la télévision et la presse, l'ODC a menée des campagnes d'informations et de sensibilisation91(*). Son action de sensibilisation devrait permettre de mettre en exergue les avantages d'utilisation des OGM tels que les bénéfices techniques et économiques qui peuvent être attendus par l'agriculture, la voie alternative à la lutte chimique pour la protection des plantes mais aussi les inconvénients potentiels pour l'environnement, la sécurité des aliments et la santé humaine et animale.

La finalité de cette démarche est que le citoyen consommateur une fois averti, trouve des réponses aux questions qu'il se pose, qu'elles soient d'intérêt environnemental, économique, social, éthique, politique ou religieux.

Inscrit dans le droit international de l'environnement, et répondant à des objectifs environnementaux, le Protocole biosécurité régit le commerce international des OGM.

Globalement son contenu parait assez protecteur, conformément aux souhaits de l'Union Européenne et des pays en voie de développement. Parmi les avancées les plus significatives, le Protocole se voit conféré un champ d'application relativement large; une procédure d'accord préalable en connaissance de cause est établie qui permet à un Etats de refuser l'importation d'OGM; le principe de précaution acquiert un caractère opérationnel et l'étiquetage devient obligatoire. Dans le même temps, le texte du Protocole reflète des compromis et certaines imprécisions y figurent indiquant les concessions faites aux pays exportateurs d'OGM.

De surcroît, le commerce international des OGM est également appréhendé, sur le plan mondial, par le droit de l'OMC. D'ailleurs jusqu'à l'entrée en vigueur du Protocole c'est le droit de l'OMC qui est le seul applicable. Après l'entrée en vigueur du Protocole, en septembre 2003, les deux systèmes juridiques s'appliqueront de manière concomitante.

Pourtant ils répondent à des logiques contradictoires: faciliter le libre commerce d'un coté, le sécuriser, en le restreignant si nécessaire, pour des motifs environnementaux et sanitaires.

Cette régulation parallèle du commerce des OGM ne va pas sans causer des difficultés d'articulation. Cette dualité annonce des conflits normatifs à l'issue incertaine, poussant à s'interroger sur les moyens de prévenir ou résoudre les différends entre Etats qui pourraient en découler.

* 84 Il semble important de souligner que l'existence de la CNB est antérieure au cadre juridique tunisien ce qui est logique puisque ce dernier est en cour d'achèvement. Cependant ce futur cadre juridique prévoit l'existence de la CNB et précise sa composition, ses modalités de fonctionnement ainsi que ses missions.

* 85Roy (A); Les experts face au risque: la cas des plantes transgéniques; op.cit p102, l'auteur utilise le terme «non experts» pour designer par commodité de langage les membres de la Commission du Génie Biomoléculaire (la CGB est une institution consultative française) qui ne font pas partie du collectif des scientifiques

* 86Zamouri (A); communication faite à l'occasion de l'atelier international de l'ADD BEDE à Djerba le 24 octobre 2002 sur «Les OGM en question: est t il temps d'ouvrir un débat public».

* 87Une enquête réalisée en 2002 par l'Organisation de Défense du Consommateur (ODC) sur le degrés de connaissance des OGM au sein d'une partie de la société tunisienne a révélé que plus le niveau de l'instruction est élevé plus le degré de connaissance des OGM augmente(7,2% des personnes ayant un niveau secondaire connaissent les OGM alors que 12,9% d'étudiants dans le supérieur les connaissent).De plus moins de 10% des personnes soumises à un questionnaire ont déjà entendu parler des OGM et moins de 5% en connaissent les domaines d'application.

* 88Chalbi (N); «Sensibilisation du public, comment éduquer le public?» Communication faite à l'occasion du séminaire du MEAT/USDA du 23 janvier 2002 sur le thème des OGM

* 89Zarrouk (K); communication faite à l'occasion de l'atelier international organisé par l'ADD et le BDEE le 24 octobre 2002 sur «les OGM en question: est il temps d'ouvrir un débat public».Le même auteur a aussi traité cette question lors du colloque organisé par l'AAMHA le 28 février 2003 sur le thème: «les organismes génétiquement modifiés: risques et enjeux».

* 90L'ODC est une ONG (arrêté du ministre de l'intérieur du 21/02/1989), reconnue d'intérêt public par l'arrêté n°348 du 08/02/1989.

* 91Notamment, les Campagnes «Aid el Idha»; Opération «un train pour la santé»; Campagne «jeun nutrition santé».

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci