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L'identification de l'acte de contrefaçon de marque en Tunisie

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par Kaïs Berrjab
Faculté des Sciences Juridiques, Ploitiques et Sociales de Tunis - DEA en Sciences Juridiques Fondamentales 2004
  

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Paragraphe 3 : Les modalités de la reproduction de la marque :

Parler de modalité en matière de contrefaçon revient à déterminer ses manifestations possibles, or nul besoin de rappeler que c'est là une question qui varie selon le degré de fécondité de l'imagination du contrefacteur. La reproduction s'entend de toute reprise matérielle de la marque ou de certains de ses éléments distinctifs, il en est de même de la reproduction de la marque sur un site Internet.

Tout d'abord, il peut s'agir classiquement d'une reproduction de la marque au sein d'un signe distinctif tel qu'une dénomination sociale, une enseigne ou un nom commercial.

Le support matériel de la reproduction peut aussi consister en un spot ou une affiche publicitaire, la licéité de la reproduction de la marque devient plus sensible dans le cas d'une publicité comparative 1 « par laquelle une entreprise compare ses produits et ses services à ceux d'un concurrent, en les désignant par la citation ou la représentation de la marque de ce concurrent ».2

Alors qu'elle est réglementée en droit français,3 la reconnaissance de la publicité comparative, en Tunisie, semble douteuse surtout eu égard aux termes généraux de l'article 22 de la loi n°36- 2001.

Quoi qu'elle puisse poursuivre une mission d'information aux yeux du consommateur, la publicité comparative reste, néanmoins, toujours partiale d'autant plus que la reproduction à titre comparatif de la marque d'autrui, sans autorisation préalable, est loin d'être la seule manière de venter les mérites d'un produit. Ainsi, et à moins d'une réglementation stricte, son admission semble être un facteur complémentaire de complication au sein du droit des marques.

Du reste, on note que la marque peut être reproduite sur tout support matériel imaginable, c'est ce que révèle la jurisprudence française en qualifiant de reproduction la reprise de la

1 MONTEIRO (J) :« Droit des marques et publicité comparative : Propos sur des idées (communautaires) réductrices ». Gaz. Pal du 13 juin 1996.N°3. p. 607.

2 MATHELY (P): op. cit. p. 184.

3 Ibidem.

marque par un tiers dans un poème publicitaire,1 sur des sacs publicitaires,2 sur des emballages,3 dans un catalogue,4 sur des bons de commande,5 dans les tarifs 6 ou encore sur un cintre.7

Quant à la jurisprudence tunisienne, il semble qu'elle a été saisie seulement de litiges mettent en question une marque reproduite face à une autre marque contrefaisante. L'étude de cette jurisprudence révèle plusieurs manières utilisées par les contrefacteurs afin de reprendre la marque d'autrui au sein de leurs marques.

Il en est ainsi du procédé de l'adjonction qui consiste à reproduire la marque au sein d'un ensemble comme çà était le cas dans les affaires 8 DRYPERS c/ DRYPERS COMPACT et ASTRAL c/ SUPER PANDA ASTRAL. Il est à noter conformément à l'article 22 de la loi n°36- 2001 que la reproduction « même avec l'adjonction de mots tels que : «formule, façon, imitation, genre, méthode» » n'est pas exclusive de la contrefaçon.

La reproduction peut aussi se consommer par le retranchement de la marque reproduite, c'est le cas dans les affaires MAMI NOVA c/ DELICE NOVA,9 et MARTINI c/ MARINI.10 De même, la reproduction est réputée constituée suite à la traduction si la marque traduite demeure identifiable dans la marque contrefaisante. Tombe aussi sous le coup de la reproduction, la conversion de l'élément nominal CROWN 11 en un élément figuratif constitué par une couronne.

Il est également un autre cas très répondu de reproduction qui consiste à créer des différences entre les deux marques soit par adjonction (SONY / SONYA),12 soit par inversion (KIRI / RIKI) 13 ou encore en modifiant une lettre, sa position ou la manière dont elle est écrite. C'est le cas dans les affaires CRISTAL c/ KRISTAL,14 et OMO c/ ORO.15 Dans tous ces cas, on peut estimer qu'il y a eu une contrefaçon phonétique car la ressemblance est évidente sur le plan de la prononciation.

Incontestablement, la reprise d'une marque au sein d'un nom de domaine sur Internet 16 semble être la plus récente modalité de reproduction de marque dans les temps modernes, ceci confirme une fois encore la diversité des modalités d'intervention du délit de reproduction.

1 Paris, 11 avril 1988, RDPI 1988, n°19, p. 75.

2 Paris, 3 mars 1965, RTD Com 1968. 1039, n°14.

3 TGI, Paris, 2 juillet 1979, RIPIA 1979. 393 ; Cass. Crim., 18 avril 1988, D 1988. IR.158. Emballage non-authentique.

4 Paris, 16 juillet 1984, Ann. 1985. 130.

5 Paris, 15 janvier 1976, RTD Com 1977. 315, n°9.

6 TGI, Paris, 13 juin 1991, PIBD 1991. III. 717, n°512.

7 TGI, Paris, 4 juillet 1986, PIBD 1987. III. 35, n°404.

8 Concernant les deux affaires, voir annexes n°6 et n°8..

9 Cass-civ n° 65931 du 8 mai 2001. Bull Civ 2001, p 103.

10 CA, Tunis, Arrêt du 16 mai 1951. Ann. Prop. Ind 1952. p. 133.

11 TPI, Sousse, jugement n°953 du 20 décembre 1982. Chronique, R.T.D 1986. p. 569, note N. MEZGHANI.

12 CA, Tunis, arrêt N°1593 du 13 février 1987. Bulletin de la Doctrine et de la Jurisprudence 1997, n°1. p. 150.

13 TPI, Tunis, jugement N°460/08 du 23 octobre 1983. Bulletin de la Doctrine et de la Jurisprudence 1997, n°1. p. 148.

14 TPI, Tunis, jugement N° 64616 du 5 juillet 1983. Bulletin de la Doctrine et de la Jurisprudence 1997, n°1. p. 145.

15 CA, Tunis, Arrêt n°62158 du 12 juin 1985. BOUDEN (O): op. Cit. Annexe p. 79.

16 CA, Paris, 28 janvier 2003, D. Aff. 2003, p. 690, obs. C. Manara ; TGI, Grasse 2001. Le litige opposait la marque 1,2,3 spresso au nom de domaine 1,2,3 espresso. com. Publié sur " www.nice-avocats.com/avocats/deur-nicolas.htm" ; TGI, Nanterre, 20 mars 2000. En l'espèce, un distributeur exclusif de la marque SONY a reproduit la-dite marque dans son nom de domaine afin de bénéficier d'un bon classement par les moteurs de recherche lorsque l'interrogation portait sur la marque SONY. La reproduction a été jugée contrefaisante. Publié sur l'adresse : www.cejem.com/article.

TGI, Paris, 14 mai 2001, publié sur www.cejem.com/article. Dans cette affaire qui opposait la marque DANONE au Réseau Voltaire qui utilise un nom de domaine sous le nom de "jeboycottedanone". La société DANONE a vu sa demande en contrefaçon repoussée s'agissant de la reproduction de cette dénomination dans l'adresse du nom de domaine, selon le tribunal cette reproduction constituait "une référence nécessaire pour indiquer la destination du site polémique" ou encore

En définitive, ce qui importe c'est que la marque soit reproduite matériellement pour désigner des produits identiques à ceux pour lesquels elle a été enregistrée selon la lettre de l'article 22 de la loi n°36-2001. Toutefois, on est en droit de soutenir que la reproduction de la marque n'est condamnable que dans la mesure où elle poursuit des fins commerciales 1 ou concurrentielles qui touchent directement à la spécialité de la marque reproduite.

Cette limitation du champ de la répression de la reproduction et de la contrefaçon en général s'explique par le fait que la marque n'est pas protégée dans l'absolu mais uniquement dans son application aux objets qu'elle a pour fonction de distinguer dans le commerce. Ainsi et à l'image de son objet, la contrefaçon n'a ni sens ni substance en dehors de la spécialité et du commerce.

Bien entendu, la nécessité de localiser la reproduction dans un cadre commercial ne doit pas être entendue comme impliquant nécessairement un usage commercial de la marque reproduite car, tel qu'il est prévu dans l'article 22 de la loi n°36-2001, l'acte de reproduction de marque est incontestablement dissocié de tout acte ultérieur d'usage ou de commercialisation.

Ainsi, si la reproduction intervient dans un cadre autre que concurrentiel, on ne voit pas en quoi elle porte atteinte aux droits conférés par l'enregistrement de la marque, l'exemple en ce sens en est la reproduction à usage privé ou encore dans un cadre contestataire ou parodique2 impliquant l'exercice de la liberté fondamentale de l'expression.

La jurisprudence française relative à la reproduction des marques dans des noms de domaine contestataires ou parodiques semble s'orienter progressivement vers la reconnaissance de certaines exceptions au droit des marques permettant d'envisager le droit à la critique et à la parodie de marque.

C'est ce qu'on peut dégager du rejet des demandes en contrefaçon intentées séparément par SCPEA 3 et ESSO 4 contre l'association Greenpeace France, ainsi que de l'arrêt infirmatif dans l'affaire DANONE 5 qui n'a pas retenu la contrefaçon par reproduction. Dans ces affaires, la jurisprudence française a fermement opposé à l'absolutisme du droit des marques l'exception de la reproduction à titre polémique sous l'égide du droit fondamental à la liberté d'expression.

Internet, vecteur d'information par excellence, est le lieu privilégié de la liberté d'expression. Toutefois, liberté n'est point synonyme d'anarchie, tout est question de mesure et de bon sens, c'est ce que laisse entendre la Cour d'Appel de Paris 6 en condamnant pour contrefaçon le concurrent malicieux (EUROPE 2) qui dirige des liens hypertextes (ANTI-NRJ) reproduisant la marque (NRJ) vers un tiers qui tient des propos dévalorisants et dénigrants à l'égard de celle-ci.

"le moyen de nature à garantir et à satisfaire pleinement la liberté d'expression". Toutefois la demande en contrefaçon a été accueillie s'agissant de la reproduction des logos de la marque DANONE à l'intérieur du site lui-même car la reprise des éléments de la marque dans cette seconde hypothèse n'était pas nécessaire au but de contestation poursuivi par les animateurs du site. Avant d'être infirmé en appel, ce jugement a failli faire jurisprudence.

1 Voir en ce sens, CHAVANNE (A) & BURST (J-J) : op. cit. N°1203. p. 713; Cf, Mathély (P): op. cit. p. 324.

2 BAUD (E) et COLOMBET (S) : « La parodie de marque : vers une érosion du caractère absolu des signes distinctifs ? » D. 1998, n°23, Chron. P. 227.

3 TGI, Paris réf., 2 août 2002. Affaire : SA SCPEA c/ Association Greenpeace France. Confirmé par : CA, Paris, 26 février 2003. Publié sur : http://www.juris-nd.com/jp/00/Theme5.htm; également sur www. legalis. net

4 CA, Paris, 26 février 2003. Association Greenpeace France c/ SA Esso. Infirmant TGI, Paris, réf., 8 juillet 2002 Esso c/ Greenpeace. Les deux décisions sont publiées sur : http://www.legalis.net/cgi-iddn/certificat.

5 CA, Paris, 30 avril 2003. Affaire "jeboycottedanone" (sur le fond), infirme TGI Paris 4 juillet 2001. publiés sur http://www.juris-nd.com/jp/00/2003 et www.foruminternet.org.

6 CA, Paris, 19 septembre 2001. NRJ c/ EUROPE 2. Publié sur : www.cejem.com/article. Note, O. CACHARD.

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"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera