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Dynamique des représentations sociales de l'agriculture et de la ruralité dans un contexte territorial du vieillissement de la population : Le cas du « Projet Nô-Life » de la Ville de Toyota au Japon

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par Kenjiro Muramatsu
Université de Liège - DEA Interuniversitaire en Développement, Environnement et Sociétés 2006
  

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Acteur 4 : Bureau Départemental de la Politique Agricole (BDPA)

Caractère général de l'acteur

Le Bureau Départemental de la Politique Agricole (BDPA) est le bureau administratif délégué du Bureau Départemental de l'Agriculture, de la Forêt et de la Pêche de Toyota-Kamo509.

Il a notamment coopéré avec la Municipalité de Toyota pour le Projet Nô-Life depuis la fin 2002 où la procédure de la réalisation concrète du Projet Nô-Life fut amorcée en concertation avec divers acteurs institutionnels sous le nom provisoire du Centre Nô-Life : « Centre pour le soutien aux activités agricoles (Einô Shien Center) ». Dans cette procédure, il contribua notamment à la préparation du Plan de la Zone spéciale au cours de l'année 2003-2004, la dernière étape avant l'inauguration du Centre Nô-Life au printemps 2004.

Domaines de compétences

D'après la brève explication de Monsieur M, responsable actuel du Projet Nô-Life, les domaines de compétences du BDPA sont les suivants :

- Tâches administratives relatives à la Loi agraire (Nôchi-hô) ainsi qu'à la Loi relative à l'Aménagement des Zones réservées pour le développement agricole (Nôgyô Shinkô Chiiki no Seibi ni Kansuru Hôritsu)

- Travaux publics agricoles dirigés par les municipalités et par la coopérative agricole

- Aides directes pour les Zones de montagne

- Développement des cultures spéciales (thé, fleurs, fruits, pêche, élevages etc)

- Orientation de l'information des produits alimentaires (étiquetage, traçabilité etc)

Le BDPA partage les domaines de compétences relatifs à l'agriculture et à la ruralité avec l'ECV (acteur 5)

508 Nous pouvons évoquer trois problèmes suivants : non intention de la Coopérative d'envoyer plus d'employés pour le Centre Nô-Life, malgré le problème d'un manque d'employés posé au Centre Nô-Life notamment suite à la construction de deux centres Nô-Life supplémentaires dans le territoire de la Ville de Toyota en 2006 ; peu de faisabilité de l'objectif d'un million de yens du revenu agricole pour la plupart de stagiaires ; Opposition de la Coopérative à l'élargissement du Centre Nô-Life de 2006. Nous les aborderons dans le Chapitre 3.

509 Son territoire de compétence s'étend au territoire de la Ville de Toyota (y compris les collectivités fuisionnées en 2005) ainsi qu'à celui de la Ville de Miyoshi, ville vosine de Toyota située à l'ouest de celle-ci.

au sein du Bureau Départemental de l'Agriculture, de la Forêt et de la Pêche de Toyota-Kamo. Le BDPA est chargé de l'administration tandis que l'ECV est chargé de l'orientation technique et économique des producteurs agricoles.

Si l'ECV travaille souvent de manière face-à-face avec les producteurs sur le terrain, le BDPA n'a pas ce rapport direct et individuel avec les producteurs et travaille « toujours à l'intérieur du bureau » (d'après Monsieur M).

Thématiques récentes

La thématique qui était la plus importante pour le BDPA était justement, jusqu'en 2005, la préparation du dossier de candidature pour l'application de la politique nationale de la Zone spéciale à la Ville de Toyota510. Cette candidature fut posée suite à la coopération entre la Municipalité de Toyota et la Préfecture d'Aichi. Monsier M a coopéré avec le BPA pour l'élaboration de ce dossier de candidature (nous avons analysé le contenu de ce dossier dans la partie de l'acteur 1) en jouant le rôle de l'intermédiaire entre la Municipalité de Toyota et le gouvernement japonais.

La thématique actuellement la plus importante pour le BDPA est la politique des « porteurs » de l'agriculture de la région Toyota-Kamo, notamment avec le système de l' « agriculteur qualifié (nintei nôgyôsha)511 » Cette politique pour la modernisation agricole constitue actuellement une des thématiques « plus urgentes » pour le BDPA.

Partenaires principaux

Les partenaires institutionnels du BDPA sont les suivants : la Municipalité de Toyota (le bureau du BDPA se trouve à côté du bâtiment de la Municipalité) ; la CAT (CAT). Et comme expliqué plus haut, le BDPA et l'ECV se partagent respectivement les tâches administratives et technico-économiques.

Le BDPA intervient dans l'élaboration des Plans fondamentaux de l'Agriculture de la Ville de Toyota512. Le BDPA donne ses avis à la Municipalité de Toyota en sorte que les plans de celle-ci soient convergents avec les plans départementaux concernés. Puis, il effectue également l'évaluation de l'état d'avancement des projets municipaux.

La position du BDPA est marquée par un lien fort avec les structures administratives supérieures dont notamment le Ministère de l'Agriculture, de la Pêche et de la Forêt. Sa mission principale consiste donc à exercer les tâches administratives attribuées par l'Etat, vis-à-vis des organismes locaux concernés tels que les municipalités et les coopératives agricoles.

C'est pourquoi le BDPA a très peu de relations directes avec la population locale dans sa mission. Ce qui le différencie de la municipalité ainsi que de la coopérative agricole qui travaillent plutôt au service de la population locale (les « membres » pour la coopérative agricole). C'est pourquoi le travail de Monsieur M se déroule toujours à l'intérieur de son bureau, comme évoqué plus haut.

Relation avec le Projet Nô -Life

Après 2005, le BDPA n'a plus d'implication régulière dans le Projet Nô-Life, à la différence de l'ECV qui participe aux activités de la formation Nô-Life dans le cadre de l'orientation technique et économique des producteurs.

Il assume une tutelle administrative a posteriori de la Municipalité qui « peut venir en aide en cas de problème », d'après Monsieur M. Il n'intervient donc pas dans l'élaboration des activités du Centre Nô-Life.

510 En effet, en 2005, les déréglementations appliquées par le programme de la Zone spéciale de Toyota furent généralisées dans toutes les collectivités territoriales au Japon. Dès lors, la qualification de la Ville de Toyota pour la Zone spéciale fut annulée.

511 Pour l'analyse du contenu de cette politique, voir la partie de l'Acteur 5.

512 L'élaboration du deuxième plan décénal pour les années 2006-2015 est actuellement en cours (en 2006).

Par ailleurs, le BDPA examine la synthèse annuelle des activités du Centre Nô-Life notamment en terme financier afin de la présenter au sein du Conseil général (départemental).

Caractère général des données

Notre analyse du BDPA se base sur l'entretien effectué par l'enquêteur (rédacteur) avec Monsieur M, vice-chef du Bureau Départemental de la Politique Agricole et responsable actuel (en 2006) des affaires administratives concernant le Projet Nô-Life. Il nous a accueilli dans son bureau pour répondre à nos questions pendant près de deux heures.

Représentations

Le BDPA est un agent administratif qui exerce ses fonctions juridiquement déterminées, et dont les actions sont fortement régies par les structures supérieures comme la préfecture et le Ministère de l'agriculture, de la Pêche et de la Forêt. C'est pourquoi il ne doit pas normalement avoir un point de vue particulier ni une position particulière.

Cependant, lorsque le BDPA s'implique dans le Projet Nô-Life, qui est un nouveau type de politique publique locale inspirée par de nouvelles idées, de quelle façon saisit-il la situation et le problème de l'agriculture de la région de Toyota et le Projet Nô-Life ? A-t-il un point de vue particulier sur le Projet, basé sur son propre intérêt et sa propre position ?

Son point de vue particulier : calcul économique et foncier

Telles étaient nos interrogations de base pour mener notre entretien avec Monsier M. Pour répondre à nos questions, Monsieur M, lui-même surpris de la visite de l'enquêteur (rédacteur) qui lui était quelque chose d'inhabituelle, s'est interrogé sur la pertinence du fait que ce soit lui qui soit choisi pour répondre aux questions de l'enquêteur. Ce qui fait déjà un grand contraste avec les employés de la municipalité qui ont l'habitude de prendre contact et de recevoir le public513.

En évoquant la complexité pour mesurer l'efficacité des mesures de la politique agricole en disant « l'agriculture est un domaine tellement grand » (une phrase que Monsieur M a répété plusieurs fois lors de l'entretien), il nous confirme qu'il ne peut nous parler que de « calculs économiques ». Ceci suggère déjà un caractère délibérément objectiviste de son point de vue. Il pense le problème agricole et rural et le Projet Nô-Life notamment en relation avec les conditions générées par le montant de la taxe sur les biens fonciers (kotei-shisan zei) sur les terrains agricoles concernés.

Il nous a d'abord expliqué les points qui l'intéressaient lorsqu'il a participé, en septembre 2006, au « contrôle du stage individuel (jisshû hantei) » des stagiaires des années 2005-2007 de la filière rizicole, en tant que l'un des contrôleurs514.

513 Monsieur M : « Donc, le point clé, ce que vous voulez savoir le plus, vous vous focalisez sur le travail de l'administration départementale dans le domaine de la politique agricole pour cette nouvelle activité sociale de personnes âgées... (Projet Nô -Life) L'essentiel pour les domaines administratifs comme la politique agricole, est de mener une politique ayant un effet net ou pas... Euh, il s'agirait du détail, je risque de me tromper... En fait, l'agriculture est un domaine tellement grand que je risque de ne pas pouvoir vous répondre exactement. (...) Ce que je peux vous répondre, ce n'est que des calculs économiques, en fait. Par exemple, 'combien coûte le coût de production agricole avec tel ou tel bien foncier loué, avec tels ou tels membres de la famille ?' etc... »

514 Le contrôle du stage individuel s'effectue à la fin du programme de la formation Nô-Life. Il s'agissait d'évaluer les pratiques agricoles que chaque stagiaire mène sur son terrain. Le stage individuel s'effectue, soit dans leur propre terrain agricole (dans le cas des stagiaires déjà possédants ou locataires de terrains agricoles), soit dans une parcelle attribuée par le Centre Nô-Life (dans le cas des stagiaires qui n'ont pas de terrains à leur disposition ou qui ont voulu utiliser une parcelle du Centre Nô-Life). Voir la

En nous montrant le rapport officiel sur les trois stagiaires qu'il avait contrôlé, il nous a expliqué les éléments qu'il avait essayé de repérer chez les stagiaires lors du contrôle : profils (sexe, âge, parcours professionnel etc) ; objectif de chaque stagiaire pour leurs activités agricoles ; évaluation des valeurs et taxes foncières des terrains agricoles concernés ; rapport entre le coût et le profit pour la production concernée ; rapport avec le coût de la vie etc.

Il a d'abord établi un constat commun sur ces trois personnes : il leur est impossible de gagner leur vie avec leur seule activité agricole, tandis que cette activité leur permet de « bien vivre (ikiiki) » en leur donnant un « deuxième emploi (daini no shûshoku) » et que leur motivation pour la production agricole est très haute.

Par contre, il relève une difficulté pour évaluer chacun des stagiaires, car chacun a son propre objectif différent de celui des autres. Voici un bilan résumé de la situation de ces trois stagiaires.

1 Salarié retraité ayant 0.3 ha de terrains agricoles. Il souhaite plus tard élargir l'échelle de sa production jusqu'à 1 ha

2 Salarié de l'âge mur, d'un foyer agricole pluriactif. Il cultive 0.2ha de terrains rizicoles qui lui appartiennent.

3 Salarié retraité ayant plus de 0.5 hectares de terrains agricoles dont une partie est mise en location sous forme d'appartements. Il mène sa production agricole sur ses terrains pour gérer ses biens immobiliers en tenant compte du montant de la taxe foncière qui s'impose sur ces biens.

Ces trois stagiaires avaient d'abord un point commun : ils sont tous chefs d'un foyer agricole pluriactif. Et le premier stagiaire retraité souhaite agrandir sa production en louant davantage de terrains ; le deuxième, actuellement salarié, cultive son terrain, dont il a hérité, pour lui-même et sa famille ; le troisième cultive son terrain pour la gestion économique de ses biens fonciers. Dans le cas du troisième stagiaire, en raison de la localisation d'une grande partie de ses terrains agricoles 0.25ha au bord de la « zone à urbaniser », il est confronté au problème de l'élevation de la taxe foncière. Si à l'avenir ses terrains seront intégrés dans la zone à urbaniser, la taxe foncière appliquée à ces terrains va radicalement s'élever. C'est pour cela qu'il choisit de maintenir des activités agricoles sur ces terrains (au lieu de les laisser en friche) pour garder le statut agricole de ces terrains.

Monsieur M constate que la succession familiale des terrains agricoles préoccupe beaucoup les producteurs agricoles en terme de gestion des biens immobiliers. Ce à quoi il accorde le plus d'importance en tant qu'enjeu de la conservation des terrains agricoles.

Rapport avec le thème majeur de la Ville de Toyota : la relation urbain - rural

L'aspect foncier marque fortement la vision exprimée par Monsieur M, en tant qu'agent de l'administration agricole du département. L'enquêteur lui a posé une question sur la relation du BDPA avec la politique de la Municipalité de Toyota marquée par son nouveau « Règlement fondamental sur l'Aménagement de la Ville (machizukuri kihon jôrei) » (voir la partie de l'acteur 2) adopté suite à la grande fusion avec six collectivités rurales en 2005, qui prône l'idée de la « ville où vivent ensemble la ville et les campagnes rurales et montagnardes (toshi to nôsanson no kyôsei) ». Monsieur M a alors relevé un problème fondamental de la structure foncière de l'agriculture dans le territoire de la Ville de Toyota. Cela tout en affirmant que le BDPA s'implique dans ce thème majeur de la Municipalité de Toyota dans le cadre de sa mission départementale, et que le Projet Nô-Life constitue également une thématique importante dans ce thème.

Problème fondamental 1 : structure foncière urbain-rural de Toyota « visible d'un seul coup d'oeil (hitome de wakaru) »

En nous montrant une carte de la Ville de Toyota, il nous a expliqué un problème fondamental qui est « visible d'un seul coup d'oeil (hitome de wakaru) » selon lui du point de vue foncier, sur l'agriculture dans le

présentation générale des activités de formation Nô-Life dans le chapitre suivant.

territoire de la Ville de Toyota.

Inégalité de la valeur foncière des terrains agricoles

D'après lui, la structure foncière du territoire de la Ville de Toyota après la fusion de 2005, se divise en trois zones géographiques : plaine de la rive droite du fleuve Yahagi (zone 1) ; plaine de la rive gauche du fleuve Yahagi jusqu'au bord de la zone de moyenne montagne (zone 2) ; zone de moyenne montagne (zone 3).

Puis, il nous a fait remarquer une inégalité nette de la valeur foncière des terrains agricoles entre ces trois zones. Dans la zone 1, la valeur foncière des terrains agricoles est environ de 3000 yens à 4000 yens par \u13217§ soit environ 3 - 4 millions de yens pour 10 ares. Dans la zone 2, elle est environ 900 à 1000 yens par \u13217§, soit environ 1 millions de yens pour 10 ares, et dans la zone 3, environ 200 yens par \u13217§, soit environ 200 000 yens pour 10 ares. Et le montant de la taxe foncière sur ces terrains agricoles est de 0.014% de leur valeur foncière.

Tableau : chiffres approximatifs sur les valeur et taxe fonciers des terrains agricoles

 

VF (par \u13217§)

VF (pour 10ares)

Taxe (\u13217§)

Taxe (pour 10ares)

Zone 1

3000 - 4000

3 - 4 millions

42 - 56

42 000 - 56 000

Zone 2

900 - 1000

90 0000 - 1 million

12.6 - 14

12 600 - 14 000

Zone 3

200

200 000

2.8

2800

Unité monétaire : yen (150-160 yens soit 1euro) Ces chiffres sont calculés par l'enquêteur.

En moyenne montagne, dépeuplement et vieillissement

Puis, s'ajoute à une telle inégalité des valeurs foncières, un mécanisme du dépeuplement et du vieillissement de la population rurale, comme Monsieur M l'explique ci-dessous :

« Voici les trois différentes zones. Et dans la zone de moyenne montagne, imaginez que vous avez une famille où les parents ont un enfant qui est susceptible de reprendre leur métier de l'agriculture. Et si cet enfant est employé dans le secteur automobile et peut gagner plus que le revenu de ses parents qui habitent dans la montagne, il s'installera en ville. Car il pourra ainsi avoir un niveau de vie plus élevé. Et dans la montagne, il n'y a plus de porteurs. D 'où l'avancement du vieillissement et du dépeuplement. »

En plus du mécanisme de l'émigration rurale tel qu'il est expliqué ci-dessus, on peut ajouter qu'en plaine, sur le prix de vente du riz pour 10 ares (environ 10 5000 - 12 0000 yens515), le montant de la taxe équivaut à la moitié de ce prix ! Dans la zone de moyenne montagne, malgré le faible taux de la taxe foncière imposée, la quantité des récoltes et la surface de terrains sont réduites par rapport à la plaine. Et si, en plus, on tient compte du coût de production, on constate qu'il est effectivement « impossible de gagner sa vie » avec la seule production rizicole.

En plaine, pression foncière urbaine

Puis, Monsieur M explique que le problème se pose également dans les foyers agricoles situés en plaine confrontés à une forte pression foncière urbaine.

« (...) Et par cette zone intermédiaire située entre la ville et les zones rurales, dont la valeur foncière peut s'élèver jusqu'à 10 millions de yens pour 10 ares, si les frères ou soeurs veulent partager les biens de la famille pour les vendre, le repreneur n'a qu'à l'accepter... »

515 Le prix de vente du riz est environ 15000 yens pour 60 kg (1pyô) au Japon. Nous pouvons récolter environ 420 kg - 480kg (7-8 pyô) de riz pour 10 ares.

Cette explication indique le dilemme des foyers agricoles face à l'antinomie des logiques de l'économie patrimoniale et de celle du marché. Et ceci implique le risque du morcellement parcellaire et ainsi la fragilisation de la structure d'exploitation agricole. Puis, on peut ajouter que c'est en plaine que les conditions géographiques sont généralement favorables pour la modernisation agricole (mécanisation et remembrement), alors que les agriculteurs y sont confrontés à la pression foncière de l'urbanisation plus forte que dans la zone de moyenne montagne. Par contre, dans la zone de moyenne montagne, même si la pression de la taxe foncière est beaucoup moins importante qu'en plaine, cette zone est marquée par des conditions géographiques défaborables à la modernisation et la main d'oeuvre agricole affablie par le vieillissement et le dépeuplement.

Système de l'exonération de l'impôt foncier : seul moyen pour la conservation agricole

En tenant compte de ces problèmes liés à la structure foncière, Monsieur M met l'accent sur l'importance de l'utilisation du système de l'exonération de l'impôt sur les terrains agricoles pour la conservation des terrains agricoles. En effet, en observant les stagiaires de Nô-Life, il avait constaté que ce problème de la gestion foncière constitue pour eux l'une des plus importantes préoccupations. Ce système de l'exonération de l'impôt foncier permet aux agriculteurs, qui continuent leur activité agricole en héritant les terrains de leur famille via donation entre vifs, d'être dispensés de payer les droits de succession. Cela constitue ainsi le seul moyen pour permettre la conservation des terrains agricoles par les agriculteurs. Sinon, d'après Monsieur M, « la taxe va tout prendre » chez les agriculteurs. Mais l'utilisation de ce système devient de plus en plus rare au sein des foyers agricoles, face au dilemme au sein du foyer agricole entre les logiques patrimoniale et marchandes. D'ailleurs, quand on applique ce système, le contrôle administratif de l'utilisation des terrains agricoles devient beaucoup plus strict pour le successeur afin qu'il continue effectivement de mener par lui-même une activité agricole sur ses terrains.

Contradiction entre la politique agricole nationale et la vie « réelle » des foyers agricoles

Ensuite, Monsieur M a continué à nous expliquer la grande contradiction entre ce dilemme imposé aux foyers agricoles pluriactifs et la politique agricole de l'Etat sur les « porteurs » qui recherche toujours l'agrandissement d'échelle de production. Monsieur M l'explique comme ci-dessous :

« Pourtant, la politique nationale d'aujourd'hui qui essaie de concentrer les terrains par les porteurs, entre en contradiction avec ce mécanisme foncier. Il y a un grand problème entre la vie réelle des agriculteurs et la politique agricole de l'Etat qui veut toujours former des exploitations de grande échelle. C'est ça, le point pénible de la politique agricole. Dans la zone de moyenne montagne, même si on reçoit des aides directes, comment un porteur peut-il gérer un hectare de terrain avec une main d'oeuvre affaiblie par le vieillissement ? Franchement parlant, il n 'y a pas de solutions C'est pourquoi dans la mesure où la base de l'agriculture reste avant tout quelque chose de social. Même si les agriculteurs font des efforts, cette base est limitée. C'est pourquoi même si la ville souhaite développer l'agriculture, il n'est même pas possible de concevoir une perspective, dans une telle réalité... »

Cela souligne la contradiction fondamentale entre la situation des foyers agricoles pluriactifs et et l'orientation de la politique agricole nationale visant la concentration des terrains entre les mains d'un petit nombre de « porteurs » sélectionnés (souvent sous forme d'entreprises agricoles soutenues par la coopérative agricole) avec des « opérateurs » qui disposent des grandes machines agricoles516.

En faisant ce constat de la réalité objective de l'économie agraire, Monsieur M explique les éléments objectifs de la crise agricole et rurale qui fondent les thématiques du Projet Nô-Life, sous un regard objectiviste

516 Sur l'orientation de la politique agricole nationale, voir la partie de l'acteur 5. Nous avons également vu dans le chapitre 1 l'évolution de cette politique dans les années 65-75 avec les entreprises agricoles à grande échelle chargées des travaux rizicoles des autres foyers agricoles pluriactifs dans la zone du sud.

et plus distancié que les autres vis-à-vis de la situation (« il n'est même pas possible de concevoir une perspective, dans une telle réalité »).

Place du Projet Nô -L ife

Face à un tel constat de la crise fondamentale de l'agriculture et de la ruralité, quelle est la place du Projet Nô-Life dans la politique agricole, du point de vue du BDPA ? Quelles valeurs sont accordées au Projet ? Les réponses de Monsieur M restent bien objectivistes et justificatrices du Projet du point de vue « administratif (gyôsei-teki) » et « social (shakai-teki) », ce qui reflète sa position toujours basée sur le principe de l'intérêt public (ou bien-être public : kokyô no hukushi)

Valeurs du Projet Nô-Life

Le thème majeur du Projet Nô-Life est « la réduction et la prévention des friches agricoles (yûkyû-nôchi no kaishô) ». Il y a environ 700ha de friches agricoles dans le territoire de la Ville de Toyota sur 10120.3ha de la zone réservée pour le développement agricole qui occupe un tiers de la surface totale de la Ville de Toyota (29012ha)517. Et Monsieur M confirme que « le plus grand fruit » du Projet Nô-Life serait le fait que les stagiaires du Projet Nô-Life mènent leur activité agricole sur ces friches, et que « les retraités prennent plaisir à leur activité agricole et rurale ». Cela veut dire que ces deux demandes de pair, constituent un consensus public sur le Projet Nô-Life.

Place accordée à l'Agriculture de type Ikigai : terrains échappant à la politique de la modernisation agricole

Quelle relation est-elle établie entre l'agriculture de type Ikigai et la politique agricole de porteurs ? Monsieur M nous a expliqué que ces terrains faisant environ 700ha constituent les terrains qu'il est impossible de concentrer par les grandes exploitations agricoles ou les opérateurs de la coopérative agricole, considérés comme « porteurs » de l'agriculture de type industriel, qui cultivent le riz, le soja et les céréales en rotation à grande échelle. Ces 700ha de terrains sont « ceux qui échappent » à la politique agricole de porteurs à grande échelle et également « ceux qui sont abondonnés par leurs propriétaires ». Et le maire de Toyota promeut le Projet Nô-Life, parce que « laisser abondonner ces friches peut constituer un problème social ».

L'importance de cet enjeu de la conservation des terrains agricoles par les petits producteurs est « une mission du Bureau de la Politique Agricole et une tâche de la Loi agraire ». Ici, il faut noter que l'urbanisation, d'après Monsieur M, n'est pas non plus exclue de la future utilisation de ces terrains, bien au contraire, elle constitue l' « objectif ultime » dans la vision normative de l'administration... Toutefois, dans la mesure où l'agriculture de Toyota est constituée d'« un secteur industriel » avec un chiffre d'affaires important (près d'un milliard de yens soit environ 6 666 666.6 euros, d'après Monsieur M), « la prévention des friches agricoles constitue un thème de la société ».

Quels sont les problèmes rencontrés dans le Projet Nô-Life ?

Monsieur M confirme d'abord qu' « il n'y a pas de problème » dans le Projet. Ce qui veut dire que le Projet se déroule comme « un projet avec un budget (yosan jigyô) » et qu'il fonctionne comme « le maire le pensait »

517 Ce chiffre est celui d'avant la fusion de 2005. Après la fusion de 2005, la surface total de la Villle de Toyota a triplé : 91 847ha. Mais nous n'avons pas pu obtenir les données sur le territoire élargi, concernant la zone réservée pour le développement agricole ni celles concernant les friches. En 2000, dans le terriotoire de la Ville de Toyota, il y a 354ha des terrains en friche, 341ha des terrains mis en jachère. Si on se base sur la « surface agricole utilisée (nôyôchi) » dans la « zone réservée pour le développement agricole (nôgyô shinkô chiiki) », la surface totale des terrains agricoles sont 5113.4 ha en 2003. Cependant, il faudrait estimer un peu plus pour compter plus réellement la surface agricole, car ce chiffre ne contient pas la surface agricole située hors cette zone, à savoir : la zone à l'urbanisation contrôlée qui n'appartient pas à la zone réservée pour le développement agrciole, et la zone à urbaniser. Ainsi, il n'est pas facile de repérer la surface agricole réelle dans les statistiques officielles...

en répondant à « une demande stable de la part des stagiaires ». Donc, c'est administrativement qu' « il n'y a pas de problème » dans le Projet.

Par contre, Monsieur M a évoqué la difficulté d' « analyser les facteurs de la réussite » de ce projet. Les facteurs de la réussite du Projet Nô-Life sont d'abord « le cycle où les stagiaires apprennnent bien (l'agriculture) et obtiennent leur terrain agricole pour prévenir les friches, et deviennent ainsi porteurs de l'agriculture en y prennant plaisir ». Et ce thème prôné par le maire « a bien réussi à avoir le droit de cité (shimin ken) ». Cependant, il est « difficile d'expliquer ses résultats et effets (seika) », compte tenu du problème de la structure foncière « visible d'un coup d'oeil » que l'on a constaté plus haut.

Les facteurs d'Ikigai ? : « Ce qu'ils n'ont pas socialement, c'est Ikigai »

Quels sont les facteurs d'Ikigai pour Monsieur M ? Un des objectifs du Projet Nô-Life d'avoir un million de yens de revenu agricole constitue-t-il un de ces facteurs déterminant ? Ou y en a-t-il d'autres ? D'abord, le fait d'aboir un revenu avec des activités agricoles constitue « un point de départ qu'il ne faut pas oublier », et que « le revenu constitue la base de vie ». Toutefois, ce n'est pas défini comme un « objectif de l'administration ».

En fait, la question de revenu est « vraiement difficile à cerner » pour Monsieur M, et il « ne voit pas la direction » quand il analyse, dans le cadre de son travail, les différents types des revenus agricoles tels que le salaire agricole, la vente des produits, le chiffre d'affaires etc., qui sont différemment définis en fonction des types d'organisation agricole tels que coopératives, entreprises, exploitations familiales, individus etc.

Malgré tout, chez Monsieur M, la thématique d'Ikigai est indispensable dans le Projet, étant avant tout une « motivation de la part du maire, qu'il ne faut pas ignorer ». Voici son explication :

« Non, non. Une des motivations du maire pour le Projet Nô-Life est le 'Nô-Life pour Ikigai'. Comme le montre l'enquête que le Syndicat ouvrier de Toyota avait effectuée, il y aura 2000-3000 retraités chaque année. Ils pourront mener leur vie avec leur pension. Donc ce qu'ils n'ont pas socialement, c'est Ikigai. Mener une production agricole dans la société, établit une relation avec la société, et ainsi permet d'avoir un Ikigai. »

Donc, l'idée d'Ikigai dans le Projet Nô-Life est avant tout d'avoir « une relation avec la société » via des activités agricoles. Puis, le Projet Nô-Life tente de lier l'idée d'Ikigai à la réalité sociale locale où « les propriétaires ruraux sont embarrassés » par le problème de leur friche agricole. Car l'absence d'activité agricole sur ces terrains définis comme « agricoles » fera disparaître l'exonération de l'impôt foncier (taxe de succession) dont bénéficient les propriétaires qui en ont hérités. Donc, si ces propriétaires peuvent louer leurs terrains aux particuliers qui mènent une production agricole sur ces terrains, cela « constituera réellement une prévention positive » selon Monsieur M. Cela constitue non seulement un « mérite pour l'administration » mais également un « mérite social » dans le sens où cela donne Ikigai pour les retraités, « cela enrichit leur vie ».

Donc, l'essentiel de la vision officielle du Projet Nô-Life n'est pas économique. Et vu la réponse que Monsieur M nous a donnée sur la question de l'objectif de dégager un million de yens de revenu agricole, la pertinence de cet objectif dépendra, finalement, des réponses de chacun des stagiaires.

Problème fondamental 2 : difficulté de la production agricole « c'est comme si on traitait un malade qui est dans un stade irrémédiable »

Monsieur M a de nouveau relevé un problème fondamental de l'agriculture lorsque l'enquêteur lui a posé la question sur les conséquences escomptées du Projet Nô-Life vis-à-vis des localités (ou sociétés locales : chiiki shakai) de la Ville de Toyota. Cette fois-ci, il a exprimé son point de vue économique en commençant par l'interrogation suivante : « Pourquoi, aujourd'hui, la production agricole connaît-elle une telle difficulté, alors qu'elle était autrefois une activité communautaire au sein de la population ? »

Monsieur M attribue la cause des difficultés pour la production agricole au système étatique du contrôle

alimentaire, où l'Etat soutenait le marché du riz, un système où l'Etat « payait cher et vendait pas cher »518. Et la nouvelle loi alimentaire entrée en vigueur en 1994 est venue bouleverser ce système du soutien national au marché du riz qui fonctionnait par l'intermédiaire de la coopérative agricole. Citons l'explication de Monsieur M :

« On gérait le prix en amont avec le financement de l'Etat. Et si on bouleverse le taux de prix entre l'amont et l'aval, ce qui fait que le prix versé aux producteurs est moins élevé que le prix à la distribution, du coup, les agriculteurs produisent moins. Et ils commencent à vouloir vendre leurs produits par eux-même. La distribution devient ainsi moins réglée. Donc, le point de départ était que le marché du riz était soutenu par l'Etat, ce qui venait compléter le revenu des agriculteurs. Et maintenant, on essaie de les faire produire et vendre librement. Du coup, c'est la Coopérative agricole qui est obligée de gérer la distribution par elle-même. Mais cela ne peut pas marcher... L'Etat n'a plus de financement maintenant. C'est pour cela que l'agriculture est tragique. Puis, dans un tel contexte, l'administration vient en aide pour combler cette absence des aides du gouvernement qui étaient mises en place auparavant. C'est l'état actuel de l'administration qui est douloureux. Franchement dit, c'est comme si on traitait un malade qui est dans un stade irrémédiable... »

Il s'agit du contexte de la libéralisation du marché du riz au Japon via la déréglementation de la distribution, l'abolition du principe de l'intervention étatique avant l'entrée des produits dans le marché, et la priorité donnée au principe du marché. Monsieur M continue son explication en abordant le problème de la surproduction que cette politique a provoqué.

« (...) La conséquence du soutien national au marché du riz ne concerne pas seulement les agriculteurs individuels, mais la surprodution du riz que tous les agriculteurs avaient produit. Cette surprodution coûte extrèment cher à l'Etat pour la gérer. Aujourd'hui, l'Etat est obligé de modifier cette politique. C'est la position actuelle de la politique agricole nationale. Et du côté des agriculteurs, aujourd'hui, c'est eux qui sont responsables d'eux-même. Il faut produire du riz ou d'autres produits, de manière concurrentielle. La situation est ainsi défavorable pour les agriculteurs aujourd'hui. Leur revenu est réduit de moitié par rapport à l'époque où le marché était soutenu. Donc ils n'ont plus de travail et quittent l'agriculture. Les opérateurs de la Coopérative s'occupent de plus en plus de la production, mais ils sont obligés de tenter d'élargir leur échelle de production en fonction du coût de production qui augmente de plus en plus. Ainsi, ils ne deviennent pas riches pour autant. Du côté des propriétaires ruraux, leurs terrains sont conservés grâce à ces opérateurs et à la Coopérative, sinon, ils les laisseraient en friche. Et finalement, si on ne conserve pas les terrains agricoles, l'agriculture n'a plus besoin d'exister! Ce n'est pas bien de dire comme ça, mais la base de la politique agricole est avant tout la base économique et le sol... »

Dans cette explication, Monsieur M nous montre que le mécanisme économique de l'agriculture japonaise qui est bloqué. Et là, l'enquêteur lui a posé la question suivante « Dans un tel contexte, qu'est-ce qu'apporteraient au niveau local l'idée de `produire et consommer localement' et de la `vente directe' ? » Pour Monsieur M, ce type d'approches « d'en bas » ne viennent pas pour autant relever l'agriculture japonaise.

« C'est le contraire. Il est impossible de relever l'agriculture japonaise par ce type d'approches d'en bas. 'Produire et consommer localement' ou la `renaissance de la communauté (community no saisei)' etc., c'est impossible. La base, c'est le calcul économique. On vous ordonne de récolter et vendre par vous-même alors que l'on vous avait empêché de les gérer par vous-même. Telle est la réalité. Donc, on n'a qu'à s'en aller... »

D'après Monsieur M, la structure politico-économique s'impose irréversiblement à l'agriculture avec une nouvelle politique de la libéralisation du marché... Et le Projet Nô-Life ne semble pas pouvoir apporter une solution décisive face à ce problème déterminé par la structure du haut. Quelle pourrait alors être la clé de la future réussite du Projet ? La réponse finale de Monsieur M est bien basée sur le principe du « bien-être public »,

518 Au Japon, on appelle ce système du soutien national au marché avec l'expression « gyaku-zaya (marge à l'inverse) ».

mais la finalité reste toujours « insaisissable » pour l'administration publique... Consensus de base sur le Projet Nô -L ife : lien social

Monsieur M reconfirme que le consensus de base sur le Projet Nô-Life est de permettre aux retraités d'avoir des « camarades (nakama) » via leur activité agricole, donc d'avoir des liens sociaux. Mais pour pouvoir continuer le Projet plus tard, quels seront les « résultats et effets » davantage requis ? Actuellement (en 2006), cette question est de plus en plus posée au sein du Centre Nô-Life, car à mesure que le nombre de stagiaires augmente depuis 2004, un financement plus important et un plus grand nombre d'employés sont requis. Il s'agit d'un besoin de justifier le Projet Nô-Life, au sein de la Municipalité de Toyota, avec plus d'éléments susceptibles de fonder le consensus sur la finalité du Projet.

Valeurs publiques de l'agriculture et de la ruralité : avec le « sens de l'intérêt public », mais le fruit est « insaisissable »...

« L'idée d'Ikigai peut-elle faire partie de celle de la multifonctionalité de l'agriculture et de la ruralité qui était présente dans la politique agricole de la Ville de Toyota depuis une dizaine d'années ? » Monsieur M a répondu à cette question en mettant l'accent sur la finalité de l'administration publique, qui n'est pas celle d'une entreprise qui suit le principe de la recherche du profit, mais celle du « sens de l'intérêt public (kôkyô no hukushi to iu kankaku) ». Cependant, il nous explique comme ci-dessous que c'est une mission extrèmement difficile à réaliser face à l'ambiguïté des « effets » que la politique agricole apporte à son public.

« Du point de vue fondamental de l'administration, la raison d'être de la politique agricole est trop difficile à prononcer. C'est insaisissable ! Il y a énormément de gens qui entourent les foyers agricoles, même si on essaie de leur donner une orientation nécéssaire, et qu'on s'efforce de les orienter, on ne voit pas les effets concrets ! Un travail aussi difficile n'existe pas ailleurs... »

L'administration est actuellement confrontée à la situation où elle doit de nouveau rendre compte du « Profit » du Projet Nô-Life par rapport à son coût financier. Ceci devrait s'effectuer par la réflexion des gestionnaires du Centre Nô-Life (BPA et CAT) et le maire de la Ville de Toyota qui justifiera la finalité du Projet.

Mode d'actions

Le mode d'actions du BDPA semble rester strictement administratif en tant qu'un agent administratif du département : certains cadres juridiques précèdent toujours les cadres de ses actions. Son exercice est ainsi dicté par les lois concernées (Loi agraire, Loi pour l'aménagement de la zone reservée pour le développement agricole) et les structures administratives supérieures (préfecture, le ministère de l'agriculture, de la pêche et de la forêt).

Position de l'adminisation basée sur le principe de l'intérêt public

Le BDPA partage plus son intérêt avec le BPA de la Municipalité de Toyota qu'avec la CAT. Ceci d'autant plus que la division des domaines de compétences est nette entre le BDPA et l'ECV qui, étant régulièrement en coopération avec la CAT, travaille directement avec les agriculteurs pour améliorer leur gestion d'exploitation. Ainsi, il n'est pas forcément attaché au principe productiviste de la modernisation agricole, à la différence de l'ECV.

Puis, dans le cadre du processus de la construction du Projet Nô-Life, il semble qu'il est le moins marqué par la divergence d'intérêts entre agents concernés en raison de sa position neutre et distanciée.

Regard neutre et distancié

Cette position rend également son propre regard neutre et distancié, à la fois sur la situation locale et la structure externe et globale.

La difficulté de définir clairement une direction dans le domaine de la politique agricole face à la compléxité des données réelles (« le domaine agricole est tellement grand... », « on ne voit la direction », « [la finalité du Projet est] insaissisable »), souvent soulignée par Monsieur M, montre bien sa position située au milieu entre la situation locale complexe et les structures externes qui l'entourent (juridique, institutionnelle, foncière, économique et politique). Et en même temps, il essaie de suivre strictement le principe administratif (exercice des missions par rapport aux lois concernées) en définissant prioritairement son rôle par rapport à ces lois, et non par rapport à la situation locale.

Et c'est ce regard neutre et distancié du BDPA qui a permis à Monsieur M de nous montrer la situation objective de l'agriculture de Toyota de son point de vue économique et foncier, en allant jusqu'à relever les grandes contradictions entre la situation réelle de l'agriculture japonaise et l'orientation de la politique agricole. Nous pourrions même considérer que, malgré le caractère personnel de ses avis, c'est sa position sociale particulière qui lui permet d'avouer une défaillance du système agricole au Japon (« cela ne peut pas marcher » ; « c'est pour cela que l'agriculture est tragique » ; « l'agriculture japonaise est dans un stade irrémédiable »)

Peu d'interaction dans sa position

Il ne se mêle pas de la relation d'interaction entre agents locaux tandis que c'était souvent le cas entre le BPA, la SCI et la CAT dans le processus de l'élaboration du Projet Nô-Life.

Il est intéressant d'ajouter, à titre anecdotique, que Monsieur M était même étonné et un peu gêné de la visite de l'enquêteur519. En effet, il ne savait pas bien comment répondre à nos questions, parce que, dans son travail, il n'a pas l'habitude de recevoir le public de manière plus ou moins imprévue et informelle, comme lorsque nous avons effectué notre entretien. Monsieur K, président du Centre Nô-Life, m'a également confirmé que cela lui est déjà souvent arrivé : « Les gens de la préfecture sont toujours comme ça. Quand on leur rend visite directement dans leur bureau, ils ont toujours l'air d'être embêté en se demandant pourquoi on vient chez eux (rire) »

Prise de position vis-à-vis du Projet Nô-Life

Pour comprendre sa position vis-à-vis du Projet Nô-Life, il faut d'abord tenir compte de la différence de son mode d'actions par rapport à la municipalité ou à la coopérative. Le BDPA a peu d'interaction, peu d'acceptation de ce qui est imprévu et ainsi peu de « bricolage » dans ses idées et actions. C'est pourquoi il n'a pas été concerné par l'histoire de la construction du Projet Nô-Life qui était marquée par une série de bricolages d'idées et d'échanges intersectoriels entre différents agents locaux concernés. En fait, il n'est impliqué dans le Projet que dans la mesure où le Projet touche ses fonctions administratives (lois, relais avec le département et l'Etat etc).

Après la fin de la procédure pour le programme de la Zone spéciale, dans la conduite du Projet Nô-Life, il n'a que des rôles minimums à jouer sans implication directe et régulière. Ainsi Monsieur M a défini sa position vis-à-vis du Centre Nô-Life comme « soutien en arrière » qui peut venir en aide en cas de problèmes.

519 C'est Monsieur K, président du Centre Nô-Life, qui nous l'a dit certain temps après que l'on avait effectué notre entretien avec Monsieur M.

Autrement, la relation de coopération entre le BDPA et le BPA de la Municipalité de Toyota nous paraît favorable, vu qu'ils partagent le même principe de représentations et d'actions qui obéit à celui de l'intérêt public.

Egalement, sa vision de l'agriculture de type Ikigai ou de la finalité du Projet Nô-Life était d'abord orientée vers la dimension sociale plutôt qu'économique, ce qui rejoint la position du BPA de la Municipalité de Toyota. (Sur ce sujet, il ne nous a pas parlé non plus de la coopérative agricole.)

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