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Relation entre Ikigai et Nô (ruralité) avec la dimension sociale et territorialeDans le Plan pour les années 2003-2007, version révisée du Plan précédent, la SCI présente un schéma mettant en relation les idées de la participation sociale (shakai sanka) et de la Création d'Ikigai et les différents types d'acteurs locaux concernés dont les acteurs ruraux (foyers et organisations agricoles) sont mentionnés (Voir l'annexe 9)458(*). Dans ce schéma, autour d'une série d'institutions coordonnées par le CPCI (Young Old Support Center, Université du Troisième âge, Ferme école des Personnes âgées, Centre des Ressources humaines âgées, Clubs des Personnes âgées etc), les thématiques de la Participation sociale et de la Création d'Ikigai met en relation en réseau sous la forme d'un cercle quatres types d'acteurs territoriaux : les « communautés locales » ; les « foyers et organisations agricoles » ; les « bénévolats et NPOs (Non Profit Organisation) » ; les « entreprises ». Ici, nous pouvons remarquer une intention, de la part de la SCI, de lier les acteurs territoriaux de différents niveaux et secteurs par l'intermédiaire des thématiques de la participation sociale et d'Ikigai autour des activités coordonnées par le CPCI. Monsieur A nous a expliqué comme ci-dessous son intention pour cette coordination intersectorielle en répondant à une question de l'enquêteur : « [L'enquêteur : Quelles sont les autres structures extérieures avec lesquelles vous êtes en collaboration depuis l'établissement du Comité ?] Euh, dès le départ, la thématique que l'on a choisie pour démarrer le Comité était la `Création d'Ikigai par le biais du travail (Shûrô ni yoru Ikigai zukuri)'. C'est le CPCI. C'était de ce point de vue-là que l'on a intégré des employés de Hellowork459(*) chargés des personnes âgées qui étaient dans la Direction de la Politique de l'Industrie et du Travail (sangyô- rôsei ka) (de la Municipalité), et le Centre pour les Ressources humaines âgées. On a intégré ces deux organismes dans notre comité du point de vue d'Ikigai des personnes âgées en tant qu'un centre doté de la fonction du centre dans son ensemble. » Et le Projet Nô-Life, qui s'organise en collaboration entre la Municipalité de Toyota et la CAT, se situe, d'après Madame S, dans la partie indiquant le rapport avec « les foyers et organisations agricoles » et les mesures de la Création d'Ikigai. Puis, l'explication donnée dans le Plan sur ce schéma, en redéfinissant les contextes et les objectifs de l'application des mesures, met l'accent sur les liens sociaux au niveau territorial. « Vu la tendance d'affaiblissement des communautés locales liée à la mobilité démographique, le changement de la structure des foyers, la diversification de Life Style, il devient important d'avoir des objectifs de la vie et Ikigai pour que chacun puisse passer sa vie comme il le souhaite en maintenant une relation avec la société. A cet effet, nous commençons la promotion de l'éducation permanente tout en intégrant les niveaux locaux, et nos soutiens au travail dans lequel les personnes âgées peuvent mettre en valeur leurs techniques et compétences qu'ils avaient acquis au cours de leur carrière (professionnelle). Puis, nous nous efforçons à assurer les diverses occasions et lieux qui permetteront aux personnes âgées de valoriser leurs énergies comme les activités bénévoles, récréatives et l'échange intergénérationnel460(*).» Là, on peut voir une intention manifeste de la SCI de mettre en relation des liens sociaux et leurs thématiques de la participation sociale et d'Ikigai tout en mettant l'accent sur le problème d'un affaiblissement de liens sociaux de type « communautaire » et « locaux », du à l'individualisation et l'urbanisation des modes de vie de la population locale comme indiquent les termes suivants « mobilié démographique », le « changement de la structure des foyers » et la « diversification de Life Style ». Pourquoi une telle mise en relation ? : Réponses de Madame SPourquoi alors un tel raisonnement autour de l'idée d'Ikigai ? Madame S explique le principe de sa mission comme ci-dessous en définissant d'abord l'idée d'Ikigai comme étant avant tout « subjective » et pouvant différer chez les uns ches les autres : « ..., en fait, Ikigai n'a pas de limite d'âges, dès la naissance jusqu'à la mort, chacun peut l'avoir en fonction de sa période de vie. Il peut y en avoir 10 chez 10 personnes, 100 chez 100 personnes. C'est une histoire très subjective, je pense. La question est : comment l'administration peut s'y impliquer ? De notre part, on se spécialise aux personnes qui vont être âgées et qui sont âgées d'à peu près 55 ans jusqu'à leur fin de la vie, ce qui peut durer à peu près 40 ans. (...) On leur propose un menu et après, c'est à chacun de trouver un Ikigai ou pas. On présente une telle chose, et le choix de l'utiliser ou de ne pas l'utiliser, c'est à la liberté de chaque citoyen. Puis, ce dont l'on s'occupe, ce n'est pas des loisirs personnels - c'est à chacun d'en chercher - mais, ce que l'on appelle la `contribution territoriale ou sociale', ou la `participation sociale', de faire trouver Ikigai [à chacun], en ayant un lien avec la société ou le territoire où il habite. C'est par là que l'administration pourrait apporter une aide, je pense. » Puis, elle a expliqué des traits spécifiques de la population de la Ville de Toyota et son vieillissement en abordant le problème de la retraite massive de la génération du baby-boom (dankai no sedai) et l'histoire urbaine de Toyota marquée par l'essor industriel avec l'Automobile Toyota depuis les années 65-75 : « (...) Quant au problème de 2007 où la génération du baby-boom née après 1947 va massivement prendre leur retraite, c'est sois disant `happy retire'. Cependant, avec la prolongation d'emploi lié au problème de la pension461(*), cela ne serait pas si massif et brutal que l'on le croyait. Mais vers 2012 où ils auront 65 ans, il y aura des problèmes quelques part. Le changement sera un peu plus doux plutôt que brutal. De toute façon, c'est la même chose, je pense. (...) Il s'agit du système urbain de la Ville de Toyota, l'impact de l'Automobile Toyota vers les années 65 - 75 est grand. La ville a grandi, physiquement et démographiquement. Bien entendu, il y a des fusions des collectivités, non celle de Heisei mais... (...). Vers le début des années 65 - 75, l'époque où l'Automobile Toyota s'est développée, il y a eu de plus en plus d'arrivants de l'extérieur de la ville ou plutôt du département. Et à cette époque, la génération du baby-boom choisit, pour leur travail après l'école, l'Automobile Toyota ou ses filiales. Ces gens-là, qui ne sont pas originaires de Toyota au niveau ancestral, disons que ce sont des `immigrants de la première génération'. Il se marient et créent leur famille et leur maison ici. C'est ces gens-là qui vont être à la retraite. Bien sûr, avec le problème de 2007, le babyboom est important au niveau national, mais à Toyota, c'est particulièrement significatif. Puis, comment puis-je dire, pour ces gens-là qui ont leur maison, mais n'ont pas de rizière ni de champs chez eux dont ils pourront s'occuper après leur retraite, qu'est-ce qu'ils vont faire après avoir quitté leur entreprise ? De le départ, ils n'ont pas de lien d'enfance entre eux, et sont devenus citoyens de Toyota après être adultes. Leur lien territorial est donc très faible. On dit, plus on est « homme d'entreprise (kaisha ningen) », plus cela a tendance à être le cas. C'est par rapport à ces gens là qu'il y a le rapport avec les mesures d'Ikigai, c'est pareil dans le cas de Nô-Life. Le président K disait que, il y en a beaucoup qui sont originaires de Kyûshû qui sont deuxième ou troisième fils de fermes. En fait, ce sont des gens qui ne sont pas totalement urbains. » De ces explications, nous pouvons comprendre le poids de la dimension historique et spécifique à la Ville de Toyota, concernant la relation entre l'idée d'Ikigai et la ruralité dans ces représentations que Madame S nous a exprimé ci-dessus par rapport au problème du vieillissement. Il s'agit d'un « déracinement », oserait-on dire, de la population toyotaienne de la génération baby-boom à majorité ouvrière et non-originaire de cette région462(*). Pourtant, ce déracinement, il ne faudrait pas le confondre avec la prolétarisation des paysans des années 60-70, à savoir la fameuse émigration saisonnière des paysans japonais qui subissaient des conditions de vie extrèmement défavorables dans les grandes villes, appellée comme « dekasegi ». En effet, dans le cas de Toyota que nous étudions ici, il s'agit, en général, de problèmes de la « retraite heureuse ». Cela comme Madame S nous l'a évoqué avec le mot `happy retire', de manière quelque peu ironique, au début de ces explications citées ci-dessus. Ainsi, la question d'Ikigai de la population de la Ville de Toyota n'est pas direcrement liée à celle du déracinement des paysans prolétarisés, mais plutôt à la faiblesse du lien social et territorial au sein d'une population locale qui a pu bénéficier d'un grand essor économique réalisé dans la période de la Haute croissance. * 458 Section Bien-être et Vieillissement de la Direction Santé et Bien-être, 2003 : 61. * 459 Le Hellowork est le nom d'un agence public pour l'emploi au Japon comme l'ANPE en France. * 460 Ibid. * 461 Il s'agit de la réforme politique actuelle de la sécurité sociale au Japon. Le début du paiement des pensions sera progressivement repoussé de 60 ans à 65 ans. L'accomplissement de cette réforme est prévue pour 2025. * 462 Nous avons vu dans le chapire 1 le phénomène de l'émigration rurale massive vers la Ville de Toyota accélérée entre 1965 et 1975 depuis toute l'archipel du Japon. |