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La pin-up et ses filles: histoire d'un archétype érotique

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par Camille Favre
Université Toulouse Le Mirail - Master 2 Histoire des civilisations modernes et contemporaines 2007
  

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2.1 Le goût masculin... normalisé.

Dans ce cadre, l'imaginaire érotique que véhiculent nos pin-up reste nécessairement imprégné d'un regard masculin. Le mythe de la pin-up se réduit alors à une femme assez déshabillée pour exciter, émoustiller le mâle ; elle ne sert qu'à aguicher. Mais la pin-up n'est pas transgression, n'est pas provocation. Elle se tient dans la norme esthétique et sexuelle. Il est évident que par la pose, l'attitude, la pin-up s'adresse à la sexualité masculine, flattée sous toutes ses formes. Le voyeur trouve son compte à travers une imagerie suggestive, il cherche ce qui lui manque dans la vie réelle.

Elle est aussi la partenaire parfaite car éternellement muette, son corps ne transpire pas, elle frôle la perfection, ce que permet le graphisme. Elle n'a pas de désirs propres, elle n'existe que pour et par le désir qu'elle suscite. On peut voir la pin-up comme une représentation standard de la beauté et de la sexualité puisqu'elle est conçue (et dessinée) pour être belle et excitante pour tous les hommes quelles que soient leurs cultures, leurs classes sociales. L'admirateur, séduit comme tous les autres hommes se sent donc dans la norme ; il est déculpabilisé par rapport aux codes moraux d'une société qui lui propose des pin-up comme modèle et stéréotype. Les propos d'Aslan, dessinateur français de pin-up, démontrent cette volonté de norme : « j'essaie de peindre des femmes répondant à tous les canons universels ; flattant tous les goûts, éveillant tous les appétits, fantastiques ou fétichistes15(*)». Ce processus de déculpabilisation est renforcé par le fait que la pin-up est innocente, elle ne possède pas une sexualité agressive qui pourrait rivaliser avec une sexualité virile et la mettre en péril.

Produite en masse, destinée à une large audience puisque son érotisme s'adresse à tous, elle induit une uniformisation du désir en raison de sa standardisation. Elle règne dans tous les lieux de socialisation masculine : lieux de travail, rue, presse. Les hommes placardent sur les murs les filles qui éveillent le plus leurs fantasmes dans un cadre « raisonnable ». A ce titre, on peut remarquer la série des pin-up institutrices (Ill. 4, 5), fantasme de la maîtresse, ou celle des secrétaires (Ill. 6) ou des soubrettes peu vêtues (Ill. 7, 8). Les pin-up incarnent, dans leur féminité idéalisée une sorte de compromis significatif, dont la rareté fait le prix : modernes, car elles répondent aux exigences de la jambe interminable, du ventre sans bourrelet, du sein haut et de la bouche pulpeuse, mais traditionnelles, car elles conservent la générosité de certaines rondeurs, référence à la maternité.

Il y a lieu de remarquer que l'on retrouve ce même imaginaire érotique lorsque les pin-up sont dessinées par des femmes. Ainsi le regard n'est pas un simple pouvoir universel et abstrait d'objectivation, comme le veut Sartre ; c'est un pouvoir symbolique, comme le souligne Pierre Bourdieu, dont l'efficacité dépend de la position relative de celui qui perçoit et de celui qui est perçu, et du degré auquel les schèmes de perception et d'appréciation mis en oeuvre sont connus et reconnus par celui auquel ils s'appliquent16(*). Les représentations de la sexualité seraient alors elles aussi empreintes de l'habitus, loi sociale incorporée. Le langage de l'imaginaire ne doit pas faire oublier que le principe de vision dominant (avec les pin-up : hétéronorme et érotisme pour les hommes) n'est pas une simple représentation mentale, un fantasme, une idéologie, mais un système de structures durablement inscrites dans les choses et dans les corps. Les images érotiques alors s'adressent aux hommes et aux femmes conjointement, attisant le désir des hommes et suggèrent aux femmes une conduite séductrice.

* 15 ASLAN, Aslan, Paris, Les Humanoïdes Associés, 1979, p.21.

* 16 BOURDIEU Pierre, La domination masculine, Paris, Seuil, 1998, p.93.

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