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La pin-up et ses filles: histoire d'un archétype érotique

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par Camille Favre
Université Toulouse Le Mirail - Master 2 Histoire des civilisations modernes et contemporaines 2007
  

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2.3 Le regard masculin bienveillant.

Claude Cahun (1894-1954) est l'une des premières artistes à travailler sur le travestisme et s'interroge sur le genre masculin et féminin. L'érotisme des poses de ses modèles est un trait frappant de ces travaux. Ses autoportraits, qu'elle apparaisse vêtue en femme ou en homme, rendent compte de la complexité de la sexualité féminine, pour le spectateur comme pour le modèle. En mettant en scène la difficulté à distinguer le désir d'identification dans le regard que portent les femmes sur les autres femmes, le travail de Claude Cahun annonce certains débats épineux des féministes concernant plaisir visuel et sexuel. Ce plaisir visuel provient-il du fait que les femmes désirent être le modèle ou du fait qu'elles désirent désirer le modèle, comme l'écrit Mary Ann Doane227(*) ? Les femmes hétérosexuelles qui regardent des images de femmes sexuellement attirantes se travestissent-elles lorsqu'elles s'identifient à elles ? Eprouvent-elles momentanément une attirance, des pulsions ou émotions homosexuelles? Où est-ce la distance, ou l'intimité qu'elles ressentent vis-à-vis de l'image à laquelle elles se comparent qui les tourmente ou leur donne du plaisir ? C'est au milieu de toutes ces questions complexes que la théorie psychanalytique féministe a émergé dans les années 1970.

Les oeuvres de Pauline Boty (1938-1966) s'inscrivent dans la lignée de ces réflexions. Ces travaux parlent des questions d'identification et de plaisir, qui sont au coeur de la réflexion féministe dans les décennies soixante-dix. Le premier élément228(*) (Ill. 222) de son diptyque est composé de portraits (Lénine, Einstein, Elvis Presley) et d'objets qui évoquent le pouvoir masculin : l'aviation, l'architecture, la sculpture classique, le sport, la musique pop, la littérature, la politique, les sciences. De ces images tirées du « Grand Art » ou de la photographie de presse, la seule femme présente est Jackie Kennedy, la « femme d'exception », représentée alors qu'elle se tourne vers son mari au moment de la fusillade de Dallas. Ces icônes de la culture patriarcales sont juxtaposées au second tableau229(*), représentant une sorte d'érotisme féminin libéré (Ill. 223). Mais la ressemblance avec les photographies des magazines pour hommes, la composition verticale « phallique » et le parc de type XVIIIe siècle à l'arrière plan semblent confirmer la domination masculine sur le corps féminin représentée dans le premier tableau. Les oeuvres de cette artiste sont alors révélatrices de ce que Bourdieu nomme « habitus ». En effet, malgré sa volonté, l'artiste n'arrive pas à ce défaire du regard masculin qu'elle a incorporé, sur le corps féminin érotique.

Cosey Fanni Tutti (1951- ) travaille, dans les années soixante-dix, pendant deux ans au projet  Prostitution imaginé par COUM Transmissions, dont elle est membre fondatrice avec Genesis P. Orridge. Cosey Fanni Tutti se présente en tant que modèle auprès de producteurs de films et de magazines pornographiques, sans rien dire de son projet personnel. Les images qui en ont résulté, sont présentées dans l'exposition  Prostitution à l'Institute of Contemporary Arts de Londres, en 1976. Les photographies en noir en blanc ou en couleurs de Cosey Fanni Tutti posant pour l'industrie pornographique, seule ou avec des hommes et des femmes, auraient dû être accrochées sur les murs de la galerie dans leur format original de pages de magazine (Ill. 221). Mais une commission de censure oblige les organisateurs à les présenter une par une dans un album. Le projet comporte aussi des performances et des débats sur le sexe et la prostitution, avec la participation de femmes travaillant dans l'industrie du sexe, d'artistes et de membres du public. Par ce travail, l'artiste nous pousse à réfléchir sur la normalisation de la sexualité, la codification des rôles et conduites sexuelles dans l'industrie pornographique. De même elle interroge l'utilisation du corps féminin comme objet à consommer et la prégnance dans les représentations érotiques du regard masculin.

* 227 DOANE Mary Ann, The Desire to desire : The woman's film of the 1940s, Bloomington, Indiana University Press, 1987.

* 228 BOTY Pauline, It's a Man's World I, 1963, 122 x 91cm, huile sur toile, collage.

* 229 BOTY Pauline, It's a Man's World II, 1963-1965, 122 x 122 cm, huile sur toile.

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