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Dynamiques socio-économiques dans les sites à  risque de Douala et ses implications sur l'environnement social

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par Valentin NGOUYAMSA
Université de Douala, Cameroun - diplome d'étude approfondie 2006
  

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VI-5-STRATEGIES DE GESTION DES RISQUES PAR LES POPULATIONS

Dans le but de réduire le risque, les populations définissent des stratégies qui vont de l'action individuelle à l'action collective

VI-5-1- ACTIONS NDIVIDUELLES

Sur le plan individuel, la gestion des risques dépend de la perception que l'individu a de ces risques. Les individus qui n'ont pas une grande considération du danger lié à leur environnement ne sont pas motivés par le désir de réduire le risque. Pour eux, le risque est mineur et il n'est pas important « de faire quoi que ce soit ». Ainsi, pour cette catégorie de personnes, balayer la cour, la maison est insuffisant. Une femme rencontrée dans un ménage à Maképé maturité (Mme MONIQUE, vendeuse de beignet Maképé Maturité) affirme :

 Il n y a pas de risque ici et vous voulez que je dise quoi ? S'il y avait un risque, je trouverai un moyen de le gérer selon les ressources que j'ai. Pour l'instant, je m'occupe de la propreté de ma maison et des alentours que je balaye et que j'entretien chaque fois comme dans toute maison 

.

De cette affirmation, la gestion des risques consiste donc à balayer la cour et la maison chaque jour car c'est une pratique commune à tous les ménages ; même où le risque n'existe même pas.

Par contre, ceux qui perçoivent leur site comme à risque, (particulièrement ceux qui ont une bonne instruction) individuellement mettent tout en jeux pour minimiser les risques. Pendant la saison pluvieuse, et étant donné les inondations dans les maisons, les lits sont suspendus sur la toiture. Après la fin de la pluie et après évacuation des eaux, ils les redescendent. Pour minimiser les risques de pollution, chaque individu creuse autour de sa maison des rigoles qui laissent traverser les déchets. Mais ces rigoles généralement se remplissent dès la première pluie ou même juste quelques jours après. Ceci parce qu'elles ne sont pas faites de façon à faciliter l'évacuation. Pour contrarier les risques sanitaires, les moustiquaires sont utilisées par certaines personnes. Mais le risque reste puisqu'en journée, les moustiques sont présents. L'action individuelle trouve ainsi ses limites comme affirme le chef de quartier de Maképé Maturité, M. BELLA :

 Les mesures que prennent mes populations individuellement pour gérer les dangers sont insuffisants et même inefficaces. Elles n'ont ni moyens matériels, ni moyens financiers, ni moyens intellectuels. Elles se contentent des mesures traditionnelles qui produisent elles-mêmes des risques plus qu'elles ne gèrent.

Les actions individuelles dans la gestion des risques trouvent leurs limites par le manque de moyens matériel et financier. Les risques sont grands, mais les moyens disponibles pour les gérer sont insuffisants. Pour pallier à cette situation, la population a engendré des actions collectives qui vont de la formation en association et des ONG de lutte contre la pollution et l'insalubrité.

VI-5-2- ACTIONS COLLECTIVES

Compte tenu de l'ignorance, de l'incivisme et du non respect des lois et réglementations des populations en matière de construction et de propriété, les individus se constituent en police de l'environnement. Police de l'environnement de proximité qui se changera entre autres de l'aspect organisation et juridique des espaces habités conformément aux textes et lois en vigueur. En outres, diverses associations et ONG sont crées dans les sites enquêtées dont le but principal est la gestion des risques. Les plus en vue sont l'ASMA à Maképé Maturité et l'ASSIC à Maképé Missoké. Ces associations obéissent à une structure bien déterminée :

Un président qui est un conseiller municipal

Un conseiller des travaux qui est le chef de quartier

Un directeur des travaux qui est un membre influent de la zone

Les contrôleurs des travaux et les membres simples

Dans chaque bloc, le comité installe un autre comité de suivi d'hygiène et de salubrité. Ce comité est chargé de contrôler et surveiller la propreté dans chaque bloc. En outre, il recense les points d'ombre qui nécessitent des travaux particuliers et les soumettent au comité exécutif.

Ces associations ont aussi un but éducatif. Elles apprennent aux populations à creuser les latrines loin des puits et de les couvrir. Des séances de formation et de sensibilisation sont souvent organisées à ce sujet. Pour pallier au risque de cholera, ces associations et ONG formulent des projets qu'ils soumettent soit aux pouvoirs publics, soit aux bailleurs de fond pour une réalisation. Les deux forages et une borne fontaine présente dans la zone de Maképé Maturité témoignent du dynamisme de ces associations.

Un autre aspect de l'action collective est l'effet des membres des associations à diriger les eaux stagnantes entre les habitations vers la rivière Ngoné par des canalisations et des drainages. Avec le concours de la population, ils remplissent des sacs de sable qu'ils mettent dans le bas fonds des rivières et certains coins sensibles pour éviter le risque d'érosion. Ils créent aussi des pistes entre les maisons, aménageant les abords des rivières. L'action collective s'avère ainsi être efficace au vu du « succès » qu'elle connaît. Mais beaucoup de problèmes se posent qui constituent des freins à cette action. L'on a souvent affirmé et avec raison que tout médaille a son revers. En d'autres termes, toute chose quelque soit sa positivité possède un certain nombre d'éléments susceptibles d'entraver cette positivité. Pour connaître les difficultés qui freinent les actions menées par les associations, nous avons rencontré les membres dans un entretien libre, entretien au cours duquel ils nous ont fait part de leurs difficultés. Entre autres, ils ont mis un accent particulier sur ceux d'ordre matériel.

- Ils ne disposent d'aucun moyen financier de base et d'aucune structure d'encadrement, de sensibilisation. Les membres de l'équipe sont tous des volontaires qui puisent parfois des fonds personnels pour mener à bien les travaux qu'ils se sont assignés.

- L'accès dans certains coins est difficile à cause des constructions anarchiques

- Le matériel utilisé pour creuser les rigoles, défricher les abords des rivières est d'une vétusté sans pareille et même insuffisant. Ce matériel est à 90% de cas inadapté. HENRI (membre de l'ASMA) affirme :

 Nous sommes parfois obligés d'arrêter les travaux à cause de l'absence du matériel. Avant lorsque la mairie s'occupait un peu de nous, nous menions nos actions au moins deux fois par mois parce que nous étions motivés. Mais aujourd'hui, nous n'avons presque plus de matériel de travail. Le peu que nous détenons ne permet pas à tous les membres de travailler si bien qu'il est difficile pour nous de mener nos actions ne serait-ce qu'une fois par mois.  (HENRI, Maképé Missoké)

Le manque de matériel entraîne une lenteur dans la gestion des risques par la population. Les conditions dictées par les moyens matériels ont un impact sur le moral des populations. Parlant justement des populations, celles-ci constituent aussi un frein à l'action collective. Toute association s'adresse d'abord à un groupe d'hommes. Ces hommes sont les supports dynamiques et dynamisants de l'action à entreprendre. A chaque type de groupe correspondra une certaine réponse aux sollicitations. La réponse peut être positive ou négative. Malgré la « positivité » de ces associations, il apparaît toujours au sein du groupe un certain nombre de réactions incompatibles avec les buts visés. On ne peut pas cependant parler de rejet radical.

Dans le cas des populations des zones enquêtées, les hommes n'adhèrent pas massivement à ces associations. C'est le refus, un rejet de leur part. Certaines personnes nous ont fait connaître qu'ils ne comprennent pas la raison d'être de ces associations de gestion des risques. Ils expliquent leurs positions en mettant en exergue le fait que malgré leurs actions, rien ne change dans leur milieu. En outre, ils ont peur de voir détruire un de leurs biens sous prétexte de l'hygiène et salubrité. C'est le sens de cette affirmation d'un habitant de Maképé Maturé, M. ALBERT : « Ces associations là ne sont pas du tout bien. L'année dernière, elles ont détruits ma cuisine et une partie de ma maison sous prétexte qu'elles empêchent le passage d'eau. Il en est de même de plusieurs autres habitations. Et vous voulez que j'adhère à cette folie ? ». L'action collective dans la gestion des risques en tant que folie éprouve des difficultés qui limitent ses actions. Les membres qui s'activent dans ces initiatives sont ceux qui ont longtemps été sensibilisés ou ceux qui ont un niveau d'instruction élevé.

Au terme de ce chapitre, les dynamiques socio-économiques en milieu à risque produisent des effets incertains. Des effets qui se traduisent par la montée des maladies microbiennes, des pathologies aiguës, des sinistres et des crises psychologiques. Ces risques ont des effets sur la scolarisation des enfants sur la qualité et la quantité, le nombre de repas journalier. Les stratégies de gestion des risques trouvent toutes leurs limites face à une population analphabète et sans éducation en matière d'insalubrité.

CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE

Trois chapitres ont constitué cette partie : le premier traitant d'abord des mobiles des dynamiques socio-économiques en milieu à risque. Les acteurs dynamiques des sites de Maképé Missoké et maturité expliquent leur présence dans ces zones comme résultant des liens qui se nouent dans les mariages obligeant certains à rejoindre soit leurs femmes, soit leurs maris. En outre la fréquentation des zones à risque est surtout la conséquence de la pauvreté des enquêtés, de leurs faibles revenus et la difficulté de logement. Les individus luttent pour s'affirmer, dominer. Ils sont à la quête du mieux être et d'une intégration économique. Ensuite analyser les représentations sociales des risques. Il apparaît d'une manière générale que les populations ont une perception positive de leur milieu. Elles n'assimilent pas leur milieu à un danger. Mais certaines variables ont permis de comprendre de manière spécifique la différence dans la perception sur l'environnement immédiat. L'instruction est le principal déterminant de la perception négative de l'environnement immédiat. Les individus instruits assimilent leur milieu à un danger. Ceci s'explique par le fait qu'une perception des dangers dans un milieu dépend largement de la compréhension de leur processus, laquelle est redevable d'un minimum d'instruction. Les individus qui ont mis long dans les sites ne perçoivent pas à priori les risques comme un danger. Plus les individus expérimentent un cadre de vie insalubre, mieux ils s'y habituent et ignorent les dangers. Sous l'effet de la crise économique, les individus ravalent la prétendue urgence des problèmes liés à l'environnement immédiat au rang de l'accessoire. La désappropriation du cadre de vie par les populations au profit du pouvoir apparaît à la fois comme une transaction mentale et une stratégie en ce temps de crise.

Le second chapitre a traité des conditions de vie de ces populations et les stratégies de survie. Il apparaît que les populations vivent dans des conditions déplorables. Certains ménages sont partagés par plus de dix personnes, les maisons sont pour la plupart en carabottes et les bois utilisés ne sont pas au préalable traités, les puits non traités sont les principales sources de ravitaillement en eau. Pour survivre, ces populations développent des stratégies diverses qui se traduisent par la pratique associative, le métier de motos taxi, la vente de sable, le petit commerce et l'élevage.

Le troisième chapitre quand à lui a permis d'analyser l'émergence des risques comme provenant à la fois de la nature et de la fabrication humaine. En outre les dynamiques socio-économiques dans les sites à risques produisent des effets négatifs tant sur le plan social économique que psychologique. Pour « contrarier » les risques, des actions sont souvent initiées par les populations. Ces actions sont d'ordre individuel et collectif, mais trouvent toutes leurs limites face à une population analphabète et sans éducation en matière d'insalubrité, ce qui renforce davantage les incidences dans les ménages.

RECOMMANDATIONS

La désappropriation du cadre de vie par les populations au profit du pouvoir a un impact doublement négatif sur la viabilité de celui-ci. D'une part, les populations en percevant les pouvoirs publics comme les responsables de la protection de ce cadre de vie s'émancipent des attitudes et des comportements qui étaient jusque-là garants d'une salubrité du cadre de vie. D'autre part, les pouvoirs publics, pris dans l'étau des difficultés économiques et partisans d'un moins d'état, ne peuvent pas matériellement prendre en charge la gestion du cadre de vie. Il en résulte un vide dans la gestion du cadre de vie. Un vide qui non seulement génère les problèmes humains, mais aussi urbains maximisant les risques au sein de cet espace urbain. La solution aux problèmes de recours aux sites à risque est probablement dans une réappropriation du cadre de vie par la population. Mais pour donner à cette réappropriation toutes chances de succès, les pouvoirs publics sont triplement interpellés. Ils doivent d'abord améliorer les conditions de vie des populations pour que celles-ci ne soient pas prises dans l'impitoyable logique des impératifs à court terme. L'amélioration des habitations et des services associés, l'amélioration et l'éradication des sites à risque ne peuvent résoudre le problème. Ces solutions ne tiennent pas compte des causes fondamentales dont l'une des principales est la pauvreté matérielle et financière. Il est important d'examiner la question des moyens d'existence des habitants des taudis et des pauvres en général et d'aller au-delà des approches traditionnelles qui ont tendance à se concentrer sur l'amélioration des habitations, de l'infrastructure et des conditions de l'environnement physique. Cela signifie donc soutenir le développement des activités informelles urbaines, liant la construction des logements sociaux à la génération des revenus. Assurer un accès facile aux emplois en mettant des moyens à la disposition des pauvres et des politiques pour les sites des établissements des groupes à faible revenu. Comme deuxième interpellation, les pouvoirs publics doivent initier des campagnes de sensibilisation et d'éducation des populations sur la salubrité du cadre de vie et bien-être de la population. Enfin, ils doivent participer à une co-gestion du cadre de vie, il faut une éthique de l'environnement dès lors veiller à l'application des règlements en matière de traitement des déchets industriels et d'implantation des industries. Une volonté politique est donc à la base de toute gestion du cadre de vie. Toutefois, les habitants eux-mêmes doivent être des acteurs majeurs de ces initiatives et actions à travers une approche participative.

Au niveau des zones rurales, l'état doit développer des stratégies de développement, notamment les réalisations des projets capables de retenir les migrations urbaines. Renforcer les initiatives paysannes par des subventions dans les domaines agricoles, de la pêche, de la chasse etc.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard