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Le management interculturel chez Bookoff France

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par David VANDEPONTSEELE
Université de Paris 7 - Master de recherche en étude japonaise 2008
  

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3.3.2 Accordent-ils l'attention aux personnes ou aux postes à pourvoir ?

On peut identifier des différences culturelles dans l'attention accordée à l'efficacité et aux compétences de la personne ou à la confiance que l'on pense pouvoir avoir en cette personne. Dans certaines cultures (nord américaine notamment), la relation interpersonnelle existe dès que les membres coopèrent pour réaliser un projet en commun. La recherche de l'efficacité est ce qui réunit ces personnes. Dans ce cas, on parlera de cultures qui accordent leur attention aux tâches et qui accorderont donc en premier lieu l'attention aux objectifs et aux compétences des partenaires. Dans d'autres cultures (asiatique et du Moyen-Orient), une relation de confiance est nécessaire avant de commencer le travail pour s'assurer de la loyauté de ses partenaires. Dans ces cultures qui accordent leur attention aux personnes, l'attention est accordée en premier lieu à la qualité des relations avec les autres acteurs (collègues et clients)106(*) .

Cette dimension d'attention aux personnes joue un grand rôle dans le recrutement des employés de BOOKOFF France. Pour preuve, aux débuts de l'entreprise en France, les recrutements se limitèrent à des employés bilingues français-japonais ou simplement des employés de nationalité japonaise. Ce n'est que récemment (mi 2008) que les premiers employés français, sans lien avec le Japon, ont été recrutés.

Il est cependant à noter que l'on peut retrouver chez ces employés les caractéristiques qu'un employeur japonais attend de ses employés, comme la persévérance, l'obéissance, la discipline, la loyauté, la flexibilité et l'esprit d'équipe107(*). Le travail demandé n'exigeant pas spécialement un savoir-faire très particulier, le recrutement s'effectue plus au degré d'adhésion à la culture du pays qu'au poste à pourvoir108(*). Monsieur A nous a d'ailleurs exprimé son point de vue dans son interview. Pour lui, les responsables, que ce soit à la maison mère ou en France, n'ont pas une culture générale très développée, ni une connaissance particulière du marché du livre ou de l'édition, mais ils défendent une certaine idée du travail et vouent une fidélité sans pareille à l'entreprise.

Cette caractéristique semble particulièrement décevoir les employés français dans le système de promotion, car il inhibe les possibilités d'innover. Les employés bénéficiant des promotions n'étant choisis que parmi ceux qui ont la même manière de penser que les responsables déjà en place. Le système ne sera donc finalement pas remis en question, ce qui remet réellement en cause l'approche bottom-up (bas en haut) du processus décisionnel que BOOKOFF affirme utiliser.

Afin de juger de la possible adhésion aux valeurs de l'entreprises, les entretiens avec les postulants de nationalité française se déroulent avec le directeur de BOOKOFF France (Yoshinaga Toshihiko, Japonais) et le gérant de la boutique BOOKOFF Quatre Septembre (Jean-Philippe Meneboo, Français). Pour les postulants de nationalité japonaise, les entretiens se font avec le directeur de la boutique française et son subalterne (X, Français). Lors de ces entretiens, lorsqu'ils n'employaient que des bilingues, il était coutume de faire passer un test d'aptitude de japonais aux employés francophones. D'après Mademoiselle A, la raison invoquée était que les employés devaient être capables de communiquer avec Yoshinaga Toshihiko, qui, comme précisé plus haut, ne parle que japonais.

Cette caractéristique est commune à beaucoup de responsables d'entreprises japonaises expatriés qui se retrouvent catapultés dans un pays dont ils n'ont qu'une connaissance très pauvre de la langue et de la culture locale. Ils ont tendance à prendre comme politique que si les employés ne sont pas capables de comprendre ce qu'ils disent, ils n'ont qu'à apprendre le japonais109(*). Cette attitude pourra être cause de manque de légitimité du chef vis-à-vis des employés.

Les responsables privilégiaient donc des employés qui ont une connaissance développée de la culture japonaise et une adhésion à la culture de BOOKOFF, plus qu'une connaissance du terrain. Cette valorisation des aptitudes sur les capacités est l'objet de vives critiques de la part des employés qui remettent en question la légitimité de leurs supérieurs, comme nous l'a décrit Monsieur A.

Le cas le plus révélateur nous a été exposé par Madame A, c'est celui de X (présenté dans le point 2.7), lequel est entré avant Jean Philipe Meneboo dans l'entreprise, mais qui n'adhérait pas particulièrement à leur façon de faire. Aujourd'hui Jean-Philippe Meneboo est responsable de la boutique BOOKOFF Quatre Septembre et X est son subordonné. Cet exemple décrit bien la tendance de l'organisation à préférer les employés qui adhèrent tout à fait à la culture de l'entreprise. Jean Philipe Meneboo s'est en effet toujours montré gardien des pratiques de BOOKOFF en, par exemple, s'opposant fermement à l'arrêt du BOOKOFF shôwa. Il nous a été rapporté lors d'une interview que son opinion par rapport aux congés payés était qu'il ne comprenait pas « comment on peut payer des gens à ne pas travailler ».

Le facteur de la confiance continue de jouer un rôle de nos jours car les employeurs continuent de recruter des personnes qui ont le potentiel de s'adapter, pour l'embauche et la promotion. C'est ce qui nous a été prouvé dans l'interview de Mademoiselle A, qui jouit de liens très forts avec la culture japonaise, qui nous a confié qu'elle avait parfois accès à des informations avant les autres mais qu'elle a ordre de garder pour elle, «  parce qu'ils me font confiance110(*) ».

Comme on peut le penser, ce système peut avoir des répercussions négatives sur les non-Japonais qui seront discriminés lors des promotions pour les postes à hautes responsabilités. Les personnes ne partageant pas la culture japonaise ou n'adhérant pas totalement à l'ensemble de la culture d'entreprise de BOOKOFF, ce qui seraient donc source autant de conflits que d'innovations, n'ont aucune chance d'avoir une quelconque influence à l'avenir.

Avant de promouvoir un employé à un poste à responsabilités, un stage de 10 jours au Japon, subventionné par l'entreprise, est requis. Pendant ce stage, l'employé peut approfondir ses connaissances sur les pratiques de management et disciplinaires de la maison mère et par la suite les appliquer dans le pays étranger et ainsi promouvoir la culture de l'entreprise et ses pratiques. Mademoiselle A a été choisie pour effectuer ce stage. Elle nous a expliqué qu'elle a commencé par travailler dans une usine qui centralise les achats de BOOKOFF et puis quelques jours dans un magasin. Elle n'avait pas le droit pendant ces 10 jours à prendre contact avec la France car c'était considéré comme impoli.

Cette méthode est très souvent utilisée par les entreprises japonaises pour à la fois donner un entraînement intensif à leurs employés qu'ils comptent promouvoir, mais aussi immerger l'employé totalement dans la culture de l'entreprise111(*), comme nous allons le développer dans le point suivant.

* 106 Kluckholn F., Strodtbeck F., Variations in value orientations, San Fransisco, CA : Row Peterson 1961

* 107 Nishiyama \u-30337\u-30337ê¼éRR, Kazuo\u21644\u21644aïvv Op.Cit.

* 108 Equilbey, Noël Op.Cit.

* 109 Nishiyama \u-30337\u-30337ê¼\u23665\u23665éR, Kazuo\u21644\u21644a\u22827\u22827ïv. Op.Cit.

* 110 Bien que l'interview de Monsieur A. se soit déroulé en français, les mots exacts étaient en japonais : \u20449\u20449êMpp\u12373\u12428êÄEcentscents\u12427é(c)é(c)çBçB(Shinyô sareteiru kara)

* 111 Nishiyama \u-30337\u-30337ê¼\u23665\u23665éR, Kazuo\u21644\u21644a\u22827\u22827ïvOp.Cit.

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