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Mise en place des structures et problématique fonctionnelle de l'école haà¯tienne

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par Kathia RIDORà‰
Université adventiste d'Haà¯ti -  Licence en science de l'éducation 2009
  

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A- La nécessité d'une conscientisation populaire.

Les pages ci-dessus mettent en lumière que l'école haïtienne, comme elle existe sous sa forme traditionnelle, est incapable de former des gens qui seront aptes à s'engager dans la lutte pour le changement de leur pays. Alors, la classe populaire doit intensifier ses actions pour la transformation de cette dite école. Il serait impensable que la classe dominante encourage ou, a fortiori, pratique une éducation libératrice ou promeuve le changement dans le système éducatif. Karl Marx1, sur la question de l'éducation de la classe des travailleurs, a dit clairement que cette dernière doit être formée dans une perspective contradictoire et antagonique à la vision de la bourgeoisie. Et paradoxalement, l'éducation, comme nous l'avons déjà dit, est sous le contrôle de l'Etat, gardien des intérêts de la classe dominante. Mais, le changement de politique éducative dans une société peut se préparer par le peuple. Si le peuple est organisé, conscientisé, politisé, regroupé de manière à pouvoir unir sa force, et à bien orienter cette dernière.

C'est ainsi que dans ce sous chapitre nous mettrons l'accent sur les actions transformatrices que la classe progressiste doit mener à l'extérieur de l'école. Définies comme un travail permanent pour l'organisation et la conscientisation de tous les secteurs concernés dans la mise en place d'une politique éducative, c'est-à-dire les parents, les professeurs, les apprenants, etc. pour accéder à la responsabilisation dans la prise en mains de leur destin de peuple, et de la formation de leur progéniture.

1 Cité par Mauro Luis Iasi, dans le texte Ensaios sobre consciência e emanci paçâo. Édition Expression populaire. Sao- Paulo, Brésil, 2007. Page 31.

1- Importance de la prise de conscience dans un projet de transformation sociale.

La conscientisation de la classe populaire doit servir de pierre angulaire à la longue construction d'un projet de lutte pour emmener la masse à assumer son rôle historique de toujours révolutionner ses conditions sociales aliénantes d'existence. D'ailleurs, elle est l'un des buts essentiels à atteindre pour réunir les conditions subjectives essentielles à la transformation radicale de la société. Servons-nous du livre de Gisèle Ampleman1: <<Pratiques de conscientisation», où elle propose et annote diverses définitions de la conscience dans les oeuvres de Paulo Freire, pour asseoir les actions que doit mener le secteur progressiste en ce sens.

Premièrement, Dans un article publié en 1970, Freire définit la conscientisation comme <<un processus dans lequel des hommes, en tant que sujets connaissants, et non en tant que bénéficiaires, approfondissent la conscience qu'ils ont à la fois de la réalité socio-culturelle qui modèle leur vie et leur réalité, et la capacité de transformer cette réalité.»Selon Gisèle, la conscientisation en ce sens apparaît comme un moment d'une praxis, c'est-à-dire une réflexion indissociable d'une action de transformation du monde.

Mais, toujours selon l'auteure, cette définition va s'éclairer mieux dans le livre: <<L'éducation, pratique de la liberté» où elle prendra un tournant plus politique. Dans ce livre, Freire parle du passage d'une conscience magique ou d'une conscience primaire à une conscience critique. La conscience magique perçoit les faits <<en leur attribuant un pouvoir supérieur qui la domine de l'extérieur,et auquel elle doit se soumettre docilement» tandis que <<la conscience critique est la perception des choses et des faits,tels qu'ils existent concrètement, dans leurs relations logiques et circonstancielles». Ce caractère politique de la définition va se réaffirmer concrètement dans un cahier publié par Freire à l'institut culturel (IDAC), où il avance que <<la conscientisation n'apparaît plus seulement comme un passage à la critique. Mais les masses populaires en sont les sujets collectifs. Aussi, elle est passage à la conscience de classe».

Pour atteindre ce niveau de conscientisation, le travail de la classe progressiste doit prendre en compte plusieurs points, dont deux plus importants:

1) Une bonne connaissance de la culture du milieu populaire.

1 Ampleman, Gisèle.- Pratiques de conscientisation. Expériences D'éducation populaire au Québec. Québec, Edition nouvelle optique, 1983..Page 58.

2) Percevoir la personne comme un sujet actif dans la création de l'histoire.

Ce dernier point, selon une analyse assez pertinente de Gisèle Ampleman:

<<Résume la conception de la personne humaine qui est à la base de la conscientisation, à savoir la conviction profonde de la capacité de chaque être humain d'être acteur autonome de sa vie et de participer pleinement à la transformation du monde. C'est la conviction que même dans les groupes les plus dominés et aliénés, les individus peuvent parvenir à percevoir la possibilité de transformation de leur situation, à croire en leur capacité d'y arriver, à identifier et à exprimer leurs intérêts et leurs désirs, ainsi qu'à s'impliquer activement dans la transformation de la société en ce sens. Pour se réaliser pleinement, elle doit exercer cette critique et devenir un sujet conscient, capable d'une participation autonome à la transformation sociale».

Ce travail de conscientisation doit viser comme premier objectif l'organisation de la classe populaire, condition essentielle à sa fortification. Si cette classe arrive à se regrouper dans divers types d'organisation reliés entre eux, soit: Les parents, les professeurs, les paysans, les ouvriers, les petits commerçants, pour débattre leurs intérêts communs,discuter de leurs statuts d'opprimés, remettre en question l'éducation que reçoivent leurs enfants. Bien orientée dans ses recommandations, la classe populaire peut non seulement réclamer et obtenir son droit à l'éducation, mais en plus exercer une action sur l'orientation de la politique éducative de la nation.

L'erreur qu'on doit éviter est de penser que ce travail fondamental pour la lutte vers l'émancipation qu'est la conscientisation est facile. D'ailleurs, le chemin de la liberté, de la désaliénation est toujours chargé d'embûches. La transformation de la masse en une classe consciente de son statut et de son pouvoir est un travail d'envergure et de longue haleine, mais, sans sa réussite, le changement social profond est impossible. La définition que donne l'INODEP1 de la conscientisation est très significative en ce sens: <<La conscientisation est l'éveil et la maturation de la conscience de classe des milieux populaires, pour une militance de plus en plus active dans les luttes de classes, au niveau national et international et dans les luttes contre certains pouvoirs dominants de l'Etat. Elle est formation à l'engagement politique et vise au développement de la solidarité des milieux et groupes opprimés».

1 Ibid Page. l'auteure n'a pas défini le cigle.

2- Spécificité d'une transformation sociale haïtienne.

En Haïti, le travail de la conscientisation de la masse doit s'accompagner d'une désaliénation perpétuelle. La politique de diabolisation et d'infériorisation de tout ce qui touche au schème religiosoculturel de la population entamée depuis la colonie, pour contenir les esclaves dans leur carcan et assurer la perduration de la structuration économique esclavagiste au profit de la métropole française, a traversé plus de deux siècles d'indépendance, en alternant force brutale et humiliation pour continuer l'exploitation de la population par un petit groupe qui se croit étranger. Ces incessants assauts, au lieu de supprimer la culture populaire, ont renforcé sa résistibilité. C'est ainsi que ces outils culturels ont contribué activement au renversement du système colonial esclavagiste, et assumé l'imperméabilité et la capacité de résistance énorme qu'a le peuple devant l'adversité. Alors, si la maîtrise de la culture du milieu populaire constitue un point important dans le processus de conscientisation, en ce qui concerne Haïti, elle est l'un des points fondamentaux, puisque la culture populaire est un lieu de dénigrement intense, où, sans aucune compréhension, elle sert de stigmate, que ce soit à travers la langue parlée par la population ou ces différentes autres formes de manifestation.

Le travail de désaliénation, et d'acceptation totale de soi comme personne historique, comme acteur, devant agir sur les conditions sociales imposées par le système capitaliste dans la société, doit se faire dans, et à travers la culture populaire. Une culture non considérée comme quelque chose d'immuable ou statique, mais plutôt comme la conçoit le courant interactionniste, où elle est présentée comme << inséparable des interactions sociales qui la produisent, dans des contextes variés et instables où cette (culture) est sans cesse appropriée, transformée, adaptée par des individus en situation. Ici, la culture n'est plus considérée comme existence en soi, mais comme un ensemble de ressources symboliques et sociales que des individus peuvent (ou non) mobiliser en situation. Il faut plutôt considérer la culture comme un processus de production sociale. Elle sera donc toujours abordée en lien avec les structures sociales et les rapports sociaux au sein desquels s'opère son émersion»1.

Dans le processus de conscientisation, la culture joue également le rôle de renforcement de l'identité nationale. La notion d'identité est souvent employée comme équivalente à la culture, elle s'en distingue pourtant au moins sur un plan : << Si la culture peut fonctionner sans conscience identitaire, et relève donc en grande

1 Verhoeven Marie. École et diversité culturelle. Sybidi Papers, Académie Bruylant, Grand Place 29, Belgique, 2002. Page 20.

partie de processus inconscients, la notion d'identité renvoie, quant à elle, à une norme d'appartenance nécessaire consciente, puisqu'elle implique un positionnement social et symbolique explicite de la part de l'acteur social »1. Le sentiment d'appartenance qu'implique le concept d'identité est indispensable pour arriver à se considérer comme responsable de son devenir social à l'intérieur du groupe sociétal. Contrairement à l'idée façonnée par les puissances capitalistes, comme quoi le développement, la démocratie, la modernité doivent sortir de l'extérieur pour être appliqués dans les pays de la périphérie au profit de leurs transformations sociales. Il est important, à travers le processus de la prise de conscience, d'amener la population à penser son propre paradigme de développement, à voir la nécessité de prendre son avenir politique en main. Le processus de transformation doit en fin de compte amener la population à comprendre les incidences de l'éducation traditionnelle sur la formation de ses progénitures et agir pour la transformer.

1 Ibid Page 23.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo