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L'arbitrage ohada à l'épreuve de l'arbitrage investisseur-etat

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par Cassius Jean SOSSOU
Université de Genève Faculté de Droit et Hautes Etudes Internationales et du Développement - Master of Advanced Studies in International Dispute Settlement (MIDS) 2008
  

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Section II.- Les propositions de réforme

208. Il s'agit d'évoquer ici les mesures de nature à accroître l'efficacité du dispositif OHADA de l'arbitrage dans la perspective d'une protection plus adéquate de l'investissement dans l'OHADA. Nous avons tout au long de ce développement démontré que l'instrumentum juridique que constitue le droit OHADA de l'arbitrage, peut bel et bien servir de fondement à un arbitrage contractuel ou bilatéral d'investissement dans la zone OHADA. Cependant, l'efficacité de ce droit pourrait davantage être accrue si l'exécution forcée à l'adresse des personnes morales de droit public pouvait être garantie par l'adoption d'un Acte Uniforme relatif aux immunités dans l'espace OHADA d'une part (1) et si d'autre part, la constitution d'un fonds de promotion de l'arbitrage pourrait être assurée en vue de contribuer à l'incitation au recours à l'arbitrage dans les clauses de règlement de différends dans la zone OHADA (2).

A.- De la nécessité d'un Acte Uniforme relatif aux immunités

209. La question se pose de savoir quelle est l'utilité pratique d'une codification des immunités dans la zone OHADA ?

210. Il y a tout d'abord lieu de noter que les restrictions aux immunités d'exécution et de juridiction à l'adresse des personnes morales de droit public peut avoir un aspect bénéfique pour l'afflux des capitaux étrangers, et donc de l'investissement étranger dans la zone OHADA. Si l'un des objectifs visés par l'OHADA est d'offrir aux investisseurs étrangers la garantie d'une justice moderne, fiable et équitable, il va de soi que la garantie de la solvabilité (au propre comme au figuré c'est-à-dire l'exécution) du débiteur de la décision juridictionnelle soit davantage renforcée dans la perspective de faire dissiper les craintes liées aux risques non commerciaux des investisseurs dans leur décision d'investir dans l'OHADA. En effet, l'espace OHADA a beau avoir les dispositions normatives incitatrices de l'investissement étranger, celles-ci n'aboutiraient pas au résultat escompté, c'est-à-dire la promotion et la protection de l'investissement étranger, si des limitations aux immunités des personnes morales de droit public ne sont pas codifiées de façon uniforme dans l'espace OHADA. La démarche d'une codification unifiée des immunités s'inscrirait dans la logique du droit des affaires harmonisé déjà applicable dans l'OHADA et constituerait une nouvelle soupape de sûreté dans les dispositifs de protection et de garantie au bénéfice de l'investisseur. Or, la remarque qui se dégage est qu'il n'existe dans cet espace aucun texte harmonisé régissant le droit des immunités. On note cependant quelques tentatives éparses de régulations dans certains Actes. Nous passerons en revue ces dispositions relatives à l'immunité d'exécution dans l'espace OHADA (a) d'une part, pour ensuite esquisser quelques propositions, d'autre part, et ce à la lumière des codifications déjà existantes et opérationnelles dans d'autres sphères juridiques (b).

1.- La question de l'immunité juridictionnelle des Etats dans l'espace OHADA

211. Nous considérerons essentiellement la question de l'immunité d'exécution, à l'exclusion de l'immunité de juridiction188(*), dont sont récipiendaires les Etats-membres de l'OHADA en tant qu'entités souveraines et leurs démembrements. Ceci étant, la problématique de l'immunité d'exécution telle qu'elle est pratiquée actuellement dans la zone OHADA pose d'énormes difficultés d'interprétation et d'application.

212. Par rapport à l'interprétation du concept de l'immunité d'exécution dans la zone OHADA, il convient de souligner que, c'est dans les dispositions de l'article 30 de l'Acte Uniforme portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et des Voies d'Exécutions189(*) que, l'on infère l'immunité d'exécution dont sont bénéficiaires les personnes morales de doit public telles que les Etats et leurs émanations. Elles ne sont pas sujettes aux mesures de l'exécution forcée et aux mesures conservatoires190(*). En posant le principe de l'interdiction des voies d'exécutions et des mesures conservatoires des personnes bénéficiaires de l'immunité d'exécution, le législateur OHADA semble avoir le souci d'éviter les atteintes à la souveraineté de l'Etat. L'objectif visé par une telle disposition étant d'éviter que par l'effet de la saisine de ses biens patrimoniaux, l'Etat souverain et toutes entreprises sous sa tutelle, n'en parviennent plus à exercer ses fonctions régaliennes ou que, les missions de service public dont cet Etat et les services sous sa tutelle sont chargées en viennent à être compromises.

213. Mais alors, si le souci de protection de l'Etat dans l'exercice de ses fonctions régaliennes est noble, l'envers de la médaille consiste à faire une interprétation stricto sensu de la notion de l'immunité d'exécution par les juges OHADA chargés de son application. C'est pourtant, la tendance que l'on observe dans les décisions judiciaires africaines OHADA où, il est noté un fort attachement des juges chargés de l'exécution à une application stricto sensu de la notion de l'immunité d'exécution des personnes morales de droit public. Plusieurs décisions judiciaires OHADA en sont illustratives et sont allées dans ce sens191(*). Pourtant, cette application absolue du principe de l'immunité d'exécution n'est pas de nature à être compatible avec les objectifs préambulaires du Traité qui vise à garantir la sécurité juridique des activités économiques afin de favoriser leur essor et encourager l'investissement. Par rapport à l'application du principe, deux incompatibilités sont à relever dans la pratique actuelle de l'immunité telle qu'elle est exercée par les juges africains OHADA.

214. D'une part, le droit OHADA n'apportant aucune précision sur la qualité des personnes pouvant bénéficier de cette immunité, il semble que le législateur OHADA renvoie à la loi de chaque Etat pour fixer la liste de ces personnes192(*). Or, cette imprécision du droit communautaire peut avoir des conséquences graves pour la crédibilité de l'exécution des décisions arbitrales d'investissement. L'hypothèse imaginable est celle d'un investisseur, bénéficiaire d'un titre exécutoire, qui se trouverait bloqué par les dispositions internes régulatrices de l'immunité dans un Etats-membres où, l'entité morale publique débitrice disposerait de biens à usage commercial et donc saisissables193(*). Même si ledit article semble, dans la suite de sa disposition, poser le principe général de compensation qu'il est possible d'opposer à l'Etat et à ses émanations, rien ne garantit que ce tempérament au principe de l'immunité est un gage de sécurité supplémentaire susceptible de l'attrait des investisseurs étrangers.

215. D'autre part, il convient de rappeler qu'en procédure civile, l'exécution forcée d'une créance est subséquente au défaut volontaire d'exécution du débiteur de la créance. Le principe en droit OHADA, trouve son fondement dans les dispositions de l'article 28 de l'Acte Uniforme ci-dessus évoqué. Ceci étant, la logique voudrait que la question de la capacité de la soumission de l'Etat et de ses entités publiques à une telle procédure ne puisse être soulevée étant entendu que leur solvabilité ne pose, au demeurant, aucun problème. Pourtant, la question ne manque pas d'intérêt juridique dans l'hypothèse où, dans le rapport de droit qui l'oppose à une puissance publique africaine OHADA, un créancier investisseur peut ne pas parvenir à obtenir le paiement spontané de sa créance détenue par son débiteur, qu'est l'Etat souverain ou son entité, et qu'au surplus l'immunité d'exécution protège. La mauvaise foi peut motiver un tel Etat OHADA perdant, dans un arbitrage international d'investissement, à ne pas vouloir s'exécuter au profit de l'investisseur au motif de l'immunité d'exécution dont il est bénéficiaire, en vertu des dispositions de l'article 30 de cet Acte Uniforme. La logique conséquence qui en découlerait, c'est la crédibilité de l'arbitrage OHADA qui prendrait assurément un coup, renforçant davantage l'idée selon laquelle cet arbitrage offre un degré d'incertitude post-phase arbitrale, eu égard à l'exécution.

216. Pour toutes ces raisons ci-dessus évoquées, un auteur propose que l'immunité d'exécution soit alors aménagée de manière à avoir un contenu compatible à la fois avec les missions de service public qui incombent aux personnes morales de droit public et avec la nécessité de sécuriser les activités économiques194(*). Nous-nous rallions à l'idée de cet auteur d'autant plus que, l'interprétation stricto sensu et l'application erronée de l'immunité d'exécution tel que l'on l'observe actuellement dans la zone OHDA est fortement préjudiciable à la promotion et à la protection des activités économiques en général et de l'investissement en particulier crédo sur lequel se fonde le droit des affaires OHADA et que l'on retrouve dans les dispositions préambulaires.

* 188
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Cette question de l'immunité de juridiction n'est de toute évidence pas envisageable dans la mesure où, la problématique de l'arbitrabilité subjective est réglée dans l'Acte Uniforme relatif au Droit de l'Arbitrage à son article 2.

* 189
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Article 30 de l'Acte Uniforme portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et des Voies d'Exécutions «L'exécution forcée et les mesures conservatoires ne sont pas applicables aux personnes qui bénéficient d'une immunité d'exécution.

Toutefois, les dettes certaines, liquides et exigibles des personnes morales de droit public ou des entreprises publiques, quelles qu'en soient la forme et la mission, donnent lieu à compensation avec les dettes également certaines, liquides et exigibles dont quiconque sera tenu envers elles, sous réserve de réciprocité.

Les dettes des personnes et entreprises visées à l'alinéa précédent ne peuvent être considérées comme certaines au sens des dispositions du présent article que si elles résultent d'une reconnaissance par elles de ces dettes ou d'un titre ayant un caractère exécutoire sur le territoire de l'État où se situent lesdites personnes et entreprises. «

* 190
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Cf. article 30 alinéa 1er de cet Acte Uniforme

* 191
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Voir, Ordonnance de référé n° 12/ORD du 11 septembre 2000 du Président du Tribunal de Première Instance de Dschang, Université de Dschang c/ Tonyé Dieudonné, Revue Camerounaise de l'Arbitrage, n° 18, Juillet-Août-Septembre 2002. p. 13. Voir aussi Gaston KENFACK DOUAJNI opt.cit. P. 10-11.

* 192
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Ndiaw DIOUF, commentateur de l'Acte Uniforme portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et des Voies d'Exécution, in OHADA Traité et Actes Uniformes commentés et annotés, Juriscope, 2008, 3ème éd. P. 773.

* 193
_
In convient de souligner ici que le droit de l'immunité distingue selon que l'activité exercée par l'Etat est ou non commerciale. Il importe de rechercher à savoir si les faits à l'origine du litige et imputables à l'Etat ou ses émanations relèvent d'acte de service public ou d'actes de gestion. A cet égard, la Cour de Cassation française refuse l'application absolue de l'immunité d'exécution lorsque le fait générateur du litige a été posé par la personne morale de droit public non pas dans le cadre de ses missions de service public mais dans le cadre d'une activité commerciale. Voir cass. Civ. 1. 20 mars 1989, République Islamique d'Iran et OIATE c/ Société Framatone et autres, JDI 1990, P. 1004.

* 194
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Gaston KENFACK DOUAJNI in «Arbitrage et investissement dans l'espace OHADA« Revue camerounaise de l'Arbitrage N° 37 Avril-Mai-Juin 2007 P. 10.

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