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La clause de non concurrence en droit du travail sénégalais

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par Ernest Aly THIAW
Université Gaston Berger de Saint-Louis - Maitrise 2009
  

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Conclusion

INTRODUCTION GENERALE

Pendant longtemps, le Droit du Travail a été présenté, analysé et enseigné comme étant un droit protecteur. C'est en effet un droit partisan parce que l'essentiel de ses règles sont orientées vers la protection des salariés qui sont réputés faibles. Ainsi, le contrat de travail est un contrat de dépendance par excellence. Le salarié a accepté à l'avance de se placer sous les ordres de son employeur, et ce dernier détient es qualité, une panoplie de prérogatives qui lui permettent de faire fonctionner son entreprise. C'est donc dire que les rapports de travail sont par essence inégalitaires, c'est ce qui justifie dans une certaine mesure l'orientation protectrice du Droit du Travail, dans un souci de rééquilibrer les rapports de travail.

Mais depuis quelques années, il s'est développé une théorie que l'on appelle la Flexibilité de l'Emploi qui est venu refouler l'orientation partisane du Droit du Travail. Le postulat de cette théorie est empreint d'une certaine évidence. C'est l'entreprise qui génère l'emploi. Il n'ya pas d'emploi sans entreprise. Par conséquent, tout ce qui affecte celle-ci rejaillit nécessairement sur celui-là. Dés lors, il ya lieu de protéger l'entreprise dans un environnement mondialisé, à rude concurrence.

En effet, le principe de la liberté du travail et notamment celle de choisir son activité, tout comme celui de la liberté du commerce et de l'industrie, trouvent leur origine dans l'article7 du Décret d'Allarde des 2 et 17 mars 1791. En principe, un salarié qui quitte son emploi peut se réembaucher librement dans une entreprise, fut-elle concurrente de la première, ou exercer pour son propre compte une activité concurrente de celle de son ancien employeur. Dans certains cas, d'ailleurs, la qualification professionnelle du salarié ne lui ouvre guère d'autres choix. En soi, l'acte concurrentiel du salarié ne peut donc être critiqué. Bien mieux, il s'inscrit dans les Principes Généraux du Droit commercial qui tendent à promouvoir la concurrence et s'attachent à en interdire les pratiques restrictives.

Certes, cette concurrence ne doit pas être déloyale et s'accompagner, par exemple, de détournement de la clientèle ou de révélation de secrets touchant l'ancien employeur. Ainsi, il est clair qu'un salarié, après avoir travaillé plusieurs années dans une entreprise est susceptible d'en connaitre quelques secrets : procédés de fabrication, technique de financement ou de commercialisation, projets industriels ou commerciaux,...etc.

Pour se prémunir contre la concurrence susceptible d'être faite par le travailleur à son entreprise, l'employeur exige parfois que ce dernier s'engage, à n'exercer aucune activité professionnelle soit pour son compte, soit au service d'une autre entreprise en insérant souvent dans le contrat de travail qu'il soumet à la signature du salarié une clause de non-concurrence. C'est donc pour parer aux conséquences préjudiciables de la concurrence d'un ancien salarié que les employeurs ont pris l'habitude de prévoir dans les contrats de travail une telle clause. Inspirée du droit commercial la clause de non-concurrence a été purement et simplement transposée en droit du travail.

Réfléchir sur la clause de non-concurrence en droit du travail sénégalais, tel que le présent sujet se propose de le faire, implique avant toute chose que les termes de notre thème de réflexion soient clarifiés.

A ce propos, la clause de non-concurrence peut être définie comme « une clause d'un contrat par laquelle l'une des parties s'interdit d'exercer dans certaines limites de temps et de lieu, une activité professionnelle déterminée susceptible de faire concurrence à l'autre partie. »1(*)

Ayant pour objet d'interdire au salarié d'exercer une activité professionnelle concurrente, à son profit ou pour le compte d'un tiers après la rupture du contrat de travail, la clause de non-concurrence ne doit pas être confondue avec la clause d'exclusivité et l'obligation générale de loyauté qui regroupe les obligations de fidélité, de direction et de réserve et l'interdiction des actes de corruption qui reçoivent application pendant l'exécution du contrat de travail et non après sa rupture.

L'intérêt essentiel de cette distinction concerne la perspective dans laquelle la validité des conventions restrictives de concurrence est appréciée. Lorsqu'on est en présence d'une convention qui interdit l'exercice d'une activité et qui donne naissance à une obligation de non-concurrence, sa validité est d'abord subordonnée à la condition que ne soit pas porté une atteinte trop grave à la liberté économique individuelle de la personne qui y est assujettie. En revanche, la validité des conventions qui interdisent seulement quelques modalités dans l'exercice d'une activité s'apprécie différemment car, dans ce cas, la liberté économique individuelle est rarement en jeu. C'est alors surtout par rapport aux règles qui tendent à ce que la concurrence soit effective, par rapport à la liberté du marché, que doit être envisagée la validité de ces conventions.

A cet effet, l'obligation d'exclusivité est une obligation par laquelle l'une des parties à un contrat(ou les deux) s'engage à ne pas conclure d'autres conventions identiques avec un tiers. Contrairement à l'obligation de non-concurrence qui s'analyse en une pure et simple obligation de ne pas faire, l'obligation d'exclusivité engendre en même temps une obligation de faire (contracter avec le créancier de l'exclusivité) et une obligation de ne pas faire (ne pas contracter avec les concurrents du créancier de l'exclusivité).

Bien que réalisant une limitation de la concurrence par son caractère négatif, l'accent est généralement mis sur l'aspect positif de l'obligation d'exclusivité ; c'est-à-dire l'intensification des relations contractuelles entre le créancier et le débiteur de l'exclusivité.

Concernant l'obligation de discrétion ou de confidentialité, il faut dire que l'exécution de certaines conventions conduit à ce que l'un des contractants ait connaissance des secrets d'affaires de l'entreprise. Dans ces circonstances une nécessaire protection de l'entreprise a suscité des dispositions légales ou réglementaires qui mettent à la charge de certains contractants une obligation de non divulgation souvent qualifiée d'obligation de discrétion ou de confidentialité.

Obligation de confidentialité et obligation de non-concurrence concourent toutes deux au maintien des situations acquises, à la préservation des avantages obtenus dans la lutte concurrentielle mais leur objet et leur efficacité différent profondément. L'obligation de confidentialité n'oblige qu'à la non-divulgation mais son débiteur conserve la liberté d'exercer une activité en concurrence avec le créancier de l'obligation de confidentialité, activité redoutée car elle sera souvent l'occasion de la divulgation ou de la mise en oeuvre des connaissances qui sont l'objet de l'obligation de confidentialité.

En revanche, l'obligation de non-concurrence a une finalité plus large puisqu'elle implique non seulement une non-divulgation mais également l'interdiction de mettre en oeuvre ces connaissances dans le cadre d'une activité concurrentielle.

A cet égard, étudier la clause de non-concurrence en droit du travail sénégalais est important à plusieurs égards. Les problèmes posés par les clauses de non-concurrence sont devenus très classiques. Si la validité de ce type de clause ne fait plus de doute au regard du principe de la liberté contractuelle, la nécessité de préserver une autre liberté, celle d'entreprendre, s'est fait très vite sentir. Les juges ont donc construit, au fil des années, le régime de la clause de non-concurrence à l'aune de cet objectif de conciliation entre ces deux libertés.

Ainsi, ces clauses portent alors atteinte à deux principes fondamentaux de notre droit: la libre concurrence et la liberté du travail. Tout homme étant libre d'exercer l'activité professionnelle de son choix, les clauses qui portent atteinte à cette liberté devraient en principe être déclarées illicites. De la même façon, tout homme étant libre de faire concurrence aux entrepreneurs déjà établis, les clauses limitant cette liberté ne peuvent produire leurs effets que dans des conditions très particulières.

Bien que la clause de non-concurrence heurte, en la matière, un principe de valeur constitutionnelle (la liberté du travail), sa validité n'a jamais été mise en cause. Le législateur sénégalais, tout en affirmant la licéité de cette restriction à la liberté du travail, s'est contenté d'en poser les limites : « un compromis va nécessairement s'établir entre le droit que possède toute personne de gagner sa vie par son travail (liberté du travail) et l'intérêt de l'entreprise à conserver certains secrets et à retenir sa clientèle ».

L'équilibre qui doit être trouvé et respecté dans toute clause de non-concurrence entre l'intérêt du créancier de non-concurrence et la sauvegarde de la liberté d'entreprendre du débiteur de non-concurrence, est incontestablement plus difficile à maintenir s'agissant des rapports d'un employeur et de son ancien salarié.

Ainsi, il convient de se poser la question de savoir comment la clause de non-concurrence est-elle encadrée par le droit du travail sénégalais ?

A coté de la loi et de la jurisprudence, le contrat vient souvent limiter la liberté de la concurrence afin d'assurer la protection de l'entreprise. Les restrictions ainsi apportées à la liberté de la concurrence s'observent dans des clauses insérées dans de nombreuses conventions qui relèvent notamment du droit du travail. En outre, la nature de certains contrats est analysée comme emportant de plein droit l'obligation pour l'une des parties de s'abstenir d'une certaine forme ou de toute concurrence à l'encontre d'un partenaire contractuel actuel ou passé.

Dans ces diverses hypothèses, on se trouve en présence d'une obligation de non-concurrence, obligation dont l'étude est l'objet du présent sujet et qui constitue une limitation apportée à la liberté de la concurrence puisque une convention oblige l'une des parties à la non-concurrence envers l'autre.

Par son appellation même, l'obligation de non-concurrence apparait comme une obligation de ne pas faire, comme imposant à son débiteur une abstention de concurrence. Plus précisément, l'obligation de non-concurrence interdit à une personne (le débiteur de non-concurrence) d'exercer une activité économique ou professionnelle déterminée en concurrence avec celle développée par une autre personne (le créancier de non-concurrence).

L'étude de l'obligation de non-concurrence en droit du travail sénégalais fait apparaitre deux pôles d'intérêt : le droit des personnes dans ce qu'il a de plus fondamental et le droit des biens dans ce qu'il a de plus novateur se rejoignent dans la notion d'obligation de non-concurrence. Au regard de la personne, l'obligation de non-concurrence a pour effet essentiel de porter atteinte à ces libertés primordiales que sont la liberté du travail et la liberté du commerce et de l'industrie et ainsi de venir limiter gravement le potentiel d'activité du débiteur de non-concurrence.

En effet, la fonction de l'obligation de non-concurrence, qui consiste à protéger directement ou indirectement l'employeur contre la concurrence dangereuse ou anormale que pourrait développer le débiteur de non-concurrence, rattache cette obligation au droit des biens en ce qu'elle s'avère indispensable à la valorisation de l'activité humaine à travers la notion de clientèle. 2(*)

Le développement de l'obligation de non-concurrence est en effet étroitement lié au mouvement qui tend à considérer les clientèles professionnelles comme des biens et qui constitue l'un des traits marquants de la transformation du patrimoine moderne3(*).

En définitive, l'obligation de non-concurrence se situe ainsi au carrefour du patrimonial et de l'extrapatrimonial.

C'est d'ailleurs sous ces divers angles que l'intervention du législateur sénégalais s'est surtout manifestée dans le domaine de l'obligation de non-concurrence dans la mesure où la question s'est posée de savoir si une telle obligation était licite.

A cet égard, aux termes de l'art L 35 du code du travail sénégalais, un certain nombre de conditions doivent être respectées afin que soit valable et efficace la clause de non-concurrence venant établir un engagement de non-concurrence de l'ancien salarié. Les clauses de non-concurrence suscitent donc un double problème de licéité et de mise en oeuvre. Eu égard à ces considérations, on examinera d'une part, la licéité des clauses de non-concurrence (chapitre1) et d'autre part, la mise en oeuvre des clauses de non-concurrence (chapitre 2).

* 1 _ Cette définition est tirée du lexique des termes juridique édition Dalloz

* 2 _ YVES SERRA : la clause de non-concurrence en matière commerciale, sociale et civile

* 3 _ P.CATALA, « La transformation du patrimoine dans le droit civil moderne », Rev. trim. dr. civ. 1966, p.185

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery