WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

L'amour comme paradigme de la morale chez Vladimir Jankélévitch

( Télécharger le fichier original )
par Marios KENGNE
Grand séminaire Paul VI-Philosophat de Bafoussam - mémoire de fin de cycle 2002
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

3. L'option morale : le tout-ou-rien

Nous avons déjà remarqué que l'amour doit engager toute l'existence de l'aimant. A cet effet, l'amour ne connaît pas de délais ni de restriction. Il faut aimer hic et nunc ; c'est à ce niveau que le tout-ou-rien trouve son origine, et devient le principe de la morale. Ce principe exige que l'aimant ignore totalement la notion d'à peu près. Tout est à prendre ou à laisser. Ainsi, dans l'acte d'aimer, « le principe du tout-à-rien veut tout simplement savoir si le coeur y est ou si le coeur n'y est pas. »50(*)

Pour l'illustration de ce principe, Jankélévitch prend l'exemple des vices ou des fautes. Il veut en fait montrer que par le principe du tout-ou-rien, il n'y a ni grande faute ni petite faute, une faute est une faute et donc que toutes les fautes peuvent s'égaler :

« Une peccadille est un grand péché et réciproquement : faute vénielle, faute mortelle, cela revient au même ; celui qui est arrivé le plus près du but et celui qui est le plus loin ont l'un et l'autre manqué le but : il n'y a pas de milieu ; ils sont tous les deux logés à la même enseigne. »51(*)

Ceci suppose que la morale doit être compétente dans toutes les situations, à tout moment et à toutes les positions. Car comme le remarque Platon dans le Philèbe, il suffit d'un petit grain de poussière pour qu'une blancheur, aussi blanche soit-elle, tourne au gris. La vie morale dans cette perspective doit être considérée comme étant « quelque chose qui se continue tous les jours du mois et toutes les heures de chaque jour. »52(*) Il faut alors dire que l'option morale ne doit souffrir d'aucune duplicité qui, dès lors, ternirait la bonne intention morale. L'option morale du tout-ou-rien n'admet donc aucune condition restrictive ni de temps ni de lieu ni d'espace dans le mouvement de l'être aimant vers l'être aimé. Il faut en fait dire que l'amour n'est ni partiel ni partial, il est intransigeant : « l'amour et le devoir ne connaissent qu'un seul degré : le superlatif ; une seule grandeur : le maximum ; une seule philosophie : le maximalisme ; une seule tendance : l'extrémisme. »53(*) Nous pouvons comprendre que si telles sont les conditions pour aimer, le seul commandement de l'amour sera d'aimer. Dans l'acte d'aimer, c'est tout le possible qui doit être fait.

Le principe du tout-ou-rien se situe dans le sillage des deux paradoxes et surtout du deuxième paradoxe qui exige que l'aimant se donne à l'aimé à l'infini c'est-à-dire jusqu'à la mort si nécessaire. L'amour est à ce titre un engagement qui conduit l'homme à l'absolu puisqu'il est absolument et infiniment exigible. La volonté de vivre pour l'autre jusqu'à la mort est donc la loi de l'amour, celle qu'aucune raison ne peut comprendre. Cette loi, nous pourrons la considérer comme la loi de la passion du toujours plus ou du jamais assez car «  l'amour souscrit à la positivité de l'inclination, et pourtant il n'en ratifie pas la facilité et l'inertie puisqu'il va, au contraire, dans le sens de la plus grande résistance et du plus grand effort et rend capable du sacrifice suprême. »54(*) Il ne s'agit pas d'une extravagance amoureuse dans le sacrifice, mais il est question pour Jankélévitch de faire comprendre que l'amour ne dit pas hactenus et ne prescrit aucune limite. Celui qui aime doit être tendu vers l'autre jusqu'au déséquilibre, et pour reprendre l'expression de Béatrice Berlowitz, nous dirons que l'amoureux est tout entier « proue de navire.» Il faut donc noter que chez Jankélévitch, l'impératif moral exige de la part de l'aimant une grande humilité ou encore un effacement total. L'amour est pur don de soi.

* 50 _ Ibid., p. 54.

* 51 _ Ibid., p. 53.

* 52 _ JANKELEVITCH V., Les vertus et l'amour, volume 1, Paris, Flammarion, 1986, p. 38.

* 53 _ JANKELEVITCH V., Le paradoxe de la morale, op. cit., p. 55.

* 54 _ JANKELEVITCH V., L'austérité et la vie morale, op. cit., p. 246.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard