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Du contentieux constitutionnel en RDC. Contribution à  l'étude des fondements et des modalités d'exercice de la justice constitutionnelle

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par Dieudonné KALUBA DIBWA
Université de Kinshasa - Doctorat en droit 2031
  

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CHAPITRE IV :
LES EFFETS DES DECISIONS DU JUGE CONSTITUTIONNEL

Parmi les modalités pratiques de l'exécution des décisions juridictionnelles, il y a lieu d'étudier en détail et avec minutie, les effets desdites décisions sur les pouvoirs publics quelles que soient leur nature et la transformation de l'ordre politique qu'elles impliquent.

En effet, la transformation de l'ordre politique vient du fait que si le juge constitutionnel par ses décisions les plus courageuses influe certainement sur l'ordonnancement juridique, cette influence aboutit presqu'inéluctablement à une transformation de l'ordre politique qui est ainsi « saisi par le droit ».1066(*)

Il s'agit, à vrai dire, d'une socialisation des pratiques et des conceptions politiques. L'Etat de droit, vu sous cet angle, est une question de civilisation finalement. Par ailleurs, le primat de la Constitution garanti par le juge est l'affirmation d'un principe de civilisation qui veut simplement dire que ce qui est décidé par le plus grand nombre doit être respecté par la minorité, fût-elle celle qui dirige. C'est un renversement des principes millénaires qui postulent la domination de la minorité sur la majorité. C'est une restitution du pouvoir au peuple.

Il est utile, à ce niveau, d'analyser en deux moments les implications théoriques du contrôle de constitutionnalité lorsqu'il s'exerce avant ou après la promulgation de la loi. Ce démarquage temporel est une sorte de summa divisio en matière de contrôle de constitutionnalité. Qu'il soit exercé avant ou après la promulgation de la loi, le contrôle a pour but institutionnel de purifier l'ordonnancement juridique.

Cette vertu purgatoire présente l'avantage certain de fixer une sorte de ligne rouge aux gouvernants qui sont ainsi tenus de respecter la Constitution telle qu'exprimée par la bouche du juge constitutionnel. La Constitution est, de ce point de vue, ce que dit le juge constitutionnel. Ceci transfigure le visage du juge constitutionnel qui devient non pas un simple rouage institutionnel, mais surtout un maillon essentiel de la mécanique de l'Etat de droit. La controverse sur sa légitimité cesse dès lors qu'elle procède de la fonction que lui confère le constituant lui-même.

Dans le détail, essayons de voir quelles sont les implications pratiques des décisions que le juge constitutionnel peut être amené à prendre.

Section 1 : LE CONTROLE A PRIORI OU LA CENSURE DES ACTES JURIDIQUES EN CHANTIER

Contrairement au droit français qui n'établit pas le contenu du rapport de conformité devant s'installer entre la norme constitutionnelle et la norme contrôlée, le droit congolais dresse ce rapport tant dans la Constitution que dans le projet de la future loi organique relative à la Cour constitutionnelle.1067(*)

En effet, la Constitution congolaise a établi la pyramide normative en son article 153 de sorte que les questions qui se sont posées en France à l'occasion du bloc de constitutionnalité ne se dressent pas devant le juge congolais.1068(*)

Si en France, la notion de Constitution s'est fait enrichir par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, au Congo la notion a un contenu plénier qui implique à la fois la déclaration des droits et libertés et l'organisation du pouvoir politique dans l'Etat. De la sorte, il demeure essentiel de voir que le juge constitutionnel agit ici comme l'un des mécanismes constitutionnels de l'élaboration de la loi. Procédons succinctement à l'étude de chacune des normes infraconstitutionnelles dont le contrôle s'impose.

§1. Les lois

Il s'agit de se rapporter ici à la définition formelle et organique que nous avons donnée plus loin. Les lois, en effet, recouvrent plusieurs formes selon aussi le contenu de la matière qu'elles régissent.

Le caractère obligatoire du contrôle de ces normes à ce niveau implique la pratique d'un contrôle à double détente : une décision de non-conformité interdit la mise en application de la disposition censurée.

C'est ce que le doyen Vedel exprime en s'interrogeant si le Conseil constitutionnel est un gardien du droit positif ou le défenseur de la transcendance des droits de l'homme. Commençons par les lois constitutionnelles.

A. Les lois constitutionnelles

La Constitution étant comprise comme la norme fondamentale à laquelle il ne peut être porté atteinte impunément, il faut donc considérer qu'il n'est pas logiquement admissible qu'il y ait des normes supraconstitutionnelles. On chercherait par ailleurs en vain qui serait l'auteur de pareilles normes. Le rapprochement que l'on est tenté d'établir entre les principes d'organisation démocratique communs à plusieurs Etats ou la constatation qu'il y a des traditions constitutionnelles communes à certains Etats sont des observations de grand intérêt sur le plan de la science politique mais n'ont pas de portée normative.1069(*)

En droit positif congolais cependant, l'on peut affirmer que le contrôle de constitutionnalité reste ouvert lorsqu'une révision constitutionnelle est susceptible de dépasser les limites matérielles et temporelles imposées par le constituant du 18 février 2006. En effet, les dispositions des articles 219 et 220 de la Constitution induisent, à n'en point douter, une double limitation au pouvoir constituant dérivé. Mais comme l'on sait, le pouvoir constituant est toujours souverain de sorte que le non respect des formes qu'il s'est imposées est aussi l'exercice de sa souveraineté.

Il faut donc conclure que le juge constitutionnel peut être a priori saisi en inconstitutionnalité d'une loi constitutionnelle en chantier sans que cette possibilité soit écartée même lorsque la loi ainsi adoptée aura été promulguée. L'effet de l'arrêt de non-conformité s'agissant d'une loi constitutionnelle sera sa non-promulgation.

Mais politiquement, il est utile de remarquer que si le contrôle d'une loi constitutionnelle d'origine parlementaire reste possible, celle d'origine référendaire demeure et politiquement et juridiquement inattaquable s'agissant, on l'a vu, d'une expression directe de la souveraineté.

B. Les lois organiques

L'obligation qui est faite aux autorités publiques de saisir le juge constitutionnel avant la promulgation des lois organiques a pour effet de purifier lesdites lois avant leur insertion dans l'ordonnancement juridique.

Prenant appui à la Constitution du 18 février 20061070(*) et à celle de la transition1071(*), le Président de la République a, le 23 août 2006, saisi la Cour suprême de justice pour solliciter l'examen de la conformité à la Constitution de la République Démocratique du Congo et à celle de la transition de la loi organique portant statut des magistrats. Examinant ledit recours, la Cour a rendu le 08 septembre 2006 l'arrêt R.Const.36/TSR1072(*) dans laquelle elle a déclaré ladite loi conforme à la Constitution.

La non promulgation en cas de contrôle juridictionnel ayant abouti à la non-conformité est la sanction qui frappe ce type de lois ; cependant, si malgré cet arrêt de non-conformité, le Chef de l'Etat promulgue quand même la susdite loi organique, pour des raisons qui lui seraient propres, il convient d'observer qu'il commettrait ainsi une violation intentionnelle de la Constitution1073(*) qui relève désormais du droit constitutionnel pénal que l'on a vu plus haut.

C. Les lois ordinaires

Les lois ordinaires, quelle que soit la catégorie à laquelle elles appartiendraient, restent soumises au contrôle préalable de constitutionnalité au voeu du constituant. Lorsque le juge aboutit sur pied de l'article 160, alinéa 3 de la Constitution à une déclaration de non-conformité, la sanction demeure la non promulgation. Une seconde lecture au niveau parlementaire peut également s'ensuivre.

D. Les actes ayant force de loi

Les actes ayant force de loi, étant par définition des actes du pouvoir exécutif intervenus dans le champ législatif, n'échappent pas au contrôle lorsque le constituant ouvre expressément ce contrôle. En effet, autrement, il est théoriquement difficile aux autorités habilités à déclencher le contrôle à priori de savoir qu'un acte ayant force de loi est en chantier auprès du Chef de l'Etat.

Par ailleurs, si malgré tout, un tel acte était soumis au contrôle du juge, ce dernier devrait le censurer car, à notre avis, l'équipollence des actes ayant force de loi avec les lois formelles commande une telle solution. La solution est différente lorsqu'il s'agit des actes expressément cités par le constituant.

* 1066 Lire FAVOREU (L.), La politique saisie par le droit, Alternance, Cohabitations et conseil constitutionnel, Paris, Economica, 1998.

* 1067 Voir article 153, alinéa 4 de la Constitution du 18 février 2006.

* 1068 Cette disposition qui, du point de vue de l'argument a rubrica, relève des juridictions de l'ordre judiciaire doit être tenue pour générale car l'on ne conçoit guère qu'elle ne s'applique pas aux juridictions administratives ou même à la Cour constitutionnelle. Sa portée est donc plus étendue, du point de vue téléologique.

* 1069 BOULOUIS (J.) et CHEVALLIER (R.-M.), Grands arrêts de la CJCE, 5ème édition, Paris, Dalloz, 1991, p.91.

* 1070 Article 222 de la Constitution du 18 février 2006.

* 1071 Article 121 de la Constitution de la transition du 4 avril 2003.

* 1072 Nous disposons de la copie de cet arrêt.

* 1073 Voir article 165, alinéa 1er de la Constitution du 18 février 2006.

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