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Le rôle de la Cour Internationale de Justice dans la détermination et le respect des normes de Jus Cogens

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par Joseph SEHORANA
Université libre de Kigali - Licence 2011
  

Disponible en mode multipage

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DECLARATION

L'Université Libre de Kigali (U.L.K) n'entend approuver ni désapprouver les opinions particulières du candidat.

Noms : SEHORANA Joseph Date : le 16 décembre 2011 Signature :

EPIGRAPHE

« Que l'on me comprenne bien : la question qui nous intéresse ici n'est pas de savoir si le droit international doit imposer certaines limites au droit national ou au droit constitutionnel, comme l'interdiction de la torture ou de lesclavage par exemple. Ces questions-là sont incontestées. (...) ». (Par BLOCHER Christophe, 107e Conseiller fédéral suisse du 1er janvier 2004-31 décembre 2007).

DEDICACE

A notre épouse DUSHIMIMANA Clémentine dont les prières et la patience nous ont soutenu pendant la réalisation de ce mémoire ;

A notre fils UHIRIWE Abia dont la joie nourrissait notre réflexion ;

A nos parents qui nous ont porté, bercé, éduqué jusqu'à l'âge adulte ;

A vous tous, frères, soeurs, amis et connaissances.

iv

REMERCIEMENTS

Au terme de ce parcours académique dans la Faculté de Droit à l'Université Libre de Kigali(U.L.K), nous tenons de prime abord à présenter notre profonde gratitude à l'Eternel pour sa fidélité insondable à notre égard. Aussi, force nous est-il de le louer grandement, car il ne cesse de se manifester pour nous donner sa force vitale.

Nous tenons à remercier vivement l'Eglise Anglicane du Rwanda, Diocèse de Shyogwe qui a soutenu financièrement nos études. Nous témoignons notre profonde reconnaissance, particulièrement à Mgr Dr KALIMBA Jéred, Evêque de ladite Eglise, pour ses conseils précieux, sa disponibilité et pour d'autres soutiens tant matériels que moraux.

Nous voulons témoigner ici notre grande reconnaissance au Dr MWENEDATA Alfred pour avoir accepté de nous encadrer comme Directeur de notre travail en dépit de ses lourdes responsabilités académiques. Ses conseils pertinents et son encouragement nous ont permis de nous situer dans nos réflexions qui étaient encore dispersées. Nous lui exprimons vivement notre reconnaissance et notre sympathie pour le zèle, la rigueur scientifique et l'abnégation qu'il nous a manifestés. Qu'il accepte notre profonde gratitude, lui qui, jours et nuits, a accepté de lire et de relire nos travaux afin que nous produisions un travail de bonne facture scientifique.

Nos remerciements s'adressent également au Prof. Dr RWIGAMBA BARINDA, Président Fondateur de l'U.L.K, pour sa contribution au développement du secteur éducatif au Rwanda et pour ses conseils précieux. Notre reconnaissance s'adresse aussi à tout le personnel administratif, au corps enseignant et à tous nos collègues étudiants de la Faculté de Droit pour l'encadrement, la collaboration, le partage et le soutien moral et spirituel qu'ils nous ont manifestés sans lesquels, nous n'aurions pas pu arriver au terme de ce travail.

Qu'ils reçoivent nos remerciements, tous ceux qui ont accepté de relire le manuscrit de ce travail et qui, par leurs observations critiques et suggestions nous ont permis de l'améliorer. Nous leur sommes très reconnaissant pour nous avoir accordé de leur temps et de leur savoir.

SIGLES ET ABREVIATIONS

§: Paragraphe

AIEA : Agence Internationale de l'Energie Atomique ART. : Article

BP : Boîte Postale

C. : Contre

CDI : Commission du Droit International

CEDH : Cour Européenne des Droits de l'Homme

Cfr. : Conferatur (se référer à)

Chap.: Chapitre

CIJ : Cour Internationale de Justice

CNRS : Centre National de Recherche Scientifique

Dr : Docteur

ED : Edition(s)

FAO : Food and Agriculture Organization (Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture)

FIDA : Fonds International de Développement Agricole

FMI : Fonds Monétaire International

http : Hyper Text Transfer Protocol (Protocole de transfert hypertexte)

LGDJ : Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence

Mgr : Monseigneur

Mr. : Monsieur

OACI : Organisation de l'Aviation Civile Internationale OIT : Organisation Internationale du Travail

OMI : Organisation Maritime Internationale

OMM : Organisation Météorologique Mondiale

OMPI : Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle

OMS : Organisation Mondiale de la Santé

OMT : Organisation Mondiale du Tourisme

ONUDI : Organisation des Nations Unies pour le Développement Industriel

vi

Op.cit. : Opere citato (ouvrage cité)

P.: Page

Pp.: Pages

PROF. : Professeur

RCD : Rassemblement Congolais pour la Démocratie

RDC : République Démocratique du Congo

Rec. : Recueil

RGDIP : Revue Générale de Droit International Public

SDN : Société Des Nations

T. : Tome

UCAC : Université Catholique d'Afrique Centrale

UIT : Union Internationale des Télécommunications

ULK : Université Libre de Kigali

UNESCO :United Nations Edicational, Scientific and Cultural Organization (Organisation des Nations Unies pour l'Education, la Science et la Culture) UNIKIS : Université de Kisangani

UPU : Union Postale Universelle

VOL. : Volume

WWW : World Wide Web (Toile d'araignée mondiale)

TABLE DES MATIERES

DECLARATION i

EPIGRAPHE ii

DEDICACE iii

REMERCIEMENTS iv

SIGLES ET ABREVIATIONS v

TABLE DES MATIERES vii

0. INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

0.1 Choix et intérêt du sujet 2

0.2 Délimitation du sujet 3

0.3 Enoncé du problème de recherche 3

0.4 Hypothèses de travail 5

0.5 Objectifs de l'étude 5

0.6 Choix des techniques et méthodes 6

0.7 Plan du travail 8

CHAPITRE I : CADRE CONCEPTUEL ET THEORIQUE 9

I.1 Généralités sur le concept de Jus Cogens 9

I.1.1 Elucidation du concept de Jus Cogens 10

I.1.1.1 Origine 10

I.1.1.2 Caractéristiques 11

I.1.2 Elaboration des normes de Jus Cogens 15

I.1.3 Contenu des normes de Jus Cogens 15

I.1.4 Consécration officielle du Jus Cogens dans la jurisprudence internationale 17

I.1.5 Place des Jus Cogens dans la hiérarchie des normes 18

I.1.6 Caractère obligatoire des Jus Cogens 19

I.1.7 Justification de la prohibition de toute dérogation à une norme de Jus Cogens 20

I.1.8 Les Jus Cogens et les notions voisines 21

I.1.9 Objections au principe de Jus Cogens 23

I.2 La Cour Internationale de Justice 25

I.2.1 Généralités sur la Cour Internationale de Justice 25

I.2.1.1 Création 25

I.2.1.2 Mission 26

I.2.1.3 Organisation, compétence et procédure 26

I.2.1.4 Source de droit applicable 28

I.2.1.5 Les parties 29

I.2.1.6 Composition de la Cour 30

I.2.1.7 Principes directeurs 31

I.2.2 La Cour Internationale de Justice comme l'un des organes de l'ONU 32

CHAPITRE II : EXAMEN CRITIQUE DU ROLE DE LA CIJ DANS LA DETERMINATION

ET LE RESPECT DES JUS COGENS 34

II.1 La CIJ face à la détermination des normes de Jus Cogens 35

II.1.1 Nécessité de détermination des normes de Jus Cogens 35

II.1.2 Compétence de la CIJ pour déterminer le contenu et le champ d'application des Jus

Cogens... 35

II.1.3 Occasions ratées par la Cour 36

II.1.4 Effets du silence de la Cour face à la détermination du domaine des Jus Cogens 37

II.1.4.1 Persistance du caractère hésitant des Jus Cogens 37

II.1.4.2 Dévaluation des Jus Cogens 37

II.1.4.3 Violation du Jus Cogens malgré sa prééminence 38

II.1.4.4 Délimitation de la compétence de la CIJ par elle-même 38

II.2 La CIJ face au respect des normes de Jus Cogens 38

II.2.1 Le Jus Cogens dans la jurisprudence de la Cour Internationale de Justice 39

II.2.2 Examen de l'arrêt de la CIJ du 3 février 2006 (affaire RDC c. Rwanda) 40

II.2.2.1 Résumé des faits et historique de la procédure 41

II.2.2.2 Résumé des arguments des parties 41

II.2.2.3 Décision de la Cour 42

II.2.2.4 Critique juridique de l'arrêt 42

II.2.2.5 Conséquences de l'arrêt 46

II.2.3 Obstacles encourus par la Cour dans le respect des Jus Cogens 46

II.2.3.1 Compétence limitée 48

II.2.3.2 La force contraignante limitée des décisions de la Cour 48

ix

II.2.3.3 Raisons politiques 49

II.2.3.4 Réserves des Etats à leur déclaration d'acceptation de la compétence de la CIJ 49

CHAPITRE III : MECANISMES ENVISAGEABLES POUR UNE MEILLEURE INTERPRETATION ET APPLICATION DES NORMES DE JUS COGENS 53
III.1 De la juridiction facultative à la juridiction obligatoire dans les affaires engageant les Jus

Cogens... 53

III.2 La Cour Internationale de Justice face à l'insurmontable qualité souveraine des contentieux.. 56
III.3 La Cour Internationale de Justice face aux raisons politiques pouvant expliquer sa faible

activité... 59
III.4 Nécessité d'amendements du Statut de la Cour Internationale de Justice et de la Charte des

Nations Unies 61

III.4.1 Le volontarisme 61

III.4.2 Problème d'exécution des arréts de la Cour 62

III.4.3 Des faiblesses structurelles 63

III.4.4 Une juridiction concurrencée 64

III.4.5 Réserves des Etats face à la compétence de la Cour 65

CONCLUSION GENERALE 67

BIBLIOGRAPHIE 71

1

0. INTRODUCTION GÉNÉRALE

Aujourd'hui, l'humanité est aussi cruellement frappée par les si graves violations des droits de l'homme y compris méme les normes de Jus Cogens considérées pourtant comme droits les plus sacrés. On se demande si cette violation des normes de Jus Cogens ne serait pas l'une des conséquences de leur caractère indéfini, ou, au contraire, si l'on pourrait concevoir que la Cour Internationale de Justice qui devait mettre en valeur leur respect ne remplit pas efficacement sa mission.

Le présent travail se focalise sur autant de questions que pose l'angoisse de ce temps et de celui qui vient dans le cadre du respect des normes de Jus Cogens. Le respect de ces normes est en tous cas l'idéal vers lequel nous devons tendre. Cet idéal à travers la prééminence des Jus Cogens ne se décrète pas : il se construit lentement et sürement. Ce n'est en effet qu'au prix d'un travail et d'un effort importants que l'universalité des Jus Cogens deviendra effective dans chaque société.

L'étude examine les arréts et avis consultatifs de la Cour Internationale de Justice et évalue la perception que celle-ci a de la suprématie et du caractère obligatoire des Jus Cogens. Elle met un accent particulier sur l'arrêt de la Cour Internationale de Justice de 2006 (affaire qui opposait la République Démocratique du Congo à la République du Rwanda). Dans cet arrêt, la Cour Internationale de Justice semble avoir oublié qu'elle avait déjà reconnu en 1970 dans l'affaire Barcelona Traction (et ailleurs), la suprématie des normes de Jus Cogens ; normes du droit international auxquelles découlent les obligations erga omnes (imposables à tout le monde) en admettant la légalité de la réserve faite par le Rwanda à l'article 9 de la Convention sur le Génocide.1

L'étude montre que méme si dans cette affaire la Cour Internationale de Justice a reconnu la prééminence des Jus Cogens, elle a encore une fois montré sa faiblesse ou sa mauvaise volonté de contraindre les Etats à s'adhérer au respect strict de ces normes. En effet, il semble que le respect des Jus Cogens est laissé à la seule volonté des Etats car ces derniers pouvant

2

accepter ou refuser la compétence de la Cour Internationale de Justice, la seule juridiction internationale capable de réprimer l'Etat transgresseur des normes d'une telle intensité.

0.1 Choix et intérêt du sujet

Le choix de ce thème n'a pas était le fruit du hasard. Il a été motivé par le débat qui a été soulevé en classe lorsqu'on examinait ensemble avec l'enseignant les motivations et les conséquences de l'arrêt de 2006. Compte tenu du temps dont on disposait, le débat a été suspendu et l'idée de mener une recherche là-dessus est ainsi venue dans notre esprit.

Le présent travail présente un intérêt à la fois sur le plan social et scientifique comme nous le montrons dans les paragraphes suivants.

· Intérêt social

Cette étude comporte un intérêt social dans le sens où les normes de Jus Cogens protègent les droits les plus sacrés dont disposent tous les êtres humains en vertu de leur dignité. La société étant « considérée comme le réceptacle et le champ d'application de toutes les implications qui peuvent découler des décisions des Etats, des organisations et des juridictions internationales comme la Cour Internationale de Justice » 2, l'intérêt social dans le cadre de ce travail est manifeste.

La Cour Internationale de Justice a été et sera sollicitée pour trancher des différends en rapport avec les Jus Cogens ; génocide commis par un Etat contre la population d'un autre Etat par exemple. La vie et les activités des populations restent donc liées au prononcé du juge international face à la violation des normes de Jus Cogens.

· Intérêt scientifique

L'intérêt scientifique réside dans l'apport de cette étude à l'univers scientifique, en ce qui concerne le rôle de la Cour Internationale de Justice dans la détermination et le respect des

2 OUMBA, P., « La Cour Internationale de Justice et la problématique des droits de l'homme », (Mémoire), Université Catholique d'Afrique Centrale, 2005, disponible sur : http://www.memoireonline.com, visité le 29/04/2011.

4

normes de Jus Cogens. Certes, ce travail aidera les chercheurs qui aborderont ce sujet sous d'autres dimensions pour une meilleure évolution scientifique. En outre, la valeur ajoutée de cette étude consiste non seulement à apporter un enrichissement à la connaissance scientifique sur les normes de Jus Cogens qui, malgré leur supériorité continuent à être violées ici et là, mais aussi sur les voies et les moyens à envisager pour pallier aux défis y afférents.

0.2 Délimitation du sujet

Pour éviter de nous perdre dans un bavardage inutile ne cadrant pas avec notre sujet, nous avons trouvé qu'il est nécessaire de délimiter notre argumentaire dans le domaine, dans l'espace et dans le temps.

? Dans le domaine

Ce travail se situe dans le cadre du droit international public mais il aborde aussi en quelque sorte les aspects des droits de l'homme vu que le « hard core rights»3 des droits de l'homme est constitué presque dans sa totalité par des normes de Jus Cogens.

? Dans l'espace

Etant donné que les normes de Jus Cogens et la Cour Internationale de Justice ont une portée universelle, il est difficile voire méme impossible de limiter cette étude dans l'espace.

? Dans le temps

La pensée sur les normes de Jus Cogens nous situe aux années 1969 avec la Convention de Vienne sur le droit des traités. Ainsi, cette étude examine l'évolution de la condition du Jus Cogens depuis sa reconnaissance par cette Convention à nos jours.

0.3 Enoncé du problème de recherche

A une époque où les violations des Jus Cogens se multiplient, bien des observateurs avisés se posent la question cardinale au sujet de l'apport de la Cour Internationale de Justice

3 Ensemble des droits de l'homme protégés par des règles impératives qui ne peuvent pas être dérogées.

dans la détermination et le respect de ces normes, étant placée par la Convention de Vienne de 1969 au coeur du mécanisme de leur reconnaissance.4

Il ya lieu en effet de se demander quel a été et quel est le rôle de la Cour Internationale de Justice dans la détermination et la reconnaissance des normes de Jus Cogens et comment ce rôle est matérialisé à travers la jurisprudence de cette Cour. Cette question entraîne aussi l'inquiétude de savoir comment la Cour Internationale de Justice pourrait contraindre les Etats à respecter les Jus Cogens si elle admet le refus de sa juridiction par les Etats accusés d'enfreindre ces normes. Et si la Cour Internationale de Justice déclare qu'elle n'est pas compétente de réprimer les Etats transgresseurs des Jus Cogens, qui en est capable ?

Voilà d'ailleurs ce qui justifie pertinemment le pourquoi de la mise en question de certains arrêts rendus par la Cour Internationale de Justice étant peu soucieuse de la sacralité des Jus Cogens. L'arrêt de 2006 (affaire RDC c. la République du Rwanda) est plus questionnable car c'est à partir de là que la communauté internationale en général et certains érudits en particuliers ont encore revenu sur leur remise en cause de la valeur que la Cour Internationale de Justice réserverait aux normes de Jus Cogens par rapport aux autres règles fondamentales.

D'autres questions monumentales restent aussi à poser comme celle de savoir pourquoi la Cour Internationale de Justice a été pendant longtemps caractérisée par la réticence dans la reconnaissance des Jus Cogens et celle de savoir comment cette Cour serait disposée à faire respecter ces normes par les Etats.

Bref, le fait que la Cour Internationale de Justice entérine la notion de Jus Cogens tout en s'écartant de son rôle dans la détermination et le respect de ces normes en même temps, pose la question du rôle futur de cette notion et des conséquences juridiques qu'il faut attacher à la violation de ces normes car, comme l'indique M.I. BROWNLIE, «de nombreux problèmes

5

d'application subsistent s'agissant du Jus Cogens ».5 En d'autres termes il y a lieu de se demander si l'on devrait continuer à croire en la suprématie des Jus Cogens.

Cela étant, il apert de signaler que pour mieux nous orienter, nous nous sommes posé ces deux questions de recherche :

1. Quel serait le rôle de la Cour Internationale de Justice dans la mise en valeur des normes de Jus Cogens ?

2. Quelles seraient les mesures à mettre en branle pour un avenir meilleur des normes de Jus Cogens ?

0.4 Hypothèses de travail

En attendant les résultats de notre recherche, nous pouvons provisoirement émettre de telles suppositions en réponse à la problématique ci-haut évoquée :

1. La Cour Internationale de Justice, pourtant placée par la Convention de Vienne de 1969 au coeur du mécanisme de reconnaissance des Jus Cogens semble être très timorée dans son oeuvre de détermination et de matérialisation de ces normes ;

2. La révision de la compétence de la Cour Internationale de Justice serait l'une des meilleures solutions pour assurer le respect des normes de Jus Cogens.

0.5 2 Ejer\ifs de l'é\xde

Sous ce paragraphe, nous voulons présenter succinctement l'objectif global et les objectifs spécifiques visés par ce travail.

? Objectif général

L'objectif général de la présente étude consiste à examiner le rôle de la Cour Internationale de Justice dans la détermination et le respect des normes de Jus Cogens. Il s'agit en d'autres termes d'examiner comment la Cour, en tant que principal organe judiciaire du droit

5 BROWNLIE, M. I, cité par M. DUGARD, « Opinion individuelle sur l'arrêt de la Cour Internationale de Justice du 3 février 2006 (affaire RDC c. le Rwanda) », disponible sur : www.haguejusticeportal.net, visité le 29/04/2011.

6

international public, concourt à mettre en évidence les valeurs fondamentales que la communauté internationale a exprimées dans les Jus Cogens.

? Objectifs spécifiques

Pour être plus précis dans notre réflexion, nous nous sommes fixé des objectifs spécifiques qui découlent de l'objectif général tels que :

1. Elucider le concept de Jus Cogens et expliquer le fonctionnement de la Cour International de Justice ;

2. Montrer les défis auxquels la Cour Internationale de Justice est bitée dans la matérialisation de son rôle de déterminer et d'assurer le respect des normes de Jus Cogens ;

3. Proposer les voies et moyens à mettre en branle pour un avenir meilleur des Jus Cogens.

0.6 Choix des techniques et méthodes

Pour mener ce travail à bon escient, nous nous proposons d'abord de présenter quelques techniques et méthodes qui ont orienté notre argumentaire.

? Technique

Une technique est un ensemble de procédés mis en oeuvre dans le but d'obtenir un résultat bien déterminé. Par « technique de recherche », il faut entendre « les moyens par lesquels le chercheur passe pour récolter les données indispensables à l'élaboration de son travail scientifique ».6

Cela étant, il convient de signaler que la technique documentaire a été mise en branle pour la réalisation de la présente étude. Celle-ci consiste à consulter les documents ayant trait à l'objet de la recherche. Elle nous a servi dans la lecture des ouvrages et des travaux antérieurs en rapport avec notre sujet.

7

? Méthodes

Une méthode est un ensemble ordonné de principes, de règles et des opérations intellectuelles permettant de faire l'analyse en vue d'atteindre un résultat. C'est aussi « l'ensemble de démarches que suit l'esprit pour découvrir et démontrer la vérité dans la science ».7 Dans le cadre de cette réflexion, nous avons procédé à une quadruple démarche : historique, exégétique, analytique et synthétique.

? La méthode historique

Cette méthode nous a permis de porter un regard rétrospectif sur ce qu'a été le rôle de la Cour Internationale de Justice dans la détermination et l'application des normes de Jus Cogens depuis leur consécration par la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 jusqu'aujourd'hui.

? La méthode synthétique

Elle nous a permis de résumer les différentes théories développées par les auteurs en rapport avec notre sujet de recherche.

? La méthode exégétique

Faire l'exégèse des textes, nous dit le Professeur J. D. BOUKONGOU, « c'est rechercher leur signification et leur portée, par la seule analyse de ces textes eux-mêmes (...) ».8 La méthode exégétique, dans le cadre de notre étude, consiste à analyser les différents textes, notamment les conventions, les arrêts de la Cour Internationale de Justice, et les autres textes de lois afin de chercher leur signification et leur portée, et ainsi mesurer leur impact sur la détermination et l'avenir des normes de Jus Cogens.

En effet, c'est au regard de ce cadre juridique que nous découvrirons l'état d'évolution ou de régression de la situation des normes de Jus Cogens. Aussi, cette méthode se situe-t-elle dans

7 ) VERNAGEN, B., Lexique du Cours de méthode de travail, Université de Kisangani (UNIKIS), Kisangani, 2000, p.10, (inédit).

8 BOUKONGOU J. D., Op.cit, p. 28.

le droit fil de la recherche documentaire que nous avons effectuée dans des différents ouvrages de droit international public.

? La méthode analytique

Cette méthode permet de faire un examen systématique de toutes les informations. Elle nous a permis de porter un jugement de valeur sur les informations recueillies de différentes sources documentaires en rapport avec notre sujet de recherche.

0.7 Plan du travail

Outre la présente introduction générale et la conclusion générale assortie des suggestions destinées à l'amélioration de la condition des normes de Jus Cogens, le présent travail s'articule autour de trois chapitres consacrés respectivement au cadre conceptuel et théorique, à l'examen du rôle de la Cour Internationale de Justice dans la détermination et le respect des normes de Jus Cogens et à la proposition des voies et moyens pour un avenir meilleur des normes de Jus Cogens.

9

CHAPITRE I : CADRE CONCEPTUEL ET THEORIQUE

Après avoir présenté succinctement l'ossature de notre travail, nous voici arrivés à son premier chapitre. Ceci tente de donner une compréhension succincte de la notion de Jus Cogens et d'une vision globale sur la Cour Internationale de Justice.

Cela étant, il sied de signaler tout au début de ce chapitre que la notion de Jus Cogens figure sans ombre de doute parmi les notions les plus controversées en droit international public. Si ses passionnés défenseurs prétent à la notion d'immenses vertus, voire des conséquences juridiques insoupçonnées, ses attaquants n'ont pas cessé de la décrire comme « une conception qui est entachée d'obscurité et prêtant à confusion >.9 En effet, cette notion a donné lieu aux débats théoriques et a causé la remise en cause de l'unité du régime normatif international10 ; d'où alors la nécessité de son élucidation avant d'aller plus loin au fond d'une réflexion sur son élaboration et son application.

Quant à la Cour Internationale de Justice, le présent chapitre donne une vue d'ensemble sur sa création, son fonctionnement, son organisation, sa mission, ses justiciables, la source du droit applicable et la procédure, sa composition et ses principes directeurs.

I.1 Généralités sur le concept de Jus Cogens

La Charte de l'ONU a reconnu l'existence de multiples règles générales juridiques, ayant une essence supérieure et s'imposant à l'humanité entière sans qu'il soit possible d'y déroger.11 Ainsi, on ne peut faire abstraction du concept de Jus Cogens qui aujourd'hui fait l'objet d'une résurgence. Ce concept serait l'aboutissement de règles philosophiques obligatoires liées à la conscience universelle et indissociables à l'existence de toute communauté internationale.12

9Nations Unies, Annuaire de la Commission du droit international : compte rendu analytique de la 878e séance (Missions spéciales), Document A/CN.4/SR.878, vol. I(2), 27 juin 1966, pp. 257-266.

10 PELLET, A., « Le crime international de l'Etat >, disponible sur http://alainpellet.fr , visité le 9/8/2011.

11 RENAUDIN, F., Droit international à l'étranger, Université Paris 2, éd. A. PEDONE, 2006, p. 43.

12 JOCELIN, P.-L., Droit international public, licence 3-1er semestre, Université Paris-Sud 11, 2006-2007, (inédit).

10

I.1.1 Elucidation du concept de Jus Cogens

Nous voulons examiner sur ce point quelques déterminants du Jus Cogens. Il s'agit par exemple de son origine, ses caractéristiques, son élaboration, son contenu, sa consécration, sa place dans la hiérarchie des normes, son caractère obligatoire, quelques objections portées contre lui, la justification de la prohibition de toute dérogation à une norme de Jus Cogens et enfin du Jus Cogens comparé à ses notions voisines.

I.1.1.1 Origine

L'origine de la notion de Jus Cogens nous est retracée clairement par J. VERHOEVEN en ces termes :

« La notion de Jus Cogens est apparue pour la première fois dans la pratique internationale lors des travaux de la Commission du droit international consacrés à la codification et au développement du régime juridique des accords internationaux, qui ont abouti à la signature, le 23 mai 1969, de la Convention de Vienne sur le droit des traités (entre États). L'article 53 de celle-ci frappe expressément de nullité le traité qui, au moment de sa conclusion, est en conflit avec une norme impérative du droit international général».13

Ainsi, selon VERHOEVEN J., c'est sur base de l'article 53 de la Convention de Vienne de 1969 qu'il convient de soutenir une démarche de détermination de la norme impérative du droit international général qu'est le Jus Cogens.

Cependant, F. RENAUDIN nous fait remarquer que le concept de Jus Cogens existait

déjà avant l'avènement de la Convention de Vienne de 1969. Il le dit en ces termes :

« Dans le droit positif humanitaire, le concept était déjà présent, notamment, l'amélioration du sort des blessés, le traitement des prisonniers de guerre, dans les quatre Conventions de Genève du 12 Aout 1949. Il résultait d'usages entre nations et des lois de l'humanité et de la conscience. »14

13 VERHOEVEN, J., « Les «bons» et les «mauvais» emplois du Jus Cogens », disponible sur : www.oas.org, visité le 30/04/2011.

14 RENAUDIN, F., « Jus Cogens et droit international », CNRS, disponible sur : http://www.opuscitatum.com, consulté le 30/04/2011.

I.1.1.2 Caractéristiques

La question de savoir à quoi reconnaître qu'une norme fait partie du Jus Cogens semble difficile. Néanmoins, en se basant sur l'article 50 du projet de la Commission du Droit International, on peut du moins en déceler quelques caractéristiques. Cet article dispose ce qui suit :

« Est nul tout traité en conflit avec une norme impérative du droit international général à laquelle aucune dérogation n'est permise et qui ne peut être modifiée que par une nouvelle norme du droit international général ayant le même caractère.»15

De ce texte ressortent trois éléments essentiels à prendre en considération : pour avoir la qualité de Jus Cogens, une norme doit, à la fois : être impérative, appartenir au droit international général, et frapper de nullité les traités passés en violation de ses dispositions. Ce sont ces trois éléments que nous voudrions successivement analyser.

a. Norme impérative sans dérogation

En règle générale, il est normalement possible à deux Etats de décider, pour ce qui concerne leurs rapports mutuels, de ne pas appliquer certaines normes du droit international qui leur imposent des obligations l'un envers l'autre, ou bien encore de choisir d'appliquer d'autres normes, comportant d'autres obligations que celles prévues par le droit international général. En d'autres termes, les normes de droit international constituent normalement ce que l'on appelle droit « dispositif ».16

Ceci n'est pas le cas pour une norme de Jus Cogens. Celle-ci est obligatoire pour tous les destinataires. Il s'agit donc d'une norme prohibitive à laquelle, il est interdit de déroger et constituant une limite importante à l'autonomie contractuelle des Etats. Le Jus Cogens se caractérise précisément par le fait qu'il interdit toute dérogation dans les rapports mutuels entre des Etats. « Ceci signifie qu'un Etat ne peut se décharger des obligations qu'une norme de Jus

15 Commission du Droit International, « Projet d'articles sur le droit des traités et commentaires », 1966, disponible sur : http://untreaty.un.org , visité le 30/04/2011.

16 MONNIER, V., Droit international public Relations internationales, Université de Genève, Semestre d'hiver 2006-2007, (inédit).

12

Cogens lui impose vis-à-vis d'un autre Etat, même par traité, c'est-à-dire avec le consentement de cet autre Etat : ce dernier ne peut renoncer lui-même à ses droits ».17 Il découle de cette analyse que le Jus Cogens présente un caractère prohibitif, mais dans un sens très particulier, puisque la portée de cette prohibition est d'interdire toute dérogation à ses dispositions.

b. Norme de droit international général

Le droit international général a été défini par la Commission du Droit International comme :

<< L'ensemble des normes applicables à tous les Etats membres de la société internationale, par opposition aux normes internationales applicables à certains d'entre eux seulement et qui constituent le droit international particulier, qu'il soit régional, local ou bilatéral.»18

Aussi, l'article 50 du projet de la Commission du Droit International insiste tout particulièrement sur ce point, qui ne constitue pas un simple corollaire du caractère précédent, mais ayant son importance en lui-même.19 Le fait que le Jus Cogens soit constitué exclusivement de normes de droit international général souligne, en effet, qu'il présente un caractère d'universalité.

Ce trait souligne bien que le Jus Cogens se caractérise par l'importance qu'il revêt pour la société internationale dans son ensemble ; s'il exprime des valeurs éthiques, celles-ci ne peuvent évidemment s'imposer avec la force impérative qui lui appartient que si elles sont absolues et, par conséquent, ne connaissent pas de limites géographiques dans leur application. Si le Jus Cogens est au service d'intérêts généraux, communs à la société internationale toute entière, il doit aussi s'appliquer à toute cette société. S'il est destiné à assurer la protection d'Etats

17 VIRALLY, M., << Réflexion sur le Jus Cogens », disponible sur : http://www.persee.fr, visité le 05/05/2011.

18 Commission du Droit International, << Projet d'articles sur le droit des traités et commentaires », 1966, disponible sur : http://untreaty.un.org , visité le 30/04/2011.

19 BREART, J., <<Travaux de la Commission du droit international des Nations Unies », in : Annuaire français de droit international, Vol. 15, no 15, 1969, pp. 458-461.

individuels, cette protection doit être donnée, quels que soient les groupes auxquels ces Etats appartiennent.20

En d'autres termes, on constate que la notion qui nous occupe conduit nécessairement à la conception d'une société internationale universelle, dotée de ses valeurs propres et pouvant invoquer, à son profit, un véritable intérêt général, qui doit l'emporter sur les intérêts particuliers de ses membres : il s'agit donc d'une société internationale à laquelle les Etats ne sont pas libres de s'ouvrir ou de se refuser.21

c. Norme frappant de nullité toute norme dérogatoire

C'est là le caractère essentiel et exceptionnel des Jus Cogens ! En effet, la nullité constitue la sanction la plus grave qui puisse frapper un acte juridique, puisqu'elle supprime tous les effets de droit qu'il aurait pu normalement produire. En droit international, une telle sanction est extrêmement rare, y compris dans le droit des traités. La sanction ordinaire d'un acte internationalement illicite, c'est-à-dire constituant une violation du droit international, est la mise en jeu de la responsabilité de l'Etat qui en est l'auteur.22

La gravité de la sanction découle très directement de l'importance fondamentale que revêtent les normes de Jus Cogens pour la société internationale. Il en résulte, tout à fait logiquement, que les Etats se voient placés dans l'impossibilité juridique d'échapper à leur application, puisque, s'ils tentent de le faire, leurs actes seront dépourvus d'effets juridiques.23

Aux trois traits caractéristiques des Jus Cogens ci-haut évoqués, quelques auteurs ajoutent encore un élément qui nous semble important : pour qu'une norme soit qualifiée de

20 HENNEBEL, L., « L'humanisation du droit international des droits de l'homme : Commentaire sur l'avis consultatif no 18 de la Cour interaméricaine relatif aux droits des travailleurs migrants », disponible sur http://www.rtdh.eu , visité le 12 mai 2011.

21 VIRALLY, M., « Réflexion sur le Jus Cogens », Op.cit., p. 32.

22 GROSSRIEDER, E., « Commentaires à la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 », disponible sur http://www.stoessel.ch , consulté le 20 juin 2011.

23 GOMEZ ROBLEDO, A., « Le Jus Cogens : sa genèse, sa nature, ses fonctions », disponible sur http://scholar.google.com , visité le 12/11/2011.

14

« Jus Cogens », il faut qu'elle soit reconnue comme telle par la communauté internationale. L'idée est libérée en ces termes :

« Ce sont des règles acceptées et reconnues comme Jus Cogens par la communauté internationale
des États dans son ensemble : des règles reconnues et acceptées comme Jus Cogens. Il s'agit icid'un processus proche de la coutume, le Jus Cogens constituant alors une règle coutumière

endurcie. Cette formulation semble exclure le fait que le Jus Cogens soit une manifestation directe du droit international ; elle évoque une solidarité et une unité de la société internationale. »24

Nonobstant les caractères principaux d'une norme de Jus Cogens ci-haut mentionnés, il est aussi apparent que sa détermination ne peut être faite qu'en prenant en considération des éléments matériels, c'est-à-dire le contenu de la norme en question, sa signification éthique et politique. Une telle méthode risque, toutefois, de soulever des difficultés pratiques considérables. Les possibilités de contestation sont évidemment extrêmement larges et difficiles à réduire lorsqu'il s'agit de qualifier une norme en raison de sa valeur morale, de son importance pour la société dans son ensemble, ou des besoins de protection auxquels elle répondrait. Une telle appréciation est nécessairement subjective et, par conséquent, ne répond pas à des critères très stricts.25

Ce problème, de caractère pratique, a, d'ailleurs, été souligné dans les réponses de nombreux gouvernements et aussi dans les critiques doctrinales adressées à la notion de Jus Cogens. Sa gravité ne peut être sous-estimée, mais il n'est pas évident qu'on ne puisse pas lui trouver une solution satisfaisante. Le scepticisme l'a quelquefois emporté et a conduit à négliger les voies qui conduisent à la découverte de critères présentant une certaine objectivité et permettant, dès lors, de surmonter cette difficulté.26

24 ANONYME, « Le Jus Cogens : droit naturel et ordre public international ou transnational », disponible sur : http://fr.wikipedia.org , visité le 05/05/2011.

25 CANNIZZARO, E., «The law of treaties beyond the Vienna Convention» (le droit de traités au-delà de la Convention de Vienne), disponible sur http://books.google.rw , visité le 4/7/2011.

26 12/02/08, N'GUYEN QUOC, « Traité de droit international », disponible sur http://www.google.rw , visité le 4/11/2011.

I.1.2 Elaboration des normes de Jus Cogens

La Convention de Vienne n'institue nulle part de procédure spécifique d'élaboration des normes impératives. Néanmoins, il faut noter que dans le processus de formation d'une norme de Jus Cogens la présence de l'opinio juris est requise. Déduit de conceptions éthiques ou d'une représentation normative de la société internationale, le jus évolue en fonction des transformations de la situation socio-historique de la société internationale et des modifications intervenues dans les conceptions politiques, éthiques, philosophiques, idéologiques qui s'y rapportent.27

I.1.3 Contenu des normes de Jus Cogens

La Convention de Vienne sur le droit des traités ne donne aucun exemple de norme de Jus Cogens et ne précise pas son contenu. Aucune liste n'est dressée de normes de Jus Cogens ; c'est la jurisprudence qui a érigé ces droits en normes impératives. Par exemple, dans son avis consultatif sur les réserves à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, la Cour Internationale de Justice a relevé les traits particuliers de la Convention sur le génocide. Pour la Cour, en effet, « les origines de la Convention révèlent l'intention des Nations Unies de condamner et de réprimer le génocide comme « un crime de droit des gens ».28

De ce fait, le Jus Cogens concernerait des normes impératives qui ont trait à la protection du droit des gens. Ces normes sont tellement importantes que ce sont des normes supérieures

auxquelles il n'est pas possible de déroger. Ainsi « l'opinion générale de la communautéinternationale pense que l'interdiction du génocide, de la torture, de l'apartheid, l'interdiction

du recours à la force ou de la piraterie sont considérées comme faisant partie des normes du Jus Cogens ».29

27 TOMUSCHAT C., THOUVENIN, J.-M., «The fundamental rules of the international legal order» (les règles fondamentales de l'ordre juridique international), disponible sur http://books.google.rw, visité le 20/9/2011.

28 Cour Internationale de Justice, « Avis consultatif du 28 mai 1951 sur la question des réserves à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide », disponible sur : www.icj-cij.org, consulté le 05/05/2011.

29 ANONYME, « Le Jus Cogens », disponible sur : http://www.oboulo.com, Visité le 05/04/2011.

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Il convient de signaler que faisant référence au contenu des Jus Cogens, la Commission de Droit International quant à elle, s'est limitée à en donner quelques exemples tels que : « le principe de non-intervention, la souveraineté des Etats, le respect de la parole donnée (principe pacta sunt servanda) ».30 La Commission cite également :

« Le principe de règlement pacifique des différends, le respect du droit diplomatique et consulaire, l'illicéité du génocide, de l'esclavage, de la traite et la piraterie, le principe de la responsabilité et la réparation du dommage causé à autrui, l'autonomie de la volonté des Etats et la liberté contractuelle en conformité avec le droit international, le respect du standard minimum dans le traitement accordé aux étrangers ».31

Parlant toujours des Jus Cogens, M. RWANKUBITO, quant à lui, cite en exemple le règlement de La Haye de 1907 et les Conventions de Genève de 1949. Il le dit en ces termes :

« A titre exemplatif, le règlement de La Haye de 1907 et les Conventions de Genève de 1949 contiennent assurément des normes reconnues et acceptées par la communauté internationale des Etats dans son ensemble, dans la mesure où le premier a été considéré comme de droit coutumier liant même des Etats qui n'y ont pas adhéré, et dans la mesure où les secondes lient quasiment tous les Etats ».32

Ainsi, de nos jours, on remarque qu'une littérature juridique importante reconnaît les règles relevant des Jus Cogens suivantes : « l'interdiction du recours à la force, le génocide, les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre, la piraterie, l'esclavage et les pratiques analogues à l'esclavage, la torture, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, les droits fondamentaux de l'homme, etc. »33 Il est aussi généralement admis que le crime contre le Jus Cogens est un crime condamné par la conscience universelle.

30 Commission de droit international, cité par OUMBA, P., Op.cit., p.17.

31Commission du Droit International, « Projet d'articles sur le droit des traités et commentaires », 1966, disponible sur : http://untreaty.un.org , visité le 30/04/2011.

32 RWANKUBITO, M., De l'applicabilité des règles du droit international public : mythe ou réalité?, Université Libre de Kigali, Kigali, 2006, p.45 (inédit).

33Organisation des Etats Américains, « Défendre les droits de l'homme », disponible sur : www.oas.org, visité le 05/04/2011.

I.1.4 Consécration officielle du Jus Cogens dans la jurisprudence internationale

Différentes cours internationales ont fait référence au Jus Cogens. Outre la Cour Internationale de Justice dont nous reviendrons sur sa jurisprudence dans le deuxième chapitre, les tribunaux pénaux internationaux établis par le Conseil de Sécurité et les juridictions relatives à la protection des droits de l'homme ont contribué à la consécration des normes de Jus Cogens. C'est ce que Naima et Céline affirment en ces termes :

« (....) Tout d'abord, le Tribunal Pénal pour l'ex-Yougoslavie en 1998 dans l'affaire Furundzija déclare que l'interdiction de la torture est une obligation erga omnes et une norme du Jus Cogens. Le comité des droits de l'homme des Nations Unies par la suite, dans une observation générale sur l'article 4 du pacte relatif aux droits civils et politiques adopté le 24 juillet 2001, opère un lien entre l'indérogeabilité et le Jus Cogens. Enfin dans l'affaire « Al-Adsani » du 21 Novembre 2001 la Cour Européenne des Droits de l'Homme confirme l'interdiction de la torture en tant que norme du Jus Cogens et en expose les conséquences sur les immunités dont bénéficient les Etats devant les tribunaux internes. »34

Outre ces juridictions internationales, M. RWANKUBITO, nous fait remarquer que quelques tribunaux arbitraux ont aussi reconnu et fait références aux normes de Jus Cogens. C'est ce qu'il déclare en ces termes :

« Dans l'affaire de la délimitation de la frontière maritime Guinée-Bissau/Sénégal, le tribunal arbitral a estimé que « du point de vu de droit des traités, le Jus Cogens est simplement la caractéristique propre à certaines normes juridiques de ne pas être susceptibles de dérogation par voie conventionnelle ».35

Ainsi, il est remarquable qu'il existe une jurisprudence internationale immense faisant référence aux normes de Jus Cogens. Nous ne tenterions pas de l'analyser entièrement mais ce que nous pouvons faire constater est qu'elle ne permet pas la compréhension efficace de ce qu'est le Jus Cogens.

34 NAIMA, et CELINE, « Les grandes notions du droit international public : le Jus Cogens à travers la jurisprudence », mardi 30 octobre 2007, disponible sur http://notionsdip.blogspot.comm , consulté le 09/05/2011.

35 RWANKUBITO, M., Op.cit, p. 46.

18

I.1.5 Place des Jus Cogens dans la hiérarchie des normes

Il n'y a en principe pas de hiérarchie entre les sources du droit international. Cependant, la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 dans ses articles 53 et 64 semble reconnaître une certaine hiérarchie des normes internationales.36 Cette hiérarchie est justifiée par ce que les spécialistes du Droit International appellent le Jus Cogens.

En effet, par les mots de l'article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités :

« Une norme impérative du droit international général est une norme acceptée et reconnue par la communauté internationale des États dans son ensemble en tant que norme à laquelle aucune dérogation n'est permise et qui ne peut être modifiée que par une nouvelle norme du droit international général ayant le même caractèrei37

Ainsi, à travers cette définition, la Convention de Vienne introduit une hiérarchie des normes internationales. Dès lors, il s'opère une distinction entre les normes internationales impératives, sorte de super-normes, (Jus Cogens), auxquelles il est impossible de déroger, et les autres normes internationales qui demeurent cependant obligatoires.

Il est clair que les règles de Jus Cogens revêtent d'une supériorité hiérarchique par rapport à celles auxquelles elles permettent de déroger, par exemple en frappant de nullité une Convention. Cela n'empêche qu'il existe nécessairement d'autres rapports hiérarchiques que ceux qui sont exprimés par la «prééminence» du Jus Cogens.

Il en résulte naturellement que certaines règles sont plus «impératives» que d'autres, puisqu'elles l'emportent en cas de conflit. Cette impérativité est évoquée à l'article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités. Ici, ce qui est en cause, est le respect de «valeurs» fondamentales mais aussi la cohérence d'un ordre juridique qui pourrait être radicalement compromise s'il n'accordait pas, ft-ce conditionnellement, une priorité à certaines règles par

36 Articles 53 et 64 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, Vienne, le 23 mai 1969, entrée en vigueur le 27 janvier 1980, Nations Unies, Recueil des Traités, vol. 1155, p.331.

37 Ibidem.

rapport à d'autres lorsqu'elles ne peuvent pas l'une et l'autre s'appliquer, simultanément ou non, à une même situation.38

Dans l'opinion individuelle qu'il a jointe à l'ordonnance du 13 septembre 1993 de la Cour Internationale de Justice relative aux mesures conservatoires demandées dans l'affaire de l'application de la Convention sur le génocide, le juge LAUTERPACHT a déclaré :

«La solution que l'article 10339 de la Charte offre au Conseil de Sécurité [...] ne peut
aller jusqu'au point où une résolution du Conseil de Sécurité entrerait en conflit avec le

Jus Cogens. (...) Dans le Jus Cogens, la norme impérative relève d'une catégorie quil'emporte à la fois sur le droit international coutumier et sur le droit conventionnel».40

On comprend que le Conseil de Sécurité ne puisse normalement pas déroger au Jus Cogens, ce qui ne pourrait logiquement se concevoir que s'il était en mesure de donner à ses décisions un caractère de Jus Cogens.

I.1.6 Caractère obligatoire des Jus Cogens

Le caractère impératif de la norme de Jus Cogens se distingue du caractère obligatoire d'autres normes qui, à l'inverse du premier, peut être écarté par des exceptions conventionnelles. De plus, tandis que le caractère obligatoire d'une norme n'est reconnu que par certains Etats, la norme de Jus Cogens est quant à elle, reconnue par la communauté internationale toute entière, méme si, à l'instar de la France, tous les Etats ne sont pas partie à la Convention de Vienne de 1969. Il n'en demeure pas moins que des règles de Jus Cogens, telle que l'interdiction de la torture, sont unanimement reconnues. D. ROUZIE dira alors que :

38 CORTEN, O., « Recours à la force/Jus Cogens », disponible sur www.ulb.ac.b , visité le 24/8/2011.

39 Article 103 de la Charte des Nations Unies, adoptée à San Francisco le 25 septembre 1945, disponible sur : http://www.micheline.ca , consulté le 16/09/2011.

40 LAUTERPACHT, cité par VERHOEVEN, J., « Sur les bons et les mauvais emplois des Jus Cogens », disponible sur : http://www.oas.org, consulté le 09/05/2011.

20

<< Le Jus Cogens constitue une exception notable à l'exigence du consentement des Etats qui a été consacrée par la Convention de Vienne sur le droit des traites et la Cour Internationale de Justice (affaire du Plateau Continental de la mer du nord, 1969) ».41

Le caractère innovant de ces normes de Jus Cogens et la raison pour laquelle ces normes sont aussi qualifiées de << super-coutumes >> « est qu'elles ont le pouvoir d'être supérieures à toutes autres normes ou obligations internationales et qu'elles ont vocation universelle, alors que similairement à d'autres normes de droit international de valeur inférieure, elles sont nées d'une coutume ou d'une opinio juris persistante.»42

I.1.7 Justification de la prohibition de toute dérogation à une norme de Jus Cogens

La prohibition de toute dérogation à une norme de droit international peut se justifier dans deux hypothèses différentes. La première hypothèse concerne les règles destinées à protéger des intérêts dépassant les intérêts individuels des Etats. Dans ce cas, une dérogation ne serait pas simplement une renonciation individuelle de la part d'un Etat à ses propres droits, dont il peut disposer conformément à son appréciation de ses propres intérêts, elle constituerait, en même temps, une atteinte aux intérêts supérieurs que cet Etat doit respecter en toutes circonstances.43

Une telle situation peut se présenter lorsque la norme en cause possède une valeur éthique qui rendrait moralement inacceptable sa mise à l'écart. Il en sera ainsi, par exemple, des normes relatives au respect des droits de l'homme, et notamment de ses droits les plus élémentaires, qui concernent la sauvegarde de sa vie et de son intégrité physique, surtout dans le cas où la violation dont elles sont l'objet atteint tout un groupe humain. Le crime de génocide a fait l'objet d'une Convention, mais cette Convention elle-même n'a fait que reprendre une conception de la moralité la plus élémentaire dans la vie internationale qui, dans le passé déjà, avait, entre autres, justifié les interventions dites d'humanité.44

41 RUZIE D., Droit international public, 15e éd., Dalloz, Paris, 2000, pp. 3-4.

42 ANONYME, << Le Jus Cogens >> disponible sur : http://www.dissertationsgratuites.com , visité le 09/05/2011.

43 GROSSRIEDER, E., Séminaire de droit international public, Année académique 2002-2003, 2e édition, p.13.

44 NISSOT, J., << Le concept de Jus Cogens envisagé par rapport au droit international >>in Revue belge de droit international, 1968, p. 67.

Il se peut aussi qu'une norme du droit international présente pour la société internationale dans son ensemble une importance telle que sa non-application exposerait celle-ci à un grave danger, même s'il existait un accord formel entre ceux qui décideraient de s'en écarter dans leurs rapports mutuels. Il suffit ici de songer à l'exemple de deux Etats s'autorisant réciproquement à recourir à des mesures de contrainte si l'un d'eux venait à ne pas respecter les engagements pris dans le cadre d'un traité, en entendant ainsi déroger à l'interdiction du recours à la menace et à l'emploi de la force.45

Dans les deux cas, le traité dérogatoire aurait pour effet de permettre à un Etat d'adopter un comportement immoral ou antisocial. Il existe, par conséquent, une analogie entre le Jus Cogens ainsi compris et l'ordre public, tel qu'il est conçu dans le droit étatique, mais il est difficile de discerner la portée exacte de ce rapprochement et les conséquences qui peuvent en être tirées.46

La seconde hypothèse est celle d'une prohibition assurant la protection de l'Etat contre ses propres faiblesses ou contre la trop grande force de ses partenaires éventuels. En d'autres termes, il s'agit d'une protection contre les inégalités dans la puissance de négociation. En effet, la société internationale actuelle se caractérise par une extrême inégalité de fait entre les Etats, qui risque de contraindre ceux d'entre eux qui sont dotés des moyens les plus limités à accepter en contre partie d'avantages qui leur sont nécessaires, des concessions excessives ou disproportionnées.47

I.1.8 Les Jus Cogens et les notions voisines

De nombreux auteurs ont tendance à identifier le Jus Cogens et obligations erga omnes. Ils partent cependant généralement de définitions plus restreintes de ces deux concepts. Si l'on se réfère au Jus Cogens et aux obligations erga omnes dans le sens limité d'obligations découlant du droit international général et dues envers l'ensemble de la communauté internationale, les

45 YASSEEN, M.-K., Réflexions sur la détermination du Jus Cogens, 1974, p.54, (inédit).

46 MAREK, K., GUGGENHEIM, M., Contribution à l'étude du Jus Cogens en droit international, éditions Lalive et Freymond, 1968, p. 121.

47 VIRALLY, M., Op.cit, p. 21.

22

deux catégories tendent alors effectivement à se confondre. Cependant, il existe bien des différences quant aux contenus et aux fondements mais aussi des différences de perspectives.48

L'obligation erga omnes est plus ample que les obligations qui découlent de norme de Jus Cogens. Exemple dans le domaine des droits de l'homme : Les obligations erga omnes concernent principalement le noyau irréductible des droits de l'Homme, pour ainsi dire, les droits indélogeables. Les obligations erga omnes et celles qui découlent de normes impératives forment deux cercles concentriques dont le premier est plus large que le second.49

En effet, la notion d'obligations erga omnes a été introduite et approuvée par la Cour Internationale de Justice dans l'affaire de la Barcelona Traction (2e phase). La Cour a pris comme exemple d'obligations erga omnes celles qui découlent de « la mise hors la loi des actes d'agression et du génocide mais aussi des principes et des règles concernant les droits fondamentaux de la personne humaine, y compris la protection contre la pratique de l'esclavage et la discrimination raciale ».50

En un certain nombre d'occasions, la Cour a ultérieurement confirmé la notion d'obligations erga omnes, même si elle l'a utilisée avec prudence. Ainsi, dans l'affaire du Timor Oriental, la Cour a déclaré ceci : « ...il n'y a rien à redire à l'affirmation du Portugal selon laquelle le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ... est un droit opposable erga omnesi51

Dans l'affaire de l'Application de la Convention sur le génocide (exceptions préliminaires), la Cour, après avoir cité un passage de son avis consultatif dans l'affaire des Réserves à la Convention sur le génocide, a déclaré que : « les droits et les obligations consacrés dans la Convention sont des droits et des obligations erga omnes »52

48 ANONYME, « Les grandes notions du droit international public : le Jus Cogens à travers la jurisprudence internationale », disponible sur http://notionsdip.blogspot.com , visité le 03 novembre 2011.

49 Académie de droit international de La Haye, Recueil des cours, Vol. 297, 2002, p. 385.

50 Affaire Barcelona Traction, Light and Power Company Limited, Op.cit, p.19.

51 Affaire du Timor oriental (Portugal contre Australie), arrêt du 30 juin 1996, Recueil, 1996.

52 Affaire du Timor oriental, Op.cit, p. 23.

24

Entre le Jus Cogens et les obligations erga omnes des liens évidents existent, dans la mesure méme où, dans les deux cas, c'est l'intérêt général qui est en cause. Cela paraît d'autant plus évident que les exemples cités pour illustrer l'un sont très souvent identiques à ceux qui le sont pour illustrer l'autre. Il ne s'ensuit pas toutefois que tout ce qui est erga omnes soit aussi et nécessairement de Jus Cogens, et vice-versa. Il peut en effet exister un intérêt général à ce que soit protégé un intérêt purement privé, ce qui ne paraît pas donner à qui que ce soit d'autre que son titulaire qualité pour en demander le respect lorsqu'il est violé.53

Le délai de préavis en matière du contrat de travail est ainsi généralement considéré comme d'ordre public, ce qui invalide les conventions conclues avant le licenciement qui prétendaient y déroger. Mais on voit mal que ce soit quelqu'un d'autre que le travailleur licencié qui puisse s'en prévaloir.54

I.1.9 Objections au principe de Jus Cogens

Le concept de Jus Cogens reste controversé dans son appréciation. Il est entouré de zones d'ombres et fait face à des réticences. Parce que la Convention de Vienne sur le droit des traités (1969) se contente juste de réglementer sans définir le concept, certains Etats ont été réticents (la Suisse et la France). La France s'était prononcée contre le texte au motif que la notion de Jus Cogens était imprécise et qu'elle portait atteinte à la stabilité juridique des relations internationales.55

En effet, la définition de l'article 53 a été très critiquée pour son caractère tautologique et flou. De plus, il n'existe pas de texte énumératif exhaustif des normes de droit international public ayant un caractère impératif. La Convention a consacré une notion sans préciser son contenu, ni méme un cadre d'extension de son champ d'application. La Convention n'institue

53 MOULIER, I., (Maître de conférences en droit public à l'Université de Caen), La relation existant entre les normes fondamentales relevant du jus cogens et la compétence pénale universelle : essai de clarification, février 2009, p. 16, (inédit).

54 VERHOEVEN, J., Op.cit, p. 11.

55 RENAUDIN, F., Op.cit, p.33.

nulle part de procédure spécifique d'élaboration des normes impératives. Comment dès lors une règle de Jus Cogens peut-elle être dissociée des normes non impératives ?56

Le Jus Cogens reste ainsi imprécis quant au procédé de sa reconnaissance. La notion de «communauté des États dans son ensemble » est ambiguë. L'art. 53 ne prévoit pas le nombre ou la qualité des États qui doivent accepter la norme. On peut considérer, semble-t-il, que ce nombre doit être très grand et inclure tous les groupes d'États, sans que le refus persistant d'un État de reconnaître une norme comme impérative empéche son opposabilité à l'État objectant.

Aussi, certains auteurs ont soutenu que les normes de Jus Cogens ont été très développées et soutenues par les pays en voie de développement comme seul moyen dont ils disposent pour garder leur souveraineté. Ceux-ci ont alors développé tout un courant qui rejette ces normes pour plusieurs raisons. Ils affirment qu'il n'y a pas d'ordre public-le droit international ne peut se réduire à un ordre public international. Ils affirment en outre qu'il faudrait un organe qui entretiendrait et un juge qui sanctionnerait cet ordre juridique international. Sinon ils se demandent comment peut-on garantir cet ordre international.57

La seconde raison qu'ils avancent est le retour au droit naturel. Pour ces auteurs, il n'est pas admissible de faire une hiérarchie entre le droit naturel et celui positif. Le naturel s'impose au positif. Pour eux, le droit international ne peut être que l'expression de la volonté des Etats, pour dire qu'ils refusent ainsi l'idée de droit naturel.58

La troisième raison comme nous l'avons déjà évoqué est que le Jus Cogens a tendance à fragiliser les règles et les relations internationales. Les négationnistes des Jus Cogens pensent que les pays en développement vont s'en emparer pour remettre en cause des principes de droit international et que cela fragiliserait ce dernier.59

56 ANONYME, « Les normes impératives du droit international public », disponible sur http://www.forum-scpo.com , consulté le 02 /11/2011.

57 GLENNON M, J., Absurdité du Jus Cogens ?, in « Revue Générale de Droit International Public (RGDIP) », vol. 110, p.3, octobre 2006.

58 ANONYME, « Application des principes : non-dérogation au Jus Cogens », disponible sur : http://web.me.com, consulté le 03/11/2011.

59 VIRALLY, M., Réflexions sur le Jus Cogens, in « Annuaire français de droit international », Vol.12, 1966, p. 5.

I.2 La Cour Internationale de Justice

Le déséquilibre de force créé après la deuxième guerre mondiale entre les grandes puissances de l'époque a conduit les auteurs de la Charte des Nations Unies à établir une Cour Internationale de Justice modelée sur sa devancière, la Cour Permanente de Justice Internationale, tout en amendant certaines dispositions de son Statut.60

Ainsi, notre argumentaire sur ce point se focalise sur la création de la Cour Internationale de Justice, sa mission, organisation, compétence et procédure ; la source de droit qu'elle applique, sa composition, ses justiciables, et ses principes directeurs. Aussi, étant donné que la Cour Internationale de Justice est l'un des organes de l'ONU, cette dernière sera aussi examinée de passage.

I.2.1 Généralités sur la Cour Internationale de Justice

Sous ce paragraphe, nous examinerons succinctement quelques traits caractéristiques de la Cour Internationale de Justice. Il s'agit nommément de sa création, mission, organisation, compétence et procédure, les sources de droit applicable, les parties, la composition et les principes directeurs.

I.2.1.1 Création

La Cour Internationale de Justice a été instituée comme organe principal des Nations Unies avec l'avènement de la Charte des Nations le 26 Juin 1946. Siégeant au palais de la paix (construit de 1907 à 1913) à La Haye, ville de résidence du gouvernement des Pays-Bas, la Cour Internationale de Justice est établie par l'article 92 de la Charte des Nations unies.61

La Cour Internationale de Justice est l'héritière directe de la Cour Permanente de Justice Internationale qui fut crée en 1992. Organe indépendant sous l'auspice de la Société Des Nations, elle n'avait pas survécu au discrédit qui avait entaché la SDN. La Cour Permanente de Justice

60 ANONYME, « Cour Internationale de Justice », disponible sur http://fr.wikipedia.org , consulté le 01 novembre 2011.

61 Anonyme, « Charte des Nations Unies, adoptée à San Francisco le 25 septembre 1945 », disponible sur : http://www.micheline.ca, consulté le 16/09/2011.

26

Internationale, organe judiciaire en dimension internationale n'a pas fonctionné par manque de sanction et cela suite à non ratification par certains Etats tels que les Etats Unies d'Amérique. D'où la dissolution de la Société Des Nations en 1946 entraînera la disparition de la Cour Permanente de Justice Internationale pour donner place quelques temps après à la naissance de la Cour Internationale de Justice.62

I.2.1.2 Mission

La mission de la Cour Internationale de Justice est constituée par l'article 38 de son Statut. Cette mission est principalement double, à savoir : Celle de régler conformément au droit international, les différends d'ordre juridique existant entre les Etats et celle de donner des avis consultatifs sur les questions que peuvent lui poser les organes ou les agences de l'ONU autorisées à le faire.63

I.2.1.3 Organisation, compétence et procédure

La Cour Internationale de Justice est organisée selon les articles 2 à 32 du chapitre 1e de son Statut. Elle peut connaître deux types d'affaires : des différends juridiques entre les Etats qui lui sont soumis par ces derniers (procédure contentieuse) et des demandes d'avis consultatifs concernant des questions juridiques qui lui sont présentées par des organes ou institutions spécialisées des Nations Unies (procédure consultative).64

a. Procédure contentieuse

En matière contentieuse, seuls des Etats (Etats membres des Nations Unies et, éventuellement, les autres Etats ayant adhéré au Statut de la Cour ou ayant accepté sa juridiction selon des conditions précises) peuvent s'adresser à celle-ci.

La Cour ne peut connaître d'un différend que si les Etats en cause ont accepté sa compétence de l'une des trois manières suivantes :

62Nations Unies, « Cours et tribunaux, la Cour Internationale de Justice », disponible sur : http://www.un.org , visité, le 16 septembre 2011.

63 Article 38 du Statut de la Cour Internationale de Justice.

64 Articles 2 à 32 du chapitre 1e du Statut de la Cour Internationale de Justice.

1' En vertu d'un accord (aussi appelé «compromis») conclu entre eux dans le but précis de

soumettre leur différend à la Cour. L'accord est notifié au greffe de celle-ci.65

1' En vertu d'une clause compromissoire : dans ce cas, les Etats concernés sont parties à

un traité dont l'une des dispositions permet la soumission à la Cour de certaines catégories de différends ou de litiges concernant l'interprétation ou l'application dudit traité. Dans ce cas, la Cour est normalement saisie par une requête introductive d'instance qui doit comporter la mention de la disposition par laquelle le requérant prétend établir sa compétence.66

1' Le dernier est le cas où un Etat a souscrit à une déclaration facultative de juridiction

obligatoire sur les différends d'ordre juridique. Cette déclaration peut se faire purement et simplement, sous condition de réciprocité, ou pour un délai de réciprocité. Les Etats acceptent la compétence par l'effet réciproque de déclarations faites aux termes du Statut et en vertu desquelles chacun des Etats en cause a accepté la juridiction de la Cour comme obligatoire pour leurs différends avec un autre Etat ayant fait une telle déclaration.67

Notons toutefois que des réserves, c'est à dire des déclarations excluant certains domaines du litige, sont également possibles. Un certain nombre de ces déclarations, qui doivent être déposées auprès du Secrétaire Général des Nations Unies, sont assorties de réserves qui excluent certaines catégories de différends.68

65 ANONYME, « Qu'est-ce que la Cour Internationale de Justice ? », disponible sur : www.mfinue.org, visité le 03/11/2011.

66 Institut de droit international, Justice et Paix : compétence obligatoire des instances judiciaires et arbitrales internationales, session de Neuchâtel, Annuaire 49(1959), 11 septembre 1959, pp. 476-479.

67 BIANCHI, A. et CHETAIL, V., Séminaire de droit international publique, Année académique 2002-2003, seconde édition, p. 13, disponible sur www.stoessel.ch , visité le 02 novembre 2011.

68 ANONYME, « Le droit international public », disponible sur : http://playmendroit.free.fr , visité le 02 novembre 2011.

28

b. Procédure consultative

La procédure consultative est ouverte à cinq organes et à seize institutions spécialisées du système des Nations Unies. L'Assemblée générale et le Conseil de sécurité des Nations Unies sont habilités à demander des avis consultatifs sur toute question juridique. Les autres organes de l'Organisation des Nations Unies et les institutions spécialisées ayant été autorisés à solliciter des avis ne peuvent le faire que sur des questions juridiques se posant dans le cadre de leur activité.69

I.2.1.4 Source de droit applicable

Les sources de droit que la Cour doit appliquer sont : les conventions et traités internationaux, la coutume internationale, les principes généraux de droit, les décisions judiciaires et la doctrine des auteurs les plus qualifiés. En outre, si les parties sont d'accord, la Cour peut statuer ex aequo et bono, c'est-à-dire sans se limiter à l'application des règles de droit international existantes.70

Il importe de souligner que le Statut de la Cour Internationale de Justice tout en étant souple reconnaît aux juges, après accord des parties, de juger aussi bien en droit qu'en équité. La Cour l'affirme dans son arrêt Cameroun Septentrional (1963) :

« Sa fonction est de dire le droit mais elle ne peut rendre des arrêts qu'à l'occasion de cas concret dans lesquels, il existe, au moment du jugement, un litige impliquant un conflit d'intérêts juridiques entre les Etats ».71

69 ANONYME, « La compétence consultative de la Cour Internationale de Justice », disponible sur : http://www.ipeut.com , visité le 03 novembre 2011.

70 BIANCHI, A. et CHANTAIL, V., Op.cit, p.52.

71 KATANGA WA KATANGA, T., « L'apport de la Cour Internationale de Justice à l'évolution du droit international : cas de l'affaire RDC c. OUGANDA », Université de Kinshasa - Graduat 2006, disponible sur : http://www.memoireonline.com, visité le 16/09/2011.

I.2.1.5 Les parties

Le Statut de la Cour Internationale de Justice dispose en son article 34 que << Seuls des Etats peuvent ester devant la Cour >>.72 Ces Etats sont repartis en trois groupes ci-après :

a. Les Etats membres des Nations Unies

L'article 35 § 1 du Statut de la Cour Internationale de Justice dispose que << la Cour est ouverte aux Etats parties du Statut >>73 et l'article 93 § 1 de la Charte des Nations Unies énonce que << tous les membres des Nations unies sont ipso facto parties au Statut ».74 En 2006 les Nations Unies comptaient 191 membres de la Cour Internationale de Justice.75

b. Les Etats non-membres des Nations Unies mais parties au Statut

L'article 93 § 2 de la Charte des Nations unies prévoit que :

<< Les Etats qui ne sont pas membres des Nations Unies peuvent devenir parties au Statut de la Cour aux conditions déterminées dans chaque cas par l'Assemblée Générale de l'ONU sur recommandation du Conseil de Sécurité >>.76

Ces conditions ont été fixées pour la première fois à la suite d'une demande du Conseil Fédéral Suisse, par la même occasion, l'Assemblée Générale a adopté le 11 décembre 1946 la résolution 91 qui énonçait les conditions ci-après :

· Acceptation des dispositions du Statut de la Cour Internationale de Justice ,

· Acceptation de toutes les obligations qui découlent pour un membre des Nations Unies de l'article 94 de la Charte des Nations Unies ,

· Engagement de verser la contribution aux frais de la Cour.77

72 Article 34 § 1 du Statut de la Cour Internationale de Justice, disponible sur : www.icj-cij.org, visité le 15/09/2011.

73 Ibidem.

74 Article 93 § 1 de la Charte des Nations Unies.

75 KATANGA WA KATANGA T., Op.cit, p.44.

76 Ibidem.

77 Nations Unies, Résolution 91(1) de l'Assemblée Générale du 11 décembre 1946 disponible sur : www.un.org , visité le 19/09/2011.

30

Un tel État devient partie au Statut de la Cour à la date du dépôt de l'instrument d'acceptation de ces conditions entre les mains du Secrétaire Général de l'ONU.

c. Les Etats non parties au Statut auxquels la Cour peut être ouverte

La Cour est également ouverte à d'autres Etats ne se retrouvant pas dans les deux catégories précitées, aux termes de l'article 35 § 2 du Statut. Cette disposition prescrit que « les conditions pour lesquelles la Cour leur est ouverte, sont réglées par le Conseil de Sécurité et sans pour autant qu'il ne puisse en résulter pour les parties aucune inégalité devant la Cour >>.78

La Cour en reconnaissant à travers les dispositions de son Statut la qualité de se présenter devant elle aux seuls Etats, exclut en principe son accessibilité aux personnes privées.79 Néanmoins des intérêts privés peuvent faire l'objet d'une action devant la Cour dans le cas où un État prend fait et cause pour l'un de ses ressortissants et fait siens les griefs de ce dernier à l'encontre d'un autre Etat.

I.2.1.6 Composition de la Cour

La Cour se compose de quinze juges élus pour neuf ans par un double scrutin de l'Assemblée Générale de L'ONU et le Conseil de Sécurité de l'ONU siégeant indépendamment l'un de l'autre. Pour être élu, le candidat doit obtenir la majorité absolue dans ces deux organes. Elle ne peut comprendre plus d'un ressortissant d'un même Etat. La Cour est renouvelable par tiers tous les trois ans pour assurer une continuité de la jurisprudence et les juges sont rééligibles. Ils ne représentent pas leurs gouvernements d'autant plus qu'ils sont des magistrats indépendants.80

Les juges doivent réunir les conditions requises pour exercer dans leurs pays les plus hautes fonctions judiciaires ou être des juristes d'une compétence notoire en droit international. En outre, ils doivent assurer dans l'ensemble la représentation des grandes formes de civilisation

78 Article 35 § 2 du Statut de la Cour Internationale de Justice.

79 Article 34 du Statut de la Cour Internationale de Justice.

80 ANONYME, « Justice internationale : Cour Internationale de Justice >>, disponible sur : http://www.diplomatie.gouv.fr , visité le 05/10/2011.

et des principaux systèmes juridiques du monde. Il importe de souligner que dans une affaire où la Cour n'a pas de juge ayant la nationalité d'un des Etats en cause, l'Etat concerné a le droit de designer une personne pour siéger aux fins du procès en qualité de « Juge ad hoc ». 81

A propos du juge ad hoc, C. ROUSSEAU nous renseigne que même la Cour Permanente de Justice était composée de 15 juges et que l'institution du juge ad hoc était venue pour tempérer les inconvénients résultant de la composition réduite de la Cour Permanente.82

I.2.1.7 Principes directeurs

Sous ce paragraphe, nous voulons présenter quelques principes sur lesquels l'agir de la Cour Internationale de Justice se base pour accomplir efficacement sa louable mission.

a. Garanties d'une bonne administration de la justice

Etant l'un des six organes principaux de l'ONU et son seul organe judiciaire, la Cour Internationale de Justice est totalement souveraine dans son ordre juridique même si l'activité juridictionnelle reste tributaire du consentement des États conformément à sont Statut. La Cour jouit des garanties d'indépendance, d'impartialité et de compétence.83

b. Principe d'indépendance

La répartition géographique équitable des juges (Afrique : 3 ; Amérique Latine : 2 ; Europe occidentale : 5 ; Europe orientale : 2 ; Asie : 3, assure l'indépendance totale de la Cour Internationale de Justice.84

81 Art 2 du Statut de la Cour Internationale de Justice.

82 ROUSSEAU, C., Droit internationale public : les relations internationales, t. 5, Editions SIREV, Paris, 1980, p.30.

83 GUILLAUME, M. G., « La Cour Internationale de Justice et les droits de l'homme », disponible sur : http://www.droits-fondamentaux.org , consulté le 24/09/2011.

84 KATANGA WA KATANGA T., Op.cit, p.25.

c.

32

34

Principe de collégialité

En règle générale, la Cour exerce ses fonctions en séance plénière, mais depuis la réforme de 1975, il est possible de former des chambres d'au moins trois membres. Les arrêts sont adoptés à la majorité des juges présents. Ils sont motivés, signés, avec possibilité d'opinion dissidente à savoir désaccord sur le dispositif, c'est à dire l'exposé par lequel la Cour tranche le différend, ou individuelle, désaccord sur la motivation de l'arrêt.85

d. Principe de protection des magistrats

Un membre de la Cour ne peut être relevé de sa fonction qu'au jugement unanime des autres membres.

e. Principe d'impartialité

Les membres de la Cour ne peuvent exercer aucune activité professionnelle annexe, et ne peuvent participer au règlement d'aucune affaire où ils sont antérieurement intervenus, à quelque titre que ce soit.

Tous ces principes garantissent aux justiciables de la Cour Internationale de Justice, à savoir les Etats et les Organisations Internationales dans le cas prévu par le Statut, une bonne administration de la justice.86

I.2.2 La Cour Internationale de Justice comme l'un des organes de l'ONU

La Cour Internationale de Justice constitue l'organe judiciaire principal des Nations Unies.87 Hormis la CIJ, la Charte a établi cinq autres organes principaux des Nations Unies :

85 DUBOS, O., « La Cour Internationale de Justice et le principe de collégialité », disponible sur : http://www.gdc.cnrs.fr , consulté le 24/09/2011.

86 LAGRANGE, E., « La représentation institutionnelle dans l'ordre international », disponible sur : http://books.google.rw/books, consulté le 24/09/2011.

87 Article 92 de la Charte des Nations Unies.

l'Assemblée Générale(1), le Conseil Economique et Social(2), le Conseil de Sécurité(3), le Conseil de Tutelle(4), et le Secrétariat Général(5).88

Ce sont ces cinq organes ajoutés aux seize institutions spécialisées de l'ONU qui sont habilités à demander l'avis consultatif auprès de la Cour Internationale de Justice.89

Pour clore ce chapitre, rappelons qu'il nous a permis de comprendre en long et en large la notion de Jus Cogens et de voir ce qu'est la Cour Internationale de Justice. Ceci va nous aider d'avancer vers « l'examen critique du rôle de la Cour Internationale de Justice dans la détermination et le respect des Jus Cogens» développé dans le deuxième chapitre.

88 Article 7 de la Charte des Nations Unies.

89 Article 65 du statut de la Cour Internationale de Justice.

CHAPITRE II : EXAMEN CRITIQUE DU ROLE DE LA CIJ DANS LA
DETERMINATION ET LE RESPECT DES JUS COGENS

En tant que principal organe judiciaire du droit international public, la Cour Internationale de Justice est inéluctablement appelée à mettre en évidence les valeurs fondamentales que la communauté internationale a exprimées. Sa jurisprudence représente un apport essentiel, car elle précise le contenu des principes fondamentaux du droit international public y compris le principe de Jus Cogens. Ses décisions constituent même un «moyen de détermination des règles du droit international»90. C'est là même sa vocation.

Cela étant, il convient de préciser qu'au cours de ce chapitre, nous allons montrer la nécessité de déterminer le contenu et le champ d'application des Jus Cogens et le rôle que la Cour Internationale de Justice devrait jouer dans ce processus. Malheureusement, nous ferons remarquer dans ce chapitre que la Cour Internationale de Justice a raté plusieurs occasions où elle aurait dû profiter pour mettre en branle son rôle pour élucider la notion entourée d'obscurité. Le silence gardé par la Cour ne manquerait pas bien sür d'effets que nous allons montrer au cours de ce chapitre. Nous parlerons par exemple de la persistance du caractère hésitante des Jus Cogens, leur dévaluation et leur violation malgré leur prééminence. La conséquence majeure de ce silence, comme nous le montrerons est que la Cour a elle-même limité sa compétence.

Aussi, la Cour Internationale de Justice n'a-t-elle pas seulement le rôle dans la détermination du contenu et du champ d'application des Jus Cogens, mais aussi et surtout dans le respect de ces normes. Cependant, nous montrerons dans ce chapitre, que la Cour a été butée aux différents obstacles monumentaux qui ont rendu difficile la mise en oeuvre de son rôle dans le respect de ces normes. Nous parlerons par exemple de sa compétence limitée, de la souveraineté des Etats, des raisons politiques et des réserves faites par les Etats à leur déclaration d'acceptation de la compétence de la Cour.

90 Art 38 du Statut de la Cour Internationale de Justice.

II.1 La CIJ face à la détermination des normes de Jus Cogens

Sous ce paragraphe, nous voulons examiner le comportement de la Cour Internationale de Justice face à la question épineuse de détermination des Jus Cogens et l'effet de son comportement.

II.1.1 Nécessité de détermination des normes de Jus Cogens

Nous sommes ici en présence de dispositions qui, malgré la définition du Jus Cogens de l'article 53, sont loin d'être claires. La Commission du Droit International (CDI) elle-même en 1969 dans son commentaire de projet d'articles sur le droit des traités a précisé que « l'on ne dispose d'aucun critère simple qui permette de reconnaître qu'une règle du droit relève du Jus Cogens ».91 La situation n'a guère évolué depuis, et il semble que la difficulté rencontrée est la possibilité de déterminer le contenu des normes de Jus Cogens et cette révélation appartient à la Cour Internationale de Justice.

Les effets de l'imprécision de la norme de Jus Cogens ont entraîné de nombreuses controverses. Ainsi par exemple, la France n'a pas adopté la Convention de Vienne sur le droit des traités par opposition à l'introduction du Jus Cogens. Selon le délégué français :

« Il n'est pas pensable, d'admettre l'existence présente et à venir d'une loi suprême et de lui attacher des effets aussi graves que d'entraîner la nullité ab initio des accords internationaux, sans définir la substance de cette règle de droit positif, les conditions de son développement et le contrôle de son application »92

II.1.2 Compétence de la CIJ pour déterminer le contenu et le champ d'application des Jus Cogens

L'article 66 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 prévoit la possibilité de renvoyer à la Cour Internationale de Justice pour trancher un différend sur le problème de déterminer le contenu et le champ d'application des Jus Cogens. L'article 66 est ainsi libéré :

91 Commission du droit international, « origine, membre et activité », disponible sur : http://www.un.org/fr , visité le 01/09/2011.

92 OUMBA P., Op.cit, p.19.

36

« Toute partie à un différend concernant l'application ou l'interprétation des art. 53 ou 64 peut, par une requête, le soumettre à la décision de la Cour Internationale de Justice, à moins que les parties ne décident d'un commun accord de soumettre le différend à l'arbitrage ».93

En effet, on a dans l'ordre juridique interne le recours au juge. Cela est transposable dans l'ordre international. L'idée est de dire que seule la Cour Internationale de Justice est habilitée à décider si une norme est ou non de Jus Cogens.

II.1.3 Occasions ratées par la Cour

Notre intention sur ce point n'est pas d'inventorier toutes les occasions où la Cour Internationale de Justice avait possibilité de déterminer et de matérialiser la notion de Jus Cogens. Nous voulons tout simplement signaler que cette Cour a eu effectivement cette chance mais qu'elle n'a pas pu jusqu'à présent enlever l'obscurité qui entoure la notion et qui l'empêche d'être effective.

En effet, la Cour Internationale de Justice avait été assez prudente concernant les normes de Jus Cogens. Elle n'a pas voulu se montrer trop révolutionnaire. Lorsqu'on parcourt sa jurisprudence ancienne, on remarque déjà que la Cour a eu l'occasion dans une affaire en février 1970 où le juge n'a rien fait d'autre que de citer quelques exemples des normes découlant des Jus Cogens comme « l'interdiction du recours à la force, l'interdiction de toute forme d'agression, l'interdiction du génocide, interdiction de porter atteinte aux droits fondamentaux des personnes, interdiction de pratiquer l'esclavage ou de toute forme de discrimination raciale >.94 Cette liste est très proche des illustrations que la Commission du Droit International avait données dans d'autres dispositions relatives aux Jus Cogens.

Le juge a eu aussi l'occasion dans l'avis consultatif de 1971 en Namibie. Il parle de Jus Cogens et que l'apartheid est contraire à ces normes. L'occasion récente est celle de 2006 où la Cour devrait préciser si les réserves faites par les Etats sur l'article 9 de la Convention sur le

93 Article 66 de la Convention de Vienne sur le droit des traités.

94 LATTY, F., La Cour Internationale de Justice face aux tiraillements du droit international : les arrêts dans les affaires des activités armées sur le territoire du Congo (RDC c. Ouganda, in « Annuaire français de droit international >, CNRS Éditions, Paris, 3 Février 2006.

génocide sont admissibles. Sa position a été affirmative, ce qui a été critiqué énergiquement par ceux qui pensent que ces réserves porteraient atteinte à l'objet méme de la Convention qui est la répression du crime de génocide.

II.1.4 Effets du silence de la Cour face à la détermination du domaine des Jus Cogens

Sous ce paragraphe, nous voulons montrer que le fait que la notion de Jus Cogens reste encore indéfinie présente plusieurs inconvénients sur la notion et son application en particulier et sur tout le droit international public en général.95

II.1.4.1 Persistance du caractère hésitant des Jus Cogens

A cause du silence manifeste de la Cour Internationale de Justice vis-à-vis de la détermination du contenu et de la portée des normes de Jus Cogens, le caractère hésitant subsiste encore. On remarque d'ailleurs dans la doctrine, tout un courant qui rejette ces normes comme nous l'avons déjà évoqué dans des paragraphes précédents.96

II.1.4.2 Dévaluation des Jus Cogens

Normalement, en tant que norme impérative sans dérogation, le Jus Cogens est obligatoire pour tous les destinataires et constitue une limite importante à l'autonomie contractuelle des Etats. En limitant la liberté des Etats, le Jus Cogens tend à se protéger contre les abus et à les obliger à respecter leurs engagements internationaux dans la conclusion de leurs contrats. Le Jus Cogens est de ce fait un concept très important pour le respect des droits fondamentaux universels et humanistes. Cependant, il appert de faire remarquer que « suite à son caractère indéterminé et confus, le Jus Cogens semble avoir relativement perdu sa force contraignante ».97

95 ANONYME, « Droit international public et organisations internationales : le droit international coutumier et le Jus Cogens », disponible sur : http://ww.stoessel.ch, visité le 01/09/2011.

96SOREL, J-M., « Sécurité collective et réversibilité des normes impératives », disponible sur : http://books.google.com, visité le 01/09/2011.

97 ANONYME, « Le respect des normes impératives du droit international : le Jus Cogens », disponible sur : http://www.ipeut.com , consulté le 07/06/2011.

38

II.1.4.3 Violation du Jus Cogens malgré sa prééminence

On l'a déjà répété à maintes reprises que le concept de Jus Cogens est entouré de zones d'ombres, sur le comment de sa création ou sur son acceptation représentative ou totale des Etats. Le concept de Jus Cogens apparaît ainsi comme une norme impérative qui demeure relativement imprécise et non immuable. C'est un concept qui reste controversé dans son respect et son application car jamais, dans la pratique arbitrale ou judiciaire, celui-ci a été clarifié et élevé à son propre rang même s'il y a eu des allusions à son existence.98

II.1.4.4 Délimitation de la compétence de la CIJ par elle-même

La conséquence grave du silence de la Cour Internationale de Justice dans la détermination des Jus Cogens est qu'elle limite sa compétence. On l'a déjà évoqué, l'article 38 donne plein droit à la Cour de déterminer et de matérialiser les Jus Cogens. Si cette dernière n'a pas voulu assumer cette responsabilité, les Etats n'ont pas manqué à profiter de cette confusion pour écarter systématiquement la notion qui venait limiter leur liberté dans leurs relations contractuelles.99

II.2 La CIJ face au respect des normes de Jus Cogens

Dans les paragraphes précédents, nous avons montré que la zone d'ombre qui entoure le Jus Cogens hante son respect et son acceptation par les Etats. On l'a aussi signalé que la détermination et le respect de ces normes ont été confiés à la Cour Internationale de Justice et à elle seule. Le présent titre tente alors d'évaluer en long et en large le pas que cette Cour aurait franchi vers la réalisation de cette noble mission.

98 THI HUONG HUYNH, « Mise en oeuvre du droit international humanitaire », disponible sur : http://books.google.com, consulté le 07/06/2011.

99 Article 38 du Statut de la Cour Internationale de Justice.

II.2.1 Le Jus Cogens dans la jurisprudence de la Cour Internationale de Justice

Au fil de sa jurisprudence, la Cour Internationale de Justice a fait référence au Jus Cogens sans jamais le sanctionner. 100 Elle s'est prononcée pour la première fois sur la notion dans un avis consultatif du 28 mai 1951 concernant les réserves à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide en affirmant l'existence de principes de morale élémentaire obligeant les Etats en dehors de tout lien conventionnel.101

Dans sa décision du 5 Février 1970 au sujet de l'affaire Barcelona Traction, la Cour Internationale de Justice affirme qu'« une distinction doit être établie entre les obligations des Etats envers la communauté internationale dans son ensemble (Jus Cogens) et celles qui naissent vis-à-vis d'un autre Etat dans le cadre de la protection diplomatique ».102 A aucun moment elle ne va mentionner l'expression de « Jus Cogens » mais elle se fait comprendre notamment en utilisant le terme « d'obligations erga omnes » c'est-à-dire, d'obligations à l'égard de tous.

La Cour Internationale de Justice se prononcera encore dans une ordonnance du 15 Décembre 1979 en déclarant qu'« aucun Etat n'a l'obligation d'entretenir des relations diplomatiques ou consulaires avec un autre mais il ne saurait manquer de reconnaître les obligations impératives qu'elles comportent et qui sont maintenant codifiées dans les conventions de Vienne de 1961 et 1963 ».103

En 1986, dans l'affaire des activités militaires et paramilitaires, la Cour souligne que « le principe de non-emploi de la force relève du Jus Cogens ».104 Dix ans plus tard, en 1996 la Cour

100 ANONYME, « Le Jus Cogens à travers la jurisprudence internationale », disponible sur :

http://www.google.com, consulté le 23/08/2011.

101 Cour Internationale de Justice, Avis consultatif concernant les réserves à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, Rec., 28 mai 1951, p. 18.

102 L'affaire Barcelona Traction.

103 Cour Internationale de Justice, Affaire du personnel diplomatique et consulaire des Etats-Unis à Téhéran (EtatsUnis d'Amérique contre Iran), mesures conservatoires, ordonnance du 15 décembre 1979, Rec., 1979, p. 20.

104 Affaire des Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci portée devant la Cour par le Nicaragua contre les Etats-Unis d'Amérique, Arrêt du 27 juin 1986.

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esquive l'expression en se référant au « caractère intransgressible » de certaines obligations. V. BAHATI parle de cette réticence en ces termes :

« Dans son avis consultatif sur la licéité de la menace ou de l'emploi des armes nucléaires, la Cour a pris soin d'éviter de se prononcer sur la reconnaissance du caractère de Jus Cogens, alors même qu'elle insistait sur des principes fondamentaux, cardinaux et intransgressibles. La Cour avait constaté qu'il avait été soutenu que ces principes et règles de droit humanitaire faisaient partie du Jus Cogens, mais elle affirma qu'elle n'avait pas à se prononcer sur ce point».105

En général, on peut dire que malgré une affirmation ferme dans les textes, le Jus Cogens n'a fait l'objet que de références discrètes (bien qu'explicites) dans la jurisprudence de la Cour Internationale de Justice.106 Références explicites, car la Cour à fini en 2006 (Affaire RDC c. Rwanda) par reconnaitre expressément la notion de Jus Cogens même si là aussi elle n'a pas pu en définir le contenu et la portée. Permettez que nous examinions cet arrêt dans la partie suivante.

II.2.2 Examen de l'arr~t de la CIJ du 3 février 2006 (affaire RDC c. Rwanda)

Si l'arrêt de la Cour Internationale de Justice du 3 février 2006 fait l'objet d'un examen particulier dans ce chapitre, ce n'est pas par ce qu'il est le seul où la Cour a raté l'opportunité de clarifier la notion de Jus Cogens et d'affirmer sa compétence d'assurer son respect strict. La raison en est simplement que nous maitriserions la situation qui nous concerne beaucoup plus que des cas étrangers.

Aussi, une autre raison a attiré notre attention : il semble que dans cette affaire, la Cour a utilisé explicitement le concept de Jus Cogens beaucoup plus que dans d'autres cas où pour désigner les normes de ce genre, elle utilisait des termes similaires comme obligations erga omnes, des règles à caractère intransgressible, etc.

105 Avis consultatif du 8 juillet 1996 sur la licéité des armes nucléaires, cité par BAHATI V., Analyse juridique de la Cour Internationale de Justice dans la protection des droits de l'homme, (Mémoire), ULK, Kigali, p. 36, (inédit).

106 ANONYME, « Le Jus Cogens à travers la jurisprudence », disponible sur http://notionsdip.blogspot.com , consulté le 25/09/2011.

42

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II.2.2.1 Résumé des faits et historique de la procédure

Le 3 Février 2006, la Cour Internationale de Justice a rendu son jugement sur sa compétence dans l'affaire République Démocratique du Congo (RDC) c. la République du Rwanda, concernant les activités armées par ce dernier sur le territoire du Congo. La requête avait été déposée en mai 2002 par la RDC qui alléguait que le Rwanda a commis contre lui des violations massives, graves et flagrantes des droits de l'homme et du droit international humanitaire au mépris de la Charte Internationale des Droits de l'Homme, d'autres instruments internationaux pertinents et des résolutions impératives du Conseil de Sécurité des Nations Unies.

Le Congo affirmait que les atteintes graves et flagrantes aux droits de l'homme et au Droit International Humanitaire dont il se plaint découlent des actes d'agression armée perpétrés par le Rwanda sur le territoire de la République Démocratique du Congo en violation flagrante de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de celle-ci, garanties par la Charte des Nations Unies et de l'Union Africaine. 107

II.2.2.2 Résumé des arguments des parties

Pour fonder la compétence de la Cour Internationale de Justice en l'espèce, la RDC a invoqué plusieurs arguments. Cependant, étant donné l'étendue et la portée de notre sujet, nous voudrions mettre l'accent sur l'une des clauses compromissoires qu'elle a alléguée.

En effet, selon la République démocratique du Congo, la compétence de la Cour « devrait être fondée sur l'article 9108 de la Convention sur le génocide, à laquelle lui-même et le Rwanda sont parties. La réserve faite par le Rwanda au dit article devrait ainsi être rendue caduque au motif que la Convention contenait des normes ressortissant du Jus Cogens et que la réserve serait incompatible avec son objet et son but ». 109

107 Activités armées sur le territoire du Congo (nouvelle requête : 2002), (République Démocratique du Congo c. Rwanda), compétence et recevabilité, arrêt, C.I.J. Recueil 2006, § 1, p. 12.

108Article 9 de la Convention sur le génocide.

109Activités armées sur le territoire du Congo, Op.cit, §57, p.30.

De sa part, le Rwanda a soutenu que la juridiction de la Cour en vertu de la Convention sur le génocide a été exclue par la réserve formulée par lui à l'article 9 de cet instrument. Pour le Rwanda, « seules les dispositions de fond interdisant le génocide ont le statut de normes impératives, et non la clause juridictionnelle de l'article 9 ».110

La RDC voit que la réserve du Rwanda n'est pas suffisante pour empêcher la Cour d'examiner sa requête car les traités relatifs aux droits de l'homme comme la Convention sur le génocide ne sont pas fondées sur la réciprocité entre les Etats, mais servent à protéger les individus et la communauté internationale dans son ensemble.

II.2.2.3 Décision de la Cour

Dans son arrêt, la Cour a conclu, par quinze voix contre deux qu'il n'avait pas compétence en le cas, ce qui élimine tous les motifs compromissoires un après l'autre.111 Non compétente pour connaitre de l'affaire sur le fond, la Cour tient néanmoins à rappeler qu'« il existe une distinction fondamentale entre la question de l'acceptation de la juridiction de la Cour par les Etats et la conformité de leurs actes au droit international, y compris le droit international humanitaire et le droit international relatif aux droits de l'homme. Elle a ajouté en outre que ces Etats demeurent responsables des actes contraires au droit international qui pourraient leur être attribués qu'ils aient accepté ou non la juridiction de la Cour ».112

II.2.2.4 Critique juridique de l'arr~

Avant toute critique sur cet arrêt, rappelons que l'article 8 de la Convention sur le génocide prévoit que: « Toute partie contractante peut saisir les organes compétents de l'Organisation des Nations Unies à prendre des mesures en vertu de la Charte des Organisation des Nations Unies qu'ils jugent appropriées pour la prévention et la répression des actes de génocide ».113 Selon l'article 3, « les actes suivants sont punis : le génocide ; les actes en vue de

110 Activités armées sur le territoire du Congo, Op.cit, § 61, p.30.

111 Activités armées sur le territoire du Congo, Op.cit, § 128, p.53.

112 LABRECQUE, G., La force et le droit : Jurisprudence de la Cour Internationale de Justice, éditions Yvon Blais, Cowansville (Canada), 2008, p.415.

113 Article 8 de la Convention sur le génocide.

commettre le génocide ; incitation directe du public à commettre le génocide ; la tentative de commettre le génocide ; la complicité dans le génocide. »114

Faisons aussi remarquer que l'objet et le but de la Convention sur le génocide est la prévention et la répression du crime de génocide, et que cela englobe la tenue d'un État responsable de la violation de ses obligations en vertu de la Convention. Cette Convention vise à l'universalité, c'est à dire d'empêcher toute commission de génocide. Il ne faut pas que les réserves détruisent la finalité de la Convention.

Ainsi, vu que l'article 9 est la seule disposition de la Convention concernant la question de la responsabilité des États, certains estiment que les réserves qui ont été émises là-dessus n'étaient pas compatibles avec l'objectif qu'elle poursuit. La Cour Internationale de Justice quant à elle, affirme que dans le silence d'une Convention, les Etats ont la capacité d'apporter des réserves. La Cour relève qu'elle a déjà conclu que les réserves ne sont pas interdites par la Convention sur le génocide (avis consultatif sur les Réserves à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, C.I.J. Recueil 1951, p. 22). ».115 Aussi, de l'avis de la Cour, une réserve à la Convention sur le génocide serait permise pour autant que cette réserve ne soit pas incompatible avec l'objet et le but de la Convention.

A notre humble avis, les réserves formulées sur la Convention contre le génocide doivent être prises en compte dans la lumière de l'objet et le but de la Convention. En vertu de l'article 1e de la Convention, « Les parties contractantes confirment que le génocide, qu'il soit commis en temps de paix ou en temps de guerre, est un crime en vertu international du droit, qu'elles s'engagent à prévenir et à punir. »116 L'article 1e impose donc une obligation pour les États de prévenir et de punir le crime de génocide.

Le titre même de la Convention : « Convention sur la prévention et la répression du crime du génocide » cadre clairement en termes de prévention et de répression du génocide.

114 Article 3 de la Convention sur le génocide.

115 Activités armées sur le territoire du Congo, Op.cit, § 66, p. 32.

116 Article 1e de la Convention sur le génocide.

L'article 9 est donc essentiel à la réalisation de l'objet et le but de la Convention car il est le seul moyen de statuer sur la responsabilité des États.

Le refus de la Cour de statuer sur l'affaire sous prétexte des réserves, non seulement l'empêche d'interpréter ou d'appliquer la Convention, mais aussi d'enquêter sur les différends entre les parties contractantes relatifs à la responsabilité de l'État pour génocide ou de l'une des autres actes énumérés à l'article 3. Cela n'est pas favorable à la réalisation de l'objet et le but de la Convention, à savoir, la prévention et la répression du génocide.

Aussi, le fait qu'un État ne s'oppose pas à une réserve au moment où elle est faite n'est pas, à notre humble avis, d'une importance déterminante. L'échec d'un État de s'opposer ne devrait pas être considéré comme déterminant dans le contexte des traités sur les droits de l'homme comme la Convention sur le génocide qui ne sont pas fondés sur la réciprocité entre les États, mais plutôt servent à protéger les individus et la communauté internationale dans son ensemble.

En outre, certains pensent qu'en examinant cette affaire, la Cour aurait dû prendre dûment compte du principe de bonne foi en ce qui concerne l'effet de la déclaration faite par le Rwanda, en la personne de son ministre de la justice, devant la Commission des Nations Unies sur les droits de l'homme :

«Le Rwanda est l'un des pays qui a ratifié le plus grand nombre d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Dans la seule année 2004, notre gouvernement a ratifié dix d'entre eux, y compris celles relatives aux droits des femmes, la prévention et la répression de la corruption, l'interdiction des armes de destruction massive, et de l'environnement. Les quelques instruments qui ne sont pas encore ratifiés seront bientôt ratifiés et les réserves non encore levées seront prochainement retirées. ».117

Parmi les quelques instruments dont le Rwanda avait émis des réserves, qui pourront être retirées il y avait la Convention sur le génocide. Les propos du ministre avaient prêté à comprendre effectivement que la réserve qui avait été formulée par le Rwanda sur ladite Convention avait été enlevée.

117 Affaire des activités armées sur le territoire du Congo, Op.cit, p.30.

Curieusement, à propos de la réserve qui avait été formulée par le Rwanda, W. A SCHABAS, et M. IMBLEAU avaient déjà écrit en 1999 qu'elle aurait été enlevée (nous ne savons pas sur quelles bases il fondait sa pensée) :

« (~ ) Certains traités internationaux octroient également un rôle à la Cour Internationale de

Justice. C'est le cas de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, mais le Rwanda a émis une réserve sur la compétence de la Cour pour ne pas être soumis à sa juridiction (cette réserve est maintenant retirée). » 118

Cela étant, certains pensent qu'il ne serait pas approprié de considérer la déclaration du Rwanda concernant sa réserve au plus important des instruments relatifs aux droits de l'homme et au droit humanitaire comme un simple geste politique dépourvu d'effet juridique. Ils pensent que refuser l'accès à la Cour, est en fait interdire le contrôle judiciaire de la responsabilité d'un Etat dans un différend relatif à la violation de la Convention.

Sans vouloir contester le fait que, le sérieux d'une obligation, le caractère impératif d'une norme ou le caractère erga omnes d'une obligation ne saurait en lui-même fonder la compétence de la Cour, nous estimons néanmoins que l'allégation de crime de génocide est beaucoup trop grave pour qu'on la laisse échapper au contrôle judiciaire par une astuce de procédure.

Certes, un principe de droit veut que la base de la compétence de la Cour soit le consentement des parties. Rien en droit n'empêchait le Rwanda d'exprimer son consentement et de permettre ainsi à la Cour d'examiner les allégations selon lesquelles le Rwanda avait violé les obligations découlant pour lui de la Convention sur le génocide.119

En conclusion, nous sommes d'avis que toute critique aux arguments ci-haut mentionnés doit être formulée en tenant compte non seulement de la gravité du crime du génocide et de la valeur reconnue aux normes de Jus Cogens, mais aussi de l'avenir de celles-ci.

118 SCHABAS, W. A. et IMBLEAU, M., Introduction au droit rwandais, les éditions Yvon Blais Inc., Cowansville (Canada), 1999, p. 245.

119 KOROMA, G., « Opinion dissidente sur l'affaire RDC c Rwanda », disponible sur : www.haguejusticeportal.net , consulté le 25/09/2011.

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La gravité du crime du génocide est telle qu'elle aurait autorisé la Cour à statuer sur l'affaire. Le génocide est le «crime de tous les crimes » et les règles y afférentes sont reconnus par les nations civilisées comme obligeant les États, même en l'absence de tout lien conventionnel.

Ainsi, vue la gravité du crime de génocide et le sérieux avec lequel la communauté internationale et l'humanité toute entière apportent à son éradication et à sa punition, la Cour ne devrait-elle pas y apporter une attention particulière ? En fait la Cour, avait eu l'occasion de favoriser de grands espoirs et les attentes que l'objet et le but de la Convention sur le génocide seraient remplies. Cette affaire était l'occasion pour la Cour d'appliquer la Convention et ses principes. En fait c'est une question très grave pour un Etat de se protéger à l'examen judiciaire internationale pour toute réclamation qui pourrait être fait contre lui concernant le génocide. La Cour aurait dû saisir l'occasion d'examiner à fond si la réserve a violé l'objet et le but de Convention.

II.2.2.5 8LIWINIKFINEMPW'

La position de la Cour de Justice vis-à-vis des normes de Jus Cogens a laissé subsister leur caractère indéfini. En effet, même si la Cour avait reconnu leur suprématie par rapport aux autres normes internationales, elle n'a pas enlevé l'ombre qui les entoure quant à leur détermination et application.120

II.2.3 Obstacles encourus par la Cour dans le respect des Jus Cogens

Le rôle de la Cour dans sa fonction de règlement des différends se heurte à des limites importantes qui découlent d'un certain nombre d'éléments. L'arrêt de 2006 constitue un bon exemple des problèmes auxquels est confrontée la Cour en ce que celle-ci n'a pas été compétente pour statuer sur les allégations qui avaient été portées contre le Rwanda. Cette incompétence est

47

due à des raisons d'ordre technique et résulte surtout de la délimitation de la compétence de la Cour par les instruments juridiques qui gèrent son fonctionnement.121

D'autres raisons sont d'ordre politique et résultent du choix de politique judiciaire opéré par les Etats quant aux différends qu'ils acceptent de soumettre à la Cour. Par conséquent, seule une portion infime des différends internationaux est soumise à celle-ci. Il est nécessaire de redonner à la Cour les moyens pour qu'elle puisse exercer la fonction de règlement des différends qui lui est assignée. Cette réforme, destinée à élargir les champs de compétence rationae materiae et rationae personae de la Cour, nécessite des amendements au Statut et au règlement de celle-ci ainsi qu'à la Charte des Nations Unies.122

En effet, pour que la Cour puisse régler un différend, les deux États parties au litige doivent avoir expressément accepté la juridiction de la Cour (cette acceptation est encore désignée sous le terme de clause facultative de juridiction. Cela peut se faire par plusieurs moyens, notamment la signature d'une entente après la survenance du litige, par une déclaration d'acceptation de la juridiction de la Cour contenue dans un traité ou encore par une déclaration d'acceptation de la compétence générale de la Cour.123

Cependant ces déclarations d'acceptation de compétence générale sont plutôt rares et très souvent assujetties à de nombreuses réserves. Parmi les membres du Conseil de Sécurité, seule la Grande-Bretagne a signé une telle déclaration (les États-Unis ont retiré la leur après l'affaire des contras au Nicaragua, la France après l'affaire des essais nucléaires).124 L'application d'une Convention dépend donc en grande partie de la bonne volonté des États liés par celle-ci.

121DULAIT, A., Rapport d'information sur la Cour Internationale de Justice : Critiques sur le principe d'une justice internationale, Paris, 1998, p. 27(inédit).

122CLAXTON, C., << Réforme de la Cour Internationale de Justice de La Haye », disponible sur http://ndh-france.org , visité le 6/10/2011.

123 ANONYME, << La Cour Internationale de Justice », disponible sur http://www.studility.com, visité le 6/10/2011.

124 DRAI, S., << Les principales branches du droit », disponible sur http://www.avocat-international.com, visité le 21/11/2011.

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II.2.3.1 Compétence limitée

Les États n'ont jamais voulu limiter leur souveraineté en créant une juridiction obligatoire de règlement des conflits. La Cour Internationale de Justice n'est compétente que lorsque les parties se soumettent à sa juridiction.

II.2.3.2 La force contraignante limitée des décisions de la Cour

L'exécution des décisions de la Cour Internationale de Justice est souvent regardée comme ne soulevant pas de problème de droit particulier en raison du caractère consensuel de la justice internationale. Néanmoins, si cette constatation présente une part de vérité, elle n'épuise pas le sujet.125

L'exécution des arrêts de la Cour soulève de nombreuses questions d'ordre juridique : la constatation de l'efficacité réduite du Conseil de Sécurité de l'ONU en ce domaine, celle limitée de l'Assemblée Générale, la quasi-impossibilité de recourir aux juridictions internes et l'aptitude inégale des États à adopter des contre-mesures pour assurer l'exécution forcée des sentences, conduit au doute quant au poids qui pèserait sur l'Etat qui refuserait d'appliquer les mesures de la Cour.126

Durant les années 1980, beaucoup d'Etats ont refusé de comparaître devant la Cour Internationale de Justice ; d'autres ont retiré leur déclaration facultative de juridiction obligatoire après que des décisions leur ayant été défavorable.127

Certes, il est bien vrai que les jugements de la Cour sont obligatoires et insusceptibles de recours et constituent de ce fait, une obligation juridique pour les parties. Mais, si la Cour tire des articles 59 et 60 du Statut une telle compétence, elle ne tient du même Statut, aucun pouvoir pour prescrire les mesures nécessaires à l'exécution de ses arrêts.

125 ANONYME, « L'exécution des décisions de la Cour Internationale de Justice », in Revue Banque, 01 juillet 2003, p. 19.

126 DUBOUT E., TOUZE, S., Les droits fondamentaux : charnières entre ordres et systèmes juridiques, Ed. A. PEDONE, Paris, 2009, p. 45.

127 Affaire des Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, Nicaragua c. Etats-Unis d'Amérique, Cour Internationale de Justice, Arrêt du 27 juin 1986.

La Cour Internationale de Justice dispose de la capacité de dire le droit avec l'autorité de la chose jugée, mais elle est limitée pour ce qui est du pouvoir de faire sanctionner l'État récalcitrant, pour assurer le respect de la règle et garantir son application correcte.

En réalité, si d'une part, la Cour peut être saisie de l'inexécution de certaines obligations et ainsi engager la responsabilité de l'État fautif, d'autre part, elle n'a ni en théorie ni en pratique le pouvoir de connaître l'exécution de ces propres décisions. D'ailleurs les dispositions de la Charte des Nations-Unis n'ont jamais permis de conclure que, dans leurs rapports mutuels, les membres de l'Organisation peuvent se faire violence à eux même ou user individuellement de la violence en vue d'assurer l'exécution des sentences judiciaires rendues à leur profit.128

II.2.3.3 Raisons politiques

En pratique, seuls les États forts sont véritablement en mesure de faire respecter les conventions qu'ils ont signées. Dans ces conditions, il pourrait sembler que le droit international n'est qu'un déguisement de la loi du plus fort. Cependant, il ne faut pas négliger le poids des relations diplomatiques et l'importance pour les États de leur image dans le monde.129

II.2.3.4 Réserves des Etats à leur déclaration d'acceptation de la compétence de la CIJ

Le plus communément pour adopter les traités, c'était l'unanimité. L'admissibilité des réserves devaient respecter cette règle que tous les états devaient accepter cette réserve. Pendant longtemps on veut que tous les Etats aient les mêmes droits et obligations donc intégrité des conventions.

Néanmoins, cette règle d'unanimité paraît impossible avec le nombre grandissant des Etats membres. Il semble ainsi quasiment impossible de faire l'universalité des conventions.

128GAMBO, C., L'apport de la CIJ dans l'affermissement et le développement du droit international humanitaire, Université de Bourgogne, 2008, (inédit).

129 ANONYME, « Traités en droit international public », disponible sur http://fr.wikipedia.org, visité le 20/9/2011.

Actuellement on a décidé d'aller plus loin que l'unanimité. La question de réserve est laissée à l'appréciation individuelle de chaque Etat. On a privilégié le caractère volontariste des traités.130

Cependant, dans la formulation du libellé de la Convention de Vienne, le droit de faire des réserves n'est pas un droit absolu mais relatif car la réserve doit être compatible avec le but et l'objet du traité. Cette Convention précise que « l'objet est l'ensemble des normes contenues dans le traité et les buts c'est l'objectif que les parties ont voulu atteindre ».131 Le juge à côté d'une Convention, se demande que soit ce que les parties ont voulu mettre en oeuvre dans cette Convention ?

L'exigence a été formulée par la Cour Internationale de Justice dans son avis relatif aux réserves à la Convention sur le génocide. Elle met le traite à l'abri d'altérations qui le défigureraient totalement ou lui feraient perdre toute raison d'être.

L'examen de la pratique des Etats et des organes de contrôle montre que le constat de l'incompatibilité d'une réserve avec l'objet et le but du traité fait en réalité appel à deux types de considérations : il est d'abord question du caractère fondamental d'un droit, caractère qui interdirait d'y apporter une réserve. (~.).132

Néanmoins, il convient de signaler que nonobstant la tentative de la Cour Internationale de Justice d'interdire les réserves incompatibles avec l'objet et le but du traité, la confusion subsiste encore. D'une part, on se demande sur l'effet que la réserve incompatible aura sur l'ensemble du traité, et d'autre par la confusion existe, celle de déterminer ce qu'il faudra entendre par l'objet et le but du traité. Pour trancher cette difficulté, J. VERHOEVEN dit qu'il devrait y avoir un organe spécialisé pour cette fin. Il le dit en ces termes :

« Toutes les questions ne sont pas réglées. L'une des plus délicates concerne l'effet des réserves qui
sont incompatibles avec l'objet et le but du traité que n'aborde pas la Convention de Vienne. Si cette
incompatibilité est établie, il parait logique de considérer que la réserve doit être tenue pour nulle

130ANONYME, « Le caractère volontariste du droit international », disponible sur www.hassanrahmouni.com , visité le 14/7/2011.

131 ANONYME, « Elaboration du droit international », disponible sur http://fr.wikibooks.org , visité le 7/12/2011.

132 DE FROUVIELLE, O., L'intangibilité des droits de l'homme en droit international : Régime conventionnel des droits de l'homme et droit des traites, Editions A. PEDONE, Paris, 2004, p. 346.

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en ce qui concerne les Jus Cogens. On ne voit pas, en effet, comment elle pourrait, en pareil cas, être considérée comme valable. S'il en est ainsi, la nullité porte-t-elle sur la réserve seulement ou s'étend-t-elle à l'ensemble du traité à l'occasion de la signature ou de la ratification du quelle elle a été formulée ? (....) L'une des difficultés tient en l'occurrence à l'absence d'un organe qui puisse en toute indépendance se prononcer sur la compatibilité de la réserve avec l'objet et le but du traité. Il est peu vraisemblable que les Etats acceptent par principe de se soumettre en l'occurrence à la décision d'un juge ». 133

Cela étant, Il convient de noter que nonobstant les difficultés liées à la détermination des réserves qui sont incompatibles à l'objet et au but du traité, il est donc possible de faire une objection à une réserve quand un Etat estime qu'elle est incompatible avec le but et l'objet du traité. Dans ce cas l'Etat refuse d'avoir toute relation conventionnelle avec l'auteur de la réserve.

L'actualité des Jus Cogens est aujourd'hui, comme dans le passé faite, de frustrations et de réussites. L'avenir dépendra « mutatis-mutandis » d'une ferme volonté politique, celle de sauver la dignité et la suprématie de ces normes. Si la loi internationale prévoit des mécanismes d'application, de contrôles, de secours et de sanctions, les Etats n'y prêtent généralement guère d'attentions particulières.134

Le rôle du juge de par la Cour International de Justice est, on ne peut plus clair là-dessus très important, car c'est à lui qu'il appartient à travers son pouvoir et surtout à l'appui des décisions convaincantes de mettre en exergue, les principes relatif aux Jus Cogens, de rappeler que ces normes doivent être respectées.135

Au cours de ce chapitre nous nous sommes posé la question de savoir quel rôle joue la Cour Internationale de Justice dans la détermination, l'affermissement, le développement et le respect des Jus Cogens ? Autrement dit nous avons voulu savoir quelles sont les actions de la Cour (sa contribution) dans l'épanouissement des normes de Jus Cogens à travers sa mise en oeuvre et son respect scrupuleux des parties au conflit ?

133VERHOEVEN, J., Droit international public, Larcier, Bruxelles, 2000, p.408.

134 NGOY, T., L'accord de Lusaka : la paix piégée, éd. CERBIPAD, Kinshasa, 2002, P. 262.

135 GAMBO, C., Op.cit, p.17.

La conclusion à laquelle nous amène l'argumentaire développé au cours de ce chapitre est que le rôle de la Cour Internationale de Justice dans la détermination et le respect des normes de Jus Cogens n'a pas toujours été clair et satisfaisant. Dans le chapitre suivant nous proposons quelques mesures à mettre en branle pour un avenir meilleur des Jus Cogens.

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CHAPITRE III : MECANISMES ENVISAGEABLES POUR UNE MEILLEURE
INTERPRETATION ET APPLICATION DES NORMES DE JUS COGENS

Dans une société internationale dominée par le volontarisme et la souveraineté des États, les opinions les plus divergentes sur le concept de Jus Cogens se sont fait jour, conduisant parfois à des échanges d'arguments fort animés. Le débat porte à la fois sur le problème théorique des conditions logiquement nécessaires à l'apparition du Jus Cogens dans un ordre juridique déterminé, avec son corollaire, qui consiste à déterminer si de telles conditions sont déjà ou peuvent être réunies dans l'ordre juridique international, et, d'autre part, sur la question de fait de savoir si cet ordre comprend déjà des normes de Jus Cogens et, dans l'affirmative, quelles sont-elles.

Devant cette impasse, la Cour Internationale de Justice ayant la détermination et le respect des Jus Cogens dans sa mission a resté timorée dans la réalisation de sa responsabilité comme nous l'avons fait remarquer dans le chapitre précédent. Tout juriste de bonne volonté pourrait ainsi s'inquiéter de l'avenir des Jus Cogens.

Voilà qui justifie assurément la présence de ce chapitre ayant pour finalité de réexaminer le futur des Jus Cogens et de proposer les mesures à mettre en branle pour s'assurer que ce futur sera meilleur. Les voies que nous proposons dans ce chapitre concernent la Cour elle-même, les contentieux et les Nations Unies.

III.1 De la juridiction facultative à la juridiction obligatoire dans les affaires engageant les
Jus Cogens

Selon l'article 36 du Statut de la Cour, « la compétence de la Cour s'étend à toutes les affaires que les parties lui soumettront ».136 A la différence de la situation des particuliers devant les tribunaux internes, les Etats ne sont soumis à la juridiction obligatoire de la Cour pour un litige donné que pour autant qu'ils y consentent. La nécessité du consentement des Etats pour que la Cour puisse exercer sa compétence contentieuse est rappelée systématiquement par la Cour Internationale de Justice. Ainsi dans l'affaire de l'Or monétaire, la Cour Internationale de Justice

136 Article 36 du Statut de la Cour Internationale de Justice.

rappelle qu'elle « ne peut exercer sa juridiction à l'égard d'un Etat si ce n'est qu'avec le consentement de ce dernier137

En règle générale, les parties conviennent de soumettre un différend déjà existant à la Cour. Dans ce cas, le compromis juridictionnel doit comprendre non seulement l'expression de l'accord des parties pour saisir la Cour mais aussi la définition de l'objet du litige. Il peut s'agir d'un différend politique ou juridique. Outre le compromis juridictionnel, la volonté d'un Etat de soumettre un différend à la Cour peut résulter de tout acte concluant, en particulier le comportement de l'Etat défendeur postérieurement à la saisine de la Cour. La Cour fait preuve de souplesse comme le montre cette procédure du forum prorogatum par laquelle la Cour peut accepter d'exercer sa compétence lorsque l'une des parties ne reconnaît celle-ci qu'une fois l'instance déjà introduite par la partie adverse.138

Ainsi, la Cour s'estimerait compétente si l'Etat défendeur acceptait de se présenter à l'instance ou s'il participait effectivement à la discussion en déposant ses propres conclusions ou en n'émettant pas d'objection contre une future décision au fond. Il s'agirait d'une acceptation tacite de la compétence de la Cour sur laquelle l'Etat défendeur ne pourrait pas revenir en vertu du principe de bonne foi. Cela permet de passer outre à des irrégularités de procédure lors de l'introduction de l'instance afin de conférer à la Cour la compétence sur le fond.139

Dans le cas de la juridiction obligatoire, le consentement reste nécessaire mais il ne porte plus sur un différend né mais sur des différends éventuels. D'une part on peut affirmer que la juridiction de la Cour Internationale de Justice est obligatoire parce que l'accord des parties est contenu à l'avance dans un acte juridiquement contraignant.

La juridiction de la Cour peut résulter, en premier lieu, d'un traité ou d'une Convention en vigueur qui prévoit d'avance la compétence de la Cour. L'article 37 du Statut prévoit que :

137 Affaire de l'or monétaire pris à Rome en 1943 (Italie/ France, Royaume-Uni... et Etats-Unis d'Amérique) .Arrêt du 15 juin 1954.

138 CLAXTON, C., Op.cit, p. 35.

139 Ibidem.

« Lorsqu'un traité ou une Convention en vigueur prévoit le renvoi à une juridiction que devait instituer la Société Des Nations ou à la Cour Permanente de Justice Internationale, la Cour Internationale de Justice constituera cette juridiction entre les parties au présent Statut ».140

Les engagements spéciaux sont inclus dans une clause spéciale de règlement juridictionnel contenue dans un traité dont l'objet principal n'est pas le règlement des différends mais qui vise les différends pouvant naître de l'application ou de l'interprétation de ce traité. Les engagements généraux figurent dans les traités qui ont pour objet le règlement pacifique des différends et portent exclusivement sur les différends qualifiés de juridiques.

En second lieu, les Etats peuvent consentir à la compétence de la Cour au moyen d'une déclaration facultative. L'article 36, §2 prévoit que :

« les Etats parties au présent Statut pourront, à n'importe quel moment, déclarer reconnaître de plein droit et sans Convention spéciale, à l'égard de tout autre Etat acceptant la même obligation la juridiction de la Cour ... ».141

Pour souscrire à la clause facultative de juridiction, il suffit que l'Etat soit partie au Statut de la Cour et adresse une déclaration d'acceptation au Secrétaire général qui en transmettra une copie aux autres Etats parties et au greffier de la Cour. Ces déclarations ont pour effet que les Etats qui les formulent reconnaissent avoir le droit de se citer les uns les autres devant la Cour en lui soumettant une requête introductive d'instance. En vertu du principe de réciprocité, la Cour n'est compétente, lorsqu'elle est saisie d'une requête unilatérale, que si les deux Etats sont liés par leur déclaration d'acceptation.142

Cela étant, il apert de réfléchir d'avantage sur le caractère obligatoire des normes internationaux en général et des Jus Cogens en particulier, si la Cour Internationale de Justice ne les appliquerait que si les Etats l'acceptent. Et si les juridictions internes agissaient de la sorte ? Quel est le contrevenant qui accepterait que la Cour soit compétente pour lui juger ?

140 L'article 37 du Statut de la Cour Internationale de Justice.

141 L'article 36, §2 du statut de Cour Internationale de Justice.

142 Art 2 du statut de Cour Internationale de Justice.

Nous partageons ces inquiétude avec M. Gorbatchev qui, dans son article célèbre : « Réalité et garanties pour un monde sur » affirmait la nécessite non seulement de relancer les

Nations Unies comme l'outil essentiel pour le maintien et le rétablissement de la paix mais aussisur le rôle centrale qu'il convient de reconnaitre à la Cour Internationale de Justice. A ce propos
il mettait l'accent particulier sur l'idée que « tous les Etats devraient accepter la juridiction
obligatoire de la Cour, quoique sous des conditions mutuellement agrées »
, et il proposait aux
membres permanents du Conseil de Sécurité de donner l'exemple par une décision concertée
entre eux à ce sujet.143

En effet, nous sommes d'avis que pour assurer le respect effectif des normes internationales en général et des Jus Cogens en particulier, il serait très urgent de revoir la compétence de la Cour Internationale de Justice. Celle-ci devait disposer de la juridiction obligatoire surtout dans les affaires engageant les Jus Cogens.

III.2 La Cour Internationale de Justice face à l'insurmontable qualité souveraine des contentieux

La souveraineté de l'Etat est « la qualité de celui-ci de n'être obligé ou déterminé que par sa propre volonté dans les limites du principe supérieur du droit et conformément au but collectif qu'il est appelé à réaliser».144

G. CORNU lui, nous définit la souveraineté de l'Etat comme « un caractère suprême d'une puissance qui n'est soumise à aucune autre puissance suprême et inconditionnelle dans laquelle l'ordre international reconnait un attribut essentiel de l'Etat mais qui est reconnue par opposition à certaines entités ».145

La souveraineté de l'Etat est ainsi la plénitude de compétence qui lui est attribuée comme sujet du droit international public. C'est un élément principal qui permet de distinguer un Etat

143 GORBATCHEV, M., cité par VIRALLY M., Le droit international au service de la paix, de la justice et du développement, éd. A PEDONE, Paris, 1991, p.316.

144 ANONYME, « La souveraineté », disponible sur : http://fr.wikipedia.org, visité le 21 juillet 2011.

145 CORNU, G., cité par MUHIRE J-M E., De l'intervention de l'ONU face aux violations des droits de l'homme en droit international, avril, 2008, p.15.

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d'une organisation internationale. L'article 21 de la Charte des Nations Unies dit que, « l'organisation est fondée sur le principe de l'égalité souveraine de tous ses membres ».146

La souveraineté étatique est un principe qui innerve l'ordre juridique international et dont la Cour Internationale de Justice ne peut se départir lorsqu'elle est amenée à se prononcer en droit. En effet, il n'est de secret pour personne que le droit international est un droit conçu par, et destiné aux Etats. De fait la souveraineté est à l'origine et à la fin de toutes les normes.147

Pour se protéger contre les incursions du droit international, les Etats ont forgé d'autres concepts de « domaine réservé » et, comme corollaire, de « non-ingérence ». Le domaine réservé est celui des activités étatiques où la compétence de l'Etat n'est pas liée par le droit international. Il est délimité par le droit international. Il n'appartient pas à l'Etat d'en tracer les contours de manière indépendante.148

Le principe de la non-ingérence vise, lui, à protéger les Etats contre les pressions et les interventions d'autres pays ou d'organisations internationales. Il est souvent invoqué dans des domaines particulièrement sensibles comme les droits de l'homme et l'assistance humanitaire, voire aussi en matière d'économie et de protection de l'environnement.149

Il existe aussi le principe des immunités de l'Etat. En premier lieu l'Etat dispose de l'immunité de juridiction. Il s'agit de l'exception de procédure selon laquelle un Etat ne peut, sans son consentement exprès, être traduit devant les tribunaux d'un autre Etat. Cette immunité ne peut être invoquée que pour les actes des puissances publiques.

Tous ces principes internationaux font que le système juridictionnel de règlement des différends interétatiques présente une série d'originalités majeures par rapport aux systèmes juridictionnels de droit interne témoignant de l'insurmontable qualité souveraine des parties au contentieux.

146 L'article 21 de la Charte des Nations Unies.

147 BARRY NJEM IBOUM, P., L'arbitration de la Cour Internationale de Justice : une étude critique, Institut des Relations Internationales du Cameroun, 2010, (inédit).

148 ANONYME, « Le droit international public », disponible sur www.lawscape.ch , visité le 16/8/2011.

149 SAMUEL L., Le principe de non ingérence, 2006, p.6, (inédit).

Alors que dans tout système juridique, l'un des attributs reconnus à tout justiciable est le droit d'ester en justice, le règlement juridictionnel tel qu'il est envisagé au sein de la Cour Internationale de Justice repose sur une justice facultative liée au consentement de l'Etat à se voir traduit en justice. Les magistrats du palais de la paix sont amenés à statuer sur des différends opposant des Etats égaux et souverains aux termes de l'article 2 alinéa 1 de la Charte des Nations Unies.150

La procédure et les règles de compétence dans cette institution sont donc fortement marquées du sceau du consensualisme. On se demanderait alors si, avec la souveraineté des Etats, la Cour Internationale de Justice ne risquerait pas de n'être que ce que les Etats en feraient comme disait R. URUJENI à propos de l'ONU : « (...) Pourquoi l'ONU n'est-elle pas ce directoire du monde capable d'arrêter les guerres, de réduire les inégalités, de prévenir la dégradation de l'environnement, de rendre la planète plus viable ? L'on répondrait que c'est par ce que l'ONU n'est que ce que les Etats en font ».151

C. BUHRER et LEVENSON, nous illustrent le méfait de la souveraineté dans la réplique de J. GOEBBELS contre une accusation portée contre le gouvernement allemand par l'un de ses citoyens, pour les exactions commis à l'encontre de ses coreligionnaires juifs en HauteSilésie : « Nous sommes un Etat souverain (...) nous faisons ce que nous voulons de nos socialistes, de nos pacifistes et de nos juifs, tout cela ne vous regarde pas. Nous n'avons de contrôle à subir ni de l'humanité, ni de la SDN »152

Face à la souveraineté des Etats, avec un pessimisme irréversible, P. DAILLIER et A. PELLET diront qu'« il n'est pas facile de concevoir que des entités qui se veulent souveraines par-dessus tout, doivent, ou même puissent, se soumettre au droit et voient leur liberté d'action limitée par lui ».153

150 L'article 2 alinéa 1 de la Charte des Nations Unies.

151URUJENI, R., De l'applicabilité du principe de non-agression en droit international public : cas de l'Irak et de l'Afghanistan, (Mémoire), ULK, Kigali, août 2005, p.75, (inédit).

152 BUHRER, J.C. et LEVENSON B.C., cités par MUHIRE J-M E., Op.cit, p. 32.

153 DAILLIER, P., PELLET, A., Droit international public : formation du droit, sujets, relations diplomatiques et consulaires, responsabilité, règlement des différends, maintien de la paix, espaces internationaux, relations économiques, environnement, 7e édition, LGDJ, Paris, 2002, p.83.

59

A notre humble avis, la pratique pourrait évoluer dans le sens d'un affaiblissement de l'immunité de juridiction en cas de violation de règles de Jus Cogens.

III.3 La Cour Internationale de Justice face aux raisons politiques pouvant expliquer sa faible activité

Jusqu' à une époque récente, les raisons politiques pouvaient expliquer la faible activité de la Cour Internationale de Justice. Les raisons politiques tiennent à une certaine méfiance des Etats à l'égard des juges de La Haye. C'est ainsi que certains pays refusèrent de reconnaître la compétence de la Cour. Les pays du tiers-monde l'estiment trop "occidentale" tandis que les pays occidentaux l'estiment trop "orientée", en raison des recrutements de ces dernières années, vers les pays du tiers-monde.154

Pour souligner la méfiance des Etas vis-à-vis de la Cour Internationale de Justice, C.- A. COLLIARD et L. DUBOUIS écrivent ceci :

« Il était inévitable que la méfiance des Etats se manifesta avec plus d'ampleur à l' endroit de la Cour Internationale de Justice. L'inquiétude sur l'avenir de celle-ci s'est nourrie de ce qu'à certaines périodes (1970 notamment), la Cour n'a pu déployer qu'une faible activité. Le nombre limité d'acceptation de la clause facultative de compétence obligatoire est souvent présenté comme le baromètre de la faible confiance dont la Cour jouit auprès des Etats. Il est corroboré par d'autres indices : retraits d'acceptation de la clause après des affaires qui n'ont pas tourné en faveur de l'Etat intéressé (France en 1974 à la suite de l'affaire relatif aux essaies nucléaires, Etats Unis en 1985, à la suite de l'affaire relative à l'intervention au Nicaragua), non comparution (France, Etats Unis, dans les affaires précitées, Iran dans l'affaire du personnel diplomatique et consulaire des Etats Unis à Téhéran en 1980 ».155

Aussi, certains Etats avaient-ils manifesté leur méfiance vis-à-vis de la Cour simplement par ce qu'ils voyaient que celle-ci ne venait que pour limiter leur souveraineté comme l'indique A. AZAR en ces termes : « Soucieux de rester maîtres de leurs différends, les Etats préfèrent ne

154 CLAXTON, C., Op.cit, p. 19.

155 COLLIARD, C-A. et DUBOUIS L., Institutions internationales, éd. Dalloz, Paris, 1995, p. 113.

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pas recourir au juge. On a pu remarquer la méfiance qu'ils ont longtemps nourris a l'égard du règlement judiciaire considéré comme une limitation de leur souveraineté ».156

La même aidée est clairement exprimée par M. VIRALLY en ces termes :

« Du champ occidental-qui est notoirement celui des supporters traditionnels de la justice internationale étaient venus divers signes de désaffectation, voire de véritable méfiance, dont les plus forts ont été certainement les décisions française (1974) et américaine (1985) de revenir sur l'acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour Internationale de Justice. Ces états exprimaient ainsi leur répulsion à voir la Cour se saisir d'affaires délicates touchant le trop près à des dossiers considérés par eux d'importance politique primordiale ».157

C'est là une preuve spécialement saisissante du bien-fondé de la remarque d'après laquelle même les Etats qui ont toujours clamé à haute voix leur attachement pour le règlement judiciaire préfèrent en fait voir celui-ci cantonné à des domaines fort restreints des relations internationales ne mettant pas en jeu des intérêts ressentis comme essentiels et même dans ces domaines, ne sont prêts à l'utiliser qu'à titre tout à fait exceptionnel.

M. VIRALLY nous fait noter encore qu' « à cela il faut ajouter que la Cour a sans doute progressivement perdu beaucoup d'attrait aux yeux de l'Ouest pour des raisons découlant, plus que de sa composition actuelle (qui fait d'avantage place à des juges issus du tiers monde), du droit qu'elle est appelée a relever et a appliquer ».158

M. IMBLEAU et W.A. SCHABAS quant à eux, pensent que les autres pays ont perdu confiance en la Cour à cause de sa passivité. Ils le disent en ces termes : « La Cour fut pratiquement inactive pendant plusieurs années. Sa crédibilité avait été affectée, surtout dans les pays en voie de développement, par suite de l'émission d'un avis consultatif dans les années soixante sur l'avenir de la Namibie ».159

156 AZAR, A., L'exécution des décisions de la Cour Internationale de Justice, éditions de l'Université de Bruxelles, Bruxelles, 2003, p.3.

157 VIRALLY, M., Op.cit, p.13.

158 Ibidem.

159 SCHABAS, W.A., et IMBLEAU M., Op.cit, p.245.

III.4 Nécessité d'amendements du Statut de la Cour Internationale de Justice et de la Charte des Nations Unies

Sous ce paragraphe, nous voulons montrer qu'il ya nécessité de révision du Statut de la Cour Internationale de Justice et de la Charte des Nations Unies. Cette révision doit être portée sur la compétence et la structure générale de la Cour.

III.4.1 Le volontarisme

La compétence désigne le pouvoir qui est conféré á la Cour de trancher une affaire déterminée. Cette compétence est conférée á la Cour Internationale de Justice par les Etats soit, bilatéralement par le biais d'un compromis soit, unilatéralement par le biais d'une notification écrite de l'introduction d'une instance.160

La compétence de la Cour est ainsi limitée par le principe du consentement des Etats. Que ce soit par le biais d'un compromis, d'un accord attributif de compétences ou d'une clause facultative de juridiction obligatoire, le consentement de l'Etat constitue la condition principale pour que la Cour Internationale de Justice puisse exercer sa fonction contentieuse. Dans l'affaire relative á la licéité de l'emploi de la force, la Cour a rappelé qu'elle n'avait pas automatiquement compétence pour connaître des différends juridiques entre Etats et que l'un des principes fondamentaux posé par son Statut est qu'elle ne peut trancher un différend entre les Etats sans que ceux-ci aient consenti á sa juridiction.161

La Cour opère une distinction entre la question de l'acceptation par un Etat de la juridiction de la Cour et la question de la compatibilité de certains actes étatiques avec le droit international. Elle souligne, qu'en tout état de cause, les Etats demeurent responsables des actes contraires au droit international. Il faut préciser que même lorsque les Etats consentent á la juridiction de la Cour par le biais d'une clause facultative de juridiction obligatoire, ils accompagnent, la plupart du temps, leur déclaration d'acceptation de réserves qui tendent á limiter le champ d'application de leur engagement dans le temps et d'un point de vue matériel.

160 CLAXTON, C., Op.cit, p.41.

161 BISSOHONG, A., L'arr~t de la Cour Internationale de Justice du 10 octobre 2002 portant règlement de différend frontalier sur la péninsule de Bakassi, 2010, (inédit).

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Pour montrer le méfait de ce volontarisme, M. CHEMILLIER-GENDREAU note ce qui suit : « Les conflits entre Etats ne peuvent etre tranchés par la CIJ qu'avec l'accord des Etats concernés. Cette prérogative prive certains protagonistes de la possibilité de faire dire le droit à leur profit puisque l'adversaire peut éviter le prétoire ».162

Une première solution consisterait à modifier le Statut de la Cour qui opère une distinction entre la compétence rationae materiae et la compétence rationae personae. L'article 93 de la Charte et l'article 35 du Statut prévoient que tous les membres des Nations Unies sont ipso facto parties au Statut, que ceux-ci n'ont pas à accepter expressément le Statut et que celui-ci est considéré comme partie intégrante de la Charte.163 Or l'article 36 prévoit que la compétence de la Cour ne peut être fondée que sur le consentement des Etats.164

Etre partie au Statut ouvre la possibilité aux Etats de soumettre leurs différends à la compétence de la Cour mais ne les y oblige nullement. Une modification de l'article 36 pourrait avoir pour objet de prévoir la compétence de la Cour dès lors que celle-ci est saisie par un Etat partie au différend sous réserve que la Cour soit compétente sur le fond et que tous les Etats parties au différend soient parties au Statut de la Cour.

III.4.2 30E4P HO'expON4[OeV arrêts de la Cour

La Cour Internationale de Justice ne tient du Statut aucune compétence pour connaitre de l'exécution de ses décisions. Si la Cour s'est exprimé plus d'une fois sur la question de l'exécution de ses décisions, elle a refusé néanmoins de traiter des questions d'inexécution confirmant ainsi le principe de son incompétence en la matière. Bien que soucieuse de la mise en oeuvre des arrêts qu'elle rend, la Cour a cependant refusé d'indiquer aux parties la manière dont elles pouvaient exécuter un jugement.165 En bref, si la Cour s'est montré préoccupée par

162 CHEMILLIER-GENDREAU, M., Droit international et démocratie mondiale : les raisons d'un échec, les éditions Textuels, Paris, février 2002, p. 84.

163 L'article 93 de la Charte des Nations Unies et l'article 35 du Statut de la Cour Internationale de Justice.

164 L'article 36 du Statut de la Cour Internationale de Justice.

165 Arrêt Haya de la Torre du 13 juin 1951, Cour Internationale de Justice, Rec., 1951, p.78.

l'exécution des arréts, elle n'a pas cherché à savoir quelle suite leur a réservé l'Etat perdant ni quel usage en a fait la partie gagnante.166

Pour résoudre le problème d'inexécution des arréts internationaux, M. RWANKUBITO propose qu'il doive y avoir un gendarme international pour cette fin. Il le dit en ces termes : « La communauté internationale doit avoir un gendarme chargé d'appliquer les dispositions mises en place par les Etats eux-mêmes au sein de l'organisation, si non le droit international ne sera qu'un mythe ».167

De notre part, nous sommes d'avis que le changement de la compétence de la Cour en termes de sa capacité d'assurer le suivi d'exécution de ses arréts serait une meilleure solution que de penser à un gendarme international.

III.4.3 Des faiblesses structurelles

La Cour Internationale de Justice ne joue qu'un rôle mineur dans la société internationale contemporaine car elle soufre de faiblesses structurelles. La justice internationale est, avant tout, lente : il faut 3 ans en moyenne à la CIJ pour régler une affaire ; 8 ans dans l'affaire de la Barcelona traction). 168

Elle est en suite couteuse pour les Etats et imprévisible. Les changements réguliers de sa composition produisent un effet certain sur l'orientation politique de sa jurisprudence. Les Etats contestent assez régulièrement les principes et les compétences de la Cour en raison de la nationalité des membres qui la composent. Les Etats socialistes et les pays du tiers monde trouvent que la politique jurisprudentielle de la Cour est trop occidentale. A l'inverse, les Etats occidentaux estiment que la Cour défend mieux les intérêts du tiers monde et des pays en développement.169

166 AZAR, A., Op.cit, p.194.

167 RWANKUBITO, M., Op.cit, p.65.

168 CARREAU, D. cité par AZAR, A., Op.cit., p. 41.

169 RUIZ H.-F., « Le procès équitable devant la Cour Internationale de Justice », disponible sur : http://hal.archivesouvertes.fr , visité le 11/9/2011.

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Tous ces problèmes font que la Cour ne présente actuellement qu'un bilan modeste comme l'affirme P. BLACHER :

« Depuis 1946, la Cour a rendu 64 arrêts sur le fonds et 24 avis consultatifs. A ce bilan modeste, il faut ajouter que 60 Etats seulement ont participé à des affaires contentieuses devant la Cour : 15 Etats africains, 10 Etats européens, 7 d'Amérique latine et 28 des autres continents. Au delà des statistiques, la doctrine constate que les affaires confiées à la CIJ rentrent dans ce que l'on peut appeler des contentieux d'ampleur moyenne, en un mot, des différends techniques ne portant pas sur des questions à forte densité politique ». 170

III.4.4 Une juridiction concurrencée

L'un des phénomènes marquants de l'ordre juridique international est l'émergence de nouvelles juridictions ou instances qui viennent concurrencer la Cour Internationale de Justice, que ce soit dans le cadre d'organisations régionales, surtout la CEDH en Europe, la Cour de Justice Centraméricaine, ou dans des domaines spécialisés avec le Tribunal International du Droit de la Mer, le Tribunal Administratif de l'Organisation International du Travail.171

Ce qui est un peu étonnant est que cette concurrence est prévue par la Charte des Nations Unies qui précise qu'« Aucune disposition de la présente Charte n'empêche les membres de l'organisation de confier la solution de leurs différends à d'autres tribunaux en vertu d'accords déjà existants ou qui pourront être conclus à l'avenir. »172 Cette concurrence ne manque pas d'effet sur la détermination des normes du droit international en général et des Jus Cogens en particulier. Un juge unique imposerait la bonne interprétation du droit international conventionnel et, surtout, déterminerait de manière incontestable (avec effet erga omnes) les normes coutumières régissant la société internationale.173

170 BLACHER, P., Droit des relations internationales, éd. du Juris-Classeur, paris, 2004, p.135.

171 GUY, C., « Les influences croisées entre juridictions nationales et internationales », disponible sur http://www.ahjucaf.org , visité le 3/10/2011.

172Art 95 de la Charte des Nations Unies.

173 KARAGIANNIS, S. cité par CHEMILLIER-GENDREAU, M., Droit International et démocratie mondiale : les raisons d'un échec, les éditions Textuels, paris, février 2002, p114.

III.4.5 Réserves des Etats face à la compétence de la Cour

Une autre solution pour assurer le respect incontournable des Jus Cogens concerne les clauses facultatives de juridiction obligatoire et consiste à limiter les réserves que les Etats peuvent apporter à leur déclaration d'acceptation. Aujourd'hui ce sont les trois quarts des déclarations qui sont limitées par des réserves qui visent à exclure certaines parties, certains types de différends ou à limiter la durée de la validité de la déclaration.174

Ainsi le gouvernement suisse a déclaré qu'il était regrettable << qu'un grand nombre des déclarations d'acceptation soient grevées de lourdes réserves ». Celui-ci souhaiterait que << par une résolution solennelle, l'Assemblée Générale invite les Etats à accepter la juridiction obligatoire et que ceux qui l'ont déjà fait ou le feront à renoncer à des réserves trop restrictives ou, s'ils les considèrent indispensables, à les formuler en termes précis et limitatifs ».175

Ces réserves peuvent limiter, dans le temps, la durée d'application de la déclaration, prévoir un retrait simple sur notification ou exclure de la compétence de la Cour les différends nés avant la date d'acceptation de la juridiction obligatoire. Les réserves peuvent également viser les différends pour lesquels il est prévu un autre mode de règlement pacifique, les différends mettant en jeu les intérêts vitaux du déclarant ou relevant de la compétence nationale de l'Etat déclarant ou encore des différends survenant au cours ou à cause des hostilités.

Les réserves les plus préjudiciables à la compétence de la Cour sont celles qui ont trait à la compétence nationale ou au domaine réservé, par lesquelles les Etats soustraient à la juridiction de la Cour les différends relevant de leur compétence nationale ou de leur défense nationale telle que celle-ci est définie non pas par la Cour mais par l'Etat déclarant. Les déclarations facultatives ont une portée d'autant plus limitée que celles-ci imposent la réciprocité. Ainsi une réserve formulée par une partie à un différend peut ôter tout effet à la déclaration de l'autre partie qui correspond à une acceptation plus large.176

174 CHEMILLIER-GENDREAU M., Op.cit, p.211.

175 Ibidem.

176 GHARBI, F., << Le déclin des déclarations d'acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour Internationale de Justice », in : Les Cahiers de droit, vol. 43, n° 3, 2002, p. 433-502.

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Le Statut ne faisant aucune mention de ces réserves, il serait souhaitable d'introduire un article qui limiterait le champ d'application de celles-ci, en interdisant les réserves à certaines dispositions, ou encore en excluant certaines catégories de réserves comme les réserves de caractère général ou, mieux encore, un article qui interdirait tout simplement les réserves. Ainsi, dans le but de renforcer le rôle de la Cour Internationale de Justice, BOUTROS BOUTROSGHALI, ancien Secrétaire Général de l'ONU a recommandé que :

« Tous les Etats Membres devraient accepter la juridiction générale de la Cour Internationale de Justice, conformément à l'article 36 de son Statut, sans aucune réserve. Lorsque les structures nationales ne permettent pas une telle acceptation, les Etats devraient établir, par voie d'accords bilatéraux ou multilatéraux, une liste générale des questions qu'ils sont prêts à soumettre à la Cour et devraient retirer les réserves qu'ils ont formulées quant à la juridiction de la Cour dans les clauses des traités multilatéraux relatives au règlement des différends».177

Cela étant, rappelons que notre argumentaire au cours de ce chapitre a d'une par tourné autour des grands obstacles encourus par la Cour Internationale de Justice dans l'accomplissement de sa mission en général et en particulier dans la détermination et le respect des Jus Cogens. D'autre part, il s'agissait de proposer quelques solutions à ces problèmes pour le futur meilleur des Jus Cogens.

Parmi les obstacles encourus par la Cour, nous avons évoqué le problème en rapport avec la juridiction facultative qui est corollaire à celui des réserves des Etats face à la compétence de la Cour. Nous avons signalé en outre des difficultés liées à l'insurmontable qualité souveraine des contentieux et aux raisons politiques pouvant expliquer la faible activité de la Cour Internationale de Justice. En fin nous avons montré qu'il ya nécessite urgente d'amender le Statut de la Cour et de la Charte des Nations Unies pour que les solutions que nous avons proposées dans ce chapitre puissent être effectives.

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CONCLUSION GENERALE

Nous voici au terme de notre travail qui nous a permis d'examiner le rôle de la Cour Internationale de Justice dans la détermination et le respect des normes de Jus Cogens. En introduisant ce travail, nous nous sommes posé deux questions de recherche suivantes :

· Quel serait le rôle de la Cour Internationale de Justice dans la détermination et le respect des normes de Jus Cogens ?

· Quelles seraient les mesures à mettre en branle pour un avenir meilleur des normes de Jus Cogens ?

Pour répondre à ces questions, nous avons provisoirement formulé des hypothèses suivantes :

· La Cour Internationale de Justice, pourtant placée par la Convention de Vienne de 1969 au coeur du mécanisme de reconnaissance des Jus Cogens semble très timorée dans son oeuvre de détermination et de matérialisation de ces normes ;

· La révision de la compétence de la Cour Internationale de Justice serait l'une des meilleures solutions pour assurer le respect des normes de Jus Cogens.

Sur base de nos analyses personnelles et de ce que nous avons trouvé dans la documentation diversifiée, il y a lieu d'affirmer sans ambages que nos hypothèses de départ ont été vérifiées et confirmées.

Au cours de notre cheminement, il a été d'abord question de tourner notre raisonnement autour des concepts de Jus Cogens et de la Cour Internationale de Justice. D'une part, il s'agissait de clarifier le concept de Jus Cogens par l'examen portant sur son origine, sa réception par la communauté internationale et les caractéristiques de base permettant sa détermination.

D'autre part, il s'agissait de faire une brève présentation de la Cour Internationale de Justice tenant compte de sa naissance, ses principes directeurs sa compétence, bref sa mission et la façon dont elle l'accomplit.

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de notre travail qui est de savoir le rôle de la Cour Internationale de Justice dans la détermination et le respect des normes de Jus Cogens.

Ce chapitre nous a permis de réaliser que la Cour, telle qu'elle est organisée aujourd'hui, est relativement similaire à la Cour Permanente de Justice Internationale qui la précédait. Alors qu'on a pu constater un changement assez radical dans les pouvoirs et la composition des organes politiques après la seconde guerre mondiale, peu de progrès ont été réalisés en ce qui concerne l'organe judiciaire.

Au lieu de devenir le principal organe judiciaire des Nations Unies dont la juridiction serait obligatoire et automatique, la Cour Internationale de Justice demeure, de la même façon que la Cour Permanente de Justice Internationale, une juridiction attributive fondée strictement sur le consentement des Etats.178

L'efficacité de la Cour Internationale de Justice dans la détermination et le respect des normes de Jus Cogens se voit donc limitée par le fait que le Statut de celle-ci et la Charte des Nations Unies délimitent de façon restrictive tant sa compétence rationae personae que sa compétence rationae materiae.

Nous avons succinctement montré que plusieurs raisons expliquent la méconnaissance par l'opinion publique de la Cour Internationale de Justice ainsi que le rôle mineur joué par celleci dans la société contemporaine en général et dans la détermination et le respect des normes de Jus Cogens en particulier : les raisons juridiques tiennent, d'une part, à ce que la saisine de la Cour est restreinte, et d'autre part, au déclin de la clause facultative de juridiction obligatoire.

Paradoxalement, le besoin d'un organe judiciaire efficace au niveau international capable de déterminer et de faire respecter les normes de Jus Cogens se fait de plus en plus sentir. D'une part, la régulation des rapports interétatiques mettant en cause les normes de Jus Cogens est nécessaire pour prévenir tout abus et contrer toute mesure arbitraire. Dans l'état actuel des

178 CLAXTON, C., Op.cit, p. 54.

choses, il est essentiel d'élargir la base de compétence de la Cour qui est limitée par le consentement de tous les Etats parties au différend.179

Afin de conférer à la Cour le rôle d'organe judiciaire principal des Nations Unies, il serait nécessaire d'agir sur deux plans différents. Sur le plan politique, il serait, tout d'abord, souhaitable de mener une véritable campagne en faveur de la Cour, dans le but de surmonter la réticence de certains Etats. Enfin, sur le plan juridique, il faudrait, d'une part, étendre la juridiction obligatoire de la Cour à tous les Etats et, d'autre part, élargir les possibilités de saisine de la Cour que ce soit sur le plan contentieux ou sur le plan consultatif.180

Aussi, pour que ces mesures puissent être bénéfiques, il serait nécessaire de mettre en branle quelques actions que nous proposons humblement dans les paragraphes suivants.

Nous nous adressons d'abord aux Nations Unies. Pour que la Cour Internationale de Justice soit capable d'accomplir efficacement sa noble mission, l'amendement de son Statut et celui de la Charte des Nations Unies quant à la compétence de la Cour serait fondamental.

Nous faisons appel pareil à la Cour Internationale de Justice dont la noble mission qui lui est assignée lui oblige à déterminer et à faire respecter les normes de Jus Cogens. Il est temps de montrer que ce respect est une obligation et non une faculté. Cela impose la ferme volonté de la CIJ de rendre caduques toutes les réserves contraires au principe de Jus Cogens faites par les Etats en fraude à la loi internationale.

Nous voulons surtout redire notre confiance à la communauté internationale. Il faudrait que les conséquences du génocide et d'autres crimes contre l'humanité commis au Rwanda et ailleurs ces dernières années offrent l'occasion d'annoncer un changement qualitatif en paroles et en actions. Il faudrait donc tenir compte de l'importance du respect des normes internationales de Jus Cogens et de poser un jugement efficace.

179 DREYFUS S., « Les déclarations souscrites par la France aux termes de l'article 36 du Statut de la Cour Internationale de Justice », in : Annuaire français de droit international, 1959, Vol. 5, pp. 258-275.

180 GUILLAUME E., « Tentatives d'instrumentalisation politique de l'organe judiciaire principal des Nations Unies », disponible sur www.diplomatie.gouv.fr , visité le 8/10/2011.

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Enfin, nous nous adressons aux différents Etats en général et aux membres des Nations Unis en particulier. Il est temps d'abattre les barrières d'égoïsme, d'incompréhension et d'agressivité. Il fallait de ce fait que les Etats prennent toute leur part de responsabilité dans l'acceptation et le respect des normes de Jus Cogens.

Puissent, les membres de la Cour Internationale de Justice être toujours plus conscients de leur vocation d'être les humbles bergers de la paix au monde. Que toute la communauté internationale fasse le tout possible pour que le génocide et d'autres crimes commis en violation des Jus Cogens ne se produisent jamais. Qu'ils s'engagent pour cela, avec une conviction accrue, sur la voie qui en écarte la menace : la détermination et le respect des normes de Jus Cogens par la Cour Internationale de Justice.

Tout travail humain étant non parfait, nous sommes conscient que tous les aspects de ce sujet n'ont pas été pris en compte. D'autres chercheurs pourront éventuellement nous compléter pour que le domaine des Jus cogens soit suffisamment exploité et de plus en plus clarifié.

BIBLIOGRAPHIE

I. TEXTES LEGISLATIFS INTERNATIONAUX

1. Acte constitutif de l'UNESCO, adoptée à Londres le 16 novembre 1945, entrée en vigueur dès 1946.

2. Charte des Nations Unies, adoptée à San Francisco le 25 septembre 1945.

3. Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée et ouverte à la signature, à la ratification et à l'adhésion par l'Assemblée Générale dans sa résolution 39/46 du 10 décembre 1984, entrée en vigueur le 26 juin 1987.

4. Convention de Vienne sur le droit des traités, Vienne le 23 mai 1969, entrée en vigueur le 27 janvier 1980.

5. Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 21 décembre 1965, entrée en vigueur en 1969.

6. Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, 9 décembre 1948.

7. Convention pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation civile (avec acte final de la conférence internationale de droit aérien tenue sous les auspices de l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale, Montréal le 23 septembre 1971.

8. Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, adoptée le 18 décembre 1979 par l'Assemblée Générale des Nations Unies.

9. Résolution 91(1) de l'Assemblée Générale des Nations Unies du 11 décembre 1946.

10. Statut de la Cour Internationale de Justice du 26 juin 1945.

II. JURISPRUDENCE INTERNATIONALE

11. Activités armées sur le territoire du Congo (nouvelle requête : 2002), (République Démocratique du Congo c. Rwanda), compétence et recevabilité, arrêt, C.I.J, Rec., 2006.

12. Affaire Barcelona Traction, Light and Power Company Limited, arrêt, C.I.J., Rec., 1970.

13.

72

Affaire de l'or monétaire pris à Rome en 1943 (Italie/ France, Royaume-Uni et Etats-Unis d'Amérique), Arrêt du 15 juin 1954.

14. Affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, Nicaragua c. Etats-Unis d'Amérique, Cour Internationale de Justice, Arrêt du 27 juin 1986, Rec., 1986.

15. Affaire du personnel diplomatique et consulaire des Etats-Unis à Téhéran (Etats-Unis d'Amérique contre Iran), mesures conservatoires, ordonnance du 15 décembre 1979, Cour Internationale de Justice, Rec., 1979.

16. Affaire du Timor oriental (Portugal contre Australie), Cour Internationale de Justice, arrêt du 30 juin 1996, Recueil, 1996.

17. Arrêt Haya de la Torre, Cour Internationale de Justice, Rec.1951.

18. Avis consultatif du 28 mai 1951 sur la question des réserves à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, CIJ, Rec. 1951.

III. OUVRAGES

19. AZAR, A., L'exécution des décisions de la Cour Internationale de Justice, éditions de l'Université de Bruxelles, Bruxelles, 2003.

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