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L'intangibilité des ouvrages publics

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par Henda EL GHOUL
Faculté de droit de Sfax Tunisie - Mastère de recherche en droit public 2013
  

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Section 2 : L'atteinte à la légalité

« Une meilleure application du principe de légalité revient à dire que le juge applique de façon plus stricte la règle de droit, que dans le

procès qui lui est soumis, il tend à astreindre davantage l'administration au respect de cette règle »185. Le principe de la légalité, caractéristique

majeur de l'Etat de droit, implique que l'administration doit, non seulement se conformer à l'objectif de l'intérêt général, mais aussi et surtout respecter les règles de droit et les décisions de la justice.

L'intervention du juge dans ce cadre, vise à imposer à

l'administration le respect des règles qui régissent l'exercice de ses pouvoirs et à contenir les privilèges dans les limites que leur assigne la règle de droit. Le recours au juge constitue pour l'administré un moyen

182 TA., arrêt n° 1404 du 15 juillet 1995, chef du contentieux de l'Etat agissant pour le compte de ministère de l'intérieur c/ Raouf Khsir, Rec., p. 335.

183 TA., arrêt n° 19834 du 11 novembre 2003, héritiers Essorci c/ Conseil régional du Bizerte, inédit.

184 TA., arrêt n° 19834 du 11 novembre 2003, héritiers Essorci c/ Conseil régional du Bizerte, inédit.

185 G. PEISER, « Le développement de l'application du principe de légalité dans la jurisprudence du Conseil d'Etat », in Droit administratif, Mél. René CHAPUS, Montchrestien, Paris, 1992, p. 517.

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Première partie : L'ambivalence du principe

de sauvegarder ses droits ou ses intérêts dans la mesure prévue par la règle de droit186.

Néanmoins, Soutenir que « l'ouvrage public mal planté ne se détruit pas » parce que, quoi que violant les droits d'un ou des administrés, il sert les intérêts de nombreux usagers187, conduit à vider le droit à la légalité de son contenu protecteur. Un tel droit perd tout effet avec l'existence de principe de l'intangibilité de l'ouvrage public par l'effet de l'abstention du juge d'annuler les actes administratifs illégaux (§ 1). De même, il convient de reconnaître que l'administration reste libre d'exécuter les décisions juridictionnelles (§ 2).

§ 1 : L'illégalité sans l'annulation

Par l'action administrative, il arrive que les administrés se trouvent lésés par l'administration dépositaire de l'intérêt général. La protection des droits des administrés et le respect de l'ordre juridique, constituons les principaux éléments de la théorie de l'Etat de droit, ne peuvent être assurés sans l'existence d'un contrôle juridictionnel énergique et efficace au cours d'un procès équitable188. Une condition même de la reconnaissance de prérogatives de puissance publique, le contrôle efficace de l'administration est une garantie donnée aux administrés et une limitation de l'administration.

186 M. LAKHDHAR, « Le droit à la légalité administrative », Etudes juridique, 1993-1994, p. 10.

187 M. LAKHDHAR, « La protection de la propriété privée immobilière par le Tribunal Administratif », RTD, 1983, p. 286.

188 « Le procès équitable suppose que le requérant doit avoir la possibilité d'exprimer sa cause vis-à-vis du juge administratif dans des conditions qui ne le désavantage pas par rapport à l'administration toute puissante. Le requérant doit avoir la possibilité d'être entendue en bénéficiant de toutes les règles garantissant le respect de ses droits conformément à l'article 6 § 1 de la CESDH ». V. HAÎM, « Le contribuable peut-il prétendre à un procès équitable devant le juge administratif », RDF, n° 25, 1999, p. 862. Voir aussi ; M. FABRE, « Le droit à un procès équitable », JOP, n° 31-35, 1998, p. 1425.

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Première partie : L'ambivalence du principe

Mais il ne suffit pas de poser le principe de la soumission de l'administration au droit. Encore faut-il avoir la certitude qu'il sera respecté et que l'administration sera sanctionnée lorsqu'elle aura manqué au droit. Pour cette raison, le problème de contrôle de l'Administration est une question essentielle dans la logique du droit administratif.

Or, accueillir un argument de la poursuite de l'intérêt général conduirait non seulement à exonérer l'administration du respect de la légalité (A) mais également d'offrir la possibilité de régulariser les violations de la règle de droit (B).

A. La violation « autorisée » de la règle de droit

Le juge administratif est « le gardien de la légalité administrative »189. De ce fait, la caractéristique du régime administratif est la soumission de l'action administrative à un droit fait pour elle, distinct du droit applicable aux particuliers190.

La spécificité du rôle protecteur du juge administratif réside dans son domaine de compétence qui est celui du contrôle de l'action administrative. Ce contrôle se fait conformément au principe de légalité qui exige que l'administration conduise son action suivant la dialectique suivante : comment satisfaire les besoins d'intérêt général tout en sauvegardant les droits des administrés191?

Or, le juge administratif semble être loin de procurer une protection suffisante aux administrés. En effet, le principe de l'intangibilité des ouvrages publics « donne des pouvoirs exorbitants à

189 J. RIVERO, « Le juge administratif gardien de la légalité administrative ou gardien administratif de la légalité », in Le juge et le droit public, Mél. offerts a Marcel WALINE, T.2, Paris, juillet 1974, p. 701.

190 J. RIVERO, « Le juge administratif gardien de la légalité administrative ou gardien administratif de la légalité », Mél. offerts a Marcel WALINE, T.2, Paris, juillet 1974, p. 701.

191 J. RIVERO, « Le juge administratif gardien de la légalité administrative ou gardien administratif de la légalité », Mél. offerts a Marcel WALINE, T.2, Paris, juillet 1974, p. 702.

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Première partie : L'ambivalence du principe

l'administration qui peut être incitée à faire l'économie d'une expropriation régulière »192. L'application de la règle de l'intangibilité de l'ouvrage public permet, en effet, à l'administration d'arriver au même résultat qu'au terme d'une expropriation pour cause d'utilité publique sans avoir à mettre en oeuvre cette procédure contraignante193.

Cette violation grave par l'administration de la procédure légale est autorisée par le juge administratif qui n'hésite pas à déclarer, à travers une jurisprudence constante, que la création d'un ouvrage public même illégalement implanté fait face à toutes mesures qui peuvent porter atteinte à l'intégrité de cet ouvrage194. Or, une telle politique jurisprudentielle « risque d'encourager l'administration à s'engager dans une politique machiavélique basée sur le principe de la justification des moyens par la fin poursuivie »195. Car l'effet d'une telle idée est de légitimer l'illégalité pour le motif que les intérêts servis sont plus nombreux que l'intérêt sacrifié196.

Dans ces conditions, le principe de l'intangibilité de l'ouvrage public acquiert en Tunisie une fonction redoutable de protection des prérogatives de l'administration et de légitimation de ses agissements, quel que soit le degré de leurs inégalités197. « De toute manière, et du

192 M-P. MAITRE, « Le principe de l'intangibilité de l'ouvrage public », LPA, 22 novembre 1999, n° 232, p. 8.

193 M-P. MAITRE, « Le principe de l'intangibilité de l'ouvrage public », LPA, 22 novembre 1999, n° 232, p. 8.

194 TA., aff. n° 1/16656, rendu le 25 avril 2009, El Fkiri c/ SONEDE, Rec, p. 305.

195 M. LAKHDHAR, « La protection de

la propriété privée

immobilière par

le

Tribunal

Administratif », RTD, 1983, p. 283.

 
 
 
 

196 M. LAKHDHAR, « La protection de

la propriété privée

immobilière par

le

Tribunal

Administratif », RTD, 1983, p. 286.

 
 
 
 

197 M. LAKHDHAR, « La protection de

la propriété privée

immobilière par

le

Tribunal

Administratif », RTD, 1983, p. 287.

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Première partie : L'ambivalence du principe

moins en ce qui concerne les dépossessions irrégulières, leur intégration aux matières administrative est susceptibles de procurer à l'administration une protection renforcée »198.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery