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L'intangibilité des ouvrages publics

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par Henda EL GHOUL
Faculté de droit de Sfax Tunisie - Mastère de recherche en droit public 2013
  

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§ 2 : Les connexes finalités

La finalité de l'intérêt général est efficace mais insuffisant pour justifier, à lui seul, la persistance de la protection des ouvrages publics118. D'autres finalités semblent en revanche, plus à même de

justifier, encore aujourd'hui, la protection de l'ouvrage public. Il s'agit

114 Ph. GHODFRIN, Droit administratif des biens, Armand Colin, 6éme éd., 2001, p. 380.

115 Pour reprendre l'expression du Commissaire du gouvernement Dulpat, « on peut [...] s'interroger avec curiosité sur cet intérêt général, qui dispenserait l'Administration de respecter le droit. Pourquoi devrait-on alors annuler des actes administratifs irréguliers, dés lors qu'ils sont justifiés pas l'intérêt général ». J. DUPLAT, Concl. sous TC, 6 mai 2002, M et Mme Binet c/ EDF, JCP G 2002, II, 10170, p. 1966.

116 D. BAILLEUL, Note sous CE., 13 février 2009, Communauté de communes du canton de Saint-Malo de la Lande, AJDA, du 25 mai 2009, p. 1060.

117 G. TEBOUL, Note sous CE., 19 avril 1991, Epoux Denard, Epoux Martin, AJDA, 1991, p. 566.

118 Ch. BOUTAYEB, « L'irrésistible mutation d'un principe : l'intangibilité de l'ouvrage public », RDP, n° 5, 1999, p. 1461.

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Première partie : L'ambivalence du principe

notamment de la protection des deniers publics (A), et de la continuité des services publics auquel satisfait l'ouvrage public (B).

A. La protection des deniers publics

La doctrine aussi bien ancienne119 que contemporaine120 s'accorde à dire que la destruction des ouvrages publics irrégulièrement édifiés impliquerait un gaspillage financier des deniers publics dans la mesure où « l'administration pourrait les rétablir presque aussitôt, à la suite d'une expropriation régulière. Cette application judaïque de la loi (que traduirait la destruction de l'ouvrage) n'aboutirait qu'à imposer au Trésor Public un sacrifice supplémentaire »121.

« Gardien des deniers publics »122, le juge, face à une demande de démolir, de déplacer ou de modifier un ouvrage public, va réfléchir en termes d'opportunité. Les considérations d'opportunités sont motivées par un souci financier qui éviterait par ce « formalisme onéreux »123 un double gaspillage à la charge de l'administré124. Cette justification pragmatique d'économie des deniers publics est expressément envisagée

119 L. AUCOC, Conférences sur l'Administration et le droit administratif, T.2, 1886, p. 558, cité par

R. CHAPUS, Droit administratif général, T.1, Montchrestien, Paris, 11ème éd., 1999, n° 688.

120 J-M. AUBY et P. BON, Droit administratif des biens, Dalloz, 1994, p. 318 ; L. DI QUAL, « Une manifestation de la déségrégation du droit de propriété : la règle "ouvrage public mal planté ne se détruit pas" », JCP, 1964, I, fasc. n° 1852 ; L. LAUCCHINI, « Le fonctionnement de l'ouvrage public », AJDA, 1964, p. 360 ; Ch. BOUTAYEB, « L'irrésistible mutation d'un principe : l'intangibilité de l'ouvrage public », RDP, n° 5, 1999, p. 1461.

121 L. AUCOC, Conférences sur l'Administration et le droit administratif, op.cit., p. 558, cité par

S. BRONDEL, « Le principe d'intangibilité de l'ouvrage public : réflexions sur une évolution jurisprudentielle », AJDA, n° 15, 2003, p. 766.

122 TA, arrêt n° 17776 du 21 décembre 2001, héritiers Hmila c/ la commune de Msaken, inédit.

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123 G. VEDEL, Droit administratif, Manuel Thémis, 1961, p. 672, cité par J-M. AUBY, « L'ouvrage public », CJEG, 1961, p. 7.

124 A ce titre, l'alinéa 3 de l'article 10 de la nouvelle Constitution de la République tunisienne adoptée le 26 Janvier 2014 dispose que « l'Etat veille à la bonne gestion des deniers publics et prend les mesures nécessaires pour les dépenser selon les priorités de l économie nationale et oeuvre à la lutte contre la corruption et contre tout ce qui porte atteinte à la souveraineté nationale ».

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Première partie : L'ambivalence du principe

par la jurisprudence du TA. Le juge administratif fonde l'intangibilité des ouvrages publics sur la protection des deniers publics125.

Cependant, l'intérêt financier, si légitime soit-il, n'est pas exempt de critiques. Il peut s'avérer totalement inadapté126. Selon le commissaire du gouvernement DULPAT, « on est en présence d'une explication plus que d'une justification, car l'intérêt financier n'est pas en principe admis comme un but valable de l'action administrative, un acte administratif pris dans ce seul but pouvant être annulé par le juge administratif pour détournement de pouvoir dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir »127.

En outre, cette justification souffre d'une limite qui ne fait pas dés lors l'unanimité au sein de la doctrine128. Il apparaît que l'administration ne peut pas systématiquement procéder à la régularisation de la situation entachée d'illégalité129. En effet, la régularisation n'est pas possible dans tous les cas. Elle n'est effectivement permise que dans certaines

125 TA, arrêt n° 1/ 10771 du 20 juin 2003, Béchir Ben Ali Zweri c/ SONEDE, inédit; TA, arrêt n° 12392 du 12 novembre 2004, Najet Hadar c/ SONEDE, inédit; TA, arrêt n° 19776 du 20 juin 2003, Kefia Bent Hamed Kertas et autres c/ SONEDE, inédit. Dans ces trois arrêts on trouve le même considérant où le juge fonde le principe de l'intangibilité de l'ouvrage public sur la continuité et le bon fonctionnement de services publics et sur la protection de deniers publics.

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126 N. ACH, « L'intangibilité de l'ouvrage public, un principe ébranlé mais loin d'être enterré », RDP, n° 6, 2003, p. 1702.

127 J. DUPLAT, Concl. sous TC, 6 mai 2002, M et Mme Binet c/ EDF, JCP G 2002, II, 10170, p. 1967.

128 R. CAVARROC, Note sous Cass. Civ, 27 février 1950, JCP, II, 5517 ; J-M. LE BERRE, « Les pouvoirs d'injonction et d'astreinte du juge judiciaire à l'égard de l'administration », AJDA, 1979, p. 18.

129 « On ne peut pas soutenir que la destruction de l'ouvrage serait toujours, en fait, une réparation coûteuse et platonique, l'observation d'une procédure régulière permettant de la rétablir ; il est des hypothèses où l'administration ne pourrait légalement implanter l'ouvrage au même endroit ». J-M. LE BERRE, « Les pouvoirs d'injonction et d'astreinte du juge judiciaire à l'égard de l'administration », AJDA, 1979, p. 18.

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Première partie : L'ambivalence du principe

circonstances, c'est-à-dire sous la condition que l'irrégularité commise par la personne publique repose, en matière d'ouvrage mal planté sur un manquement aux prescriptions formelles de la procédure d'acquisition d'un terrain appartenant à une personne privée130. En revanche, dès l'instant où l'irrégularité repose sur l'absence d'une condition de fond, il est impossible pour l'administration de procéder à une quelconque régularisation au regard du bien-fondé juridique de l'opération131.

De même, si le juge administratif envisage à travers ce principe protéger, les deniers publics, il doit se garder de contrecarrer des projets importants et non pas à tous les ouvrages publics même d'une faible envergure, comme un canal d'eau132.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault