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Les opérations de maintien de la paix de l'ONU et les droits de l'homme

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par Christian Brice NTSAMA BALLA
Université de Yaounde II - Diplôme d'Etudes Approfondies 2013
  

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B- Le comportement des belligérants

La persistance des violations des droits de l'homme dans les conflits africains malgré la présence des OMP, est également le fait de l'attitude des belligérants ou des factions en conflit. Selon Éric David, le respect du droit humanitaire pose des problèmes qui sont d'abord plus psychologiques que juridiques224. Nous présenterons d'abord les paramètres psychologiques des belligérants qui sont cause des violations des droits de l'homme (1), ensuite nous examinerons l'attitude des belligérants vis-à-vis des normes protégeant la personne humaine en période de conflit (2).

1- Les paramètres psychologiques des combattants comme source de violations des droits de l'homme

Il existe des paramètres psychologiques chez les belligérants qui sont cause de multiples violations des droits de l'homme commises par ceux-ci. Il s'agit de l'obéissance à l'autorité, du conformisme au groupe, de la spirale de la violence, et de l'inversion de la moralité.

L'obéissance à l'autorité dans les groupes armés est l'un des facteurs de la perpétration des violations des droits de l'homme. Selon une étude de Stanley Milgram sur le comportement des individus soumis à une autorité légitime, « des gens ordinaires, dépourvues de toute hostilité peuvent en s'acquittant de leur tâche, devenir des agents d'un atroce processus de destruction...si l'autorité morale leur demande d'agir à l'encontre des normes fondamentales de la morale »225. Ainsi, le caractère hiérarchisé des armées entraine des violations de droits de l'homme par les militaires en raison des ordres reçus. Le soldat tue alors parce qu'il lui est demandé de tuer et qu'il obéit aux ordres, « le fait d'infliger une pénalisation douloureuse à la victime ne vient pas des pulsions destructrices des participants, mais de leur intégration dans une structure sociale dont ils ne peuvent se détacher »226. Cet obéissance est extrême dans l'armée car

224 David (E), Principes de droit des conflits armés, Bruylant, Bruxelles, 2e édition, 1999, p.794

225 Stanley Milgram, Soumission à l'autorité, Calmann-Levy, Paris, 1974, p.22

226 Ibid. p.206

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« le pouvoir militaire est plus brutal, la place pour la désobéissance est moindre, les contraintes institutionnelles sont supérieures »227.

Comme autre facteur entrainant la commission des violations des droits de l'homme par les belligérants en période de conflit, il y'a le conformisme au groupe. Car il est facile de se fondre dans la masse pour commettre des violations des droits de l'homme, que de le faire tout seul. Comme pense un auteur, « l'individu n'est pas un tueur. Le groupe l'est...les hommes au combat ne sont généralement pas motivés par la haine ou la peur ; mais par la pression du groupe : estime pour leurs camarades, défense de leur réputation collective et volonté de contribuer au succès du groupe »228. Le conformisme au groupe a un effet négatif sur la perception que les belligérants se font de leur responsabilité. Les combattants se considèrent comme agents ou membres d'une structure, et se voient « engagés vis-à-vis de l'autorité dirigeante, mais ne se sentent pas responsables du contenu des actes que celle-ci prescrit »229. On parle alors de désengagement moral. Selon Bandura, « il ne fait aucun doute que les gens peuvent agir de manière plus cruelle quand le groupe assume la responsabilité d'une action que lorsque l'individu doit en porter seul la responsabilité »230.

Le désengagement moral entraine l'inversion de la moralité, qui a pour effet de faire passer les actes odieux de l'anormalité à la normalité. Dans une étude sur l'évolution de la violence, Erwin Staub déclare que : « en général, la grande violence et surtout la violence de groupe, évolue avec le temps. Les individus changent à la suite de leurs propres actes...au cours de cette évolution, la personnalité des individus, les normes sociales, les institutions et la culture changent de diverses manières qui font qu'il devient plus facile et plus probable de commettre d'autres actes plus violents »231. En un mot, les combattants qui violent les droits de l'homme dans les conflits en Afrique, deviennent moins sensibles car ces violations qu'ils commettent ont acquis un caractère normal.

227 Frésard (J-J), « des laboratoires de Milgram aux champs de bataille : quelques éléments de compréhension du comportement des combattants », RICR, vol 86, N2 853, Mars 2004, p.156

228 Munoz-Rojas (D), Frésard (J-J), « Origines du comportement dans la guerre : comment comprendre et prévenir les violations du droit international humanitaire », RICR, vol 86, N2 853, Mars 2004, p.174

229 Frésard (J-J), op.cit, p.153

230 Bandura (A), « moral disengagement in the perpetration of inhumanities », Personality and social psychology review, vol 3,N23, 1999, p 193-209

231 Erwin Staub, « the roots of evil: personality, social conditions, culture and basic human needs », personality and social psychology review, vol 3 N23, 1999, p. 179-192

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Comme autre facteur psychologique expliquant les violations des droits de l'homme de la part des combattants en période de conflits, il y'a la spirale de la violence qui s'entend comme la perpétration sans arrêt de la violence par les combattants. La succession des violences par les combattants les entraine dans le confort de l'immoralité. Ils deviennent incapables de faire la différence entre ce qui est humainement acceptable ou non. L'on se trouve alors dans une situation qui n'est régie ni par la loi, ni par la raison. Herbert Kelman résume tous ces aspects psychologiques liés à la perpétration de la violence par les combattants en ces termes : « je parle d'autorisation quand l'action a été explicitement ordonnée, implicitement encouragée, tacitement approuvée, ou au moins permise par les autorités légitimes. L'autorisation en fait, légitime les actions qui dans des circonstances normales seraient moralement répréhensibles. La répétition routinière - qui transforme l'action en opérations routinières, mécaniques et hautement programmées tant au niveau individuel qu'au niveau organisationnel - réduit le nombre d'occasions au cours desquelles les questions d'ordre moral peuvent se poser et renforce le point de vue que l'on est engagé dans une activité normale et juste dans le cadre d'une activité légitime. La déshumanisation délégitime les cibles de ses actions, les excluant de la communauté morale de l'acteur, de sorte que massacrer ou torturer devient moralement acceptable voire désirable aux yeux des auteurs et de ceux qui sont censés les soutenir. le processus d'autorisation, de répétition routinière et de déshumanisation fonctionnent ensemble pour supprimer ou affaiblir les contraintes morales qui normalement inhiberaient l'auteur de telles violations des droits fondamentaux de ses semblables humains »232. Tels sont les facteurs qui entrainent la perpétration des violations des droits de l'homme de la part des combattants dans les conflits armés africains et dont l'ONU a l'incapacité d'éradiquer de même que le non-respect par les belligérants des normes de protection de la personne humaine en période de conflits.

2- L'indifférence des combattants à l'égard des normes de protection de la personne humaine

André Stemmet, résumant un rapport Onusien de 1999 portant sur la prolifération des armes légères et de petits calibres, restitue ce qui est devenu la caractéristique des

232 Herbert Kelman, « reflections on social and psychological processes of legitimization and delegitimization », in John (T) and Brenda Major (eds), psychology of legitimacy, Cambridge University press, 2001

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forces non conventionnelles : « le comité des Nations Unies a souligné que les forces irrégulières n'ont guère de respect pour les normes du droit international humanitaire et ne font pas de distinction entre combattants et civils »233. Pourtant, les normes de droit international humanitaire et celles relatives au droit international des droits de l'homme ont un caractère universel. Dans l'étude du CICR sur le droit humanitaire coutumier, les pratiques des groupes armés ont été prises en compte (codes de conduite, engagements de faire respecter le DIH et autres déclarations)234, car elles constituent des « éléments probants quant à l'acceptation de certaines règles dans les conflits armés non internationaux »235. Le discours des droits de l'homme et du droit international humanitaire n'est pas ignoré des combattants, mais ces derniers ne l'acceptent pas comme tel236. Ces groupes violent alors en toute conscience les normes relatives aux droits de l'homme et au droit international humanitaire. L'on constate donc qu'un consensus se dégage sur la reconnaissance des normes générales (le fait que certains comportements sont prohibés en période de guerre ou que les civils ne doivent pas faire l'objet d'attaques), et non sur leur application237.

Une autre raison du non-respect des normes relatives au droit international humanitaire et aux droits de l'homme est l'ignorance des combattants. Car il existe une différence fondamentale entre la lettre et l'esprit d'un corpus normatif. Les combattants peuvent maitriser d'une manière générale ce qu'ils ne doivent pas faire, mais il faudrait que ceux-ci maitrisent également les normes de manière précise. Si l'effectivité du droit international humanitaire est sous contrainte du fait de la complexité de son modèle de régulation normative238, il devient plus compliqué pour les combattants des guerres africaines, qui sont pour la plupart du temps analphabètes, de maitriser ces normes. L'ignorance des belligérants et le refus délibéré des combattants de respecter les normes protégeant la personne humaine sont donc des causes de violations du droit international humanitaire et des droits de l'homme.

233 Stemmet (A), « regulating small arms and light weapons: the African experience », African security review, 2001, p.92

234 Droit humanitaire coutumier, volume II : practices disponible uniquement en langue anglaise sur le site www.cicr.org

235 Henckaerts (J M), Doswald- Beck (L), Droit humanitaire coutumier, op.cit p.LII

236 Ferme (M), Hoffman (D), « Combattants irréguliers et discours international dans les guerres civiles africaines, le cas des chasseurs Sierre léonais », Politique africaine 88, décembre 2002, p. 47

237 Les voix de la guerre, CICR, 1999, disponible à l'adresse www.cicr.org

238 Olinga (A-), « considérations sur l'effectivité du droit international humanitaire aujourd'hui », op.cit

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Les violations des droits de l'homme dans les conflits africains s'expliquent par des phénomènes qui ne sont pas imputables aux OMP de l'ONU. Maintenant, nous partons montrer dans quelle mesure les OMP ont leur part de responsabilité dans ces violations des droits de l'homme.

PARAGRAPHE 2 : LES CAUSES DES VIOLATIONS DES DROITS DE L'HOMME IMPUTABLES AUX OMP

Les violations des droits de l'homme dans les conflits où se déploient les OMP de l'Onu sont également dues à leurs nombreuses défaillances. Celles-ci ont amené certains à parler du discrédit Onusien. Il est question de démontrer que les violations des droits de l'homme malgré la présence des OMP sont dues à leur insuffisance en matière de ressources humaines et financières (A), et à des défaillances au niveau stratégique (B).

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery