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La saisie des navires en droit positif camerounais

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par Christian Valdano KOJOUO
Université de Dschang - Master 2013
  

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Paragraphe 2 : Quant au saisi

Tout comme l'AUPSRVE, les textes sur la saisie conservatoire des navires posent en la matière le principe selon lequel tout débiteur peut être saisi. Ceci étant, nous analyserons les personnes susceptibles d'être saisies (A) dont les dérogations sont pour la plupart tirées du droit commun et desquelles la principale concerne les immunités d'exécution (B).

A- Les personnes susceptibles d'être saisies

Deux catégories de personnes peuvent être saisies : le propriétaire du navire à l'origine de la créance (1) et le tiers détenteur du navire (2).

1- Le propriétaire du navire à l'origine de la créance

Le propriétaire du navire à l'origine de la créance est en quelque sorte le sujet passif de la saisie. Tout comme en droit commun, le principe est celui selon lequel toute personne ayant la qualité de débiteur peut être saisie et uniquement cette personne.

Cette hypothèse est manifestement la seule envisagée par les textes. Elle nécessite l'accomplissement des deux formalités suivantes : la signification au débiteur d'un procès verbal de saisie et la dénonciation au commandement du port, ceci en vertu des dispositions du droit interne CEMAC219(*). Le saisi n'aura connaissance de l'ordonnance de saisie qu'au moment de l'exécution, c'est-à-dire lorsque l'huissier de justice mandaté par le créancier procédera à la signification du procès-verbal de saisie au débiteur, cet acte étant le premier de la saisie conservatoire. Les actes de saisie représentés en pratique par le procès-verbal et l'ordonnance, devront être simultanément dénoncés en copie au commandement du port afin que celui-ci refuse l'autorisation de départ du navire. Lorsque la saisie est faite pour recouvrement d'une créance contre l'affréteur, elle devra aussi être dénoncée au fréteur propriétaire du navire par signification au capitaine de celui-ci. Lorsque le navire est hypothéqué, la pratique recommande pour l'opposabilité aux tiers, que la saisie soit également dénoncée à la conservation des hypothèques maritimes220(*).

La situation n'est pas forcément la même lorsque la saisie a été pratiquée entre les mains d'un tiers.

2- La saisie du navire entre les mains d'un tiers

Cette situation n'a pas été organisée par les textes particuliers régissant la saisie des navires car les conventions internationales sur la saisie des navires et le CCMM n'ont manifestement et techniquement envisagé qu'un seul cas de figure : la saisie pratiquée directement entre les mains du propriétaire du navire. Or il n'est pas inconcevable qu'au moment où le créancier désire faire saisir le navire, celui-ci soit entre les mains d'un tiers221(*). Les principales hypothèses sont celle du contrat d'affrètement dans lequel le navire est mis à la disposition d'un affréteur et celle du chantier naval à qui tel navire est confié pour entretien et réparation. Ces tiers ont en commun de ne pas être propriétaires du navire ; cette détention du navire par un tiers induit-elle des modalités spécifiques de saisie ? On sait en effet que dans toutes les autres procédures, en pareil cas, la saisie est pratiquée entre les mains du tiers puis dénoncée au propriétaire du bien ; doit-il en être de même concernant la saisie conservatoire de navires ? La solution la plus simple à notre avis serait de faire recours aux règles supplétives posées par le droit commun des saisies conservatoires. À cet effet, l'article 50 de l'AUPSRVE dispose : « Les saisies peuvent porter sur tous les biens appartenant au débiteur alors même qu'il seraient détenus par des tiers... ». Conséquemment, cette situation nécessitera l'accomplissement des trois formalités suivantes : la signification au débiteur d'un procès-verbal de saisie222(*), la dénonciation de la saisie au débiteur et la dénonciation au commandement du port223(*).

Toutes ces différentes procédures ne pourront être mises en exécution lorsque le sujet passif de la saisie en cause, bénéficie des faveurs l'immunisant contre toute exécution sur ses biens.

B- Les immunités d'exécution

C'est une faveur exceptionnelle de la loi en vertu de laquelle certains débiteurs ne peuvent faire l'objet d'une exécution forcée. Bien que relevant de la même inspiration que l'insaisissabilité, elle s'en sépare par son caractère personnel puis qu'elle est orientée vers les personnes et non pas vers les biens comme l'insaisissabilité. Par définition, tous les biens d'une personne bénéficiaire de l'immunité d'exécution sont insaisissables. La règle ainsi posée découle de l'article 30 de l'AUPSRVE selon lequel : « L'exécution forcée et les mesures conservatoires ne sont pas applicables aux personnes qui bénéficient d'une immunité d'exécution ».

Prenant la suite de cette disposition, le droit spécial de la saisie des navires, à l'image du droit commun de la saisie a tenu à apporter quelques éclaircissements sur les personnes bénéficiaires de l'immunité d'exécution.

Sur le plan interne, le CCMM dispose à cet effet que, « Les navires appartenant à un État, ou exploités par lui, ne peuvent être saisis si, au moment où la créance est née, ils étaient affectés exclusivement à un service gouvernemental et non commercial »224(*).

Sur le plan international, et tout comme le droit interne CEMAC, conformément aux exigences de la convention de Bruxelles du 10 avril 1926 sur l'immunité des navires d'État, les navires d'État affectés exclusivement à une activité gouvernementale et non commerciale ne sont pas saisissables, en vertu des immunités d'exécution et de juridiction qu'on doit leur reconnaître.

En définitive, selon ces deux ordres juridiques, l'immunité d'exécution est une véritable immunité personnelle, c'est-à-dire en raison de la qualité de leurs propriétaires. En matière de saisie de navires, l'immunité personnelle la plus fréquente sera celle conférée par le droit international public concernant les navires appartenant à un État ou souverain étranger. Cette immunité a donné lieu à la théorie des navires apparentés. On sait qu'en règle générale, l'immunité d'exécution devra être écartée chaque fois qu'il s'agit de recouvrer une dette contractée dans le cadre de l'exercice, par un État étranger, d'une activité économique ou commerciale, c'est-à-dire sans rapport avec sa souveraineté, et que ne seront alors saisissables que les biens affectés à cette activité. La solution est la même lorsque les biens d'un organisme public distinct d'un État étranger, donc notamment une compagnie maritime, ont été affectés par celui-ci à une activité économique ou commerciale, ledit organisme, en raison de son caractère public, étant considéré comme une émanation de l'État lui-même225(*). Or, pour échapper à la saisie de leurs biens, la tentation est grande pour certains États, ayant traditionnellement un secteur privé réduit voire inexistant, de multiplier les établissements publics ou les sociétés de droit privé à la personnalité juridique soi-disant distincte, propriétaires de biens tels des navires. Dans ce cas, pour faire échec à cette fraude et saisir les biens de cet organisme public, les créanciers auront l'obligation de démontrer en quoi celui-ci ne dispose pas véritablement d'un patrimoine distinct de celui de l'État étranger dont on dit alors qu'il n'est qu'une émanation ; cette solution n'a pas cours lorsque ce sont les biens d'un organisme de droit privé qui ont ainsi été affectés à cette activité, même si l'État étranger y dispose de la plus forte participation, il n'est pas alors vu comme une émanation de l'État étranger226(*). Dans le même ordre d'idées, toujours à propos de la constitution d'une société de droit privé, la Cour de cassation française estime que « l'allégation selon laquelle un État a eu pour but, dans la création de sociétés d'armement, de limiter le gage de ses créanciers maritimes ne démontre pas, par elle-même, que ces sociétés seraient fictives et ne constitueraient que des émanations de cet État, dès lors qu'elles possèdent un patrimoine propre »227(*).

Enfin, notons que la convention de Genève du 12 mars 1999, non encore en vigueur, dispose en son article 8 paragraphe 2, qu'elle « n'est pas applicable aux navires de guerre, navires de guerre auxiliaires et autres navires appartenant à un État ou exploités par lui et exclusivement affectés, jusqu'à nouvel ordre, à un service public non commercial ».

* 219 Voy. l'article 122 du CCMM déjà analysé plus haut dans le cadre des diligences à observer.

* 220 JULIEN (P.) et TAORMINA (G.), op.cit., pp 542 et 543.

* 221 Cette possibilité a été admise en pratique : CA de Rennes, 16 juin 1968, DMF 1969, p 741, note Bokobza-Boquet ; CA d'Aix-en-Provence, 25 février 1986, DMF 1987, p 164, note Pestel-Debord.

* 222 Ce procès verbal de saisie pourrait être vraisemblablement celui de l'article 122 du CCMM et déjà analysé.

* 223 Voir article 122 du CCMM.

* 224 Article 114 alinéa 2 du CCMM.

* 225 JULIEN (P.) et TAORMINA (G.), op.cit., pp 520 et 521.

* 226 JULIEN (P.) et TAORMINA (G.), ibidem.

* 227 Cass.com, 23 novembre, Bull.civ. IV, n°204, DMF 2000, p.719, obs. N. MOLFESSIS.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius