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La saisie des navires en droit positif camerounais

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par Christian Valdano KOJOUO
Université de Dschang - Master 2013
  

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Paragraphe 1 : Quant aux conditions objectives

Pour exercer sa saisie-exécution en toute légitimité, le demandeur devra exciper l'existence d'un titre exécutoire (A) auquel d'autres conditions liées au bien saisissable sont requises (B).

A- L'exigence d'un titre exécutoire

Pour permettre l'exécution forcée, la créance qui la justifie doit être constatée dans un titre exécutoire ; telle est en quelque sorte l'exigence de l'article 127 du CCMM qui cite les divers titres exécutoires et de l'article 128 du même code qui renvoie à la saisie-exécution des navires aux conditions et à la procédure en vigueur dans la saisie immobilière classique234(*). Ainsi, pour la détermination des titres exécutoires, nous pouvons interpeler deux articles : l'article 127 du CCMM et l'article 33 de l'AUPSRVE déterminant les types de titres exécutoires en matière de saisie de droit commun. Quoi qu'il en soit, ces articles sont similaires, ce qui ne poserait donc par conséquent aucun souci de cohésion ou d'harmonie. Ils disposent en effet : « Constituent des titres exécutoires : les décisions juridictionnelles revêtues de la formule exécutoire et celles qui sont exécutoires sur minutes ; les actes et décisions juridictionnels étrangers ainsi que les sentences arbitrales déclarées exécutoires par une décision juridictionnelle non susceptible de recours suspensif d'exécution de l'État dans lequel ce titre est invoqué ; les procès-verbaux de conciliation signés par le juge et les parties ; les actes notariés revêtus de la formule exécutoire ; les décisions auxquelles la loi nationale de chaque État partie attache les effets d'une décision judiciaire ».

Différents titres ont donc la nature de titre exécutoire. Il en est ainsi des actes judiciaires des juridictions nationales et ceux émanant de juridictions étrangères. Seules les décisions des juridictions nationales revêtues de la formule exécutoire sont considérées comme des titres exécutoires. Cette formule ordonne aux huissiers de justice de mettre à exécution l'acte contenant ladite formule et à la force publique de leur prêter main forte lorsqu'elle en sera légalement requise. Cette formule contient généralement les termes suivants : « en conséquence, la République mande et ordonne à tous les huissiers de justice, à ce requis, de mettre ledit jugement ou arrêt à exécution, aux procureurs généraux, d'y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu'ils en seront légalement requis ». En plus de la formule exécutoire, la décision juridictionnelle nationale doit contenir la condamnation du débiteur, avoir été régulièrement signifiée et être passée en force de chose jugée235(*). Par les termes « décision juridictionnelle nationale revêtue de la formule exécutoire », aussi bien l'Acte uniforme que le CCMM visent également les décisions qui sont exécutoires sur minute.

Quant aux actes et décisions juridictionnelles étrangers ainsi que les sentences arbitrales étrangères, ils ne sont, en principe, exécutoires dans l'État du for que s'ils ont préalablement obtenu l'exéquatur ; l'exéquatur est la décision juridictionnelle nationale déclarant la décision étrangère exécutoire sur le territoire du for ; ce jugement d'exéquatur doit être revêtu de l'autorité de la chose jugée c'est-à-dire qu'il ne doit pas être susceptible d'un recours suspensif d'exécution.

Les textes ci-dessus cités assimilent aux actes judiciaires les procès-verbaux de conciliation signés par le juge et les parties. Ces procès-verbaux sont des actes judiciaires mais ils ne sont pas pour autant des décisions de justice. Il en est ainsi du procès-verbal de conciliation dressé par la juridiction saisie sur opposition au cours de la procédure d'injonction236(*).

En dehors des procès-verbaux de conciliation, ces textes assimilent également aux actes judiciaires les décisions auxquelles la loi nationale de chaque État partie attache les effets d'une décision judiciaire. L'on peut citer à titre d'illustration le certificat de non paiement délivré par l'huissier en cas de non paiement d'un chèque pour défaut de provision suffisante. Ce certificat de non paiement doit être signifié au tireur. Dans les quinze jours de la notification, l'huissier de justice qui n'a pas reçu justification du paiement délivre un titre exécutoire.

Consacrant une solution classique, ces dispositions, dans leur énumération des titres exécutoires, citent les actes notariés revêtus de la formule exécutoire. En effet, dans sa qualité d'officier public, le notaire peut délivrer des expéditions des actes authentiques qu'il établit et les revêtir de la formule exécutoire. Il faut assimiler à ces actes notariés les actes sous seing privé qui sont reconnus sincères par les parties devant notaire et déposés en son étude. Cette force exécutoire de l'acte notarié est suspendue lorsqu'une procédure d'inscription en faux237(*) est engagée contre cet acte.

Cependant, ces dispositions ne comportant aucune formule limitative, l'on doit inclure dans son énumération des titres exécutoires des actes omis. Il en est ainsi des titres délivrés par des personnes morales de droit public et déclarés exécutoires par la loi nationale de l'État partie. Bien que ces titres ne soient pas revêtus de la formule exécutoire, ils constituent incontestablement des titres exécutoires. Il s'agit des actes administratifs. Ces actes sont définis comme des titres émis par l'administration et qui sont exécutoires par eux-mêmes. Tel est le cas des marchés de fourniture qui sont des actes contractuels de l'administration. On peut encore citer les états de perception ou avis de mise en recouvrement qui sont des actes unilatéraux de l'administration. Ce pouvoir de l'administration de se créer elle-même des titres exécutoires s'explique par les prérogatives de puissance publique qu'elle détient238(*).

In fine, nous dirons qu'en principe, le créancier doit détenir un titre exécutoire, mais une difficulté peut se poser s'agissant des titres constitués de jugement assorti de l'exécution provisoire. Le titre exécutoire par provision peut-il fonder une poursuite par voie de saisie immobilière-saisie de navire ? Le CCMM ne dit mot ; l'AUPSRVE pourrait combler cette lacune. En effet, l'article 247 alinéa 2 de l'AUPSRVE répond par l'affirmative. Aux termes de ce texte, « ... la poursuite peut également avoir lieu en vertu d'un titre exécutoire par provision, ou pour une créance en espèces non liquidée ; mais l'adjudication ne peut être effectuée que sur un titre définitivement exécutoire et après liquidation ». Il en résulte que si la poursuite peut commencer sur le fondement d'un titre provisoirement exécutoire, l'adjudication quant à elle est subordonnée à l'obtention d'un titre définitivement exécutoire. Sur ce point l'article 247 rejoint les dispositions de l'article 32 du même Acte uniforme239(*). Le législateur de l'OHADA, en exigeant un titre définitivement exécutoire pour les adjudications est soucieux de l'importance de l'immeuble (en l'espèce il s'agit du navire) dans le patrimoine de l'individu. Le danger n'est cependant pas écarté. Le titre exécutoire sur la base duquel une vente de navire a été initiée et poursuivie jusqu'à son terme peut être annulé pour des vices intrinsèques à ce titre ; quel sera donc le sort de la vente intervenue240(*) ?

En tout état de cause, pour y parvenir, il faudrait que le navire soit d'abord saisissable.

B- Les conditions liées aux navires saisissables

Le principe est que tous les navires sont saisissables (1) mais il y a des restrictions à ce principe (2).

1- Le principe de la saisissabilité des navires

En principe tous les navires sont saisissables ainsi que leurs accessoires appartenant au débiteur. Contrairement à ce qui a cours en matière de saisie-conservatoire de navire241(*), le créancier qui voudrait saisir-exécuter le navire devra s'attaquer au navire appartenant au véritable débiteur.

Ces navires doivent faire l'objet d'une immatriculation préalable. Selon l'article 253 de l'AUPSRVE, si les navires devant faire l'objet de la poursuite ne sont pas immatriculés, le créancier est tenu de requérir l'immatriculation à la conservation des hypothèques maritimes après y avoir été autorisé par décision du président de la juridiction compétente de la situation des biens, rendue sur requête non susceptible de recours. À peine de nullité, le commandement ne peut être signifié qu'après le dépôt de la réquisition d'immatriculation et la vente ne peut y avoir lieu qu'après la délivrance du numéro d'immatriculation.

Cependant, cette étape ne pourrait être atteinte si à la base, le navire est soumis à une restriction de saisie.

2- Les restrictions au principe de la saisissabilité des navires

Elles sont de deux ordres : les restrictions générales et les restrictions particulières.

En ce qui concerne les restrictions d'ordre général, en plus du droit d'usage et d'habitation, de l'hypothèque, ne peuvent être saisies les valeurs immobilières. Cependant la problématique de la saisie-exécution des droits indivis sur les navires méritent une attention particulière. À ce sujet, deux situations doivent être distinguées. Premièrement, si le débiteur détient des parts minoritaires, la saisie ne peut porter que sur les parts et non sur le navire lui-même. Deuxièmement, si la saisie porte sur des parts représentant plus de la moitié du navire, la vente sera étendue à tout le navire, sauf opposition des autres copropriétaires pour des motifs reconnus sérieux et légitimes242(*). Autrement dit, en cas d'opposition, il ne sera procédé qu'à la saisie et à la vente de la partie affectée à la garantie. Mais il est inimaginable de procéder à une saisie morcelée d'un même corps du navire. Dès lors, seules les parts du quirataire, et non pas le navire, sont saisies. Il s'agit d'une véritable subrogation réelle. On peut dès lors se demander suivant quelle procédure cette saisie sera ordonnée. La copropriété n'étant pas une société, les quirataires n'étant pas des associés, on a de la peine à imaginer qu'il puisse s'agir d'une saisie des droits d'associés. On songerait plutôt à une saisie des valeurs mobilières. En faisant reposer l'hypothèse de saisie du navire sur le nombre de parts du quirataire en cas d'opposition des autres quirataires, le CCMM n'en a pas mesuré la portée sur la nature et la procédure de saisie. Il s'est contenté d'évoquer cette alternative, pour ne réglementer que les seules saisies du bâtiment de mer tout entier.

Pour ce qui est des restrictions d'ordre particulier :

Premièrement, les navires appartenant à un incapable ne peuvent être saisis que si les biens mobiliers de l'incapable l'ont été ou se sont révélés insuffisants pour faire face au paiement de sa créance.

Deuxièmement, il s'agit du cas où la créance est inférieure ou égale au revenu biannuel du navire243(*). Autrement dit, les procédures de saisie de navire sont suspendues si les conditions suivantes sont réunies : d'abord les revenus des deux années du navire sont suffisants pour régler la créance en capital, intérêts et frais ; ensuite, le débiteur offre la délégation de ces revenus au créancier. La suspension des poursuites est provisoire et peut être reprise sur décision du juge.

Troisièmement et enfin, l'hypothèque portant sur plusieurs navires ; deus cas de figure peuvent se présenter : premier cas de figure : aux termes de l'article 251 de l'AUPSRVE, le créancier ne peut poursuivre la vente des navires qui ne lui sont pas hypothéqués que dans le cas d'insuffisance des navires qui lui sont hypothéqués pour garantir le paiement sauf si l'ensemble de ces biens constituent une seule et même exploitation et si le débiteur le requiert. Deuxième cas de figure : selon l'article 252 de l'AUPSRVE, la vente forcée des navires situés dans les ressorts des juridictions différentes ne peut être poursuivie que successivement. Toutefois, poursuit l'article 252, et sans préjudice de l'article 251, elle peut être poursuivie simultanément lorsque les navires font partie d'une seule et exploitation, et après autorisation du président de la juridiction lorsque la valeur des navires situés dans un même ressort est inférieure au total des sommes dues tant au créancier saisissant qu'aux créanciers inscrits ; l'autorisation peut concerner tout ou partie des biens.

* 234 Cet article énonce en effet : « Lorsqu'elle n'est pas précédée d'une saisie conservatoire, la saisie-exécution est demandée au juge du fond dans les conditions et selon la procédure en vigueur pour les saisies immobilières. Un procès-verbal est dressé et un gardien est désigné dans les mêmes conditions qu'en matière de saisie conservatoire ».

* 235 Article 34 AUPSRVE (solution implicite).

* 236 Article 12 alinéa 7 et 26 de l'AUPSRVE.

* 237 Il s'agit d'une procédure principale ou incidente dirigée contre un acte authentique pour montrer qu'il a été altéré, modifié, complété par de fausses indications, ou même fabriqué. Une procédure analogue peut être utilisée à titre principal ou incident contre un acte sous seing privé ayant déjà fait l'objet d'une vérification d'écriture si la partie soutient que l'acte a été matériellement altéré ou falsifié depuis sa vérification. GUILLIEN (R.) et VINCENT (J.), op.cit., p 270.

* 238 ASSI-ESSO (A.-M.), DIOUF (N.), OHADA, op.cit., p 54.

* 239 L'article 32 de l'AUPSRVE dispose en effet : « À l'exception de l'adjudication des immeubles, l'exécution forcée peut être poursuivie jusqu'à son terme en vertu d'un titre exécutoire par provision... ».

* 240 POUGOUE (P.-G.) et TEPPI KOLOKO (F.), La saisie immobilière dans l'espace OHADA. PUA 2010, p 59.

* 241 Dans la saisie conservatoire des navires, dans certaines circonstances déjà examinées, l'on peut saisir le navire qui n'appartient pas ou plus au débiteur.

* 242 Article 71 du CCMM : « Si une saisie porte sur des parts représentant plus de la moitié du navire, la vente sera étendue à tout le navire, sauf opposition des autres copropriétaires pour des motifs reconnus sérieux et légitimes. ».

* 243 Article 265 de l'AUPSRVE.

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