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Les jeux vidéo et la socialisation chez les adolescents

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par Elodie Gérard
ESPE Nantes - Master 2 MEEF : Encadrement Educatif 2016
  

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VII.3) L'expression des rôles dans le collectif

Il existe 3 principaux rôles au sein des jeux vidéo : Heal, Tank et DPS. Le Heal53 a un rôle de soigneur, il redonne de la vie, grâce aux pouvoirs spécifiques de son propre personnage,

51 http://www.psyetgeek.com/desir-dintersubjectivit-dans-les-jeux-video-de-frdric-tordo

52 http://www.bpi.fr/culture-numerique/le-selfie-chez-les-adolescents-et-les-jeunes-adultes

53 Terme anglais : Soigneur

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aux autres membres du groupe. Le Tank, lui, doit se protéger et protéger le groupe en prenant le maximum de dégâts. Il agit comme un bouclier. Enfin, le joueur peut choisir d'être DPS54 dont le but est uniquement d'infliger le maximum de dégâts aux monstres ou aux autres joueurs (s'il pratique le PVP55). Ainsi, lorsque qu'un groupe décide d'aller tuer des ennemis au sein du dispositif ludique (donjons), les rôles sont complémentaires : les Tanks sont une distraction pour les ennemis, qui focalisent leurs attaques sur eux pendant que les DPS, moins résistants, sont protégés. Ils peuvent de ce fait asséner un maximum de dégâts aux ennemis. Les Heals, eux, permettent de renforcer les capacités défensives des Tanks en leur redonnant de la vie mais aussi en soignant tout joueur ayant subi des dégâts. Tous ces rôles permettent une complémentarité, mais aussi une interdépendance aux autres joueurs afin de réaliser une mission précise, fixée par le groupe, en fonction de la difficulté créée par dispositif ludique (par exemple, tuer un monstre d'un haut niveau).

Afin de réaliser ces missions, les joueurs peuvent entrer en communication les uns les autres et ainsi rechercher d'autres joueurs afin de compléter le groupe.

En effet, un joueur peut décider de « monter » un groupe (allant de 5 à 25 joueurs) c'est-à-dire rassembler tous les joueurs dont il a besoin, sur la base de la spécificité de leurs rôles. Afin de permettre la formation de groupes, les joueurs utilisent le dispositif ludique au travers des canaux de discussion écrite et orale. Ceux-ci fonctionnent sous forme de chat, individuel ou collectif, permettant de faire passer un certain nombre de messages : recrutement, vente d'objets... Grâce à ces espaces de discussion, les groupes « s'organisent, prévoient des stratégies, distribuent les rôles, relèvent leurs erreurs, leurs faiblesses afin d'y remédier lors des prochains combats » (Craipeau, 2011, p.42). L'autre espace de communication qu'est la messagerie instantanée permet aux joueurs de discuter entre eux de manière confidentielle.

Ces canaux vont donc permettre le recrutement d'autres joueurs. Ainsi, lorsque le groupe sera formé et complété, chaque compétence va être mise au service du groupe et mise en oeuvre de façon coordonnée dans le collectif. L'expression de la production de ses propres compétences est « une nouvelle forme de sociabilité expérimentée en permanence dans les jeux massivement multi-joueurs [...]. Elle est ainsi un enjeu, au même titre que ceux de la partie » (Craipeau, 2011, p.73).

54 Terme anglais : Damage per second. Rôle consistant à infliger le plus de dégâts possible.

55 Terme anglais. Player versus Player : combats allant de 2 à 10 joueurs

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La socialisation au sens « entrer en contact avec » est donc inhérente au dispositif ludique, grâce à l'ensemble des systèmes de communication présents au sein du jeu. Ces espaces obligent donc les joueurs à se mettre en relation les uns avec les autres et de communiquer avec les autres. Le terme de socialisation est donc redéfini. Si celle-ci est traditionnellement entendue comme un ensemble de valeurs et normes partagées par un groupe d'individus, elle est ici un simple établissement de contact entre les joueurs. De même, ces canaux de discussions tendent à participer à l'affranchissement des barrières géographiques et à l'abolissement du temps. Le dispositif ludique, par ces dispositifs techniques crée un « cordon ombilical » (P.Lardellier) et permet de communiquer avec n'importe quel joueur et lorsque l'adolescent le souhaite. « Le fait de rester en contact prime tout autant que le contenu des échanges: la fréquence et la continuité des flux phatiques fonctionnent comme d'importantes validations du lien » (Charpentier, 2007).

Ainsi, tous les adolescents interrogés sur leurs pratiques (7 sur 8) disent jouer en groupe de leur plein gré durant la phase de jeu. Parfois, cette alliance à d'autres joueurs peut être vécue comme une contrainte.

Parmi notre corpus, un élève évoque la nécessité d'être en groupe dans son jeu vidéo. En effet, il explique que « le gros gros défaut de ce jeu, c'est que tu ne peux rien faire si tu n'es pas en groupe » (Hugo). Il explique que les missions ne peuvent se réaliser seul et que la progression n'est conditionnée que par l'appartenance à un groupe. Afin de pouvoir collecter ou d'acheter de l'équipement, ce joueur est donc contraint de s'allier à d'autres afin de pouvoir faire progresser son personnage. Dans ce cas, la socialisation est vécue comme contraignante et forcée. Elle permet de mettre en contact des joueurs mais n'est pas vécue comme une possibilité d'établir de nouvelles relations sociales.

La socialisation peut donc être vécue comme contraignante. En revanche, pour les autres interviewés, leurs rôles semblent être perçus comme une possibilité d'alliance avec les autres joueurs.

Pour les joueurs ayant choisi leurs avatars et leurs rôles, la majorité (4 sur 5) jouent uniquement DPS56, qui consiste à infliger le plus de dégâts possibles aux monstres et adversaires : « mon rôle est de faire beaucoup de dégâts » (Etienne). Ce rôle est le plus utile dans le jeu car il permet de combattre le plus efficacement, avec des armes ou sorts puissants, les monstres ou les adversaires au sein du jeu. Le rôle de DPS est donc nécessaire à un

56 Terme anglais : Damage per second. Personnage dont le but est d'infliger le maximum de dégâts à l'adversaire.

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groupe. Par ailleurs, en fonction de la difficulté, la majorité du groupe (allant de 5 à 25 personnes) est composée de DPS.

En revanche, l'un des 5 adolescents interviewés (ayant choisi leur rôle) déclare être polyvalent. Son rôle est d'être DPS mais également Tank : « je joue aussi bien DPS que Tank. J'ai une préférence pour Tank parce que ça ne meurt pas facilement [...] Je cherche les coups les plus optimisés » (Gaston). Par ces deux rôles, l'adolescent se place en position de force c'est-à-dire d'utilité. Il lui permet d'être nécessaire à un groupe (s'il joue en groupe) et de réaliser des missions seul s'il le souhaite, grâce à sa capacité de résistance. « Les joueurs se sentent alors utiles aux groupes qu'ils peuvent intégrer, parce qu'ils montrent qu'ils sont détenteurs d'une compétence reconnue et recherchée » (Craipeau, 2011, p.86). La socialisation apparait alors comme choisie. Dans un cas, le joueur s'allie à d'autres joueurs lorsqu'il joue un rôle de DPS et recherche la reconnaissance, l'admiration des autres. Dans l'autre cas, le rôle de Tank est tourné vers une socialisation absente car l'adolescent peut réaliser des missions seul, son personnage ayant une résistance importante en cas de dégâts.

Tous les adolescents pratiquant une activité vidéo ludique ont donc investit un rôle leur permettant de s'inscrire dans le collectif. Aucun n'a investi le rôle de Heal, c'est-à-dire de soigneur. Seul, il ne peut (ou difficilement) affronter des monstres ou des adversaires. En PVP (joueur contre joueur), il est la cible principale des adversaires car il peut se soigner et régénérer le groupe et empêche la progression des ennemis. Jouer ce rôle implique donc d'être dans une constante et étroite collaboration avec les autres joueurs. Cette collaboration lui permettra de réaliser ses propres objectifs et ceux du groupe. Les adolescents interrogés n'ont pas investi ce rôle, permettant le plus la socialisation au sein du jeu.

La recherche d'un groupe de pairs étant particulièrement développée durant l'adolescence, la pratique vidéo ludique permet à l'adolescent de développer un sentiment d'appartenance. D'après nos résultats, le sentiment d'appartenance sera d'autant plus renforcé que l'adolescent sera performant et donc utile au groupe afin d'affronter plus efficacement l'univers ludique ou les adversaires.

Ainsi, nous pouvons voir que le rôle détermine la spécialisation (classe) de chaque avatar. De ces rôles, choisis ou imposés, vont découler des alliances avec d'autres joueurs, qu'elles soient forcées ou non. La mission de chaque avatar est donc pré déterminée lorsqu'un adolescent joue en groupe et est en phase de combat.

En effet, lors de la phase de jeu en groupe, « chacun sait ce qu'il a à faire » (Florent)

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c'est-à-dire que chaque personnage a son rôle spécifique : Tank, Heal ou DPS57. « Ce qui fait la force du groupe est que chacun sait ce qu'il doit faire, où et comment » (Craipeau, 2011, p.162). La socialisation est donc présente, mais uniquement sous tendue par la complémentarité des compétences de chaque rôle et donc de l'utilité de chacun : « En général, tu crées des pseudo-amitiés » (Hugo).

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo