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Les jeux vidéo et la socialisation chez les adolescents

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par Elodie Gérard
ESPE Nantes - Master 2 MEEF : Encadrement Educatif 2016
  

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II.3) Jeux vidéo, Jeux en ligne massivement multijoueur (MMORPG) et caractéristiques

II.3.1) L'ordinateur, support privilégié du jeu

En cinq ans, la généralisation d'internet dans les foyers français et l'apparition de la troisième génération d'ordinateurs ont peu à peu modifié les pratiques et usages de l'ordinateur. Autrefois réservé au domaine du travail, celui-ci est devenu le support privilégié du jeu. En effet, selon une étude21 parue en 2014 sur la pratique des jeux vidéo des Français, près de 7 Français sur 10 joueraient à des jeux vidéo sur leur ordinateur. En revanche, et contrairement aux idées reçues, la population adolescente est la deuxième catégorie après les personnes ayant une activité rémunérée, à savoir les adultes. En effet, ceux-ci sont plus nombreux à jouer que les enfants. Sur 70% de la population, 60,1% des joueurs ont plus de 25 ans, 43,4 % des joueurs ont entre 25 et 49 ans et 21,0 % des joueurs ont moins de 15 ans. Concernant la population adolescente, les premiers utilisateurs sont les étudiants, suivis des lycéens et des collégiens. Ces derniers sont très peu nombreux à jouer, ne disposant pas dans la plupart des cas d'un ordinateur personnel22.

Mais qu'entend-on par jeu vidéo ?

20 http://www.e-marketing.fr/Marketing-Magazine/Article/Les-ados-ou-la-generation-moi-d-abord-22014-1.htm

21 http://www.tns-sofres.com/sites/default/files/2014.11.28-jeux-video.pdf consulté le 05/05/2015

22 Berry, V ; (2012) L'expérience virtuelle. Jouer, vivre, apprendre dans un jeu vidéo. Presses Universitaires de Rennes. P 58-61.

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Salen et de Zimmerman (2004) nous en proposent une définition. Celui-ci est un « système dans lequel les joueurs s'engagent dans des conflits artificiels, définis par des règles et dont les résultats sont quantifiables » (Sutter Wider, 2010, p.14). Le jeu vidéo possède certaines caractéristiques permettant de les distinguer des jeux traditionnels :

? une interactivité immédiate

? la manipulation d'informations différentes (sons, textes, images, vidéos...)

? une automatisation des systèmes rendant difficile la modification des règles par le joueur

? la possibilité de constituer de larges réseaux de communication

Au-delà de ces caractéristiques, les adolescents se tournent vers les jeux vidéo car ils suscitent de l'intérêt et du plaisir.

II.3.2) Les attraits des jeux vidéos

· La recherche de plaisir

La pratique d'un jeu vidéo sur ordinateur présente un intérêt chez les adolescents. Sur un plan marketing, cet intérêt est mesuré au plaisir et à la satisfaction de l'audience par rapport à leur pratique des jeux vidéo. Ainsi, pour 71 % des adolescents, le jeu vidéo est une source d'amusement et de divertissement. Il permet également de développer certaines capacités (imagination, réactivité), de rencontrer d'autres personnes et de se mesurer à d'autres joueurs23. La notion de défi proposée par le jeu vidéo et la volonté de se mesurer à d'autres joueurs permet aux adolescents, au travers de leurs performances, d'alimenter leur estime de soi (« valeur qu'on s'attribue dans les différents aspects de la vie ») (Duclos, 2002, p.8). Ainsi, si le jeu vidéo représente un vif intérêt et est un objet de plaisir pour la population adolescente, c'est grâce à un ensemble de mécanismes actifs que l'on appelle le gameplay.

Selon l'agence de jeux marketing et de communication Actisia, le gameplay « désigne l'ensemble des mécanismes utilisés pour augmenter le plaisir et la satisfaction de

23 http://www.tns-sofres.com/sites/default/files/2014.11.28-jeux-video.pdf consulté le 05/05/2015

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l'audience »24 . Ainsi, d'un point de vue marketing, il est essentiel que toute production d'un jeu vidéo respecte un ensemble de mécanismes actifs : type de jeu, règles, objectifs, récompenses. Ceux-ci sont définis avant la conception du jeu et regroupés dans le « Game Design Document », document recensant, avant sa conception, la représentation du jeu, son contenu et son implémentation (ou codage sur ordinateur)25. L'expérience de l'utilisateur est également un élément à prendre en compte dans la définition du gameplay, dont « les actions doivent être perceptibles, pertinentes et immédiates »26. Ainsi, par un ensemble de mécanismes actifs, le jeu vidéo suscite de l'intérêt et du plaisir chez l'adolescent. Cet intérêt et ce plaisir est renforcé par le flow ou l'expérience optimale.

· La théorie du Flow : entre défi et immersion

La théorie du flow27 (ou expérience optimale) proposée en 1990, permet de mettre en avant une expérience optimale apparaissant en cas d'adéquation entre le défi proposé par le jeu vidéo et les capacités de l'individu (coordination, réflexes ou encore capacités d'attention). Ainsi, cette expérience optimale exigerait une concentration totale de l'individu sur la tâche en cours mais permettrait à l'individu d'oublier les aspects déplaisants de sa vie, ses préoccupations et ses frustrations. « Les individus sont tellement intensément impliqués dans une activité que rien ne semble autrement importer, l'expérience elle-même est si agréable que les gens la fassent même à un grand coût, dans l'intérêt fin de la faire »28 .

Si le jeu vidéo est un objet de plaisir au travers du Gameplay et du Flow, celui-ci présente également un intérêt pour la population adolescente car il propose un univers ludique.

La pratique la plus courante dans les jeux en ligne est le PVE (player versus environment, littéralement joueur contre l'environnement). Celle-ci consiste à « affronter seul ou en groupe, l'environnement informatique : animaux, monstres, créatures, et autres personnages hostiles » (V. Berry, 2012, p. 71). Cet affrontement est le plus souvent généré par des quêtes (ou missions), que l'adolescent va trouver auprès de différents personnages

24 http://www.actisia.com/quest-ce-que-le-gameplay/ consulté le 06/05/2015

25 http://www.gamasutra.com/view/feature/3384/the_anatomy_of_a_design_document_.php consulté le 06/05/2015

26 http://www.actisia.com/quest-ce-que-le-gameplay/ consulté le 06/05/2015

27 Csikszentmihalyi, M ; (1990). Flow : The Psychology of Optimal Experience, Harper and Row, New York.

28 http://jean.heutte.free.fr/spip.php?article54 consulté le 07/05/2015

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virtuels, placés dans l'univers ludique. Au regard des données, les connaissances acquises d'un jeu vidéo se fait par l'expérience solitaire dans le jeu, première source d'apprentissage chez les adolescents29. Enfin, lorsque le combat ou la quête sont terminés, le joueur gagne systématiquement un loot (butin) sous diverses formes telles que l'argent (virtuel), l'expérience, armes, ressources que les joueurs pourront exploiter (créer des vêtements, faire du commerce avec d'autres joueurs). Ainsi, à l'image des jeux traditionnels (poupées, figurines), le jeu vidéo revisite l'expérience ludique. « Dans les Sims ou World Of Warcraft, les personnages renvoient aux poupées ou aux figurines que l'on habillait et à qui l'on inventait des histoires » (Berry, Le Monde, 2012).

· Le jeu vidéo, levier d'une pratique collective

Comme évoqué précédemment, l'affrontement à travers l'univers ludique peut se faire seul ou en groupe. En ce sens, le jeu vidéo est une pratique collective.

Le jeu en ligne massivement multijoueur (autrement appelé MMORPG) met en relation des joueurs du monde entier. Autrement dit, des milliers de joueurs peuvent interagir les uns avec les autres et ce, grâce à des canaux de discussions spécifiques présents dans le jeu. Ces jeux, tels que World Of Warcraft ou encore Dark Age Of Camelot, nécessitent une connexion internet et sont donc des jeux dits online (en ligne). Comme évoqué précédemment, un joueur peut créer un ou plusieurs avatars. Au sein de ces jeux, les adolescents, au travers de leurs avatars, peuvent intégrer une ou plusieurs guildes ou fédérer plusieurs joueurs et créer une guilde. La guilde (terme du Moyen-Âge) est une « association pérenne de joueurs réunis par un intérêt commun sous une même bannière. Les guildes peuvent avoir un but commercial, militaire, politique, social ou autre selon les jeux en ligne massivement multijoueurs (MMORPG). En plus de l'entraide naturelle entre les membres de la guilde, l'appartenance à une guilde peut prodiguer des bonus ou avantages divers (partage de ressources, bonus de guilde en cas de victoire au combat)30 ». Lorsque l'adolescent crée sa guilde, on dit alors qu'il est le maître de guilde (autrement il en est membre). Un avatar n'appartient qu'à une seule guilde. 70 % des joueurs (soit la majorité) appartiennent à une seule guilde et 30% appartiennent à au moins deux guildes. Cette relation d'aide, au travers de la guilde, est appelée étayage. La guilde est la seconde source d'apprentissage chez les

29 Lardellier, P ; (2006). Le pouce et la Souris. En quête sur la culture numérique des ados. Fayard.

30 http://www.jeuxonline.info/lexique/mot/Guilde consulté le 07/05/2015

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adolescents lors de leur pratique des jeux vidéo (Berry, 2012). Cette relation d'aide déclenche alors des apprentissages.

Lorsqu'un joueur est membre d'une guilde, il est nécessaire pour lui d'apprendre les pratiques mais également les codes qui la régisse. La guilde est une « communauté de pratiques » (Wenger, 2005) auxquelles l'adolescent doit se conformer afin de s'insérer dans la guilde. Selon les travaux d'Eric Wenger et Jean Lave (1992), l'apprentissage est « d'abord un processus de participation à des pratiques sociales, à des communautés de pratiques » (Wenger et Lave, 1992, p 51). En d'autres termes, l'apprentissage ne serait pas un transfert de connaissances d'une situation à une autre ni un transfert d'information. Ce serait davantage une façon de participer à une pratique sociale, permettant à l'apprenant de découvrir les différentes facettes de la pratique d'un jeu vidéo. Ainsi, un joueur expérimentera et acquerra plusieurs compétences (langage, rôles possibles, identités) par le biais de cette participation à des pratiques sociales, que Jean Lave et Étienne Wenger qualifient de « participation légitime périphérique ». Cette participation périphérique signifie que « l'apprentissage n'est pas seulement une condition pour être membre, mais également une forme d'appartenance qui va évoluer [...] Ce concept désigne à la fois le développement de l'identité de l'individu en tant que personne reconnue compétente par une communauté et le double processus de reproduction de l'ordre social et de transformation des communautés de pratiques ». (Lave et Wenger, 1992, p 55). Ainsi, l'acquisition de ces pratiques sociales, au travers du jeu vidéo, va permettre à l'adolescent de se socialiser avec d'autres joueurs dans l'univers ludique et de s'intégrer dans sa ou ses guilde(s). La socialisation se définie comme « la construction d'une identité sociale par et dans l'interaction » (Mead, 1934, p. 4). Ce processus est à l'image de l'intégration au sein d'un groupe de pair dans la vie réelle. En cherchant à s'éloigner du nid familial et en cherchant à se forger une identité, l'adolescent va chercher à intégrer un groupe de pairs en développant un langage commun et un style dans le but de se faire accepter par les autres.

Au sein de la guilde et dans l'univers virtuel, les règles peuvent être soit établies par les joueurs, soit contraintes par le dispositif ludique. Ainsi, les règles relatives à la guilde ou encore à l'univers virtuel telles que son fonctionnement, les horaires de jeu, l'exploration de l'environnement virtuel ou encore l'accomplissement de quêtes sont généralement décidées par les joueurs. Dans les cas particuliers (tels que l'affrontement de monstres de niveaux supérieurs), le maître de guilde peut choisir d'imposer les règles. Afin que chaque joueur se

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prépare à l'affrontement, la nécessité de créer des artefacts (sous forme de potions, d'équipement) pouvant aider lors de l'affrontement (redonner de la vie ou encore augmenter la puissance d'un joueur) sera imposée. De la même manière, les règles peuvent être imposées mais cette fois-ci par le dispositif ludique.

En effet, les règles autour de la pratique d'un jeu vidéo peuvent être imposées et dans ce cas, la pratique collective est une contrainte car imposée par le dispositif ludique. Ainsi, si un monstre ou créature ne peut être vaincu par un seul joueur, celui-ci devra faire appel à d'autres joueurs (qu'il connaît ou non), provoquant une relation d'entraide. Ces monstres se trouvent généralement dans des instances (donjons) ou des raids, c'est à dire des zones précises de jeu (comme par exemple un château) qui sera explorée pendant une durée de une à cinq heures, afin de tuer les créatures virtuelles résidant dans cette zone. Afin de combattre ces monstres, certains joueurs seront soigneurs, d'autres seront présents pour provoquer des dégâts et d'autres devront endurer les dégâts lors du combat (les tanks). Afin de construire ce groupe, le joueur pourra proposer la mission sur le canal général (un canal de discussion uniquement lu par les joueurs connectés dans une zone précise), à laquelle les joueurs connectés pourront répondre s'ils le souhaitent. L'autre moyen sera pour le joueur de proposer la mission au sein de sa guilde (alliance de joueurs) afin de monter un groupe et d'aller tuer les monstres dans le donjon qu'il souhaite. Autrement dit, le joueur est contraint de faire appel à d'autres joueurs. Lorsque la créature virtuelle est vaincue, celle-ci délivre un butin. Or, ce butin est distribué en fonction des personnes présentes, leurs rôles et leur nombre c'est à dire qu'un joueur désirant un butin spécifique, attribué aléatoirement par l'ordinateur, devra éventuellement négocier avec un autre joueur, ou avoir de la chance afin de l'obtenir. Une stratégie doit s'établir, et tous les joueurs doivent nécessairement s'entendre. La recherche d'un compromis est alors nécessaire et au travers des discussions et des négociations, l'adolescent va chercher à s'affirmer. La sociabilité, entendue comme "l'ensemble des relations qu'un individu entretient avec les autres" (Mercklé, 2004, p. 39) est donc nécessaire et contrainte si le dispositif ludique requiert une collaboration forcée.

Nous avons donc pu voir que le jeu vidéo, au travers de son dispositif ludique, permettait à l'adolescent une socialisation (contrainte ou non) et des apprentissages (codes, pratiques) liés à cette socialisation. L'apparition des serious game (jeu sérieux) dans les

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années 200031 met en lumière d'autres apprentissages au travers du jeu vidéo.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand