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Dynamique professionnelle et transformations de l'action publique. Réformer l'organisation des soins dans les prisons françaises. Les tentatives de spécialisation de la « médecine pénitentiaire » (1970-1994).

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par Eric FARGES
Université Lyon 2 - Sciences Po - THESE EN SCIENCES POLITIQUES 2013
  

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CHAPITRE 5. LES SPECIFICITES CARCERALES A L'EPREUVE DU « DECLOISONNEMENT »

« Médecine remaniée suivant les gouvernements. Médecine sujette à scandale (voir l'affaire des grâces médicales). Médecine sans statut bien défini. Aujourd'hui, la médecine pénitentiaire n'existe plus, il n'y a que des médecins exerçant en prison dit un médecin de Muret. Il a ajouté : "tout ça c'est de la politique" »1329(*).

Longtemps toléré, le manque de sérieux avec lequel le Médecin-inspecteur remplit sa tâche est vivement contesté en 1981 par le nouveau chef de l'inspection des services pénitentiaires, Philippe Chemithe, après qu'une mission relative à l'Hôpital de Fresnes ait été confiée à Solange Troisier: « Je ne puis que constater l'indigence du rapport du Médecin-inspecteur qui ne répond à aucun des points que j'avais évoqués dans ma note. J'ajoute que la méthode employée par le Médecin-inspecteur relève de la plus parfaite fantaisie et n'a aucun rapport avec la technique la plus élémentaire d'une quelconque inspection. En définitive, Mme Troisier se contente de me remettre deux lettres qui lui ont été adressées [...] sans que les informations contenues dans celles-ci aient été vérifiées »1330(*). On comprend dans ces conditions que les contrôles des MISP aient engendré de nombreuses tensions, notamment avec des médecins libéraux peu habitués à un contrôle de leur activité.

Considérée comme un domaine spécifique, l'organisation des soins en prison est longtemps demeurée à l'écart du ministère de la Santé. C'est dans l'objectif d'appliquer la même médecine au-dedans comme au-dehors que la nouvelle équipe en place à l'Administration pénitentiaire décide de sanctionner certaines situations tolérées jusqu'alors. Le Conseiller technique du garde des Sceaux s'étonne ainsi auprès du DAP de la motion du syndicat CFDT déposée au cours d'un congrès en avril 1982 faisant état de « surveillants qui empêcheraient la réalisation d'examens de laboratoire ou se substitueraient aux infirmières en "donnant les médicaments" et même qui effectueraient des "actes médicaux et chirurgicaux" »1331(*). Une plus grande importance semble accordée à ce moment aux griefs formulés à l'encontre du corps médical. Informé de la plainte à l'encontre d'un dentiste, Jean Favard saisit Yvan Zakine estimant qu'il « serait inadmissible de laisser en place un praticien qui aurait à ce point oublié les devoirs de sa fonction »1332(*). Peut-être du fait d'un changement de génération ou de l'attention apportée au DAP dans la nomination des directeurs en commission paritaire1333(*), certains directeurs semblent plus sensibles aux récriminations formulées par les détenus. Ainsi, le directeur du CP de Fleury demande en 1986 le retrait de l'agrément d'un dentiste en se fondant sur des plaintes : « La qualité des soins qu'il pratique est de plus en plus contestée par la population pénale [...] Notamment il ne nettoierait pas ses instruments après usage et fumerait le cigare pendant les soins. Ces faits ont d'ailleurs été confirmés par des agents en poste à l'infirmerie »1334(*).

Les conditions de départ de cet autre médecin attestent du moindre degré de tolérance dont bénéficient désormais les praticiens « problématiques ». En 1976, le Procureur général de Pau alerte la direction de la M.A au sujet du praticien de l'établissement ayant été interpellé alors qu'il « tentait de pénétrer à la clinique Lagrange armé d'une carabine » et qui fut alors diagnostiqué comme « dépressif »1335(*). Cet avertissement ne semble alors pas pris au sérieux comme en témoigne le commentaire manuscrit laissé en marge du courrier : « Ce médecin n'a commis aucune faute intéressant le service de la M.A de Pau. L'administration n'a donc aucune raison d'intervenir ». En janvier 1982, le même Procureur général signale une nouvelle fois, après avoir rappelé son précédent courrier, que le praticien fut arrêté de nouveau pour avoir tenté de s'introduire de force et armé dans une habitation1336(*). Quelques mois plus tard, le généraliste est suspendu.

Symbolique de cette tentative de transformation de l'organisation des soins, l'Administration tente de mettre fin à la règle selon laquelle un médecin n'effectuerait que la moitié des vacations qui lui sont attribuées1337(*). Cette disposition informelle permettant de conférer un certain attrait à des postes mal rémunérés avait en effet été, faute de contrôle, à l'origine d'une importante dérive au cours des années soixante-dix. Plusieurs praticiens n'effectuaient qu'une part très congrue de leurs vacations. C'est le cas de ce médecin exerçant à la M.A de Vesoul et dont le relevé précis des visites à l'établissement entre 1975 et 1978 fut trouvé dans son dossier de carrière1338(*). Ce praticien réalisait en moyenne une vacation par semaine, tous les mardis, d'une durée approximative d'une heure et quart (avec une arrivée à 11h15 et une sortie à 12h30), pendant laquelle il auscultait entre huit et dix-huit détenus. Ses visites sont en revanche parfois beaucoup plus brèves. Le mardi 4 février 1975, il ne reste que quarante minutes (11h35-12h19) pour examiner quinze détenus. Le mardi 22 juillet, il passe vingt minutes (10h47-12h05) pour douze détenus. La durée moyenne de ses visites se réduit en 1976 à une heure pour un nombre équivalent de détenus. Cette tendance à la baisse s'aggrave, alors même que le nombre de vacations qui lui est alloué augmente, passant de 279 en 1977 à 485 en 19791339(*). Plusieurs visites sont parfois inférieures à quinze minutes. Le 3 janvier 1978, il ne demeure dans la M.A que dix minutes (11h40-11h50) pour douze détenus consultés... Comme le constate une note du surveillant-chef de l'établissement au sujet de ce généraliste, « compte tenu du temps passé, il est permis de s'interroger sur le sérieux de ces examens médicaux »1340(*).

C'est pour remédier aux problèmes constatés dans plusieurs établissements qu'un contrôle de l'assiduité des praticiens est mis en place par l'Inspection des services pénitentiaires à partir de 1982, comme le rappelle un magistrat de la DAP : « On avait un inspecteur chez nous qui était M. Chemithe. Lui, il était craint... J'allais dire, il faisait un peu figure d'inquisiteur. Lui, si vous voulez, il était chargé de faire de l'inspection pour l'Administration pénitentiaire. Mais il rencontrait les médecins et dans ses rapports, il faisait un paragraphe sur l'infirmerie. Et lui, il se battait beaucoup avec certains médecins »1341(*). La tonalité avec laquelle Philippe Chemithe demande le licenciement du généraliste de la M.A de Nîmes, qui « n'a effectué pour l'année 1984 que 72 heures de vacations à la Maison Centrale et 77 heures à la Maison d'Arrêt sur les 1.116 vacations annuelles d'une heure dont il est titulaire »1342(*), témoigne du rapport de force désormais instauré avec certains praticiens :

« Il estime rendre des services éminents à l'Administration pénitentiaire et affirme, sans vergogne que la qualité de ses prestations n'était pas proportionnelle à son temps de présence dans les établissements. L'intéressé a cru bon d'ajouter sur un ton désobligeant qu'il avait une conscience professionnelle puisqu'il exerçait une profession libérale (sic) [...] En tout état de cause, cette situation intolérable et scandaleuse ne saurait perdurer sans occasionner un préjudice irréparable au fonctionnement des prisons de Nîmes dont on note par ailleurs le contexte difficile »1343(*).

Le Bureau du personnel systématise progressivement ce contrôle à partir des relevés de temps de présence des médecins que chaque chef d'établissement est chargé de communiquer1344(*). Ces vérifications révèlent le taux extrêmement bas des vacations assurées par beaucoup de praticiens. L'Administration découvre qu'un cardiologue exerçant à la M.A de Nice n'a effectué en 1982 que neuf des cent cinquante-six vacations qui lui sont rétribuées1345(*). Le Directeur régional (DRSP) de Lyon remarque que le médecin de la M.A de Saint Quentin n'a effectué « que 18 heures sur 180 en 1984 »1346(*). Dans un courrier adressé au chef des services d'inspection, le Bureau du personnel indique le « coefficient de fréquentation » de chaque praticien de la M.A de Nice : 2/5ème pour le généraliste, 1/12ème pour l'ophtalmologue, 1/17ème pour le cardiologue, 1/33ème pour l'ORL1347(*). Le directeur de la M.A de Saverne tire les conséquences du fait que le praticien n'ait effectué que 16 heures sur les 120 qui lui sont rémunérées :

« En défalquant le temps nécessaire aux mouvements des détenus et aux entretiens avec le chef d'établissement, on peut estimer très généreusement à 13 heures le temps consacré aux consultations, au cours desquelles 501 détenus lui ont été présentés, soit une moyenne de 90 secondes par détenu »1348(*).

En dépit du faible prix des vacations, l'Administration pénitentiaire prend, grâce à ces contrôles, la mesure de la rémunération réelle de certains praticiens. Concernant la M.A de Nice, Philippe Chemithe note les effets pervers du système de paiement par vacations : « L'expérience montre en effet que l'ophtalmologiste travaillait à plus de 3000 francs de l'heure, l'ORL à plus de 2200 francs, le cardiologue à plus de 1200 francs. Il est certain qu'un paiement à l'acte eut été moins onéreux »1349(*). Certains médecins jusque-là considérés comme vertueux, parce que peu contrôlés, sont mis à l'index. C'est le cas d'un praticien exerçant depuis 1960 et décoré en 1980 de la médaille pénitentiaire1350(*), suite à un rapport de Solange Troisier où elle le décrivait comme étant « particulièrement attaché à sa fonction et qui dirige avec continuité, compétence et dévouement le service médical des prisons de Metz »1351(*). Quelques années plus tard, le DRSP de Strasbourg observe que « ce médecin n'a pas assuré de service » dans un premier établissement où lui sont confiées 226 vacations et que « ce même médecin n'a assuré, en 1982, que 85 heures de présence » dans un autre où lui sont allouées 702 vacations1352(*). Après un rappel à l'ordre de l'inspecteur Chemithe, selon qui ce praticien « assimile sa fonction à une véritable sinécure », ce généraliste présente sa démission en juin 19841353(*).

Outre la non-reconduction systématique des médecins titulaires1354(*), la mise en place de ces contrôles se double d'avertissements aux praticiens qui effectuent moins de la moitié de leurs vacations. Un médecin n'assurant qu'un cinquième de son temps de présence (48h sur 240h en 1984) se voit demander par le DRSP de modifier ses consultations : « Un seul passage systématique le jeudi après midi ne permet plus de répondre aux besoins de l'établissement qui se sont accrus avec l'augmentation de l'effectif de la population pénale [...] Je vous serais reconnaissant de bien vouloir envisager l'institution de deux consultations hebdomadaires au centre de détention, l'une en début de semaine (lundi ou mardi), la seconde en fin de semaine (jeudi ou vendredi) »1355(*). Parfois après un certain laps de temps (entre six mois un an), l'Administration met en demeure le praticien récalcitrant d'augmenter ses vacations sous peine d'être licencié. Après avoir demandé au généraliste de la M.A de Nice d'effectuer cinq vacations de trois heures par semaine, les services pénitentiaires constatent que ce praticien n'assure « que 25 heures de présence en moyenne par mois », soit moins de la moitié exigible, et enclenchent une procédure de licenciement1356(*).

Pour répondre au faible temps de présence des médecins, l'Administration pénitentiaire tente de mieux répartir les vacations entre praticiens1357(*). Le Bureau du personnel réduit ainsi, après avis de Philippe Chemithe, le nombre de vacations allouées aux praticiens les moins présents pour les distribuer à d'autres. Plusieurs praticiens s'offusquent alors de voir leur rémunération diminuer et refusent de continuer à assurer leur fonction. Avançant une « volonté délibérée de [l'] administration de diminuer [s]es honoraires et de [lui] supprimer [s]es avantages sociaux par n'importe quel moyen », un médecin exerçant à la M.A de Dunkerque démissionne, après avoir remarqué que « le "temps de présence" de 7 heures (un peu minoré à mon avis) n'a rien de commun avec le travail que je consacre à cet établissement, ni avec la tension nerveuse qu'il provoque »1358(*). Le médecin du CD de la Réunion remet sa démission après qu'il est « demandé à ce praticien de consacrer un peu plus de temps à son poste médical (31 heures assurées sur 312 prévues en 1982) »1359(*). Parce qu'ils occupent des postes peu reconnus, beaucoup de praticiens vivent le contrôle de leurs vacations comme une humiliation. En témoignent les propos de ces différents médecins démissionnaires :

« J'apprends maintenant que les médecins vont pointer à la porte des Maisons d'arrêt comme des manoeuvres non spécialisés, dont, avec les femmes de ménage de la région parisienne, ils partagent le privilège du niveau de salaire »1360(*).

« Les exigences inhérentes à la médecine pénitentiaire qui confine au bénévolat [1700 frs/mois] mériterait une considération bien différente qu'une appréciation administrative obéissant à des "impératifs comptables" »1361(*).

« Le chiffre de 28 heures de présence à la maison d'Arrêt est faux : il dépasse 40 heures [...] Il ressort de votre lettre que je n'accomplis pas le travail pour lequel je suis dérisoirement rémunéré. Compte tenu de ce qu'il l'est scrupuleusement, je considère votre assertion comme une insulte caractérisée »1362(*).

La mise en place d'un contrôle des vacations n'est pas sans problèmes pour l'Administration pénitentiaire. La remise en cause de cette règle tacite assurant que ces postes peu prisés soient pourvus se traduit, souligne le magistrat alors chargé de suivre les questions de santé, par des problèmes de recrutement dans les petites villes :

« C'était compliqué parce que si localement on leur avait dit : "On s'arrange. On vous paie dix heures mais vous ne venez que cinq heures...". C'étaient des arrangements [...] Quand vous avez conclu un accord au niveau local et après vous dites au médecin : "On vous paye dix vacations et vous devez faire dix heures...". Pour des villes comme Marseille, on n'avait pas de difficultés à recruter mais dans des petites villes... Et puis tout se sait ! Y avaient même des conseils départementaux de médecins qui disaient : "Alors, dans ces conditions là, on interviendra plus dans les établissements pénitentiaires". Y avaient des réactions corporatistes. A partir du moment où on avait cherché des noises chez l'un d'entre eux, il pouvait y avoir une sorte de réaction de solidarité... »1363(*).

Le contrôle de l'assiduité des praticiens exerçant en milieu pénitentiaire n'est probablement pas sans lien avec le transfert de la mission d'inspection à l'IGAS, particulièrement attentive à cette question. Durant leurs missions les inspecteurs remarquent en effet la très faible assiduité des médecins. Au cours d'une journée d'étude, le Chef de l'IGAS remarque « que ce type de situation ne peut absolument pas être toléré »1364(*). On comprend mieux la façon dont étaient vécus ces contrôles au vu de la vive colère que manifesta ce généraliste durant l'entretien quand lui furent présentés les chiffres de l'IGAS concernant son propre temps de présence :

« - Mon rôle était de voir les patients, or l'Administration pénitentiaire vous pointe en entrant et en sortant... On vous fait remarquer que vous avez fait 4h30 au lieu de 5h00 ! Alors vous voyez !

- Par contre dans le rapport de l'IGAS il est précisé que vous n'effectuiez que 20 de vos vacations...

- Qu'ils disaient ! Et en plus on n'était pas payé pour des horaires, on était payé pour des vacations. Alors on peut dire une vacation peut être une vacation horaire... [c'était le cas] Mais non ! Moi, j'étais payé pour voir des malades et après les avoir vus je partais ! [...] Parce que c'était lamentable ! [Vive colère] C'était de l'ordre de 7 euros de l'heure ! C'était ridicule. ! Alors qu'un médecin peut gagner actuellement soixante euros de l'heure ! Alors on était payé pour le travail qu'on avait à faire et quand on avait fini, on partait ! »1365(*)

La question de l'assiduité illustre les difficultés rencontrées par l'Administration pénitentiaire à vouloir traiter les médecins travaillant en milieu carcéral selon les mêmes règles que celles s'appliquant à n'importe quel praticien. S'il se heurte à certaines spécificités résiduelles de la médecine pénitentiaire, le contrôle exercé par le ministère de la Santé permet néanmoins de rapprocher progressivement l'organisation des soins en prison du reste du système de santé (Section 1). La délégation de la santé à des groupements privés opérée à la fin des années quatre-vingt dans le cadre du « Programme 13.000 » de prisons à gestion semi-privée marque l'achèvement du monopole, déjà ébranlé, exercé par l'Administration pénitentiaire sur l'organisation des soins. Pour la première fois s'exerce en milieu carcéral une médecine non pénitentiaire (Section 2).

Section 1- L'organisation sanitaire en prison sous le contrôle des services de la Santé

La mise en oeuvre du transfert de l'inspection médicale au ministère de la Santé se traduit par des conséquences paradoxales. Elle oblige tout d'abord l'Administration pénitentiaire à devoir rénover les problèmes les plus criants, sous peine d'être sévèrement épinglée par l'IGAS. L'absence d'un véritable contrôle pendant près de dix ans laissait craindre, tel que le souligne le Conseiller technique du garde des Sceaux, que de nombreuses irrégularités soient mises à jour : « Quand vous êtes votre propre inspecteur, vous ne trouvez rien... Tous les vieux sommiers qui sont dans votre jardin, si vous ne les touchez pas, vous ne voyez que les tulipes ! Vous, vous arrivez après... Et c'est là qu'on a eu des ennuis ! Vous arrivez après et vous dites : "Vous pouvez tout fouiller !". Alors là, on trouve tout ! »1366(*). Un magistrat alors chargé des questions de santé à la DAP confirme les implications attendues découlant du transfert de contrôle : « En interne, on se doutait bien de la situation. On savait que c'était pas florissant. Donc ça voulait dire prendre le risque de faire apparaître au grand jour des tas de dysfonctionnements, d'anomalies qui sont dues au manque criant de personnel ! »1367(*). Le transfert du contrôle médical s'accompagne ainsi d'une volonté de l'Administration pénitentiaire de parer aux carences les plus aiguës. En témoigne cette note interne de la DAP :

« Les inspections que seront appelées à faire l'IGAS et les médecins inspecteurs départementaux et régionaux de Santé, ne peuvent pas être raisonnablement envisagées avant quelques mois : il me paraîtrait utile, au moins pour les établissements pénitentiaires de la région parisienne, de réfléchir à une "remise à jour" même provisoire des infirmeries »1368(*).

Ce transfert est, second effet non désiré de la réforme, l'occasion pour l'Administration pénitentiaire de réaffirmer son autorité en matière médicale. Faute d'un service interne, l'inspecteur des services pénitentiaires, Philippe Chemithe, est tout d'abord amené à intégrer une dimension sanitaire à ses contrôles. Mais surtout, lors de la réflexion menée sur le transfert à l'IGAS, ce dernier propose que le recrutement des médecins, où le Médecin-inspecteur jouait auparavant un rôle important, soit dorénavant le seul fait des services administratifs : « Cette pratique qui donnait en définitive, à tort ou à raison, l'impression que le médecin était le seul à pouvoir recruter d'autres médecins, me parait devoir être définitivement abandonnée. Il me parait opportun de faire connaître le principe selon lequel le médecin candidat à un emploi est recruté par une administration et non par l'un de ses pairs »1369(*). Bien que conçue comme une étape dans le démantèlement de la médecine pénitentiaire, la réforme de l'inspection médicale apparait comme un moyen pour la DAP de renouveler l'autorité de la tutelle administrative sur le personnel médical.

Si le transfert de la médecine pénitentiaire est envisagé par la DAP, c'est d'ailleurs uniquement à long terme, ce que confirme un échange de courriers entre les deux ministères. Dans sa réponse au Chef de l'IGAS, qui regrette qu'une note de l'Administration pénitentiaire prévoyant le contrôle du ministère de la Santé « n'a pour effet de modifier ni le statut des personnels médicaux et para-médicaux qui relèvent de l'administration pénitentiaire, ni la gestion des services médicaux pénitentiaires », Myriam Ezratty reconnaît que « la banalisation du contrôle sanitaire est susceptible de comporter des incidences à moyen termes » avant de relever que « s'agissant d'un problème qui ne se posera effectivement que dans plusieurs années, il me semble prématuré d'en faire état dès à présent »1370(*). Les contraintes pénitentiaires apparaissent ainsi bien trop lourdes pour qu'il y soit mis fin immédiatement. Si le contrôle de l'IGAS apparaît comme un moyen de relégitimer l'autorité de l'Administration pénitentiaire en matière médicale, il permet également de dresser le bilan et d'amorcer une réforme de l'organisation des soins en prison (1). Mais surtout la concertation entre ministères, aussi bien au niveau local, par le biais des médecins inspecteurs de santé publique, qu'au niveau central grâce à l'instauration d'un Comité de coordination, rend possible une lente évolution de l'organisation des soins en prison, désormais jugée à l'aune des critères du système national de santé (2).

1. L'Inspection générale des affaires sociales, entre légitimation et réforme de la médecine pénitentiaire

Les premières inspections de l'IGAS sont destinées, dans un contexte très polémique, à restaurer la crédibilité des services de médecine pénitentiaire. Les docteurs Avril et Tchériatchoukine1371(*) sont ainsi chargés en avril 1983 par l'Administration pénitentiaire de résoudre « les graves difficultés qui entravent le fonctionnement normal » de l'Hôpital de Fresnes, suite au décès de plusieurs patients1372(*). C'est à partir de ce rapport que, comme le titre Le Quotidien de Paris, « l'inspection des Affaires sociales veut mettre un terme à la polémique sur la mort de trois détenus » (7/09/1983). L'Administration pénitentiaire s'appuya, souligne Jean Favard, sur l'IGAS afin de mettre à l'écart un chirurgien gênant, le Dr Perdrot, parce que dangereux et relégitimer ainsi l'Hôpital de Fresnes : « Y avaient des médecins qui découpaient vite comme celui de Fresnes. On n'aurait pas été en état de le faire tout seul et grâce à l'IGAS, sur la base de l'IGAS... »1373(*). Outre une fonction « légitimante », le rapport de l'IGAS laisse transparaître la forte prise en compte des logiques pénitentiaires dans la fonction de contrôle1374(*). Si les inspecteurs se plient à des contraintes administratives venant du ministère de la Justice, ils n'en soulignent pas moins les « problèmes de fond importants » affectant l'Hôpital. Sans remettre en cause son appartenance au ministère de la Justice, jugée « inévitable », ils suggèrent une étude approfondie afin de « rapprocher le plus possible le fonctionnement de l'hôpital de Fresnes d'un Centre Hospitalier général ». Quelques mois plus tard, l'IGAS publie un second rapport, moins médiatique, sur l'organisation de l'Hôpital. Si « l'équipement d'ensemble est satisfaisant » et le « personnel médical [...] nombreux », les inspecteurs relèvent des problèmes liés à sa « tutelle pénitentiaire » :

« Le directeur de l'hôpital n'a ni responsabilité, ni pouvoir [...] Ses responsabilités propres sont limitées aux délégations parcimonieuses données par le Directeur de la Maison d'arrêt de Fresnes [...] Il n'y pas d'instances de concertation hormis la commission médico-administrative [...] Sa conception et sa composition répondent à une organisation très hiérarchisée des services de soins. Un médecin-chef à fonction exclusivement administrative le dirige, sous l'autorité du directeur des prisons [....] L'opinion des médecins ne peut d'ailleurs s'exprimer, puisqu'il n'existe pas de commission médicale consultative comme dans les hôpitaux civils. Aucun dialogue ne peut s'instaurer avec la Direction, et aucune réflexion commune s'amorcer sur le fonctionnement de l'établissement »1375(*).

En outre, observe la mission, tous les médecins ne répondent pas aux conditions de qualification, d'autres vivent loin de leur lieu de travail (Nice par exemple) et leur présence est « éphémère » (un médecin n'effectue que 2h55 pour 208 exigibles, un autre 17h pour 522 vacations). L'hôpital, enfin, manque d'infirmières (douze postes ne sont pas pourvus) et a ainsi recourt a du personnel non habilité (surveillants manipulateurs radios ou brancardiers). En conclusion, l'IGAS propose de « banaliser l'Hôpital de Fresnes » en lui conférant « une réelle autonomie sous l'autorité plus lointaine du Directeur des prisons » et de doter l'établissement de davantage de moyens.

Le service d'inspection du ministère des Affaires sociales est sollicité peu de temps après pour un autre établissement ayant défrayé la chronique, l'Hôpital des Baumettes, qui est l'objet d'un rapport beaucoup plus alarmiste. Utilisée comme lieu d'hospitalisation pour tous les détenus du Sud-Est de la France, la PHB « ne possède aucunes des conditions qui justifieraient ce rôle »1376(*), estime l'IGAS, tant pour des raisons d'installation et d'équipements (pas de salle de réveil, manque de matériel, aseptisation de la salle d'opération pas assurée) que de personnel (« insuffisance manifeste tant sur le plan médical que para-médical, insuffisance quantitative et bien souvent qualitative ») ou d'organisation générale : « Les malades sont opérés sans que l'examen préalable et les bilans aient été appréciés à l'avance [...] La surveillance post opératoire immédiate est également perdue de vue [...] En fait, tout repose sur les internes [....] Inutile de souligner que cette organisation est absolument incompatible avec le fonctionnement d'un hôpital digne de ce nom »1377(*).

« Sous installé, sous équipé, sous médicalisé », l'Hôpital des Baumettes ne peut, selon les inspecteurs, continuer à fonctionner sans des transformations radicales, faute de quoi « mieux vaudrait fermer l'établissement qui présente le danger d'une fausse sécurité étant considéré par l'extérieur comme un véritable hôpital sans en posséder aucune des garanties »1378(*). Le rapport de l'IGAS provoque aussitôt la fermeture du bloc opératoire1379(*). Cette décision, source de nombreuses difficultés notamment financières pour l'Administration pénitentiaire, traduit selon un magistrat de la DAP l'impossibilité d'évaluer le milieu carcéral selon les mêmes normes que celles prévalant dans le reste du système de santé :

« L'IGAS est venue à la PHB faire un audit. Mais c'était dans les premiers temps, où ils ne connaissaient pas encore vraiment le milieu. Et puis le circuit du bloc opératoire n'était pas achevé. Il n'y avait pas de salle de réveil. Un petit problème. Il manquait juste quelques crédits. Mais Mme Ezratty recevant cela [le rapport], pour elle c'était de la dynamite ! Surtout Marseille. Alors elle s'est dit : "On ferme le bloc !". Et après on a fait X missions avec l'IGAS [...] Le problème, c'est que... L'IGAS après m'a dit : "Ah, mais si on avait su, on aurait peut-être pas dit qu'il fallait le fermer ou on l'aurait peut-être pas dit sur le même ton". Mme Ezratty a craint un scandale. "Si demain vous le ré-ouvrez et vous avez le décès d'un détenu au bloc, votre responsabilité est en cause". Alors, bon... Moi, on m'a envoyé faire des dizaines de missions de bons offices pour essayer de trouver une solution [...] Pour des choses, si vous voulez, qui auraient pu se faire dans cette structure là ! Mais si sous voulez, faute de comprendre... Parce que, l'IGAS c'était une de leurs premières missions. Si vous voulez, ils n'ont pas saisi. Ils ont écrit, ce qu'ils auraient écrit pour n'importe quel hôpital lambda. C'est plus des problèmes de communication, de compréhension. Plus de communication, je pense »1380(*).

Parallèlement à ces rapports ponctuels destinés à résoudre des situations considérées comme urgentes, l'IGAS conduit une mission plus générale, visant à réaliser un état des lieux de l'organisation sanitaire des prisons françaises et à formuler des propositions afin de « désenclaver la médecine pénitentiaire » (Le Monde, 10/02/1984). Tout projet de réforme semble d'ailleurs suspendu à ce rapport très attendu. En témoigne un échange de courrier entre les ministères de la Santé et de la Justice. En s'appuyant sur les conclusions du rapport sur l'Hôpital de Fresnes, le garde des Sceaux propose à Edmond Hervé, en octobre 1983, l'« assimilation de cet établissement ainsi que de l'hôpital prisons des Baumettes à Marseille, à des hôpitaux de la deuxième catégorie tout en tenant compte de leur vocation carcérale »1381(*). Le vote dune réforme hospitalière au printemps 1984 est proposé par le ministère de la Justice comme échéance. Dans sa réponse, le secrétaire d'Etat chargé de la Santé donne son approbation au projet mais semble plus réservé quant au calendrier proposé : « La mise au point des dispositifs réglementaires relatifs à l'organisation des soins nécessite des études et des concertations préalables, tout particulièrement en ce qui concerne le statut des personnels appelés à dispenser les soins. Dès que vos services auront été en mesure d'y procéder, il sera certainement possible de dégager des solutions concrètes, et mes services sont également prêts à collaborer à leur élaboration »1382(*). Une fois encore, la tutelle administrative exercée par la DAP sur les soignants pénitentiaires fait obstacle à une prise en charge hospitalière.

A partir de la visite de trente-trois établissements, l'IGAS recense, dans un rapport de synthèse publié en mai 1984, de façon très précise les dysfonctionnements de la médecine pénitentiaire. Les données statistiques sont jugées « imprécises et peu fiables », voire parfois « aberrantes ». En 1980, 1.553 femmes auraient par exemple subi un examen psychiatrique tandis que 2.205 auraient reçu un traitement pour ce motif1383(*). Outre l'absence de prévention, les inspecteurs notent le non-respect des horaires de service, le rôle médical exagéré confié aux surveillants et aux infirmières qui en découle, ainsi que les atteintes au secret médical. La gestion des médicaments est considérée comme « l'un des plus importants problèmes », en raison du peu d'établissements disposant d'un pharmacien gérant (une trentaine), de l'absence de contrôle et des mauvaises conditions de préparation des médicaments. Le rapport s'interroge longuement sur le statut des personnels sanitaires et notamment sur le manque d'attractivité des postes proposés. Rémunérés presque comme les attachés des hôpitaux, c'est-à-dire assez faiblement (de l'ordre de 60 francs de l'heure), « le recrutement des praticiens se fait par connaissance ou par reprise de clientèle. Il n'y a généralement pas de publication des postes ni aucune publicité » (p.108). Les étudiants en médecine sont faiblement motivés pour exercer en milieu pénitentiaire « où, quelque soit l'intérêt du travail, l'interne ne reçoit pas de formation réelle et n'acquiert pas de titre qui puisse lui servir ultérieurement ». Le difficile recrutement des infirmières s'explique par la faible rémunération mais surtout des conditions de travail souvent difficiles1384(*). De nombreuses infirmières sont amenées à démissionner1385(*). « Presque seule femme dans une population masculine, chargé d'une mission humanitaire, là où la finalité est la répression des fautes et la préoccupation majeure la sécurité, elle se sent souvent isolée, mal acceptée, mal comprise », relèvent les inspecteurs (p.122).

Constatant, en conclusion, que « mis à part quelques exemples, on tombe assez fréquemment au-dessous du minimum tolérable », le rapport propose une « banalisation des structures » afin de « réintégrer au maximum le dispositif dans les structures de soins banales » (p.131). L'idée d'une suppression des services de soin pénitentiaires, qui consisterait à « traiter intégralement les malades dans les établissements hospitaliers habituels », bien que considérée comme « la plus satisfaisante sur le plan de l'égalisation des soins », est qualifiée d'« utopique » du fait des problèmes de sécurité et de garde (p.132). Deux hypothèses sont alors proposées. La première, « la création d'établissements publics à l'image des établissements hospitaliers », est aussitôt écartée pour son coût et sa lourdeur. Le « rattachement des unités pénitentiaires à des hôpitaux publics existants dont elles constitueraient alors une annexe », deuxième hypothèse, bénéficie de la préférence des inspecteurs. Elle n'est cependant proposée qu'à des « unités de moyen séjour », telles que les « infirmeries » de Fresnes et des Baumettes, le terme hôpital leur étant désormais refusé, tandis que des conventions pourraient, d'autre part, être signées avec des hôpitaux pour les plus grands établissements afin d'avoir recours à du personnel hospitalier. Ce dispositif est en revanche exclu pour les prisons moins importantes, « où on peut se contenter d'une infrastructure plus limitée. Le recours à des médecins vacataires est de toute évidence la seule formule » 1386(*) (p.146).

Au cours de leurs nombreuses visites, et de leurs différents rapports, les inspecteurs de l'IGAS ont pu comprendre le fonctionnement de la médecine pénitentiaire et en tirer quelques conclusions. Ils ont tout d'abord relevé les nombreuses atteintes à la déontologie médicale qu'implique la tutelle de l'Administration pénitentiaire. Outre les atteintes au secret médical, l'IGAS interroge le rôle pénitentiaire que sont parfois amenés à exercer les praticiens, notamment en cas de recours à la contention, pratique beaucoup moins fréquente qu'auparavant mais encore présente dans quelques établissements1387(*). Si cette mesure est jugée « intolérable » par les inspecteurs, qui demandent sa suppression et proposent la mise en place de chambres capitonnées, c'est avant tout parce qu'elle « fait référence à une décision médicale »1388(*). La surprise des inspecteurs n'est d'ailleurs pas tant liée à l'existence de cette pratique qu'au fait que les praticiens pénitentiaires semblent l'accepter : « Curieusement d'ailleurs, beaucoup de médecins ne sont pas choqués par la contention jugée comme une nécessité, alors qu'elle n'est rien d'autre qu'une absence de considération des individus ». Le fait que l'exercice en milieu pénitentiaire, « notamment s'il se prolonge, [puisse] avoir une influence néfaste et supprimer tout terme de référence à un autre système qu'il paraît essentiel de maintenir »1389(*), est d'ailleurs présenté comme un argument important en faveur du « décloisonnement » des structures médicales pénitentiaires. En atteste une note adressée aux cabinets Santé et Justice par le Chef de l'IGAS :

« De façon plus fondamentale doit être posé le rôle du médecin dans les établissements pénitentiaires. Trop souvent l'Administration de ces établissements s'abrite derrière une décision "médicale" qu'elle sollicite pour justifier des situations qu'elle décide elle-même : il en est ainsi de la mise en contention des détenus. C'est une mesure plus coercitive que médicale [...] Cet exemple souligne bien la signification du décloisonnement de la médecine pénitentiaire et doit nous conduire [...] à délimiter le rôle de cette médecine »1390(*).

Non rendu public, le rapport de synthèse de l'IGAS fut d'ailleurs commenté par la presse essentiellement autour de l'idée de décloisonnement. « Désenclaver la médecine », titre La vie mutualiste d'avril 1984 tandis que Le Quotidien du médecin voit dans les propositions de l'IGAS un moyen de « sortir la médecine pénitentiaire de son "ghetto" », en accordant notamment la « liberté pour le médecin d'exercer en milieu carcéral et le droit pour le prisonnier de bénéficier de la médecine "hors prison" ». « Surtout, il faudrait éviter une médecine qui ne traiterait que les détenus », déclare Michel Lucas1391(*). « Il n'y a pas deux médecines : l'une pour la société civile, l'autre pour le monde carcéral », proclame la directrice de l'Administration pénitentiaire, qui voit dans l'organisation des CMPR « un excellent modèle pour la réorganisation de la médecine pénitentiaire »1392(*).

Si cette politique de « décloisonnement » réalise un consensus au sein de l'espace public, elle se heurte en revanche à des divergences d'interprétation entre les ministères. Trois éléments conduisent à un blocage de la proposition de l'IGAS « que le service public hospitalier assure également les soins aux détenus », qui a pourtant reçu l'accord de la Direction des Hôpitaux1393(*). En premier lieu, le ministère de la Santé conditionne la réalisation de conventions entre les hôpitaux et les prisons à une réorganisation du statut des personnels sanitaires et demande, pour cela, « une étude approfondie en vue d'aboutir à la définition d'un statut unifié [...] L'étude doit envisager également les conditions de la participation du personnel pénitentiaire à l'organisation des soins, la formation à ces tâches et la reconnaissance d'une qualification »1394(*).

Le ministère de la Justice ne semble d'ailleurs pas, en second lieu, disposé à se dessaisir du contrôle qu'il exerce sur les médecins. Si la DAP est très favorable au « décloisonnement », c'est notamment parce qu'elle y voit un moyen de résoudre les problèmes auxquels elle se trouve confrontée en matière d'hospitalisation des détenus. La signature de convention avec des établissements hospitaliers représente pour elle, en effet, l'opportunité d'assurer « l'accueil et le traitement par l'hôpital le plus proche, des détenus ne pouvant pas être soignés sur place, ni dirigés sur l'Hôpital des prisons de Fresnes »1395(*). Mal acceptés par les services de police et les équipes hospitalières, les transferts de détenus seraient ainsi facilités par la mise en place, dans chaque région pénitentiaire, de services de sûreté comme ceux déjà existant à Bordeaux, Marseille et Paris. Le ministère de la Justice est en revanche plus réservé quant à la création d'« unités de soins médicaux », comme le propose l'IGAS, dont le médecin-chef et le personnel médical et paramédical disposeraient d'un statut hospitalier, échappant ainsi au contrôle de la DAP1396(*).

Enfin, troisième source de blocage, le « décloisonnement » se heurte à un problème de crédits. La réforme du système de financement est d'ailleurs présentée par l'IGAS comme allant de pair avec la réforme de la protection sociale, au moins pour les détenus placés dans des établissements à vocation sanitaire comme Fresnes : « Il va de soi que la banalisation du dispositif ne va pas sans une banalisation des modes de financement et le retour au mode de protection sociale générale : Sécurité sociale pour certains, aide médicale pour d'autres »1397(*). Si la transformation de Fresnes en établissement public hospitalier, vivement souhaitée par l'Administration pénitentiaire1398(*), recueille l'assentiment de la Direction des Hôpitaux, elle se heurte cependant au refus de la Direction de la Sécurité sociale. C'est ce que constate en 1993 un bilan de la mise en oeuvre des suggestions de l'IGAS : « Concernant le financement par la Sécurité sociale, un groupe de travail consacré à ce point fut institué mais n'aboutit pas, dans les années qui suivirent le rapport, sur une intégration des détenus dans le système de protection sociale de droit commun »1399(*). C'est en raison d'une opposition de la DSS que l'affiliation des détenus aurait été écartée1400(*), si l'on en croit ce magistrat ayant représenté la DAP au sein de ce groupe de travail :

« En 84-85, la volonté du ministère de la Justice, c'était d'aligner l'hôpital de Fresnes sur un hôpital lambda. Avec une seule spécificité, c'est que tous les malades étant détenus, il y avait la nécessité d'une sécurité... Et à l'époque la Sécurité sociale a dit niet. Je m'en rappelle, le directeur de la Sécurité sociale a dit niet. Ça pouvait paraître scandaleux. C'était une goutte d'eau l'Hôpital de Fresnes par rapport aux hôpitaux nationaux. Mais il y avait des gens comme ça... c'étaient des énarques : "Non, ça c'est nos budgets !" »1401(*).

La remarque finale de l'interviewé souligne une nouvelle fois la difficile collaboration entre hauts fonctionnaires n'appartenant pas au même corps. Magistrats de l'Administration pénitentiaire et administrateurs civils peinent à s'accorder. Par conséquent, « faute dans l'immédiat de pouvoir retenir la solution du financement par la Sécurité sociale dont le principe est loin d'être acquis et dont la négociation retarderait considérablement la réforme envisagée », le financement de la santé des détenus demeure à la charge du ministère de la Justice1402(*).

Du fait de ces trois obstacles (problèmes statutaires et déontologiques, réticences de la DAP à déléguer la responsabilité des soins, difficultés budgétaires), les propositions de l'IGAS « ne furent que très partiellement mises en oeuvre » : « Le recrutement, la gestion et la rémunération des personnels continuèrent à être assurés par l'Administration pénitentiaire. Le projet de comités de santé dans chaque établissement ne recueillit pas l'assentiment des principaux acteurs et ne fut pas mise en oeuvre [...] Aucune politique d'évaluation ne fut véritablement mise en oeuvre »1403(*). Près d'un an après l'annonce par Robert Badinter du « décloisonnement » des services de santé aux détenus, aucune transformation concrète n'a encore eu lieu : « Vous avez dit réforme de la médecine pénitentiaire ? [....] La médecine pénitentiaire aurait changé de tutelle, passant de la Justice à la Santé ? Il n'en est rien sur le terrain [...] La situation sanitaire carcérale reste toujours l'otage de l'Administration des prisons »1404(*). Pourtant la réforme de l'Hôpital de Fresnes est en cours, notamment du fait de la présence du médecin-coordinateur Pierre Espinoza. Celui-ci avait été nommé en 1983 suite à la suppression du poste de Médecin-inspecteur1405(*). Après plus d'un an passé à observer le fonctionnement de la M.A de Fresnes où il exerce également, il décide d'alerter le ministère de la Justice sur l'urgence d'une réforme. Bien que convaincu qu'un transfert de tutelle devrait concerner l'ensemble de la médecine pénitentiaire, le Dr Espinoza ne propose alors que la réforme de l'Hôpital de Fresnes qui concentre de nombreux problèmes :

« En septembre [1984], pendant trois jours, je m'enferme dans mon bureau et je rédige un rapport pour dire que tant qu'on envisage pas un statut à cette structure, ça n'irait pas ! [...]Ma vie quotidienne en tant que médecin était alors complètement invivable. Je me confrontais à toutes les difficultés institutionnelles de la prison hôpital. En un an j'ai compris à quel point c'était compliqué. Il fallait là vraiment un changement structurel [...] Entre trois ou quatre statuts d'infirmières très différents, des médecins pour la plupart à temps très partiel... J'ai par exemple réussi à faire arrêter de travailler un urologue qui était fou. Un beau matin, il vient me voir. Il était dans une déchéance physique majeure. Totalement alcoolisé ! [...] Il y en a un qui était chef de service en même temps à l'hôpital de Montfermeil ! Comment pouvait t-il en même temps être médecin à Fresnes et chef de service à Montfermeil ? Ben c'est simple, il arrivait le vendredi à 10h30 et il repartait à 11h30 et le reste du temps il n'était pas là. Le second médecin, il était davantage là mais il était incompétent... [...] Alors y avait des détenus qui avaient accès aux dossiers médicaux. Ils faisaient également la réception des courriers des détenus voulant voir un médecin [...] Dans le passé, il y avait eu des histoires. Il y avait un détenu qui avait posé une demande de grâce médicale en utilisant la copie d'un dossier médical d'un autre patient. De plus on interdisait au médecin, quand un détenu était extrait pour l'Hôpital, de donner le jour et l'heure. Sauf que c'était écrit dans les dossiers médicaux qui étaient dans les mains des détenus ! C'était aberrant ! [...] Des surveillants étaient bombardés du jour au lendemain infirmiers. C'était totalement illégal pour eux de faire des injections ou de distribuer des médicaments. C'était une multiplicité de dysfonctionnements [...] En plus, il n'y avait pas de secrétaire médical. Il y avait des surveillants avec des blouses blanches. Il y avait des détenus et moi je me suis demandé à un moment s'il fallait continuer à travailler dans ce système-là [...]

Le problème, c'est que le directeur de l'Hôpital de Fresnes a à la fois une casquette de directeur d'hôpital et de directeur de prison [...] En un an, j'ai compris à quel point c'était compliqué. Il fallait là vraiment un changement structurel ! J'ai écrit ce rapport que j'ai envoyé au directeur de l'Administration pénitentiaire et au garde des Sceaux [...] Le vrai problème était le changement de tutelle. La première fois que j'ai proposé dans un rapport la mise sous tutelle de l'Hôpital de Fresnes du ministère de la Santé, c'était à la fin des années 85. Ça s'est passé par un rapport qui est monté tout là-haut, là-haut. Je pensais la même chose pour la prison de Fresnes mais c'était beaucoup plus compliqué parce que les détenus dans la prison ne sont pas des malades. Sauf, qu'ils sont dix fois plus malades que la population générale. Il n'y avait pas de levier suffisamment fort à ce moment-là pour pouvoir enclencher un transfert de tutelle des infirmeries des prisons »1406(*).

Initialement prévu pour la réforme hospitalière du printemps 1984, le changement de statut des infirmeries de Fresnes et des Baumettes en établissement hospitalier ne prend forme que durant le second semestre 1984. Un projet de règlement intérieur est soumis à l'IGAS durant l'été 1984. Le ministre de la Justice profite, le 17 décembre, du débat sur les « diverses dispositions d'ordre social » pour intégrer au Sénat deux amendements visant au « décloisonnement de la médecine en milieu carcéral »1407(*). L'article 66 de la loi du 3 janvier 1985, venant modifier la loi hospitalière du 31 décembre 1970, prévoit qu'« un ou plusieurs établissements d'hospitalisation publics peuvent être spécifiquement destinés à l'accueil des personnes incarcérées », tandis que l'article 67 permet au personnel paramédical déjà en place de prétendre au statut hospitalier. Le décret n°85-1392 du 27 décembre 1985 place enfin l'hôpital de Fresnes sous la double tutelle de la Chancellerie et du secrétariat d'Etat à la Santé, le transformant ainsi en établissement public d'hospitalisation des détenus. « Un petit pas, mais une première avancée vers l'intégration et la mise à niveau de la médecine carcérale dans le système "civil", géré par l'Assistance publique », commente La Croix en février 1986, à l'occasion de l'inauguration de l'Hôpital : « Pour formelle qu'elle soit, la cérémonie symbolise l'une des dernières grandes réformes de Badinter (loi du 3 janvier 1985) qui vise à intégrer la médecine pénitentiaire dans le système hospitalier général » (LM, 21/02/1986). « Notre ambition est d'assurer la même qualité de soin que dans un hôpital général », déclare le Dr Espinoza présentant le nouvel équipement (laboratoire d'analyses, salle de radiologie, bloc opératoire, service d'hémodialyse) et les nouvelles instances réglementaires (conseil d'administration, commission médicale d'établissement, etc). Les conditions dans lesquelles cette réforme fut adoptée, racontées ici par la directrice de l'Administration pénitentiaire, contrastent pourtant fortement avec la volonté de réforme affichée alors par le ministère de la Justice :

« Alors la Santé encore ne disait trop rien. Ils n'étaient pas ravis mais enfin ils ne disaient trop rien. Mais c'étaient les Finances qui ne voulaient pas qu'on crée une nouvelle catégorie d'établissement public. Alors le cabinet était intervenu. On avait préparé un texte pour mettre dans un wagon de ces mesures que le conseil constitutionnel ne veut plus, vous savez les petits ajouts dans les lois. Il fallait accrocher ce paragraphe dans une loi de santé publique, une des lois sociales. Alors ça commençait très mal car les Finances sont quand même plus robustes que la Justice et la Santé. Et le texte était très long... On avait été débarqué à l'Assemblée nationale et le Sénat adorait à l'époque les séances de nuit parce que c'était payé double. Je reçois un coup de fil. On me dit : "Le texte passe ce soir, probablement après 20 heures". Moi, j'avais été au concert avec ma famille, je les avais mis au perchoir et le texte est passé vers minuit ou une heure du matin. Il n'y avait personne des Finances, on était tout seul. Je passe ma fiche et le matin, je vous dis pas, ils étaient furax les Finances... Mais c'était passé. Le problème, c'est que ce sont des petites choses et ça arrive souvent quand on présente un texte qu'on perde des choses. Mais il est passé. Je ne sais pas du tout ce qui se serait passé si les Finances avaient envoyé quelqu'un... »1408(*).

Au-delà de cette apparente « normalisation », l'organisation des soins en prisons demeure frappée de nombreuses contraintes pénitentiaires comme en témoigne l'Hôpital de Fresnes. « Avant d'être un centre médical, l'hôpital de Fresnes est d'abord une prison » souligne La Croix tandis que Le Monde observe que « l'hôpital de Fresnes [...] se veut hôpital, mais reste avant tout prison ». L'hôpital de Fresnes n'échappe en effet pas à la tutelle pénitentiaire, le décret du 27 décembre 1985 considérant que l'« établissement [est] considéré comme un établissement pénitentiaire ». Son directeur est, certes, nommé par les ministères de la Justice et de la Santé mais il s'agit d'un fonctionnaire de l'Administration pénitentiaire. La commission médico-administrative est, d'autre part, présidée par le directeur de l'Administration pénitentiaire1409(*). Interrogée sur ce mode de fonctionnement particulier, la directrice de l'Administration pénitentiaire s'étonne : « Il faut être réaliste. Evidemment, on peut dire "Fresnes est un hôpital comme un autre", mais c'est impossible. C'est pour ça que le statut était tout à fait spécial »1410(*).

La forte publicité consacrée aux premiers rapports de l'IGAS traduit la légitimation dont en attend le ministère de la Justice. En favorisant l'émergence d'un consensus autour de la définition de la politique sanitaire en prison, l'IGAS semble avoir contribué à faire taire le « scandale » de la médecine pénitentiaire. Rares sont d'ailleurs les articles de presse critiques à ce sujet à partir de 1986. Pourtant, tout en légitimant au sein de l'espace public le ministère de la Justice, les contrôles effectués par les services de la Santé contribuent à la mise à l'agenda administratif d'une réforme de la médecine pénitentiaire en soulignant son état critique. En ouvrant les portes des prisons aux inspecteurs de santé publique, le Conseiller technique du garde des Sceaux espérait peut-être, comme le suggère ce magistrat, développer un intérêt et une préoccupation au sein du ministère de la Santé pour la question carcérale, pouvant à terme déboucher sur une réforme de plus grande envergure :

« Je pense qu'il y avait à l'époque une arrière-pensée un peu politique [...] Sur le plan pratique, l'objectif c'était de faire apparaître les incohérences. Mais quand vous faites apparaître ces incohérences, vous devez être en mesure de dire : "On a les moyens pour y remédier !". Mais ces moyens, on savait bien qu'on n'allait pas les avoir comme ça du jour au lendemain ! Alors l'arrière pensée je crois de Jean Favard, c'est qu'il espérait qu'au bout d'un certain temps... et il y avait cette idée au ministère de la Justice, qu'elle soit tacite ou explicite... c'était de passer le relais de la gestion au ministère de la Santé »1411(*).

L'extension du contrôle aux services déconcentrés de la Santé ou la création d'un comité de coordination interministérielle en matière de prise en charge médicale des détenus participent de cette stratégie. Jusque-là non questionnées, les spécificités carcérales se trouvent soudainement mises à l'épreuve aux normes prévalant à l'extérieur après le transfert de l'inspection médicale aux services déconcentrés du ministère de la Santé.

* 1329 FARGEAS Colette, Détenus-Médecine-Prison. Analyse sociologique d'une infirmerie de prison, thèse de médecine, université de Limoges, 1987, p.29.

* 1330 Note de Philippe Chemithe au DAP datée du 12/11/1982 (CAC 19940511. Art. 98).

* 1331 Lettre de Jean Favard à Yvan Zakine datée du 11/05/1982 (CAC. 2002055. Art .1).

* 1332 Lettre de Jean Favard à Yvan Zakine datée du 21/05/1982 (CAC. 2002055. Art .1).

* 1333 Yvan Zakine a attiré notre attention sur les conséquences qui ont découlé de l'ouverture d'un concours « externe » pour les directeurs d'établissement, permettant l'arrivée de nombreux étudiants à cette fonction.

* 1334 Lettre du directeur du CP de Fleury-Mérogis au Bureau des personnels datée du 3/11/1986 (CAC. 199405111. Art.90).

* 1335 Lettre du Procureur général de Pau au surveillant-chef de la M.A de Pau datée du 16/08/1976 (CAC. 19940511. Art. 97).

* 1336 Lettre du Procureur général de Pau au surveillant-chef de la M.A de Pau datée du 27/01/1982 (CAC. 19940511. Art. 97).

* 1337 Cf. Introduction du Chapitre 3 - Section 1 : « La réhabilitation d'un secteur d'action publique discrédité ».

* 1338 Relevés manuels des dates et heures de visite du médecin de la M.A de Vesoul. CAC. 199405111. Art.90.

* 1339 Ce praticien n'effectuait ainsi qu'environ 60 heures par an au lieu des 485 qui lui étaient payées, faisant de l'activité de médecin pénitentiaire quelque chose de relativement rémunérateur.

* 1340 Note du surveillant-chef de la M.A de Vesoul au Bureau du personnel du 17/01/1980. CAC.199405111. Art.90.

* 1341 Jacques, magistrat chargé de la réglementation sanitaire de 1982 à 1989. Entretien réalisé le 11/01/2008, 3H30.

* 1342 Note du chef du Bureau des personnels au DRSP de Toulouse datée du 30/10/1985 (CAC.19940511. Art. 97).

* 1343 Note de P. Chemithe au chef du Bureau des personnels datée du 30/10/1985 (CAC.19940511. Art. 97).

* 1344 Tout établissement est tenu par le règlement de noter sur un registre l'heure d'arrivée et de départ de chaque personne pénétrant dans son enceinte.

* 1345 Dossier de carrière d'un cardiologue de la M.A de Nice (CAC. 19950511. Art.89).

* 1346 Lettre du DRSP de Lyon au Bureau du personnel datée du 9/10/1983 (CAC.199405111. Art.90).

* 1347 Lettre du Bureau du personnel à Philippe Chemithe datée du 7/03/1983 (CAC. 19940511. Art.87).

* 1348 Lettre du Chef d'établissement de la M.A de Saverne au DRSP de Strasbourg datée du 10/03/1983 (CAC.19940511. Art.95)

* 1349 Lettre du Chef des services d'inspection au Bureau du personnel datée du 24/03/1983 (CAC.19940511. Art.87).

* 1350 La médaille pénitentiaire est une distinction honorifique décernée par la DAP à ses membres les plus méritants.

* 1351 Note de Solange Troisier au DAP concernant la MA de Metz datée du 19/04/1979 (CAC 19940511. Art. 96).

* 1352 Note de service du DRSP de Strasbourg à la DAP datée du 6/05/1983 (CAC 19940511. Art. 96).

* 1353 Note de P. Chemithe au Chef du Bureau du personnel datée du 19/06/1983 (CAC 19940511. Art. 96).

* 1354 La circulaire n°25 de Myriam Ezratty adressée aux directeurs régionaux et directeurs d'établissements pénitentiaires le 27/09/1985 limite à trois ans renouvelables la durée des fonctions de médecine pénitentiaire (Archives internes DAP)

* 1355 Lettre du DRSP de Lille au médecin du CD de Loos datée du 4/02/1987 (CAC. 19940511. Art.92).

* 1356 Lettre de la DAP au médecin généraliste de la M.A de Nice datée du 1/12/1983 (CAC. 19940511. Art.87).

* 1357 Outre le non-respect de leurs horaires, il faut souligner également que certains médecins effectuaient les examens médicaux d'aptitude des candidats aux fonctions de surveillant, pour lesquels ils étaient spécifiquement rémunérés, sur le temps normalement consacré à la visite des détenus. C'est ce que constate le rapport de l'IGAS au sujet du médecin-chef de la M.A de Pontoise qui ainsi « ne réserve guère plus de 3 minutes d'examen pour chaque détenu » (REYNES, GREGOIRE, TCHERIATCHOUKINE, Rapport sur la maison d'arrêt de Pontoise, octobre 1984, Rapport de l'IGAS n°19840133, p.6).

* 1358 Lettre de démission du médecin de la M.A Dunkerque datée du 20/11/1985 (CAC.19940511. Art. 96).

* 1359 Lettre du directeur du CD de la réunion au Bureau du personnel datée du 3/05/1984 (CAC. 19950511. Art.89).

* 1360 Lettre du médecin de la M.A de Châlons-sur-Marne au Bureau du personnel datée du 8/05/1985 (CAC. 19950511. Art.89).

* 1361 Lettre du médecin du CD Melun au Bureau du personnel datée du 10/03/1988 (CAC.19950511. Art.89).

* 1362 Lettre du médecin de la M.A de Chalons sur Saône au Bureau du personnel datée du 23/12/1982 (CAC. 199405111. Art.90).

* 1363 Jacques, magistrat chargé de la réglementation sanitaire de 1982 à 1989. Entretien réalisé le 11/01/2008, 3H30.

* 1364 Compte-rendu de la session d'information du 10 décembre 1987 « Soins et hygiène en milieu carcéral », 24 pages ronéotypée. Archives internes DGS.

* 1365 Jérôme, généraliste puis médecin-chef aux Baumettes de 1979 à 1983. Entretien réalisé le 24/02/2006, 1H50.

* 1366 Jean Favard, magistrat à la DAP de 1970 à 1975 puis Conseiller technique du ministre de la Justice de 1981 à 1986. Entretien réalisé le 10/01/2008, durée: 3H00.

* 1367 Jacques, magistrat chargé de la réglementation sanitaire de 1982 à 1989. Entretien réalisé le 11/01/2008, 3H30.

* 1368 Note du Bureau des méthodes et de la réinsertion à l'attention du Bureau des personnels datée du 3/01/1984 (CAC.19940511. Art.87).

* 1369 Note de Philippe Chemithe, Chef de l'inspection des services pénitentiaires, au directeur de l'Administration pénitentiaire du 3/03/1983. Archives internes DAP.

* 1370 Lettre de la DAP, Myriam Ezratty, au Chef de l'IGAS du 18/09/1984. Dossier C3 Inspections médicales. Archives internes DAP.

* 1371 Aucun des membres de l'IGAS n'a pu être interviewé. Celui qui fut le plus chargé de ces questions alors, le Dr Tchériatchoukine fut contacté téléphoniquement mais n'a pu être rencontré pour des raisons pratiques.

* 1372 AVRIL J., TCHERIATCHOUKINE Jean, Rapport sur l'hôpital de Fresnes, Rapport IGAS, juin 1983.

* 1373 Favard Jean, magistrat à la DAP de 1970 à 1975 puis Conseiller technique du ministre de la Justice de 1981 à 1986. Entretien réalisé le 10/012008, 3H00.

* 1374 Cf. Annexe 27 : « L'anesthésiste et le chirurgien : la prise en compte par l'IGAS des contraintes pénitentiaires ».

* 1375 AVRIL J., TCHERIATCHOUKINE Jean, Rapport sur l'hôpital des prisons de Fresnes, op.cit, pp.7-9.

* 1376 BROYELLE Jean, TCHERIATCHOUKINE Jean, Rapport sur l'hôpital des prisons de Marseille, Rapport IGAS, janvier 1984, n°1984001, p.3.

* 1377 Ibidem, pp.16-17.

* 1378 Ibidem, p.25.

* 1379 Circulaire DAP du 24/01/1984 relative aux hospitalisations à la prison hôpital des Baumettes.

* 1380 Jacques, magistrat chargé à la DAP de la réglementation sanitaire de 1982 à 1989. Entretien réalisé le 11/01/2008, 3H30 (Souligné par nous).

* 1381 Courrier du garde des Sceaux à Edmond Hervé, secrétaire d'Etat chargé de la Santé, du 18 octobre 1983 (CAC. 19950151 Art.6. Archives de Jacques Roux, Directeur général de la santé : médecine pénitentiaire).

* 1382 Courrier d'Edmond Hervé à Robert Badinter, garde des Sceaux, du 17 novembre 1983 (CAC. 19950151 Art.6)

* 1383 BROYELLE Jean, AVRIL J., TCHERIATCHOUKINE Jean, Rapport sur les problèmes de santé dans les établissements pénitentiaires, Rapport IGAS, mai 1984, n°1984060, p.6

* 1384 Cf. Annexe 28 : « Entre surmenage et lassitude, portraits de trois infirmières pénitentiaires exerçant dans les années quatre-vingt ».

* 1385 28 postes d'infirmières furent pourvus par concours de 1978 à 1979, contre 82 cessations de fonction, dont 55 par démission, au cours de la même période (FAVARD Jean, Le Labyrinthe pénitentiaire, op.cit., p.54).

* 1386 Souligné par nous.

* 1387 Cf. Chapitre 1, section 2-1 : « La dénonciation par les militants de la cause carcérale de la prise en charge médicale des détenus ».

* 1388 BROYELLE Jean, AVRIL J., TCHERIATCHOUKINE Jean, Rapport sur les problèmes de santé, op.cit., p.54.

* 1389 Ibidem, p.138.

* 1390 LUCAS Michel, « Note relative à la médecine pénitentiaire », 15/12/1983, 5 pages (CAC. 19950151 Art.6).

* 1391 « Pour une médecine pénitentiaire plus libre », Le Quotidien du médecin, 13/02/1984.

* 1392 « Pour Myriam Ezratty, directrice de l'administration pénitentiaire : "Il n'y a pas deux médecines : l'une pour la société civile, l'autre pour le monde carcéral" », Panorama du médecin, 1984.

* 1393 Il est prévu une distinction entre « établissements d'une certaine importance » qui seraient dotés d'une « unité de soins médicaux » dans laquelle les soins seront assurés par du personnel doté du statut d'agent public : médecin directeur responsable de l'unité, personnel médical, para-médical et social ». Et, d'autre part, des établissements « de moindre importance » où le personnel médical serait vacataire et un personnel paramédical de statut public (DGS, « Note sur l'organisation de la médecine pénitentiaire », document non daté (CAC. 19950151 Art.6).

* 1394 DGS, « Note sur l'organisation de la médecine pénitentiaire », document non daté (CAC. 19950151 Art.6).

* 1395 DAP, « Note sur la prise en charge hospitalière des détenus », 2/04/1984, 10 pages (CAC. 19950151 Art.6).

* 1396 DGS, « Note sur l'organisation de la médecine pénitentiaire », document non daté (CAC. 19950151 Art.6).

* 1397 BROYELLE Jean, AVRIL J., TCHERIATCHOUKINE Jean, Rapport sur les problèmes de santé, op.cit., p.137.

* 1398 Courrier de Myriam Ezratty à Jacques Roux, DGS, du 11 avril 1984 (CAC. 19950151 Art.6).

* 1399 DAP, « Synthèse du rapport sur les problèmes de santé dans les établissements pénitentiaires », document ronéotypé de la bibliothèque DAP, 1993.

* 1400 La DSS s'oppose à l'application de la loi du 29 janvier 1975 prévoyant l'immatriculation de tous les détenus aux assurances maladie et maternité du régime général au nom de l'article D.380 du CPP qui prévoit la gratuité des soins prise en charge par la DAP. Interrogé sur cette question, le Conseil d'Etat confirme dans un avis du 10/06/1986 que cet article rend impossible la mise en oeuvre de la réforme de 1975. Cet avis du Conseil d'Etat sera mis en avant par la DSS jusqu'à la réforme de 1994 qui modifiera l'article D.380 du CPP.

* 1401 Jacques, magistrat chargé de la réglementation sanitaire de 1982 à 1989. Entretien réalisé le 11/01/2008, 3H30.

* 1402 DAP, « Note sur la prise en charge hospitalière des détenus », 2/04/1984, 10 pages (CAC. 19950151 Art.6).

* 1403 DAP, « Synthèse du rapport sur les problèmes de santé...», document ronéotypé, bibliothèque DAP, 1993.

* 1404 « Médecine pénitentiaire : la réforme est toujours à venir», Le Quotidien du médecin, 24/10/1984.

* 1405 Interniste, gastro-entérologue et urgentiste à l'APHP, Pierre Espinoza exerce alors en tant que médecin généraliste remplaçant en banlieue parisienne. Faute d'être praticien hospitalier à l'APHP, il envisage d'ouvrir son cabinet en tant que gastro-entérologue avant d'accepter en 1983 le poste de médecin-coordinateur à l'Hôpital de Fresnes.

* 1406 Pierre Espinoza, chef de service de l'Unité de soins intensifs de l'Hôpital de Fresnes de janvier 1983 à septembre 1991. Entretiens réalisés le 16/05/2006, le 31/05/2006 et le 22/04/2008. Durées :1H45, 2H00 et 1H50.

* 1407 « Un vrai hôpital pour les détenus », Libération, 19/12/1984.

* 1408 Myriam Ezratty, magistrate et directrice de la DAP d'avril 1983 à juillet 1986. Entretien le 8/02/2008, 3H30.

* 1409 REYNES, GREGOIRE, TCHERIATCHOUKINE, Note concernant les règlements intérieurs des Hôpitaux des prisons de FRESNES et des BAUMETTES de MARSEILLE, Rapport IGAS, septembre 1984, n°19840124, 12p.

* 1410 Myriam Ezratty, magistrate et directrice de la DAP d'avril 1983 à juillet 1986. Entretien le 8/02/2008, 3H30.

* 1411 Jacques, magistrat chargé de la réglementation sanitaire de 1982 à 1989. Entretien réalisé le 11/01/2008, 3H30.

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