WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Dynamique professionnelle et transformations de l'action publique. Réformer l'organisation des soins dans les prisons françaises. Les tentatives de spécialisation de la « médecine pénitentiaire » (1970-1994).

( Télécharger le fichier original )
par Eric FARGES
Université Lyon 2 - Sciences Po - THESE EN SCIENCES POLITIQUES 2013
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2. L'arrivée de médecins-chefs réformateurs : une même médecine entre le dedans et le dehors ?

Au milieu des années quatre-vingt, l'Administration pénitentiaire prend progressivement conscience, au vu du faible taux d'assiduité des praticiens, que le régime de vacations sous lequel sont placés les généralistes est insatisfaisant. Décision est prise de nommer à la tête des principaux établissements (Fleury-Mérogis, Fresnes et Marseille bien que plus tardivement) des médecins-chefs exerçant à temps plein ou à mi-temps. Exerçant jusqu'alors à temps partiel, les médecins-chefs n'étaient en effet pas en mesure d'assurer correctement le fonctionnement des infirmeries, en contrôlant par exemple l'assiduité des praticiens. En créant des postes de médecins-chefs stables et reconnus, l'Administration espère, souligne un magistrat de la DAP ayant procédé à ces embauches, pallier les dysfonctionnements les plus importants de l'organisation des soins :

« C'est-à-dire que dans ces grandes Maisons d'arrêt, on voulait un point fixe. Un point fixe, ça voulait dire un médecin qui ne soit pas vacataire et qui puisse avoir une rémunération correcte [...] Et c'est vrai qu'à partir du moment, où [le médecin-chef] était là, [il] commençait à voir les dysfonctionnements. Et puis, ne serait-ce que pouvoir tenir des réunions. Tenir des réunions avec les chefs d'établissements ou avec sa propre équipe. C'était impossible pour les fameux médecins. C'étaient des passages éclairs [...] On restait dans l'ancien système. Mais un système rénové. Et puis la présence d'un médecin-coordinateur permettait de faire le ménage si je puis dire... entre ceux qui assuraient leurs vacations et puis les fumistes. Et ça permettait de redistribuer un peu les vacations»1789(*).

C'est dans le cadre de cette rénovation que Jacqueline Tuffelli est nommée en 1986 médecin-chef des prisons de Fresnes ou encore que Xavier Emmanuelli devient médecin-chef de Fleury-Mérogis en 1988. Ces médecins, bien que n'appartenant pas au milieu hospitalier proprement dit, tentent d'instaurer de nouvelles règles du jeu afin de rapprocher la médecine pénitentiaire, dont ils refusent l'appellation, de la pratique médicale en milieu libre. Ils militent pour une nouvelle organisation des soins et participent à ce titre à la réforme de 1994.

En 1986, le Centre pénitentiaire de Fresnes, dont le fonctionnement reposait jusqu'alors uniquement sur la présence de personnel infirmier et de quelques internes de garde, se restructure suite à l'autonomisation de l'Hôpital de Fresnes. L'établissement, qui accueille alors près de 3.500 détenus, doit désormais se doter d'un médecin-chef. Après avoir effectué des remplacements dans des quartiers d'Ile-de-France difficiles, Jacqueline Tuffelli, qui souhaitait depuis plusieurs mois travailler en milieu carcéral, accepte la direction du service médical avec l'adoubement du directeur qui lui laisse « carte blanche »1790(*). Elle est aussitôt surprise par le fonctionnement de l'infirmerie, même si elle ne « s'attendai[t] pas à ce que ce soit l'Hôpital américain » :

« Il y avait un vieil infirmier, un vieil infirmier au sens où il était près de la retraite et puis ensuite, il avait effectué une grande partie de sa carrière comme infirmier à Fresnes. Il s'occupait de tout ! Il était assisté d'un surveillant-chef pénitentiaire qui faisait fonction d'infirmier. Et à eux deux, [prend un ton grave] et à eux deux... C'est eux qui s'occupaient de la santé en prison [...] Ce qu'on peut dire, c'est que franchement, en gros, les soins étaient donnés majoritairement et par le personnel pénitentiaire, et par les détenus. Bien sûr les diagnostics étaient faits par un médecin mais c'est les surveillants qui organisaient les consultations et qui faisaient parfois les injections. C'étaient eux qui parfois faisaient des soins [...] Avant, c'est une chose incroyable... Il y avait des détenus qui assistaient aux consultations comme secrétaires. C'était incroyable ! C'était quelque chose d'absolument invraisemblable ! ».

La nouvelle médecin-chef modifie aussitôt certaines dispositions : elle décentralise la gestion des dossiers médicaux au niveau de chaque unité de détention et instaure la visite quotidienne au quartier disciplinaire, seulement bi-hebdomadaire dans le CPP. Elle multiplie les extractions en milieu hospitalier et tente surtout de limiter le recours aux détenus en obtenant du directeur de Fresnes l'embauche de nouveaux personnels sanitaires, souvent obtenus au prix de lourds efforts :

« Et tout ça a progressivement disparu. On a sorti les détenus des consultations. Progressivement, on a gagné du terrain, je dirais. Mais on a gagné du terrain petit à petit parce que pendant qu'on éloignait, d'une part, les détenus et, d'autre part, les surveillants du service médical, il fallait en même temps les remplacer par du personnel médical. Alors pendant longtemps... Au fil de ces dix-sept ans, ça a été une longue politique de recrutement. C'était la bagarre année après année ! On peut pas dire qu'on a obtenu ça facilement... ».

Conscient de ces problèmes, le directeur de l'établissement réussit à obtenir l'affectation de deux infirmières détachées de l'Assistance publique. Interviewées, elles confirment les nombreuses transformations que le nouveau médecin-chef a introduites dans le fonctionnement du service médical. « Tout a été mis en route à son arrivée. Elle a fait un travail formidable », s'exclame cette infirmière qui souhaitait alors « quitter le milieu hospitalier pour voir autre chose »1791(*). « Mme Tuffelli est arrivée à Fresnes et a commencé à tout réorganiser [...] On a vu petit à petit les dossiers être fermés dans les placards et les [détenus] classés disparaître. Elle avait vraiment une grande force de caractère. Il fallait être très costaud avec la Pénitentiaire », confirme Laurence qui à la sortie de l'école d'infirmière est arrivée à Fresnes car elle ne « voulai[t] pas être à l'hôpital »1792(*). Malgré sa ténacité, le Dr Tuffelli se heurte à plusieurs contraintes qui rendent difficile la remise en cause de règles en place depuis fort longtemps. La mise à disposition de préservatifs, lancée à son initiative, prend rapidement fin. La distribution des psychotropes sous forme de fioles demeure en l'état faute de personnels suffisants : « C'était complètement idiot mais... Mais c'était comme ça ! Oui, c'était comme ça ! [...] Pour supprimer tout ça, il fallait une pharmacie sur place, des infirmières qui distribuent. Bref, toute une organisation qu'on n'avait pas avant... »1793(*).

Au-delà des transformations dans le fonctionnement de l'infirmerie, limitées par le manque de moyens, le nouveau médecin-chef se distingue surtout par l'autonomie qu'elle d'adopte à l'égard de l'Administration pénitentiaire. Elle essaie ainsi, au fur et à mesure, d'instaurer un respect mutuel des missions et du « champ d'action » de chacun, en refusant toute immixtion des surveillants dans l'organisation médicale et, réciproquement, en s'empêchant de « donner un avis sur la façon dont on gardait les détenus » : « Je n'intervenais que lorsqu'il y avait une atteinte à la personne ou alors que ça n'allait pas du tout sur le plan médical. Tant que ça se passait dans les cadres de l'Administration pénitentiaire, c'est-à-dire du règlement, alors là, je ne me mêlais pas de savoir ce qu'ils faisaient »1794(*). Le médecin-chef accorde notamment une importance particulière au choix des surveillants affectés à l'infirmerie afin d'assurer le respect du secret médical, comme le rappelle ici une infirmière :

« C'est vrai qu'un surveillant qui n'était pas au service médical et qui souhaitait avoir des informations, son collègue qui était au service médical pouvait très bien les lui donner. C'est vrai que Mme Tuffelli était très à cheval là-dessus. Quand quelqu'un de la Pénitentiaire était nommé pour travailler avec nous au service médical, elle les recevait avant et leur disait bien quel était leur rôle et qu'il fallait bien garder la confidentialité par rapport à des choses qu'ils pouvaient entendre »1795(*).

Les certificats médicaux sont un bon exemple de cette tentative d'autonomiser le médical du pénitentiaire. Outre qu'elle attache beaucoup d'importance à ce que l'Administration ne puisse pas contester ses décisions de retirer un détenu du quartier disciplinaire pour raison médicale, Jacqueline Tuffelli donne pour consigne à tout le personnel sanitaire de ne pas délivrer de certificats de compatibilité avec le « mitard » : « C'est comme si on nous demandait un certificat médical pour attester que l'état de santé d'une personne est compatible avec l'incarcération et qu'elle peut donc bien aller en prison. Ça n'a pas de sens ! C'est une décision de justice ». « Elle a été toujours très à cheval là-dessus », confirme une infirmière1796(*). Les consignes strictes du médecin-chef et la mise en place de réunions entre praticiens permettent progressivement d'homogénéiser la pratique des différents médecins1797(*). En témoigne ce généraliste arrivé à Fresnes en 1990 :

« Jacqueline Tuffelli nous briefait toujours sur les certificats. Parce que c'est vrai qu'on nous demande des certificats pour tout et c'est vrai qu'au début quand on vient d'arriver, on ne sait pas. Et donc, il y avait des choses qu'il ne fallait pas faire [...] Ça permettait d'avoir une pratique plus ou moins homogène. Par exemple, par rapport aux quartiers disciplinaires on refusait les certificats d'aptitude. Au début, on ne se voyait pas entre médecins et, ensuite, on a fait une réunion deux fois par an pour essayer de voir ce que faisaient les autres. Avant, c'était un combat de chaque instant pour conserver son territoire »1798(*).

Par le biais de conflits quotidiens, le Dr Tuffelli arrive progressivement à faire valoir son autorité, faisant du service médical du Centre pénitentiaire de Fresnes l'un des plus remarqués de France1799(*). Un phénomène de transformation apparemment similaire survient à Fleury-Mérogis en 1988, où l'Administration pénitentiaire décide de remplacer l'actuel médecin-chef qui avait été mis en cause dans un rapport de l'IGAS en 19851800(*). Dans la synthèse du rapport adressée au garde des Sceaux, le Chef de l'IGAS avait repris les conclusions des inspecteurs préconisant « la mise à disposition par convention avec le Centre Hospitalier d'Evry d'un médecin qui garderait quelques activités hospitalières »1801(*). Plutôt qu'une convention, une petite annonce est alors publiée dans un journal médical à laquelle répond Xavier Emmanuelli, médecin urgentiste connu pour son engagement humanitaire, qui vient alors d'achever son mandat de vice-président de MSF1802(*). « Ce qui m'intéressait c'était la toxicomanie et le sida. J'ai fait des pieds et des mains pour rentrer en prison », déclare-t-il lors de l'entretien1803(*). Il ne s'agit pourtant pas de sa première expérience en milieu carcéral. Se décrivant lui-même comme un « bébé Huguenard », du nom du chef de service de l'Hôpital Henri Mondor où il était attaché, Xavier Emmanuelli était intervenu en tant qu'anesthésiste au début des années soixante-dix à l'Hôpital de Fresnes. Cette première sensibilisation à la question des prisons fut probablement un atout, comme il le souligne: « Lorsque j'ai voulu aller à Fleury, je savais où j'allais. Je savais où j'allais et pourquoi j'y allais. C'est peut-être ça qui m'a donné le recul, c'est que je n'y ai pas été par défaut mais avec beaucoup d'intérêt clinique ».

Très vite pourtant, le Dr Emmanuelli se heurte à l'animosité de l'équipe médicale en place et tout particulièrement de l'ancien médecin-chef, Jean-Charles Bertin, désormais placé sous les ordres du prestigieux médecin humanitaire. Cette animosité traduit, selon un médecin proche de Xavier Emmanuelli, autant une rivalité personnelle qu'une différence de point de vue quant aux pratiques professionnelles : « Je me souviens Bertin, il était furibard ! Parce qu'Emmanuelli était déjà quelqu'un assez connu [...] Je pense que c'était un tout petit peu de l'ordre de la rivalité personnelle et puis il faut dire quand même que quand Xavier est arrivé il a commencé à tout bouleverser... »1804(*). Un autre praticien de Fleury-Mérogis tempère cette différence entre les deux médecins-chefs. Selon lui, Jean-Charles Bertin était surtout moins « idéaliste », en raison de son expérience, que son collègue fraîchement arrivé, comme en atteste l'exemple de la distribution des médicaments :

« Les psychotropes étaient donnés dilués pour éviter les intoxications médicamenteuses. C'est vrai que ça pose un problème car tous les médicaments étaient mélangés. Le docteur Emmanuelli avait souhaité qu'on arrête et la Pénitentiaire avait refusé. Les psychiatres voulaient qu'on donne sous forme sèche. Emmanuelli avait appuyé cette demande. Bertin avait déjà fait cette demande et il savait que l'Administration s'était déjà opposée. Donc là, vous voyez par exemple, Emmanuelli avait dit : "On va tenter" et Jean-Charles Bertin avait dû répondre : "Ça ne sert à rien". Il y en avait un qui avait plus d'entrain et l'autre était plus blasé... »1805(*).

Travaillant depuis treize ans en milieu pénitentiaire, le Dr Bertin est un médecin largement adapté aux règles pénitentiaires. A son arrivée, Xavier Emmanuelli s'avère choqué par plusieurs pratiques, comme par exemple l'usage de la dilution : « Ma soeur qui était pharmacienne, je lui ai demandé de voir quels étaient les principes actifs qui restaient une fois que c'était dilué. Bien sûr, c'est pas la même chose sous la forme diluée que sous forme de comprimé parce que les molécules font une hydrolyse et il y a moins de principe actif »1806(*). Il s'interroge également sur la forte prescription de psychotropes (« Philosophiquement, on n'était pas là pour atténuer la peine ») ainsi que sur les atteintes au secret médical : « D'autant plus qu'au début, les gens séropositifs avaient une pastille rouge sur leur dossier... [baisse le ton] de manière à les identifier ». Il remet en question plus globalement le statut des praticiens, notamment à l'égard des autorités pénitentiaires :

« J'étais un peu perplexe parce que le personnel médical appartenait à la Pénitentiaire et était noté par la Pénitentiaire. C'est dire que vous pouvez donner une note. Elle était corrigée et revue par le directeur de la prison qui était lui-même supervisé par la direction régionale. Donc, vous n'aviez aucun moyen pour contrôler. Elles [les infirmières] se considéraient d'ailleurs elles-mêmes comme pénitentiaires » 1807(*).

Le Dr Emmanuelli tente d'apporter certaines modifications. Il instaure une infirmière-chef afin de mieux coordonner les différentes infirmières « car elles n'avaient pas du tout cette notion là ». Il essaie, d'autre part, de remédier à l'isolement dont souffre le personnel en établissant des rencontres conviviales entre médecins, tel que le rappelle ce médecin alors en poste à Fleury : « C'était une fois par mois où on établissait le tableau de garde. Alors d'habitude, on se réunissait dans la chambre où on dormait et puis il avait organisé ça autour d'un repas au mess. Donc c'était plus convivial. On parlait plus des problèmes »1808(*). Pour contrer les craintes suscitées par l'épidémie de sida auprès des surveillants, le nouveau médecin-chef favorise la création d'une association, Fleury Santé, dont l'objectif est de former les personnels ou de mettre en place des supports à destination des détenus tel un film de prévention. En dépit de son volontarisme, Xavier Emmanuelli se heurte à certains blocages. Il est notamment confronté à une vive opposition des syndicats :

« Il y a eu des bagarres pour imposer ces connaissances. J'ai encore des tracts incendiaires de syndicats... Parce que moi, je voulais former les surveillants et il y avait une résistance parce qu'ils disaient : "Nous, on est surveillants. On n'est pas auxiliaires de santé". Mais ils l'étaient dans les faits. Et il y a donc eu des bagarres »1809(*).

Contrairement à l'exemple de Fresnes, il semblerait que peu de transformations aient objectivement eu lieu au final à Fleury-Mérogis1810(*). Ainsi, l'usage des fioles ou le recours aux surveillants-auxiliaires perdurent. S'il ne peut les interdire, Xavier Emmanuelli prend ses distances avec certaines pratiques propres au milieu pénitentiaire. C'est ainsi qu'il se désolidarise du rôle médical joué par les infirmières. Ces critiques sont probablement à l'origine du ressentiment éprouvé par cette infirmière alors en poste à Fleury-Mérogis : « Il ne nous considérait pas ! Il était là juste pour diriger [...] Il nous avait appelé des "infirmières d'hospice" et forcement on avait réagi. Et pour se racheter, il nous avait toutes invitées pour manger à Evry à midi, pour essayer de... Il était resté seul [rires] Personne n'avait voulu accepter son invitation »1811(*). Le Dr Emmanuelli est surtout accusé d'être trop loin de la clinique et d'exercer une fonction essentiellement administrative. Davantage homme de réflexion que de terrain, le médecin-chef de Fleury se dédie alors principalement « à faire progresser l'idée qu'on devait être rattaché au ministère de la Santé »1812(*). « L'essentiel de mon activité a quand même été de rattacher tout le système sanitaire à la Santé », affirme-t-il non sans fierté.

Plus idéaliste que le précédent médecin-chef, Xavier Emmanuelli questionne les pratiques en vigueur. En s'inspirant du côté « pragmatique » du Dr Bertin et l'aspect plus « théorique » du nouveau médecin-chef, il est possible selon un praticien de Fleury de « prendre en compte les contraintes liées à l'incarcération et obtenir une médecine plus responsable »1813(*). Le Dr Emmanuelli apporte un regard extérieur sur le fonctionnement largement autarcique du service médical : « Les médecins n'étaient pas tellement impliqués. Parce que c'étaient des vacataires. Ils étaient dans la routine de la prison. Moi, j'avais un regard neuf parce que j'étais urgentiste »1814(*). Le nouveau médecin-chef s'engage en faveur d'une plus grande collaboration avec les services du ministère de la Santé. A son arrivée, il demande à ce que le dépistage des MST, jusqu'alors effectué par un laboratoire privé, soit pris en charge par la DDASS. Grâce au Pr Gentilini, chef de service à la Pitié-Salpêtrière, Xavier Emmanuelli obtient par ailleurs la signature d'une convention permettant l'intervention de praticiens hospitaliers dans la prise en charge du sida. « Je me rappelle du premier rendez-vous chez Gentilini où Xavier a dit : "Et bien, on va faire venir des médecins extérieurs... Et hospitaliers. Et surtout hospitaliers !". C'est-à-dire des gens de qualité. Il fallait quand même qu'on fasse venir des gens de l'Assistance publique de Paris pour voir comment il fallait faire », souligne ce médecin alors en poste à Fleury1815(*).

Chacun à leur façon, Jacqueline Tuffelli et Xavier Emmanuelli, peuvent être considérés comme des précurseurs de la réorganisation des soins en prison. Femme de terrain, la première tente d'imposer son autorité médicale à l'égard de la Pénitentiaire, avec l'accord du directeur de Fresnes. Davantage théoricien, le Dr Emmanuelli développe une réflexion sur la place du médecin en situation d'incarcération qui, si elle ne transforme pas radicalement les pratiques, ouvre la voie à une réforme globale de l'organisation des soins.

__________________________________________________

En dépit de leurs modestes conséquences, la constitution de l'APSP ainsi que l'arrivée de médecins-chefs volontaristes temps-plein au milieu des années quatre-vingt symbolisent un tournant dans l'histoire de l'organisation des soins en prison. Elles sont le signe, tout d'abord, d'une prise de conscience croissante au sein du ministère de la Justice qu'une réforme du statut des médecins est nécessaire. La mise en place de médecins titulaires souligne, en effet, avec acuité le nécessaire abandon du principe de la vacation, selon celui qui était en charge de la réglementation sanitaire à la DAP :

« Pourquoi ces médecins vacataires n'étaient pas en mesure de gérer, de résoudre les problèmes récurrents ? Parce que quand vous êtes vacataire, vous passez très très vite. Tandis que quand vous avez un médecin à temps plein ou à 80%, vous avez un médecin qui va mettre à plat les vrais problèmes, qui va peut-être réorienter le rôle chacun. Vous voyez ! Ça n'est pas un problème individuel. Si Emmanuelli, on lui avait donné des vacations à la Maison d'arrêt de Moulins, il aurait été comme les autres [...] Voilà, ce qu'on voulait, c'était quelqu'un qui puisse vraiment organiser le service, et sortir de tous ces vacataires ! »1816(*).

Ces transformations traduisent, d'autre part, un rejet croissant de la part des généralistes exerçant en milieu carcéral de certaines pratiques issues de la tutelle pénitentiaire. Ces médecins-chefs s'inscrivent pleinement dans le segment, évoqué précédemment, de praticiens porteurs d'une nouvelle représentation de l'exercice médical en milieu carcéral. Tous ces médecins ont d'ailleurs comme point de commun de réfuter avec virulence le terme de « médecine pénitentiaire ». « Pour moi, ça ne veut absolument rien dire car que vous soyez en prison ou dehors les symptômes et les signes cliniques sont absolument les mêmes ! », s'exclame Jacqueline Tuffelli1817(*). Le médecin-chef de Fleury-Mérogis semble encore plus opposé à cette appellation. « Il n'y a pas à proprement parler de médecine pénitentiaire. C'est un concept qui a disparu dans les années 1982-19831818(*). On peut, si l'on veut la caractériser, écrire de cette pratique que c'est une médecine en "environnement" pénitentiaire. La sémantique a son importance », affirme dans une tribune Xavier Emmanuelli (Quotidien du médecin, 20/04/1989).

Beaucoup de médecins arrivés à cette même période partagent ce constat. Le rejet d'une appellation synonyme d'une médecine soumise aux impératifs pénitentiaires traduit l'amorce d'un segment de praticiens souhaitant faire prévaloir les obligations déontologiques sur les règles pénitentiaires tout comme Georges Fully avait tenté de le faire à partir des années soixante, dans un contexte cependant très différent. Cependant, contrairement au premier Médecin-inspecteur, ces praticiens ne sont plus porteurs d'une vision de la médecine pénitentiaire en tant que discipline spécifique. Ils entendent ainsi se démarquer de la représentation de la médecine pénitentiaire telle qu'elle s'est progressivement construite au cours des années soixante-dix. De scandale en scandale, cette pratique médicale, et la discipline que Solange Troisier a tenté d'ériger à partir d'elle, est devenue stigmatisante. La médecine pénitentiaire disqualifie ceux qui l'exercent et les expose au risque d'être accusés d'être des sous-médecins. Le seul moyen pour ces praticiens de revaloriser leur pratique et leur statut et d'obtenir leur rattachement au ministère de la Santé. Cette revendication rencontre la volonté réformatrice de quelques magistrats-militants de l'Administration pénitentiaire se revendiquant de la politique de « décloisonnement » menée par Robert Badinter.

S

i le sida peut-être considéré comme un élément de réforme de l'organisation des soins en prison, ce n'est pas en raison d'un pouvoir intrinsèquement réformateur de l'épidémie. Des acteurs s'en sont emparés afin d'en faire un argument dans leur tentative de transformation de la prise en charge sanitaire des détenus. Ce sont, dans un premier temps, quelques acteurs administratifs qui se servirent du sida afin d'accélérer le rapprochement entre les ministères de la Justice et de la Santé. L'épidémie servit d'argument, ensuite, à des médecins-réformateurs soucieux d'autonomiser l'exercice médical en milieu carcéral. Ce segment de praticiens arrivés durant les années quatre-vingt est porteur d'une vision alternative de la médecine pénitentiaire à celle qu'avait rendue célèbre Solange Troisier. Ces médecins tentèrent de mettre en oeuvre un exercice affranchi des impératifs pénitentiaires et semblable à n'importe quelle autre pratique médicale. Le sida fut utilisé par les ces praticiens comme un argument de poids dans la réforme de l'organisation des soins.

Les médecins-chefs réformateurs arrivés à la fin des années quatre-vingt exercèrent un rôle de porte-paroles du segment de praticiens nouvellement apparu. C'est particulièrement le cas des Dr Emmanuelli et Espinoza, de manière cependant très distincte. Le premier privilégie en effet les revues scientifiques ou médicales. Il publie ainsi des études documentées, s'appuyant souvent sur les travaux épidémiologiques réalisés par ses internes de l'Hôpital de Fresnes, à partir desquels il souligne l'incapacité des services médicaux pénitentiaires à faire face au « défi » de l'épidémie. Au-delà du VIH, il tente d'intéresser les milieux médicaux et associatifs, et de lutte contre le sida, à une approche plus globale de la prise en charge des détenus qui vient légitimer une réforme de l'organisation des soins :

« Le taux de séropositivité pour le virus de l'immunodéficience humaine VIH en milieu carcéral est 20 à 30 fois plus élevé que dans la population générale. Ce constat pose le problème de l'accès aux soins de cette population [...] Le médecin n'a pas l'obligation de résultat mais les moyens dont il dispose pour assurer le suivi de 10 à 15% de séropositifs dans les grandes Maisons d'arrêt en zone urbaine sont-ils suffisants ? [...] La prise en charge des séropositifs induit une prise en charge qui menace à terme d'aggraver la pénurie des services médicaux des prisons [...] Les détenus, de manière plus générale les toxicomanes séropositifs ou sidéens, seront-ils exclus de ces traitements de l'AZT, pour des raisons liées à leur marginalisation sociale, aux difficultés d'organisation du soin dans cette population. Sida et pauvreté constituent un défi pour nos institutions »1819(*)

« La création d'antennes Cisih dans sept prisons témoigne de ce mouvement d'ouverture et de liaison avec l'extérieur. L'extension, le développement de la collaboration hôpitaux-prisons répondra-t-elle aux besoins, à la charge sanitaire réelle du sida en prison ? Cette tendance à l'ouverture sera-t-elle poursuivie dans le secteur de la médecine générale ? [...] Le sida est un redoutable révélateur des dysfonctionnements institutionnels... et la prison est actuellement, d'une certaine manière, une réponse institutionnelle au problème sida-toxicomanie dans la Cité [...] Ce constat justifie l'objectif d'un transfert de tutelle vers le ministère de la santé »1820(*).

« Quand les prisons réintégreront-elles la Cité ? Les détenus en France ne peuvent bénéficier des prestations de la Sécurité sociale, on touche ici du doigt les raisons d'un tel état de fait : le nerf de la guerre n'est-il pas l'argent ? »1821(*).

« Peut-on parler d'hygiène bucco-dentaire lorsque le lavabo collectif sert à nettoyer certes les dents, mais aussi les assiettes, la peau et le linge ? ou que les draps ne sont changés qu'une fois par moi ? Peut-on dans ce contexte, parler raisonnablement du VIH, des préservatifs, ou se polariser sur le sida en oubliant l'hépatite ou la tuberculose ? [...] Il faut continuer à décloisonner la prison et se faire aider par l'intervention de médecins extérieurs. Pragmatique et compétent, le médecin généraliste de la prison ne peut la plupart du temps solutionner que les difficultés locales et quotidiennes. Il est bien souvent ignoré et méconnu, son image est celle de quelqu'un de peu présent, de peu payé, voire d'incompétent. Il en est de même pour les infirmières. Ces militants d'un système obsolète doivent être reconnus, et associés aux actions de santé publique, car ils disposent d'un savoir-faire indiscutable »1822(*).

A l'inverse, Xavier Emmanuelli privilégie les journaux grand public au sein desquels il multiplie les déclarations alarmistes appelant à des mesures urgentes :

« Trente pour cent de notre population pénale est infectée par le virus [...] Il faut alerter l'opinion publique et les ministères de la Santé et de la Justice [...] Le problème "Sida-prisons" dépasse ce que l'on pouvait imaginer [...] Nous ne pourrons faire face au fléau si une prise de conscience immédiate n'a pas lieu [...] Si l'on ne prend pas des mesures immédiates, le Sida va exploser dans les prisons françaises surpeuplées. Et c'est notre société dans sa totalité qui devra s'en défendre en exerçant des mesures totalitaires d'exclusion auxquelles personne n'échappera », déclare le médecin-chef de Fleury-Mérogis (VSD, 24-30/08/1989).

« Désormais, les séropositifs ne sont plus isolés. Ils sont actuellement 900 sur 5000 à Fleury-Mérogis [...]"Et, souligne le docteur Xavier Emmanuelli, quand on sait que 10% seulement des séropositifs ont développé un sida, on sait aussi que l'épidémie est devant nous, et qu'il va y avoir un problème diabolique" » (Libération, 30/11/1991).

A partir du sida sont dénoncées les nombreuses carences affectant la prise en charge des détenus. Mais c'est progressivement une nouvelle organisation des soins que défendent certains praticiens, comme ici le Dr Espinoza : « Doubler ou même tripler les effectifs de médecins et d'infirmières pénitentiaires, doubler les rémunérations permettrait sans doute d'accomplir d'importants progrès. Mais c'est tout l'organisation de la santé en milieu carcéral qu'il faudrait repenser » (Tonus, 13/06/1988). Le coût économique de la prise en charge de la maladie est souvent présenté comme un argument récurrent en faveur d'une réforme. « Le problème au départ est un problème budgétaire. Car le budget de la Justice qui est de 1% est un des budgets les plus faibles. Et dans ce même budget, celui de l'administration pénitentiaire est un parent pauvre. Et pour finir, les sommes consacrées à la santé sont dérisoires ! En réalité, il n'y a aucune ligne budgétaire pour faire face à ce problème du SIDA en milieu carcéral. Or le dépistage coûte cher », souligne le Dr Barlet de Lyon1823(*). « Aujourd'hui encore, l'administration pénitentiaire comptabilise les frais médicaux à quelques francs par jour alors qu'un test de dépistage vaut 100 francs et qu'il est suivi d'un examen de confirmation (300 francs) puis d'un bilan immunitaire (de 300 à 500 francs) s'il s'avère positif », relève Xavier Emmanuelli (VSD, 24-30/08/1989). C'est au nom de cet argument économique que le médecin-chef de Fleury-Mérogis plaide en faveur d'un rapprochement avec le ministère de la Santé :

« Praticien exerçant en prison, ce n'est pas l'Administration pénitentiaire que j'interpelle, mais bien le ministère de la Santé, en lui demandant instamment de prendre d'urgence les mesures qui s'imposent. Sur ce point, il n'y a pas d'ambiguïté, les problèmes de santé relèvent bien de ses attributions et, si l'on veut schématiquement résumer la situation, le mot d'ordre que je préconiserais serait : "Sortez le VIH du cadre de la pénitentiaire et prenez vos responsabilités [...] Où sont les projets ? Où sont les budgets ? Pourquoi l'administration de la Santé est elle silencieuse et impénétrable ?" » (Le Quotidien du médecin, 20/04/1989).

L'argument économique prend d'autant plus de poids qu'un meilleur dépistage des séropositifs et la mise à disposition de l'AZT se traduisent à la fin des années quatre-vingt par une explosion du budget de l'Administration pénitentiaire. « On prescrivait comme on voulait. Ça représentait des sommes énormes », déclare une infirmière des Baumettes où le nombre de cas de sida était parmi les plus élevés1824(*). « C'était l'AZT. Et ça coûtait extrêmement cher à l'Administration pénitentiaire », confirme une autre infirmière en poste à Pontoise1825(*). L'incapacité de l'Administration pénitentiaire à faire face à cette charge financière constitue un nouvel argument en faveur d'une réforme de l'organisation des soins. Au 31 mai 1989, le nombre de détenus séropositifs en milieu pénitentiaire (2.348) avoisine le nombre de personnes contaminées par le virus VIH dans l'ensemble des hôpitaux français (2.565) : « On imagine alors quelle est la charge sanitaire pour les prisons. En termes de chiffres, c'est comparable. C'est très lourd », conclut le Dr Espinoza1826(*).

La charge économique que représente le sida est un sujet de préoccupation pour le ministère de la Justice. Établissant le bilan budgétaire de 1988 à 1989, l'Administration pénitentiaire s'alarme de « la dérive des dépenses médicales » : « L'augmentation de la masse des frais de pharmacie (+3.734.068 francs par rapport à 1988) est d'autant plus importante qu'elle intervient dans une conjoncture de réduction de la population pénale. Le coût journalier moyen en métropole enregistre ainsi une hausse de 17% (2,69 en 1989 contre 2,30 en 1988) »1827(*). Le vice-président du Haut comité de la santé publique (HCSP) qui eut un rôle moteur au moment de la réforme confirme le poids démesuré des dépenses médicales : « Les prisons étaient le lieu où l'on distribuait le plus de traitements antiviral. On en était au début. Et le coût était énorme. Donc tout d'un coup, le budget médicaments explosait. Et donc au total, ils [la DAP] ne pouvaient plus suivre »1828(*). La part des dépenses médicales dans le budget de la DAP passe de 5,9% en 1986 à 7,5% en 19901829(*). C'est à partir de ces arguments qu'un projet de prise en charge par la Sécurité sociale est envisagé dès la fin des années quatre-vingt par les services du ministère de la Santé. Le risque d'une perte de contrôle des personnels sanitaires qui s'ensuivrait aurait bloqué le projet1830(*), d'après le Conseiller technique de Claude Evin :

« Le ministère de la Justice ne voulait pas perdre ses pouvoirs. J'avais fait faire une expertise par la Direction de la Sécurité sociale avec mon collègue Pierre Louis Bras, qui était au cabinet, et qui a été par la suite Directeur de la Sécurité sociale, sur la question de la possibilité du transfèrement [...] J'avais demandé à la Sécu de travailler sur un modèle où, en gros, la Sécurité sociale paierait les frais de Sécu et la Pénitentiaire paierait le tiers payant. Je crois que c'était ça l'hypothèse. Eux, ils n'avaient pas très envie. Ils voulaient, mes amis de la Justice, être patrons chez eux. C'est-à-dire qu'ils voulaient bien disposer d'un appui du ministère de la Santé mais ils voulaient rester maîtres chez eux et ils avaient très peur d'une médecine autonome en prison [...] Ils voulaient à la fois qu'on [la Santé] paye et qu'on n'ait pas une partie du pouvoir, des prérogatives. Ça, c'est la Justice. On est habitué à ça... Moi, je leur disais que les payeurs ils veulent avoir une partie du pouvoir... la Justice est habituée à taxer des gens extérieurs. On [la Santé] avait déjà payé sur les dépistages. Est-ce qu'on pouvait l'étendre à l'ensemble du système sans rien réformer ? Et là on a eu un désaccord. On a discuté mais...»1831(*).

Comme on peut le voir, si l'idée de décloisonnement a permis une nouvelle représentation de la prison, elle n'a pas non plus mis fin à une certaine conception de l'organisation du pouvoir propre à l'Administration pénitentiaire. Si celle-ci est convaincue qu'elle ne peut plus gérer à elle seule la santé des détenus, notamment pour des raisons financières, elle ne souhaite pas pour autant perdre tout contrôle dans l'organisation des soins et notamment dans la gestion des personnels. La peur du dessaisissement semble alors l'emporter. Ces réticences vont finalement pouvoir être levées au début des années quatre-vingt-dix grâce à une alliance entre les magistrats-militants issu du Syndicat de la magistrature et le segment de praticiens apparu dans les années quatre-vingt défavorable à une médecine pénitentiaire spécifique.

CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE

La première configuration, allant de 1970 à 1981, marquait un temps d'affirmation de la médecine pénitentiaire en tant que nouvelle spécialité médicale. Le second Médecin-inspecteur, Solange Troisier, poursuivait ainsi le travail initié par Georges Fully mais dans un but nouveau. Il s'agissait pour elle de réhabiliter un secteur d'action public discrédité, soumis à de nombreuses critiques et où les démissions étaient fréquentes, ainsi que de faire prévaloir le Code de procédure pénale sur celui de déontologie médicale. La seconde configuration est quant à elle avant tout caractérisée par le rejet de cette histoire de la médecine pénitentiaire. Les magistrats issus du Syndicat de la magistrature ainsi que certains professionnels regroupés dans une communauté épistémique, baptisée COSYPE, participèrent ainsi au démantèlement de l'oeuvre de Solange Troisier. Il s'agissait pour eux de déspécialiser l'organisation des soins en prison dans le cadre de la politique de décloisonnement, afin de le rapprocher le plus possible de l'exercice médical en milieu libre.

Cette politique aboutit en 1984 à la suppression de l'inspection médicale interne à l'Administration pénitentiaire et au transfert de cette compétence à l'IGAS ainsi qu'aux DDASS. Cette réforme produisit des effets notables mais elle ne permit cependant pas de mettre fin à une certaine autonomie de fonctionnement de la médecine pénitentiaire. Celle-ci demeurait gouvernée par des règles spécifiques et ses praticiens étaient rétifs à tout contrôle trop contraignant. De même, le projet de transfert de tutelle au ministère de la Santé se heurta, une fois encore, aux réticences de la Direction de la Sécurité sociale.

La question sanitaire prit une autre ampleur avec le développement du sida qui alourdit la charge de travail des soignants. Affectés par ces changements, les praticiens nouvellement arrivés dans les années quatre-vingt formèrent un segment professionnel spécifique porteur d'une nouvelle représentation de la médecine pénitentiaire. Prenant le contre-pied des idées auparavant prônées par Solange Troisier, ils défendirent, notamment au sein de l'association l'APSP, l'image d'une médecine non spécifique guidée par les seules exigences déontologiques. Même si leurs effets furent modestes, les entreprises de réforme ayant eu lieu dans les établissements de Fleury-Mérogis et de Fresnes attestent de la transformation opérée dans la profession de médecin pénitentiaire mais aussi dans l'Administration elle-même. L'organisation des soins en prison est analysée à la fin des années quatre-vingt comme un système présentant de nombreux dysfonctionnements (absentéisme, violation du secret médical, etc.) demandant à être réformé.

A l'inverse des années soixante-dix, cette seconde configuration réformatrice laisse peu de place aux variables professionnelle et institutionnelle. La médecine pénitentiaire apparait affaiblie d'une part en tant que profession et d'autre part en tant que discipline. Le groupe professionnel des médecins exerçant en prison est tout d'abord divisé du fait de l'émergence d'un nouveau segment professionnel. En effet, l'important renouvellement opéré au sein du corps médical au milieu des années quatre-vingt, suite au contrôle des temps de travail, a permis l'arrivée de jeunes praticiens qui ne se reconnaissent pas dans l'appellation de « médecine pénitentiaire » et qui se revendiquent exclusivement du Code de déontologie. Déjà durant les années soixante-dix, un segment d'internes protestataires était apparu. Pour contester leur hiérarchie pénitentiaire, ces derniers avaient eu recours à la grève, à la démission ou à la dénonciation de leurs conditions de travail. Il s'agissait toutefois d'internes qui se situaient à la marge du système et n'avaient d'autres moyens de faire valoir leurs revendications. A l'inverse, la plupart des médecins titulaires étaient à cette époque demeurés silencieux soit par « apathie », soit par loyauté à l'égard de l'Administration pénitentiaire. Dorénavant, les médecins pénitentiaires sont divisés.

En second lieu, la médecine pénitentiaire apparait affaiblie en tant que discipline. Ce nouveau segment de praticiens récuse tout d'abord l'idée d'un exercice médical spécifique qui justifierait sa mise à l'écart du reste du système de santé. Cet affaiblissement s'explique, d'autre part, par la marginalisation que subit Solange Troisier. Bien que poursuivant ses enseignements, cette dernière perd son poste de Médecin-inspecteur qui lui permettait d'exercer un contrôle important sur l'ensemble de ce groupe professionnel. Avec la suppression de son poste, a lieu en 1983 le dernier congrès de médecine pénitentiaire. L'implication de Solange Troisier dans le procès des grâces médicales, même si elle est finalement acquittée, accentue sa mise à l'écart1832(*). Avec la disparation de son principal représentant, cette discipline médicale perd de sa vigueur1833(*). Se diffuse alors l'idée que la médecine pénitentiaire n'est pas quelque chose de spécifique et que rien ne justifie que l'organisation des soins en prison soit régie par des règles propres.

Cette division au sein de la médecine pénitentiaire en tant que profession est également visible au niveau de la variable institutionnelle. Dans la première configuration, le Médecin-inspecteur exerçait une forte emprise sur l'organisation des soins. Ce rôle-clef perd de l'influence après 1981 avec l'alternance et disparait dès 1983. Il est remplacé par un magistrat qui dispose d'une légitimité moindre dans la gestion du corps médical, laissant ainsi aux praticiens en place davantage de marge de manoeuvre. Ce magistrat doit, en outre, composer avec d'autres institutions. Au rôle quasi-monolithique détenu par Solange Troisier se substitue désormais un partage du pouvoir entre plusieurs instances. L'inspecteur Philippe Chemithe assure une fonction de contrôle, notamment sur les horaires des praticiens. Mais surtout l'Inspection générale des affaires sociales et les médecins inspecteurs de santé publique représentent désormais des contre-pouvoirs importants à l'Administration pénitentiaire ainsi qu'aux praticiens travaillant en détention. Les « établissements 13.000 » à gestion mixte imposent même au ministère de la Justice de composer avec des acteurs totalement étrangers aux règles du système administratif français. La décision en matière d'organisation des soins est ainsi désormais co-produite entre ces différents acteurs institutionnels1834(*).

Si les facteurs professionnels et institutionnels perdent de leur importance, les facteurs politiques et cognitifs jouent en revanche pleinement durant cette seconde configuration.

Dans la première période, aucun acteur politique ne s'était engagé en faveur d'une réforme de la médecine pénitentiaire. L'autorité dont disposait Solange Troisier demeurait ainsi sans réel contrepoids. L'alternance de 1981 est à l'inverse marquée par un engagement de Robert Badinter en faveur d'une transformation de la prison et de sa médecine. Son Conseiller technique, Jean Favard, dispose de toute sa confiance. Ce dernier profite de sa connaissance de l'Administration pénitentiaire et de sa longévité (il reste cinq années en poste) pour entreprendre de nombreuses réformes. Si ces dernières n'ont pas révolutionné l'institution carcérale et ont engendré des déceptions, elles ont néanmoins favorisé une nouvelle représentation de la prison incarnée par des mesures modestes mais lourdes de signification, comme par exemple l'instauration de parloirs sans séparations. Convaincu que la médecine pénitentiaire n'existe pas en tant que discipline, le garde des Sceaux a joué en outre un rôle fondamental dans la suppression du poste de Médecin-inspecteur. Cet engagement politique fut également, d'une toute autre manière cependant, celui d'Albin Chalendon en faveur des « établissements 13.000 » dont on a noté les répercussions pour l'Administration pénitentiaire, notamment en terme d'organisation sanitaire.

Enfin, le facteur cognitif fut probablement le plus important durant la seconde configuration. Bien qu'apparue dans les années soixante-dix, l'idée de décloisonnement a peu joué durant la première période. Cette notion souffrait alors de définitions polysémiques mais surtout restait cantonné à des acteurs extérieurs à la prise de décision (essentiellement associatifs et médicaux). Enfin, si elle fut esquissée par Valéry Giscard d'Estaing dans le début de son mandat, l'idée de décloisonnement se heurta par la suite à la politique sécuritaire d'Alain Peyrefitte. L'alternance 1981 fut à cet égard fondamentale en permettant à des magistrats porteurs de cette représentation de l'incarcération d'arriver à des postes hauts placés. Elle permit ainsi la reconnaissance de la COSYPE, créée explicitement afin d'offrir des contre-propositions à la politique d'Alain Peyrefitte. Il semble s'être établi entre cette Coordination syndicale et les décideurs en matière de politique carcérale une situation originale de coproduction de l'action publique, proche de celle décrite par Pierre Muller et Bruno Jobert.

En lien avec l'apparition de l'approche « néocorporatiste »1835(*), Pierre Muller et Bruno Jobert ont mis en évidence un modèle de régulation sectorielle où prédominent les « médiateurs »1836(*). L'élaboration d'une politique publique suppose trois conditions1837(*). Il faut que se dégage une relation de leadership professionnel qui fait qu'une catégorie sociale prend la direction d'un secteur spécifique, en cherchant à le modeler en fonction de ses intérêts. Il est nécessaire qu'un acteur administratif revendique avec succès l'exclusivité du domaine concerné, et donc qu'il détienne l'expertise légitime. Il faut, enfin, que les deux formes de leadership se superposent suffisamment pour aboutir à une coproduction de l'action publique et, pour cela, que leurs visions respectives du secteur à réguler soient compatibles.

Ce modèle correspond en partie au cas d'espèce. Bien que ne représentant pas tant une profession qu'un secteur, la COSYPE bénéficie d'une légitimité importante après l'alternance. Elle apparaît alors comme un réel contrepoids aux syndicats pénitentiaires traditionnels et bénéficie d'une bonne couverture médiatique, par exemple lors du congrès organisé en novembre 1982. S'établit entre le garde des Sceaux et cette Coordination une relation de confiance qui repose notamment sur le partage d'une même vision commune de l'institution carcérale que l'on a qualifiée de « décloisonnement ». Cette coproduction de l'action publique entre deux acteurs fut renforcée par le rôle-clef dont disposèrent le Conseiller technique Jean Favard puis la DAP Myriam Ezratty. Le fait que tous deux aient appartenu auparavant au Syndicat de la magistrature, qui lui-même était représenté à la COSYPE par Alain Blanc, a probablement favorisé cette convergence de vue quant à politique à adopter en la matière.

Ainsi, si les alternances politiques sont des moments importants de transformation de l'action publique, ce n'est pas seulement en raison du volontarisme politique mais aussi du fait du renouvellement des hommes qui a alors lieu. La politique carcérale de Robert Badinter a eu, on l'a souligné, des effets limités sur les conditions de détention en raison d'une pluralité d'obstacles (manque de crédits, opposition des syndicats et acharnement de certains médias). Cependant, l'arrivée de magistrats membres du Syndicat de la magistrature à des postes décisionnels a marqué une rupture importante. L'action publique est ainsi tout autant le produit de grandes orientations politiques que de décisions quotidiennes adoptées par ceux qui les mettent en oeuvre.

L'idée de décloisonnement ne produit cependant pas tous ses effets durant cette seconde configuration. Le projet, qui en découle, d'une médecine dotée d'un statut non pénitentiaire se heurte à certains obstacles, tels un problème de financement ou une inertie de certaines règles pénitentiaires. La formation d'un segment de praticiens favorables à un transfert et hostiles à une spécialisation de la médecine pénitentiaire représente un allié de poids dans la volonté des magistrats-militants affectés à la DAP de réformer l'organisation des soins. Confrontés à la difficile gestion du sida, ces magistrats engagent dès 1990 une nouvelle tentative de réforme. Celle-ci va déboucher sur l'adoption d'un décret en 1993 qui sera repris sous la forme d'une loi en 1994. On retracera les conditions d'adoption du transfert de tutelle au début des années quatre-vingt-dix, sous la forme d'un prologue, avant d'apporter des éléments de conclusion plus généraux sur ce travail de thèse.

* 1789 Jacques, magistrat chargé de la réglementation sanitaire de 1982 à 1989. Entretien réalisé le 11/01/2008, 3H30.

* 1790 Jacqueline Tuffelli, médecin-chef de la Maison d'arrêt de Fresnes de 1986 à 2003, membre du Rapport du Haut comité à la Santé publique. Entretien réalisé les 20 et 22/06/2005. Durée : 5H00.

* 1791 Claudine, infirmière de l'Assistance publique détachée à Fresnes depuis 1986. Entretien le 15/12/2005, 1H40.

* 1792 Laurence, infirmière de l'Assistance publique détachée à Fresnes depuis 1986. Entretien le 30/06/2005, 1H10.

* 1793 Jacqueline Tuffelli, médecin-chef de la Maison d'arrêt de Fresnes de 1986 à 2003, membre du Rapport du Haut comité à la Santé publique. Entretien réalisé les 20 et 22/06/2005, 5H00.

* 1794 Jacqueline Tuffelli, médecin-chef de la Maison d'arrêt de Fresnes de 1986 à 2003, membre du Rapport du Haut comité à la Santé publique. Entretien réalisé les 20 et 22/06/2005, 5H00.

* 1795 Claudine, infirmière de l'Assistance publique détachée à Fresnes depuis 1986. Entretien le 15/12/2005, 1H40.

* 1796 Claudine, infirmière de l'Assistance publique détachée à Fresnes depuis 1986. Entretien le 15/12/2005, 1H40.

* 1797 Pendant longtemps, certains surveillants ont mis à profit l'absence d'homogénéité entre praticiens en recourant à différents médecins, en cas de refus d'obtempérer à leurs demandes.

* 1798 Virginie, généraliste à Fresnes depuis 1990. Entretien réalisé le 30/06/2005, 2H10.

* 1799 Du fait de son expérience, Jacqueline Tuffelli sera appelée à participer à la commission Santé /Justice puis, en 1992, à la réforme de la médecine pénitentiaire à travers le rapport du Haut comité à la santé publique.

* 1800 Suite à la protestation d'internes en 1983 et la publication d'articles critiquant l'organisation des soins (« Fleury-Mérogis, un interne de garde de nuit pour 4.600 détenus », Le Matin, 16/07/1985), la mission de l'IGAS avait relevé « l'insuffisance de personnel médical et para-médical », l'établissement disposant de 3,5 médecins plein temps et de quatorze infirmières (AVRIL J., BROYELLE Jean, Notes sur l'organisation sanitaire du Centre pénitentiaire de Fleury-Mérogis et sur le Centre Médico-psychologique Régional, Rapport IGAS, avril 1984, n°1984062, 15p).

* 1801 Lettre de Michel Lucas au cabinet du garde des Sceaux datée du 1/04/1984 (CAC. 19990278. Art.3 (extrait) : Notes sur l'organisation sanitaire du Centre pénitentiaire de Fleury-Mérogis).

* 1802 Né en 1938 et fils d'un médecin de banlieue parisienne, Xavier Emmanuelli s'engage, au terme de ses études de médecine à Paris, au sein de la marine marchande où il se sensibilise à la question de l'urgence médicale. À son retour en France. Il devient assistant en consultation de chirurgie dans un hôpital situé au coeur des mines du bassin lorrain. En 1971, il décide de rejoindre le service des urgences du Professeur Huguenard au centre hospitalier Henri Mondor ce qui l'amène à travailler au SAMU 95. Il obtient alors le statut de médecin-chef dans plusieurs services d'anesthésie réanimation. Il s'engage, parallèlement à sa carrière médicale, dans l'aide d'urgence internationale co-fondant l'ONG Médecins sans frontières (MSF) dont il est vice-président de 1971 à 1988. C'est alors qu'il bénéficie d'une relative notoriété (il a déjà publié sept ouvrages), qu'il décide de postuler en tant que médecin-chef de Fleury-Mérogis.

* 1803 Xavier Emmanuelli, médecin-chef de Fleury-Mérogis de 1988 à 1992. Entretien réalisé le 11/02/2008, 1H.

* 1804 Hélène, interne puis généraliste à Fleury-Mérogis de 1983 à 2000. Entretien réalisé le 8/12/2005, 2H40.

* 1805 Ludovic, généraliste à Fleury-Mérogis de 1988 jusqu'en 1999. Entretien réalisé le 12/01/2006, 2H10.

* 1806 Xavier Emmanuelli, médecin-chef de Fleury-Mérogis de 1988 à 1992. Entretien réalisé le 11/02/2008, 1H.

* 1807 Xavier Emmanuelli, médecin-chef de Fleury-Mérogis de 1988 à 1992. Entretien réalisé le 11/02/2008, 1H.

* 1808 Ludovic, généraliste à Fleury-Mérogis de 1988 jusqu'en 1999. Entretien réalisé le 12/01/2006, 2H10.

* 1809 Xavier Emmanuelli, médecin-chef de Fleury-Mérogis de 1988 à 1992. Entretien réalisé le 11/02/2008, 1H.

* 1810 Il faut ici rappeler que Fleury-Mérogis comporte plus de 4.000 détenus tandis que la M.A de Fresnes en compte « seulement » 1.500, le pouvoir syndical étant plus affirmé à Fleury qu'à Fresnes.

* 1811 Evelyne, infirmière à Fleury-Mérogis de 1983 à 1985 puis à Fresnes de 1985 à 1986 puis à Fleury-Mérogis de 1987 à 1993. Entretien réalisé le 8/02/2006, 2H30.

* 1812 Xavier Emmanuelli, médecin-chef de Fleury-Mérogis de 1988 à 1992. Entretien réalisé le 11/02/2008, 1H.

* 1813 Ludovic, généraliste à Fleury-Mérogis de 1988 jusqu'en 1999. Entretien réalisé le 12/01/2006, 2H10.

* 1814 Xavier Emmanuelli, médecin-chef de Fleury-Mérogis de 1988 à 1992. Entretien réalisé le 11/02/2008, 1H.

* 1815 Hélène, interne puis généraliste à Fleury-Mérogis de 1983 à 2000. Entretien réalisé le 8/12/2005, 2H40.

* 1816 Jacques, magistrat chargé à la DAP de la réglementation sanitaire de 1982 à 1989. Entretien réalisé le 11/01/2008, 3H30.

* 1817 Jacqueline Tuffelli, médecin-chef de la Maison d'arrêt de Fresnes de 1986 à 2003, membre du Rapport du Haut comité à la Santé publique. Entretien réalisé les 20 et 22/06/2005, 5H00.

* 1818 Il est fait bien sûr ainsi référence au décret supprimant le poste de Médecin-inspecteur en 1983, considéré unanimement comme la première étape du décloisonnement.

* 1819 ESPINOZA Pierre, « L'infection par le VIH en milieu carcéral », art.cit.

* 1820 ESPIOZA Pierre, « L'ombre du second choc sida. Sida, toxicomanie et système pénitentiaire », Revue française des affaires sociales, hors-série Les années sida, 1990, pp.84-86.

* 1821 ESPINOZA Pierre, « Les exclus du débat », Le journal du sida, supplément au n°31-32, 09-10/1990, pp.35-36.

* 1822 ESPINOZA Pierre, « Un maillon dans la chaine de prévention », Le journal du sida, n°31-32, 09-10/1991, pp.54-55.

* 1823 « Le sida en milieu carcéral : choc de deux tabous », Lyon Figaro, 10/03/1987.

* 1824 Brigitte, infirmière de 1984 à 1995 à la Prison Hôpital des Baumettes. Entretien réalisé le 21/02/2006, 2H15.

* 1825 Julie, infirmière à Pontoise de 1987 à 1990 puis à Poissy de 1990 à 1992. Entretien réalisé le 31/01/2005, 2H.

* 1826 « Table ronde autour des questions de sida en prison en milieu carcéral et en milieu ouvert », Les cahiers d'action juridique, 1990/06, n°71-72, pp.91.

* 1827 Lettre de la section des affaires économiques de la DAP aux sous directeurs sur le bilan de la gestion 1988 et 1989 datée du 24/08/1990. Archives internes DAP.

* 1828 Guy Nicolas, vice-président du Haut comité à la santé publique. Entretien réalisé le 15/06/2005. Durée : 2H20.

* 1829 DAP, Actes du colloque Soigner absolument, 1992, p.22. Bibliothèque DAP.

* 1830 Aucune trace écrite ce dette intention de réforme n'a a été trouvée.

* 1831 Jean-Paul Jean, magistrat, Conseiller technique du ministre de la Santé de mai 1988 à mai 1991 puis Conseiller technique des ministres de la Justice de mai 1991 à avril 1992. Entretien réalisé le 6/07/2005, 2H.

* 1832 Jusqu'à son décès en 2008, Solange Troisier ne fera plus parler d'elle dans l'espace public, si ce n'est par la publication d'ouvrages autobiographiques.

* 1833 Rappelons cependant le maintien d'une exception lyonnaise où demeure à la fin des années quatre-vingt le seul enseignement de médecine pénitentiaire ainsi qu'un service hospitalier qui lui est consacré.

* 1834 C'est de ce partage du pouvoir que naitra la polémique, explicitée en conclusion, afin de savoir à qui imputer l'absence de décision quant à l'arrêt des collectes de sang en milieu carcéral.

* 1835 L'analyse néocorporatiste analyse les politiques publiques comme le produit d'un système de cogestion qui repose sur des organisations auxquelles l'Etat attribue un monopole de représentation légitime des intérêts d'un secteur d'action publique (SCHMITTER P., LEHMBRUCH G., (ed.), Trends Toward Corporatisf IntermedialÎon, Londres, Sage, 1979).

* 1836 Les médiateurs sont des agents qui occupent une fonction sociale spécifique (haute fonction publique, syndicats dominants, etc.) et qui imposent leur représentation d'une politique sectorielle vis-à-vis d'autres agents avec lesquels ils sont en concurrence. Ainsi ils « réalisent la construction du référentiel d'une politique, c'est-à-dire la création des images cognitives déterminant la perception du problème par les groupes en présence et la définition des solutions appropriées » (MULLER Pierre, Les politiques publiques, Que sais-je ?, Paris, 1990, p.50).

* 1837 JOBERT Bruno, MULLER Pierre, L'Etat en action, politiques publiques et corporatisme, Presses Universitaires de France, Paris, 1987.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand