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Améliorer les compétences interculturelles de là¯Â¿Â½infirmière en psychiatrie


par Philippe Montoisy
Haute Ecole de Namur Liège Luxembourg Belgique - Spécialisation en santé mentale et psychiatrie pour infirmier bachelier 2013
  

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5. Le contexte particulier de la psychiatrie

L'hôpital psychiatrique véhicule encore de nos jours de nombreux tabous. Il est un lieu de pouvoir lié à des savoirs non partagés, aux conditions fragilisantes de la maladie mentale, aux trajectoires individuelles et aux représentations de la souffrance psychique. La relation entre soignant et soigné, pourtant centrale dans le processus des soins, est parfois asymétrique (« domination » du soignant sur le patient). Les pathologies rencontrées (névroses, psychoses, dépressions, ...) se manifestent souvent par des comportements assez « déconcertants » : colère, crises, peurs, etc. Leur accompagnement par l'infirmier (même s'il est spécialisé en psychiatrie) n'est pas chose facile.

Après les approches liées aux diverses « écoles de pensée » (psychanalyse, comportementale, systémique, ...), l'accent est plutôt mis, de nos jours, sur un « patient - acteur » au centre de son parcours. On favorise donc une dynamique de co-construction du projet thérapeutique.

Les différences culturelles sont particulièrement marquées lorsque l'on aborde le champ de la santé mentale et de la psychiatrie. Les patients étrangers ne comprennent pas toujours très bien nos manières occidentales de faire. Ce qui oblige les soignants à être particulièrement attentifs aux sensibilités culturelles. La relation que l'infirmier peut avoir, en psychiatrie, avec un patient d'origine étrangère est un phénomène complexe à étudier. De nombreux facteurs entrent en jeu.

L'entretien est un élément central du processus de soin en psychiatrie. La parole échangée est fondamentale. Pour Apotheloz et Grossen, en présence d'un patient étranger, « l'entretien psychiatrique peut être vu comme une conversation au cours de la quelle patient et soignant verbalisent un certain nombre d'éléments en partant de leurs perspectives, et négocient ensuite les significations en les confrontant, en les co-construisant »32. Il est primordial que la communication fasse sens pour l'infirmier et le patient. Cela permet d'éviter les incompréhensions et les frustrations.

En présence d'un patient étranger, les différences culturelles et l'éventuelle barrière de la langue peuvent rapidement devenir des obstacles. En effet, on peut s'interroger sur la manière dont l'infirmier et le patient étranger échangeront, de manière efficace, sur des problèmes liés à l'identité, au mal-être psychique, etc.

Normalement, l'entretien est un « face à face » plutôt ritualisé. Il se déroule dans l'intimité, le secret et la confidentialité. Il a lieu entre deux acteurs : le soignant et le soigné. Mais dans le cas d'un patient étranger, la présence d'un traducteur/interprète est parfois requise. Ce qui porte la relation à trois acteurs au lieu de deux. Se pose alors la question de savoir si la présence de cette troisième personne est réellement souhaitable, pour le patient et/ou le soignant, dans ces échanges assez intimes. Ne risque-t-on pas d'influencer négativement le rôle de l'entretien ?

Régulièrement, le soignant aura d'abord recourt aux gestes, au non verbal, à une langue intermédiaire commune (comme l'anglais ou l'allemand), à un dessin ou éventuellement un outil de traduction Internet. Et c'est souvent quand cette première solution ne marche pas qu'il convoquera un traducteur/interprète. La relation devient alors triangulaire et la présence de cet acteur supplémentaire n'est pas neutre. Cela modifie les frontières de la relation « soignant - soigné » et risque d'entraîner des réticences.

32 APOTHELOZ et GROSSEN, cités par MOLINA M. E., Communication, migration et santé : souffrances psychiques et communication. Comment dire sa souffrance en situation d'insécurité linguistique et socioculturelle ? , in : Actes du VIIe Congrès de l'Association pour la Recherche Interculturelle (ARIC), Université de Genève, 2001.

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Le traducteur/ interprète permet une meilleure compréhension du discours du patient étranger. Mais, en même temps, il réinterprète aussi, d'une certaine façon, les dires du patient. Son rôle n'est donc pas totalement neutre au niveau de la relation.

Si cela est possible, on pourrait éventuellement faire appel à un soignant de même origine géographique que le patient étranger. Le patient étranger opère alors une sorte d'identification en le voyant comme un compatriote à qui l'on peut plus facilement se confier. Si cette solution peut faciliter la relation, elle peut poser la question de la distance thérapeutique.

L'article qui suit (voir page suivante) est assez révélateur du type de difficulté que l'infirmier peut rencontrer lorsqu'il se retrouve en présence d'un patient dont la culture est différente de la sienne.

Un simple médicament dont l'infirmier connaît, par expérience, les effets habituels, peut très bien ne pas produire les effets escomptés sur ce patient étranger.

La représentation que se fait une personne d'un médicament donné peut très bien varier d'une culture à l'autre.

 

Le beau médicament moderne

! AütubleDevo tlEPEc.11tes

Dominique Osso:, psychiatre, centre D'Ici et d'Arlfeurs.

o. Quelle sottise c'était de rejeter le fétiche dans les ténèbres de l'illusion manipulatrice, mais quelle sottise plus grande encore ce serait de rejeter le beau médicament moderne dans les ténèbres de la seule raison objective».

Travailler avec des personnes venues d'ailleurs renvoie à sa propre culture_ C est un constat que toute personne confrontée à d'autres qui pensent différemment peut faire.__

Quand après de longues études, on se lance dans une carrière médicale, certain de sa tt science » apprise à l'université, an prescrit quotidiennement des médicaments, ce qui devient un geste presque banal.

Mais lorsqu'un jour, monsieur H_ vient nous trouver, déballe son sac, au sens premier du terme, et en sort une boite de SuscopanC, suivie d'une boite de Spasmomen(c), ensuite du Duspatalin(c), puis du Dicetel(c) et enfin de la Visceralgineea et que par ailleurs, les douleurs de ventre pour lesquelles toutes ces médications ont été prescrites sont toujours présentes, on se pose des questions_ Et pourtant la demande de monsieur H. est simple il ne comprend pas pourquoi ses maux de ventre ne passent pas et demande un nouveau médicament qui l'aidera à les faire passer. Mais prescrire un Xiême antispasmodique ne résoudra rien...

L B111710 Latour, or Petite réflexion sur te culte moderne des dieux Faitiehes Paris, Les empêcheurs de penser en rond, I996, p.33_

2. Noms commerciaux de di erents médicaments antispasmodiques_

3. Et si, ainsi que certains le proposent on utilisait une substance qui produit des sensations dans le corps, l'effet ne serait-il pas encore plus important ?

Tous ces médicaments sont efficaces, c'est écrit dans les traités de médecine; la publicité le dit; les délégués nous le répètent en nous inondant de graphiques et d'études en double aveugle, les congrès le confirment__.

Que penser donc lorsqu'on manie les médicaments longueur de journée, et que l'on constate que telle substance prescrite dans l'attente de tel effet parce qu'il y a tel ou tel symptôme, produit tout sauf l'effet attendu ? C'est courant en médecine de tous les jours, mais cela se constate encore plus avec les personnes d'origine étrangère.

Cela veut-il dire que le ou les symptômes repérés et classés « traditionnellement » sous tel diagnostic sont peut-être le signe de quelque chose d'autre ? Est-ce notre nosographie qui n'est pas adaptée aux symptômes des personnes appartenant à d'autres cultures ? Ou alors nos médicaments, ceux auxquels nous sommes habitués depuis notre plus tendre enfance, sont-ils avant tout ce que l'an

SrFiCifte DOCraW... Se ge Yàs gts'iJlJE Sourrcni FAiTES vbt3S 1;t4rdllia6TEK

pourrait appeler un « objet thérapeutique » typiquement occidental ?

On sait en effet que lorsqu'on prescrit un médicament à un patient, bien sûr la molécule qu'il contient agit pour une part_ Mais ce n'est pas tout, le nom, la couleur, la forme, la manière de le prescrire, « l'effet placebo », le prescripteur... ont aussi leur part d'efficacité.

Mais cet effet que l'on nomme placebo, comment agit-il ? On le retrouve dans toute étude qui concerne l'efficacité d'un médicament et cela représente la part d'efficacité d'un médicament qu'on ne peut finalement pas expliquer par la molécule elle-même'. C'est donc dire que nous ne connaissons pas tout du comment agit un médicament, du moins pour ce qui ne relève pas de la molécule elle-même.

Cela nous ramène à la représentation que chacun d'entre nous peut se faire du médicament. Et lorsque quelqu'un venu d'ailleurs s'adresse à cette médecine qui manie ces « objets thérapeutiques » aux effets qui lui apparaissent miraculeux, il s'attend effectivement à un résultat probant. Mais est-on vraiment sûrs que nos médicaments peuvent aider quelqu'un frappé par le mauvais oeil ou possédé par un djinn ? Et si monsieur H_ avait été victime de sorcellerie et qu'on lui a fait manger « quelque chose », les antispasmodiques sont-ils vraiment indiqués ?

Bien sûr, cet exemple, celui des maux de ventre du patient H., semble banal, trop simple. Mais la même situation pourrait être reprise pour les problèmes de dépression, de maux de tête, de maux de dos, d'insomnies, de nervosité,... Il nous reste donc beaucoup de questions concernant le mode d'action des médicaments et aussi plus largement de notre

médecine. fi

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56 Santé conjuguée - janvier 99 - n° 7

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle