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Améliorer les compétences interculturelles de là¯Â¿Â½infirmière en psychiatrie


par Philippe Montoisy
Haute Ecole de Namur Liège Luxembourg Belgique - Spécialisation en santé mentale et psychiatrie pour infirmier bachelier 2013
  

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3.2. Deuxième situation

La patiente évoquée est d'origine marocaine et ne vivait que depuis quelques années au Grand Duché de Luxembourg. En situation de migration, la maladie, vécue hors de sa culture d'origine, impliquait un stress supplémentaire. Elle se voyait alors contrainte de remplacer ses stratégies jusqu'alors opérantes par de nouvelles (phénomène d'acculturation)15.

Cette patiente marocaine se plaignait de douleurs aux genoux. Mais, après une anamnèse plus poussée, la patiente nous disait : « Je suis travaillée, je le sens, c'est les parents de mon mari qui n'ont jamais accepté notre mariage, c'est eux qui font des choses sur moi ». Elle ajoutait : « Je ne suis pas malade, la preuve les médecins que j'ai rencontrés ne m'ont pas donné de traitement ! ». Ce qui se passait, c'est que cette patiente exprimait un mal-être en dirigeant ses plaintes à un endroit de son corps. Cette manière de procéder peut paraître assez inhabituelle pour notre culture occidentale. La somatisation peut être différente selon les cultures. Rappelons nous aussi qu'une plainte est en quelque sorte « une invitation à entrer dans le monde du patient où une souffrance psychique est présente »16.Une plainte exprimée, outre l'aspect purement médical, peut aussi avoir un aspect symbolique. Il est donc assez courant de voir formuler une plainte inhabituelle par un patient étranger. Notre patiente marocaine exprimait symboliquement son mal-être en termes de santé physique (douleurs aux genoux) plutôt que psychique. Pour elle, son bien-être dépendait surtout de sa place au sein de sa famille. Elle déprimait car sa position était menacée. Mais, plutôt que d'exprimer une dépression, elle utilisait, de part ses références culturelles, des métaphores. Elle déviait sur son corps un mal-être psychique.

L'infirmier se doit donc d'être prudente lorsqu'il interprète une plainte d'un patient.

A. Sayad évoque, à juste titre, le concept de « maladie de l'immigré » selon lequel « sa pathologie dont on ne sait si elle est vraiment pathologique au sens médical du terme ou si elle est sociale. (...) Les sinistroses sont des immigrés malades précisément de leur condition de malade, et ce qui est demandé à la thérapeutique de la médecine (du soma ou du psyché) n'est pas tant de les guérir d'une quelconque maladie, mais de les délivrer d'un mal en leur restaurant l'intégrité de l'état antérieur et en les restaurant dans l'équilibre perdu »17.

Dans notre culture occidentale (plutôt individualiste), c'est une relation duelle (soignant versus soigné) qui sera préférée. Par contre, dans d'autres cultures, c'est la famille, le groupe ou le clan qui sera privilégié. Il arrive aussi que la hiérarchie familiale d'un patient étranger soit différente de la nôtre. Le père, l'époux, l'oncle, le frère ou le chef de clan peuvent posséder le pouvoir de décision en ce qui concerne les soins que l'on donnera à une femme. Ce fut le cas pour cette patiente marocaine.

Il est donc assez courant de voir arriver, à l'hôpital psychiatrique, un patient étranger accompagné de sa famille ou de ses proches. La famille et/ou les proches peuvent aussi être une aide précieuse pour traduire et/ou interpréter les dires et/ou les comportements du patient.

15L'acculturation désigne les processus complexes de contact culturel au travers desquels des sociétés ou des groupes sociaux assimilent ou se voient imposer des traits ou des ensembles de traits provenant d'autres sociétés. BONTE P. et IZARD M., Dictionnaire de l'ethnologie et de l'anthropologie, Op. Cit., p.1.

16 FERRANT L., La plainte : point de départ d'une approche, in : Santé Conjuguée / Cahier : Patients sans frontières : l'approche interculturelle en soins de santé primaire, 1999.

17 SAYAD A., Vieillir dans l'immigration, in : Migration Santé, n° 99, pp. 7-23.

Nous estimons encore trop souvent que c'est au patient étranger à s'adapter à notre manière de percevoir les soins. Cela est vrai en partie. La loi est la loi, même pour un étranger. Néanmoins, pour le faire adhérer à nos soins, il convient de ne pas nier leur culture et de ne pas rabaisser leurs habitudes.

De même, la prise en considération de la famille du patient étranger, dans le processus du soin, favorisera souvent la relation qui va s'établir entre le soignant et le soigné et permettra d'éviter de négliger certaines étiologies auxquelles on aurait, à priori, pas pensé.

18

Cahier - Patients Sans frontières - Santé Conjuguée, n°7, janvier 1999

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery