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La seconde lecture en droit parlementaire camerounais.


par Daniel MBENGUE EYOUM
Université Yaoundé 2 soa - Master 2 en droit public 2018
  

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B- LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE, MOTEUR DE LA VIE LEGISLATIVE

Le Président de la République est donc érigé en moteur de la vie législative. Cette dernière fait référence à l'existence de la loi et au fonctionnement du parlement. Ainsi, avec la seconde lecture, le Président de la République apparait comme la clé de voûte d'un bon fonctionnement de la procédure législative. A cet effet, le Président de la République est le moteur de la vie législative parce qu'avec la seconde lecture on peut assister à la paralysie de de la loi et du parlement d'une part (1), et d'autre part la loi devient l'expression de la volonté présidentielle (2).

1- La paralysie possible de la loi et du parlement à travers la seconde lecture

La seconde lecture est une arme dont dispose le Président de la République pour paralyser la loi et le parlement. A sa guise et selon ses désirs, le Président de la République peut « bloquer la promulgation des lois »258 et décider de ne pas la promulguer en formulant des secondes lectures sans que cela ne puisse être contré. Bien au contraire, l'on ne sera pas étonné qu'une résistance accrue du parlement puisque causer sa dissolution par le Président. De la sorte, c'est le parlement qui en pâtie face à la puissance de l'exécutif car il se trouve paralysé dans l'exercice de sa fonction législative monopolisée par le Président de la République. C'est à cet effet que Maurice HAURIOU affirme que « le pouvoir exécutif (...) intervient dans l'accomplissement de toutes les fonctions de l'Etat ; d'abord dans la fonction gouvernementale et administrative qui constitue son domaine principal, mais, aussi dans la

256 PACTET (P.), op. cit., p. 228.

257 ARDANT (P.) et MATHIEU (B.), Institutions politiques et droit constitutionnel, 22e éd, LGDJ, 2010, p. 242.

258 BILOUNGA (Th.), op. cit., p. 71.

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fonction législative (...) »259. Son intervention dans la fonction législative ne vise pas seulement à assurer la production de la loi, mais aussi et surtout pour exprimer sa volonté.

2- La loi, expression de la volonté présidentielle à travers la seconde lecture

La seconde lecture confère une position privilégiée au Président de la République par rapport au gouvernement et au parlement dans la procédure législative. Ainsi, c'est son opinion qui compte à un certain moment au grand dam de la volonté du peuple exprimée par le parlement. Ce dernier est donc appelé à « reconsidérer une loi sur laquelle le Président a une opinion défavorable »260 car la seconde lecture est une prérogative « négative lui permettant de s'opposer aux lois qui ne lui conviennent pas »261 .

En clair, à l'observation de la seconde lecture comme prérogative du Président, on est en droit d'affirmer que la loi n'est plus l'expression de la volonté générale, mais elle est l'expression de la volonté générale conformément à la volonté du Président de la République.

259 HAURIOU (M.), Précis de droit constitutionnel, op. cit., p. 380

260 CC, Evolution de la Nouvelle Calédonie op. cit., Considérant n° 9

261 PACTET (P.), op. cit., p. 228.

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CONCLUSION SECONDE PARTIE

La seconde lecture est une prérogative du Président de la République dans le travail législatif. Il existe une relation d'interdépendance entre les deux institutions dans la mesure où, si le Président de la République maîtrise la seconde lecture, cette dernière quant à elle le valorise.

En effet, le Président de la République déclenche la seconde lecture non seulement discrétionnairement et sans motivation, mais aussi exclusivement car les membres du gouvernement et les autres pouvoirs constitués sont évincés. Par ailleurs, la seconde lecture est une prérogative qui, lorsqu'elle est demandée, non seulement ne nécessite aucune habilitation parlementaire et contribue à la décadence du parlement législateur. De plus, elle constitue une prérogative insurmontable et une décision ultime du Président de la République car, « par l'exercice de la faculté d'empêcher, le Président de la République statue définitivement. Il prive de ce fait l'Assemblée nationale de sa faculté naturelle en la matière »262.

262 BILOUNGA (Th.), op. cit., p. 71.

CONCLUSION GENERALE

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La procédure législative n'est donc pas un long fleuve tranquille en droit parlementaire camerounais. Elle peut faire face à des interruptions provoquées par les différents organes intervenant dans sa mise en oeuvre. Cette étude en est sans doute la parfaite illustration à travers son objet qui est la seconde lecture. La préoccupation centrale qui a motivé celle-ci s'inscrit dans une perspective de précision du langage juridique dont l'élucidation est cruciale aux fins de satisfaire aux exigences de communication. Mais aussi -- et surtout -- de sécurité juridique car, le critère de l'accessibilité intellectuelle à la norme juridique qui est une composante essentielle de la sécurité juridique passe également par la clarté des notions juridiques. Dans cette perspective cette étude consistait à rendre compte de la définition de la seconde lecture en droit parlementaire camerounais. Deux dimensions ont ainsi été retenues, la seconde lecture comme un incident de procédure législative et comme une prérogative du Président de la République.

D'une part, la seconde lecture comme incident de procédure législative a conduit à la détermination de sa nature incidente et de ses conséquences incidentes. Ainsi, la nature incidente de la seconde lecture nous a permis de démontrer qu'elle a la capacité d'affecter le déroulement normal de la procédure législative normale car elle intègre la catégorie des différents incidents de procédure. La procédure législative normale est structurée en trois étapes à savoir : l'initiative, la délibération et la promulgation. Ceux-ci peuvent donc être interrompus à tout moment du fait de la sur d'un incident de procédure tel que la navette parlementaire, le contrôle de constitutionnalité et la demande de seconde lecture. Cette dernière qui nous intéresse constitue un incident du fait de ses caractères imprévisibles et irrésistibles. Elle entraîne ainsi des conséquences incidentes telles que la suspension de la procédure législative et le réexamen de de loi dont les modalités sont ambivalentes et les finalités variables. Les modalités de la seconde lecture sont ambivalentes dans la mesure où la procédure de discussion est identique à celle de la procédure législative normale, mais l'adoption de la loi exige une majorité importante qui renvoie à la majorité absolue pour les lois ordinaires et la majorité qualifiée des membres composants le parlement pour les lois portant révision constitutionnelle. Quant aux finalités de la seconde lecture, elles sont variables et portent sur la production d'une loi de qualité et la consolidation de l'Etat de droit. La loi de qualité est une loi caractérisée par la sécurité juridique et une effectivité ; l'Etat de droit recherchée par la seconde lecture vise à garantir la suprématie de la constitution et la préservation de l'ordre social.

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D'autre part, la seconde lecture comme prérogative du Président de la République laisse entrevoir une relation d'interdépendance entre les deux institutions : le Président de la République maîtrise la seconde lecture et la seconde lecture valorise le Président de la République. Sous le premier rapport, le Président de la République dispose de la faculté de déclencher la seconde lecture car elle relève d'un pouvoir discrétionnaire et elle est dispensée de motivations, qu'il s'agisse de motifs de droit ou de circonstances. Par ailleurs, C'est une prérogative exclusive du Président de la République car lui seul peut la déclencher. Sont donc exclus d'une part les membres du gouvernement du fait de l'absence de contreseing, consultation et délégation ; et d'autre part les autres pouvoirs constitués qu'il s'agisse du parlement à travers ses membres ou les organes de direction, ou des juges constitutionnels et ordinaires. Sous le second rapport, la seconde lecture est une prérogative qui valorise le Président de la République dans la mesure où non seulement elle rabaisse le parlement, mais elle constitue un véto absolu. La seconde lecture rabaisse le parlement du fait de l'absence d'une habilitation parlementaire et de la décadence du parlement législateur car elle apparait ici comme un vice à l'autonomie du parlement et une directive à elle adressée par le Président de la République. Par ailleurs, la seconde lecture constitue un véto absolu du Président car elle est une prérogative insurmontable et une décision ultime à travers laquelle ce dernier apparait manifestement comme étant le moteur de la vie législative.

»263.

Au final, la seconde lecture apparait comme étant une institution située entre la légistique et les freins et contrepoids. Si dans le premier cas elle permet d'effectuer un travail de forme et de fond sur la loi, dans le second cas elle permet d'entrevoir l'aménagement de la séparation des pouvoirs au Cameroun. Il faut donc dire qu'avec elle, « la séparation des pouvoirs présente (...) une prééminence institutionnelle d'une institution, l'institution présidentielle, qui jouit à la fois de la spécialisation des fonctions, de l'autonomie, qui a un pouvoir d'influencer l'exercice des autres fonctions et le fonctionnement des autres organes sans que la réciproque soit vraie (...)

263 OLINGA (A.D.), « Notule sur la séparation des pouvoirs dans la Constitution camerounaise », in ONDOUA (A.) (Dir.), La Constitution camerounaise du 18 janvier 1996 : bilan et perspective, Séminaire organisé par l'Initiative Gouvernance Citoyenne (IGC) du 17 au 19 janvier 2007, Afrédit, p. 21

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