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Les conventions locales: un outil novateur de gestion des collectivités locales au Sénégal

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par Abdoul Aziz Sow
Université Gaston Berger de Saint louis - DEA Droit de la Décentralisation et gestion des collectivités locales 2005
  

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Introduction Générale :

S'interroger sur la gestion des collectivités locales et incidemment sur

leurs ressources naturelles et environnementales dans le contexte africain en général et Sénégalais en particulier requiert de la part du chercheur d'une part un miroir orienté vers l'histoire et d'autre part sur l'évolution actuelle de

la gestion de ces collectivités locales. Pour ce faire nous allons prendre comme point de départ le long processus de décentralisation opéré au Sénégal. Cette politique de décentralisation du Sénégal est vieille de plus de trente ans. Depuis 1964 en effet, la réforme foncière et la responsabilisation des populations locales (gestion et aménagement des terres) assuraient, dans les principes, la réalisation de l'autonomie et de la participation. L'adoption en

1966 de la loi portant Code de l'administration communale permettra l'approfondissement de la décentralisation à travers les communes.

Depuis 1972, le Sénégal a fait des progrès remarquables dans la conception et la mise en place de politiques et d'institutions décentralisées

(les communautés rurales notamment). Dans l'esprit de rapprocher les décideurs politiques des populations, la décentralisation des services publics devrait augmenter l'efficacité de la fourniture de certaines prestations. On peut remarquer que c'est surtout à partir de 1972, lors de la deuxième phase, avec la réforme de l'administration territoriale, que la décentralisation connaîtra véritablement des avancées significatives.

Enfin, le nouveau régime des collectivités locales est fixé par la loi 96-

06 complétée par la loi 96-07 du 22 mars 19961 portant transfert de compétences aux régions, communes et communautés rurales). Il importe de noter que la réussite de la politique de décentralisation dépend de plusieurs facteurs dont notamment la capacité des institutions locales à assumer leur rôle avec la mise à leur disposition de ressources financières et humaines. Comme le stipule l'article 7 du code des collectivités locales, celles-ci

« disposent de budget et de ressources propres » destinées à la satisfaction

de la demande sociale locale. La décentralisation fait des populations locales

1 Loi 96-06 complétée par la loi 96-07 du 22 mars 1996 portant transfert de compétences aux régions, communes et communautés rurales dénommée Code des Collectivités Locales

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le principal centre de prise des décisions relatives à la gestion des ressources naturelles en donnant des perspectives réelles de développement de l'entreprenariat rural privé. La prise en compte des valeurs locales et de leur savoir-faire s'avère inévitable dans la conception, l'élaboration et la vulgarisation des technologies de gestion des ressources naturelles. La deuxième phase de la décentralisation s'est accompagnée d'un transfert de pouvoir de l'Etat aux collectivités locales notamment en matière de gestion des terres des communautés rurales. Le transfert du pouvoir s'est fait de manière progressive. Dans un premier temps, le représentant de l'Etat avait

le droit de se prononcer sur l'opportunité des délibérations du Conseil local,

ce qui lui conférait d'énormes pouvoirs et beaucoup d'influence. Cette disposition a évolué et désormais il n'exerce plus qu'un contrôle de conformité des actes pris par le conseil local, conformément aux dispositions législatives et réglementaires. Les plans locaux de développement, d'aménagement et de gestion des ressources naturelles, élaborés par les collectivités locales, doivent être approuvés par le représentant de l'Etat.

Le Sénégal compte actuellement trois types de collectivités locales décentralisées sans hiérarchie entre elles (le principe d'égale dignité oblige) à savoir les communautés rurales, les communes et les régions. La loi sur le transfert des compétences en matière de gestion de l'environnement et des ressources naturelles consacre une gestion rapprochée des ressources naturelles par les communautés de base pour en assurer la durabilité. Le transfert repose sur le principe de la complémentarité entre l'Etat et les collectivités locales. La loi 96-07 du 22 mars 1996 et le décret 96-1134 du 27 décembre 1996 précisent les compétences transférées aux régions, aux communes et aux communautés rurales.

Au plan local, il a été mis en place des cadres institutionnels qui sont soit des services déconcentrés de l'Etat, soit des cadres de concertation au sein de l'administration locale d'une part et d'autre part entre services de l'Etat, les partenaires au développement et les administrés (OCB, populations etc.). Les activités menées par les cadres de concertation sont fonction de leur nature mais tournent essentiellement autour des réunions d'information, d'échanges et de visites de terrain. Dans le cadre de l'approfondissement du

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processus de décentralisation, un nombre significatif de compétences en matière de gestion des ressources naturelles et de protection de l'environnement ont été transférées aux collectivités locales.

La gestion durable des ressources naturelles, en raison de son importance stratégique dans la planification du développement économique

et social, se situe au centre des principales préoccupations des pouvoirs publics. Elle est basée sur certains principes directeurs tels que la participation, la responsabilisation, le partenariat et la bonne gouvernance.

Condition préalable à l'élaboration des politiques et programmes, la participation des acteurs impliqués dans la mise en oeuvre du développement durable est sollicitée par les institutions publiques pour plusieurs raisons : elle permet de valoriser les compétences locales, de garantir la prise en compte des préoccupations des populations dans la définition des lignes d'actions et de procéder à une délimitation concertée des rôles et responsabilités de chaque catégorie d'acteurs, dans la mise en oeuvre des programmes de développement. L'évaluation de la décentralisation dans le domaine de la gestion des compétences générales et transférées a montré que les collectivités locales ont des limites certaines pour assumer, de manière satisfaisante, leurs rôles. Ces limites s'articulent autour des points suivants : insuffisance de l'expertise au sein des CL malgré les arrangements permis par les conventions-type pour mettre à leur disposition une assistance technique disponible au niveau des services déconcentrés ; insuffisance des moyens financiers et logistiques pour faire face à leurs responsabilités dans les domaines transférés. De plus les CL ne sont pas souvent sensibilisées sur les nombreuses opportunités quant à la GRN, notamment l'exploitation forestière et les ristournes sur les recettes contentieuses autour de la forêt ; etc.

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Ces faiblesses d'ordre institutionnel et organisationnel empêchent les

CL d'exercer effectivement le pouvoir transféré pour une meilleure planification des ressources naturelles dans le cadre des planifications locales

(PRDI, SRAT, PIC et PLD). Des conflits peuvent découler de ces faiblesses énoncées ci-dessus. Le manque de précision dans les limites des communautés rurales, la perception de l'espace communautaire par le conseil rural et sa gestion essentiellement limitée aux attributions de terres, souvent déterminées par la prédominance d'une activité donnée, entraînent des déséquilibres dans les affectations au profit de catégories professionnelles dominantes (agriculteurs notamment), créant ainsi un rétrécissement des zones réservées au parcours de bétail au point de désorganiser le système pastoral.

Face à ces difficultés textuelles ; les conventions locales viennent constituer selon le Docteur Diallo2 des outils non encore exploités de la gestion des ressources naturelles et environnementales dans le cadre des compétences transférées et subséquemment des collectivités locales. Ceci se traduit par des conventions désignées sous des vocables différents : accords locaux, contrats locaux, conventions locales, charte etc.

Pour rendre compte de toute la complexité de ces conventions locales, nous allons les cerner sous deux angles : d'abord par rapport à la décentralisation (d'un point de vue juridique), ensuite par rapport à la pratique, c'est-à-dire dans le sens que les acteurs locaux en donnent et qui

ne recouvre pas toujours la même réalité pour ne pas dire les conventions

locales de la décentralisation d'une part et d'autre part les conventions

locales dans la décentralisation3.

2 Diallo Ibrahima « Les aspects juridiques de la convention locale dans le cadre de la décentralisation au Sénégal »

(une communication à l'atelier national de Kaolack sur les conventions locales du 17 au 18 juin 2003)

3 A l'image du leitmotiv juridique classique connu en droit constitutionnel à savoir la souveraineté de l'Etat et la

souveraineté dans l'Etat qui nous a été soufflé par le Docteur Diallo lors du séminaire sur les Conventions locales sous

la direction de Mr Dieng.

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D'un point de vue juridique, la convention locale désigne un accord écrit passé officiellement entre deux ou plusieurs parties qui s'engagent à respecter diverses obligations. Le terme local indique qu'une institution locale est partie au contrat. Cette institution peut être une collectivité territoriale,

un établissement public ou une association. C'est pour cette raison que le code des collectivités locales a prévu la coopération dans tous les domaines à travers les conventions locales. En effet, la demande sociale, le coût des interventions, la complexité des procédures, les difficultés de coordination des actions, interdisent de plus en plus à une collectivité locale d'agir seule. L'article 14 du CCL dispose à cet effet, que les collectivités locales peuvent entreprendre des actions de coopération entre elles.

Au plan institutionnel des conventions locales sont prévues dans la perspective d'une collaboration entre l'Etat et les collectivités locales (article

15 du CCL) qui précise que les collectivités locales peuvent entreprendre avec l'Etat la réalisation d'un programme d'intérêt commun. Cette disposition ne procède qu'au rappel d'une évidence dans le sens où, cette collaboration fait partie intégrante de la philosophie même du processus de décentralisation. En conséquence ; la région, la commune et la communauté rurale peuvent passer des conventions avec l'Etat pour mener des actions de développement dans le respect de leurs attributions. Entre les collectivités locales, l'opportunité leur est offerte de créer une entente qui peut être soit interrégionale, intercommunale ou intercommunautaire (article 71 et 239 du CCL). Dans cette perspective, plusieurs communautés rurales peuvent décider de constituer entre elles ou avec une ou plusieurs communes, un groupement d'intérêt communautaire ayant pour objet la gestion ou l'exploitation des ressources naturelles intéressant plusieurs collectivités locales (article 239 CCL). Ce groupement est créé par décret sur les voeux des conseils municipaux et ruraux après avis du conseil régional. Des groupements mixtes peuvent être constituées par accord entre des régions et l'Etat, ou des établissements publics ou avec des communes ou communautés rurales en vue d'oeuvre ou service présentant une utilité pour chacune des parties (article 74 CCL). Et enfin des conventions locales sont prévues entre les collectivités et des associations ou organismes de

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développement (article 3 du CCL). Ceci se justifie à travers la préoccupation d'une démocratie locale seule voie pour vaincre le sous développement par une participation des acteurs à la base dans la gestion de leurs ressources et

de la sauvegarde de leur environnement.

Au regard des textes sur la décentralisation, trois critères peuvent donc être dégagés pour l'identification d'une convention locale : il s'agit d'un critère organique (collectivité locale), d'un critère matériel (compétence générale ou transférée par le code des collectivités locales) et enfin un critère formel selon la procédure suivie lors de son élaboration.

Dans un autre registre, le régime juridique des conventions locales notamment de gestion des ressources naturelles est régi aussi bien par des conventions internationales que des textes nationaux. Au plan international, l'article 12 du décret 96-1134 du 27 décembre 1996 portant application de la

loi de transfert des compétences aux régions aux communes et aux communautés rurales en matière d'environnement et de gestion des ressources naturelles énonce que l'exercice de ces compétences transférées s'exerçait dans le respect des conventions et accords internationaux ratifiés par l'Etat Sénégalais. A partir de ces éléments, nous pouvons rappeler quelques conventions internationales qui fondent les conventions locales notamment en matière de gestion des ressources naturelles et de l'environnement. Nous retiendrons parmi tant d'autres l'Agenda 21 de la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement (Rio,

1992) ; la déclaration de Rio sur l'environnement et le développement (juin

1992) ; la Convention sur la diversité biologique, Rio de Janeiro, 3-14 juin

1992 ; la stratégie mondiale de la biodiversité (WRI/UICN/PNUE, 1994) ; la

Résolution 28 C/2.4 de la Conférence générale de l'UNESCO (novembre

1995) approuvant la stratégie de Séville et adoptant un cadre statutaire du

Réseau mondial de réserves de biosphère MAB ; tous ratifiées par le Sénégal

et ayant ainsi une force supérieure à la loi. Cette obligation est rappelée l'art.12 du décret n°96-1134 du 27 décembre 1996. Relevons dans ces conventions certaines déclarations, principes et engagements posés par la communauté internationale et qui ouvrent une brèche à la légalité des

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conventions locales. Je cite : « Que l'expansion des besoins...; Que pour pouvoir satisfaire ces besoins... progresser vers une exploitation plus efficace

et plus rationnelle de la terre et de ses ressources naturelles... Que l'objectif général est de faciliter l'affectation des terres à des utilisations offrant les plus grands avantages durables et le passage à une gestion intégrée et durable des terres ; ... Qu'il faudrait également tenir compte, entre autres, des zones protégées,... des droits des populations et collectivités autochtones

et autres collectivités locales4 »

En outre, le Principe 22 de la Déclaration de Rio sur l'environnement et

le développement de juin 1992 estime que : « Que les populations et communautés autochtones et les autres collectivités locales ont un rôle à jouer dans la gestion de l'environnement et le développement du fait de leurs connaissances du milieu et de leurs pratiques traditionnelles ; que les Etats devraient reconnaître leur identité, leur culture et leurs intérêts, leur accorder tout l'appui nécessaire et leur permettre de participer efficacement à la réalisation d'un développement durable. » Enfin, la Stratégie de Séville et Cadre statutaire du réseau mondial des réserves de biosphère MAB de 1995 dispose « Que les réserves de biosphère sont établies pour promouvoir une relation équilibrée entre les êtres humains et la biosphère et doivent permettre d'associer pleinement les communautés locales à la conservation

et à l'utilisation durable des ressources. » Ces quelques conventions ratifiées par notre pays ouvrent la possibilité pour les populations locales de participer

à la GRNE à travers les conventions locales.

Au plan communautaire nous pouvons rappeler à l'image du Docteur Diallo5 la convention africaine sur la Conservation de la Nature et des Ressources Naturelles, ratifiée par le Sénégal le 6 mars 1972 et constituant

de ce fait le premier texte panafricain visant la mise en place de mesures adéquates pour assurer la conservation, l'utilisation et le développement des sols, eaux, flore et ressources en faune. Les conventions locales constituent des instruments d'application de cette convention internationale au plan local dans la mesure où, elles prennent en considération les besoins spécifiques

4 Agenda 21, chapitre 10 relatif à la conception intégrée de la planification et de la gestion des terres.

5 Op.cit.

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des populations selon une approche conciliant les logiques juridiques locales

et nationales en matière de gestion des ressources naturelles. Dans cette même mouvance, soucieux de définir un statut clair pour le foncier et de la gestion des ressources naturelles, la Déclaration de Praia souhaite une implication des populations locales et préconise des modes d'application qui prennent compte des réalités sociétales et culturelles. C'est ainsi qu'elle précise l'indispensabilité de définir des cadres contractuels clairs et durables pour améliorer les conditions d'accès et de gestion des ressources naturelles.

Au Sénégal, les conventions locales constituent des instruments juridiques et économiques qui trouvent leur fondement dans le principe de libre administration des collectivités posé par l'article 102 de la constitution

de janvier 2001. Le cadre législatif et réglementaire de la gestion des ressources naturelles et de l'environnement accorde une grande importance aux conventions locales comme outil et cadre qui permettent de réaliser une cohérence et adhésion des populations locales. Au terme des dispositions du CCL ; pour accomplir leurs missions, les collectivités locales peuvent s'associer en partenariat avec les mouvements associatifs pour la réaliser des projets de développement local. De même, l'article 14 dispose que les collectivités locales peuvent créer des groupements de promotion et de coordination des actions de développement. Il résulte de ces dispositions que les conventions locales constituent des instruments privilégiés de gestion des affaires locales dans la perspective d'un développement durable. L'article 4

du code de l'environnement6 dispose que tout projet de développement mis

en place dans le pays doit tenir compte de la coopération entre l'Etat, les collectivités locales, les associations, et les citoyens. Le législateur reconnaît ainsi aux conventions locales une importance capitale en imposant comme condition d'implantation de tout projet la prise en compte des conventions locales. Les conventions locales sont principalement prévues par le législateur dans les compétences transférées. Parmi celles-ci, nous pouvons citer en matière de gestion des ressources naturelles :

Les plans d'aménagement des forêts ;

6 Loi 2001-01 du 15 janvier 2001 portant code de l'environnement.

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Plan d'action pour l'environnement

Plans locaux de développement

Le plan général d'occupation des sols, les projets d'aménagement de lotissement, d'équipement des périmètres affectés à l'habitation L'aménagement de l'exploitation de tous les produits végétaux de cueillette et des coupes de bois

Ces conventions locales doivent au risque d'être illégales faire l'objet d'une délibération devant le conseil délibérant compétent (conseil régional, municipal et rural) en plus d'une approbation du représentant de l'Etat

(Gouverneur, Préfet, sous-préfet) dans le cadre des compétences transférées

ou générales des collectivités locales. Au regard de ce qui précède, les conventions locales dans le cadre de la décentralisation sont constituées par celles qui impliquent la participation d'au moins une collectivité locale. Cette conception diverge avec l'approche que les populations et les projets de développement local intervenant sur le terrain en font.

La notion de convention locale est différemment considérée par les acteurs effectivement impliqués dans l'élaboration et l'exécution des conventions. En effet, la fragilisation des conditions écologiques, la dérégulation des systèmes sociaux combinée à un environnement socio- économique de plus en plus vulnérable, ont contribué à la redynamisation des stratégies communautaires de gestion des ressources naturelles, telles que les conventions locales. Ces institutions traditionnelles sont souvent initiatrices de conventions locales, parfois en relation ou non avec les collectivités locales qui exercent désormais des compétences transférées en matière de GRN. Les fonctions des conventions locales sont multiples et renvoient aux aspects suivants :

un cadre méthodologique basé sur un processus d'apprentissage participatif et concerté entre des acteurs aux logiques diverses,

un instrument réglementaire et institutionnel définissant des règles, des procédures et des organisations pour veiller à leur application,

des outils de planification, de gestion et d'aménagement des ressources naturelles en vue d'assurer leur durabilité.

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Selon le PAGERNA7 la convention locale peut être définie comme un « ensemble de dispositions prises de manière consensuelle par les population d'une zone éco-géographique ou d'une unité d'aménagement donnée en vue de gérer durablement les ressources naturelles de leurs terroirs villageois et supra villageois8.» La convention est comme son nom l'indique consensuelle et obéit à des procédures d'élaboration (l'initiative provient des populations locales ou des projets de développement) et d'exécution (mise en place de Cellules d'Animation et de Concertation). Elle est élaborée selon des échelles différentes : villageoise, inter-villageoise, communautaire, inter-communautaire, zones géographiques transfrontalières contiguës. Leur champ d'application varie d'une convention locale à une autre

et peuvent porter sur toutes les ressources foncières, ou sur des ressources communes ou individuelles.

Par ailleurs, les dénominations pour désigner ces règles diffèrent selon l'aspect que l'on voudrait mettre en exergue. Une vingtaine a été recensé par les chercheurs de L'IIED9 parmi lesquelles nous pouvons citer : conventions locales, codes locaux, codes de conduite, règles de gestion, charte de territoire, plan d'aménagement et d'occupation des sols, co-gestion des ressources naturelles etc. Elle sont avalisées après leur élaboration par les autorités décentralisées (conseil rural) et déconcentrées (sous préfet). Les conventions locales peuvent donc être considérées comme des règles et principes de gestion des ressources naturelles au niveau local, élaborés et acceptés par les acteurs concernés de manière consensuelle. Il existe un élément déclencheur de l'établissement des conventions locales, à savoir l'éveil de la conscience des populations.

Il ressort des développements précédents que les conventions locales reposent en de termes nouveaux le débat permanent du décalage entre les pratiques coutumières et le droit positif. Dans presque tous les textes juridiques sur la gestion des collectivités locales, toutes les prérogatives sont détenues par l'Etat malgré la décentralisation. Des années d'application ont cependant suffi de montrer les faiblesses de cette option et la dégradation

7 Projet d'Auto promotion et de gestion des Ressources naturelles au Sine Saloum

8 Expériences du PAGERNA sur les conventions locales à l'atelier national sur les conventions locales à Kaolack en juin 2003

9 International Institut pour l'environnement et le développement.

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des ressources naturelles en est une preuve irréfutable. Parmi les causes, on peut noter l'inappropriation des règles par les populations considérées comme inadaptées et étrangères. L'inexistence d'une gestion officielle et efficace de ces ressources par l'Etat et les collectivités locales a fait que les populations ont toujours adopté des pratiques locales de gestion de ces dernières.

Les conventions locales s'inscrivent dans cette mouvance de pratiques locales et se singularisent par la forte implication des populations à la base. C'est pour tenir compte de ces pratiques locales de gestion qui ont fait leur preuve d'efficacité que les lois de la décentralisation ont prévu des conventions locales mais dans le cadre des compétences transférées. Cependant la pratique dénote une différence aussi bien dans la conception, la mise en oeuvre et le contrôle de ces conventions locales par rapport à celles déterminées par les lois de la décentralisation. D'où cette situation d'un risque de vide juridique où se retrouvent ces conventions locales. Différentes structures d'appui tels que la SAED10, l'UICN11, l'IIED, le PAGERNA participent

à la promotion et à l'élaboration de ces conventions locales. Récemment la conférence de Bamako organisée par l'IIED en décembre 2003 avait pour thème les conventions locales.

L'étude de cette problématique est fondamentale dans le sens où, une gestion efficace des collectivités aura des impacts sur le plan politico organisationnel car les conventions locales amorcent un dialogue entre un éventail de parties prenantes, y compris les pouvoirs publics, les élus locaux, les OBC et les ONG afin de promouvoir la gouvernance collective. L'impact est aussi économique dans la mesure où : une meilleure GRN peut se traduire par une diversification des revenus (par exemple cueillette des produits de la forêt, artisanat, écotourisme, petite entreprise) et peut engendrer des avantages économiques notables. Sur le plan social, le renforcement des mécanismes de GRN existants et traditionnels dans le cadre de l'établissement d'une Convention locale consolide les connaissances locales et renforce les liens sociaux. Ceci peut mettre en valeur la cohésion sociale et engendrer des moyens de résoudre les conflits futurs. Enfin sur le plan de la conservation de la biodiversité les conventions locales protègent la

10 SAED Société d'aménagement et d'exploitation du Delta

11 Mission de l'Union Mondiale pour la Nature au Sénégal

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biodiversité par l'entremise de la GRN. L'impact le plus manifeste jusqu'ici a été la régénération du couvert d'arbres et d'arbustes et la restauration du sol érodé par le vent. En résumé, l'intérêt d'un questionnement sur les conventions locales intéresse le développement à la base et le développement durable par ricochet.

S'intéresser sur les conventions locales comme outil novateur revient donc à appréhender l'efficacité, la pertinence, les impacts, les limites et défis

de ces conventions particulièrement la problématique de leur assise juridique. Dans cette étude, nous n'entendons pas identifier les critères d'une convention locale12 mais plutôt apprécier la pertinence des conventions locales à travers des cas pratiques et leurs implications dans le développement local en mettant en exergue les difficultés aussi bien méthodologiques, pratiques que juridiques soulevées par ce outil novateur.

Si certaines études quantitativement faibles ont documenté divers aspects des conventions locales au Sénégal, il reste certain qu'une approche juridique combinée à la recherche d'efficacité de ces conventions dans la gestion des collectivités locales n'a pas été aussi riche et laisse encore par conséquent un champ libre aux divers spécialistes du droit de la décentralisation et de la gestion des ressources naturelles que nous sommes. Néanmoins, tous les acteurs s'accordent sur l'intérêt d'une recherche sur les aspects juridiques des conventions locales et principalement sur leur efficacité dans la gestion des collectivités locales comme en témoigne leur prise en compte lors de l'atelier national organisé par le PAGERNA à Kaolack avec la communication du Docteur Ibrahima Diallo de l'Université Gaston Berger de Saint louis. Au-delà de son aspect novateur comme outil de gestion des ressources naturelles et partant des collectivités de base, le défi de l'heure est de trouver une articulation des conventions locales (posant des difficultés d'ordre juridique surtout) avec le cadre juridique de la gestion des collectivités locales. Notre problématique peut être posée en ces termes :

12 Cissé Gorgui a procédé à l'identification des critères d'une convention locale (critère organique, matériel et formel).

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle