WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Pour l'amélioration des performances des entreprises publiques camerounaises: le rôle du conseil d'administration

( Télécharger le fichier original )
par André Marie MBILI ONANA
Université de Yaoundé II SOA - DEA ès Sciences de Gestion, option Finance 2004
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

I-2-1 L'articulation du courant cognitif

Les prémisses de l'argument cognitif se retrouvent dans les écrits de l'un des précurseurs des théories contractuelles des organisations en l'occurrence Alchian (1950) 39 mais de manière non explicite. Pour ce dernier, l'incertitude de l' environnement dans lequel les décideurs interviennent conduit à l' impossibilité pour ceux-ci de prévoir toutes les contingences futures. Ils doivent de ce fait fonder leurs actions sur un certain nombre de jugements et d'opinions subjectifs (Alchian, 1950, p.216).

39 Jensen et Meckling (1976, p.80) se réfèrent explicitement à plusieurs contributions de cet auteur.

Ces prémisses vont donner lieu à des travaux sur la cognition, et les représentations subjectives évoquées par Alchian vont prendre une terminologie appropriée : cartes mentales (Huff, 1990), schémas mentaux (Denzau et North, 1 994)40. Un schéma mental est donc une grille de lecture de la réalité, permettant aux individus de déchiffrer une situation de prise de décision, grâce à la perception d'un ensemble de liens de cause à effet et d'agir en conséquence (Wirtz, 1999). C'est dans ce sens que Calori (2000), en conférant aux dirigeants le statut de << théoriciens [ou de savants] ordinaires >> conduit à comparer une carte cognitive à un modèle scientifique.

Une telle approche va dans le même sens que la TCT et la TPA notamment sur l'hypothèse de la rationalité des acteurs, cependant elle substitue une rationalité de type procédural (Simon, 1982) à la rationalité substantielle41. Les individus ne disposant pas de l'ensemble des paramètres << objectifs >> pour calculer des solutions optimales, sont supposés fonder leurs raisonnements et arbitrages sur leur perception subjective des paramètres pertinents. Cette perception est façonnée par les schémas mentaux. La perception des opportunités concernant l'évolution de l'entreprise se trouve ainsi conditionnée par différents types de schémas mentaux permettant d'étudier la prise de décision des dirigeants concernant les orientations de leur politique générale mais également pour appréhender certains phénomènes idéologiques liés directement au gouvernement d'entreprise (Lazonick et O'sullivan, 2000 ; Wirtz P., 1999). Les schémas mentaux donnent une autre explication aux conflits d'intérêts. C'est leur diversité qui est source de conflit en lieu et place de l'opportunisme. Ainsi deux parties prenantes de la firme, A et B, ont théoriquement une perception différente de leurs actions en tant qu'intervenants loyaux s'ils ne partagent pas le même schéma mental par rapport aux intérêts à privilégier. Cette idée est défendue par Conner et Prahalad (1996, p.483).

40 Les études sur la cognition sont nombreuses. Dans notre exposé, nous basons notre terminologie sur l'analyse de Denzau et North (1994), car elle est à priori compatible avec les postulats fondamentaux de la TPA et facilite, de ce fait, le travail d'intégration théorique.

41 La rationalité procédurale, cohérente avec l'approche cognitive et dynamique du conflit, se différencie également de la rationalité limitée, car la première met l'accent sur le processus de prise de décision, la seconde plutôt sur son résultat (Charreaux, 1999).

I-2-2 Une réponse au conflit d'intérêts : le gouvernement des entreprises Berle et Means en 1929, étudiant la dispersion du capital des 200 plus grandes firmes américaines concluent à l'émergence d'une nouvelle forme de propriété (Harti G., 1999). Cette forme de propriété contribue à l'émergence des firmes dites <<managériales >>, c'est-à-dire effectivement contrôlées par des managers non propriétaires. Cette séparation42 conduira Jensen et Meckling (1976) à élaborer la théorie de l'agence. En effet, en confiant la gestion de ses intérêts à l'agent, le principal se trouve souvent en face de divergences d'objectifs et des asymétries d'information qui entraînent les phénomènes traditionnels de risque moral et de sélection adverse (ou anti-sélection) et qui à leur tour créent des coûts d'agence43.

Le risque moral désigne l'impossibilité pour le principal d'évaluer l'effort fourni par l'agent. L'agent peut en effet choisir de << trahir >>, au moins partiellement les intérêts de son mandant pour mieux servir les siens propres (Raimbourg P., 1989). Celui d'anti-sélection trouve son origine dans l'impossibilité qu'a le principal d'avoir une connaissance précise des caractéristiques du bien ou du service sur lequel porte le contrat avec l'agent. Il existe de ce fait une incertitude concernant la qualité du recrutement et de la sélection effectués par le principal sous l'hypothèse d'une asymétrie d'information (Raimbourg P., 1989). Pour donc limiter les coûts inhérents au conflit, il est né des mécanismes chargés d'aligner les intérêts du mandataire sur celui du mandant (Charreaux G., 1997).

1-2-2-1 Quelques définitions du gouvernement d'entreprise

Selon l'optique disciplinaire, le GE a pour objet de mettre le dirigeant au pas afin que ce dernier gère l'entreprise au profit des actionnaires, et plus généralement au profit de toutes les parties prenantes. On oppose de ce fait la vision traditionnelle ou moniste du GE qui fait la part belle aux seuls apporteurs de capitaux (actionnaires), à la vision pluraliste ou partenariale qui élargit la firme à tous les partenaires. Dans l'un ou l'autre aspect, le GE désigne l'ensemble des mécanismes devant assurer la prise en compte

42 Cette séparation des fonctions de propriété et de direction se double d'une séparation des fonctions de direction et de contrôle comme l'illustre la figure III-4.

43 Les principaux coûts d'agence sont les coûts de surveillance, les coûts d'action ou de développement et la perte résiduelle. Voir Coriat B. et Weinstein O., (1995).

des intérêts de toutes les parties contractantes. Le GE a trait ainsi à la façon de concilier les intérêts des deux parties et de faire en sorte que les entreprises soient exploitées au profit des investisseurs (Mayer C., 1996). Demb et Neubaeur (1992), par exemple, indiquent que << le gouvernement d'entreprise concerne la responsabilité en matière de performance >>. Selon Kester, << le problème central du gouvernement d'entreprise est de concevoir des systèmes spécialisés d'incitation, de sauvegarde et de réglementation des différends de nature à favoriser la continuité au sein de l'entreprise de relations qui soient efficientes en présence d'un opportunisme régi par l'intérêt personnel.>> Pour ce faire, le GE dispose d'instruments internes et externes, spécifiques et non spécifiques et enfin intentionnels et spontanés. Le marché financier étant un moyen coûteux, voire défaillant (Hardi G., 1989), ce sont les mécanismes internes qui encadreront l'action des dirigeants. Dès l'introduction de leur article, Becht M. et alii. (2002) définissent cinq principaux mécanismes devant limiter l'espace discrétionnaire des dirigeants. Une liste exhaustive de ces mécanismes est proposée dans le tableau qui suit.

Tableau III-2 Typologie des mécanismes de gouvernement des entreprises

 

Mécanismes spécifiques

Mécanismes non spécifiques

 

- contrôle direct des actionnaires

(assemblée)

- conseil d'administration (avec ou sans séparation du conseil, direction ou

- environnement légal et réglementaire (lois sur les sociétés, sur le travail, droit de la faillite, droit social...)

Mécanismes

forme

- syndicats nationaux

intentionnels

unique contre forme biconseil)

- auditeurs légaux

 

- systèmes de rémunération,

- associations de

 

d'intéressement

consommateurs

 

- structure formelle

 
 

- auditeurs internes

 
 

- comités d'entreprise

 
 

- syndicats maison

 
 

- réseaux de confiance informels

- marchés des biens et services

 

- surveillance mutuelle des dirigeants

- marché financier (dont prises

 

- culture d'entreprise

de contrôle)

 

- réputation auprès des salariés

- intermédiation financière

 

(respect des engagements)

- crédit interentreprises

Mécanismes spontanés

 

- marché du travail

 
 

- marché politique

 
 

- marché du capital social

 
 

- environnement sociétal

 
 

- environnement médiatique

 
 

- culture des affaires

 
 

- marché de la formation

 

Source: Charreaux G., (1997), Le gouvernement des entreprises. Théories et faits, Economica, paris, p.427

Le plus important de ces mécanismes est le conseil d'administration (Fama, 1980). Il a ainsi pour rôle de contrôler et de ratifier les décisions managériales en jugeant les managers selon leur performance soit en renouvellant leur mandat soit en les

révoquant (Fama et Jensen, 1983). Ses leviers d'action sont donc le pouvoir de révocation (Pigé B., 1996 en mesure le poids à partir d'un échantillon de PDG de 222 entreprises françaises cotées sur la période 1985-1989) et le système de rémunération. Gharbi H. (2002) dresse à cet effet la liste des leviers d'action des mécanismes du tableau.

Si on admet que certains comportements déviants ne sont pas motivés par l'opportunisme, mais simplement par des perceptions divergentes, il devient théoriquement possible de représenter au moins une partie des mécanismes de gouvernance comme indicateurs d'apprentissage (Tainio, 2001). Dans cette perspective, les leviers institutionnels qui fondent les mécanismes de gouvernance peuvent fournir des incitations aux acteurs pour réévaluer la perception de leurs positions et adapter, le cas échéant, la structure de leurs connaissances. De ce fait, le GE ne joue pas simplement un rôle disciplinaire, mais également un rôle cognitif.

Figure III-4 La double séparation propriété/direction et direction/con trôle

Administrateurs

- Exercent la fonction de contrôle pour le compte des actionnaires

Actionnaires

- Prise en charge du risque résiduel

- perception des revenus résiduels

Dirigeants

- Exercent la fonction de direction pour le compte des actionnaires

Source: Pigé B., (1996), « La probabilité de rotation des PDG : une mesure du pouvoir de révocation du conseil d'administration », Revue d 'Economie Politique, 106 (5), sept.-oct., p.892

II- Le CA entre contrôle et stratégie

La littérature sur le CA s'avère largement dominée par le cadre conceptuel de la théorie de l'agence. Elle est fondée sur une vision contractuelle de la firme, laquelle appréhende le conseil, d'un point de vue organisationnel, comme l'organe de contrôle des dirigeants dans l'optique de la défense des intérêts des actionnaires. Ces apports de la théorie de l'agence sont eux-mêmes opposés aux développements issus du courant dit de l' << hégémonie managériale. > Ce courant prend origine dans la théorie managériale et s'appuie sur des travaux empiriques tels que ceux de Mace (1971), Herman (1981) ou Vance (1983). Il en ressort une limitation de la capacité du CA à contrôler les dirigeants.

Cependant, en marge de ces approches du conseil, qualifiées d' << internes > (Charreaux G., Pitol-Belin, 1990 ; Le Joly K., 1998) puisqu'elles appréhendent le conseil d'un point de vue interne à l'organisation, il s'est développé un important courant de recherches consacrées à une analyse dite << externe. > Elle (l'analyse externe) est dominée par l'étude des caractéristiques et des conditions d'émergence des liens inter organisationnels établis par l'intermédiaire des administrateurs (liens interlock) et conduit au développement de l'approche stratégique du conseil.

Notre objectif dans ce paragraphe est de présenter le CA dans l'optique du contrôle et d'en dégager les limites pour ensuite proposer une alternative, l'approche stratégique du CA.

II-1 L'optique disciplinaire du CA (voir figure III-5)

Elle est proposée par les théories contractuelles des organisations via la théorie de l'agence. Elles ont en effet pour objectif d'expliquer les différences de structures adoptées par les organisations et de déterminer un ensemble de caractéristiques qui permettent d'en comprendre le fonctionnement. Ces caractéristiques organisationnelles

ne faisant référence qu'aux fonctions de contrôle et de décision, et ne prenant en compte que les organisations privées44.

Les théories contractuelles sont fondées par la vision contractuelle de l'organisation dans laquelle la firme apparaît comme une fiction légale, un noeud de contrats implicites ou explicites qui régissent les relations aussi bien entre les agents internes à l'organisation qu'entre ceux-ci et les tiers et la sélection naturelle45 selon laquelle il existe une concurrence entre les différentes formes organisationnelles ; la forme qui survit est censée être celle qui permet de minimiser le coût de fonctionnement de l'organisation partant de la distinction fonctionnelle propriété/décision (Fama et Jensen, 1983), les théories contractuelles formulent deux propositions fondamentales46 :

- la séparation47 propriété/décision conduit à des processus de décision pour lesquels il y'a séparation des fonctions de décision (initiative et mise en oeuvre) et de contrôle (ratification et surveillance) ;

- la concentration des fonctions de décision et de contrôle entre les mains d'un nombre limité d'agents conduit à une répartition des titres de propriété qui privilégie ces mêmes agents.

Ces deux propositions constituent le coeur de la théorie, dont les aspects principaux sont résumés dans le tableau synoptique qui suit.

44 Le champ d'application de la théorie peut être élargi aux organisations publiques ou contrôlées par l'Etat. Les relations de mandat entre électeurs et élus, élus et administration participent à une extension de la théorie. L'analyse de Breton et Wintrobe (1982), qui porte sur la bureaucratie publique et privée à partir d'une problématique très proche de celle utilisée par la théorie contractuelle, peut être considérée comme une extension de l'analyse aux organisations publiques. Cette généralisation de la théorie supposerait l'intégration du marché politique dans l'analyse. Pour une présentation de l'analyse de Breton et Wintrobe, cf. Salmon (1983).

45 Contrairement à une idée fort répandue, ce ne sont pas les sciences sociales qui ont fait un emprunt de ce principe à Darwin. Il s'agit au contraire de ce dernier qui a appliqué à la biologie, ce concept utilisé en sciences sociales. Voir sur ce point Hayek (1980, p.26). Cette utilisation du principe de sélection naturelle en économie a particulièrement été prônée par Alchian (1950).

46 La notion de complexité de l'organisation et le critère de minimisation des coûts d'agence sont les éléments à la base de ces propositions. Une organisation complexe est une organisation où l'information spécifique nécessaire à l'accomplissement de la fonction de décision est détenue par de nombreux agents. La notion d'information spécifique est proche de celle d'asymétrie de l'information et a été introduite par Hayek (1945). Cette notion est également proche de la notion d'information impactedness utilisée par Williamson (1975). Il y'a souvent corrélation positive entre la taille de l'organisation et la complexité. La séparation fonctionnelle apparaît être un mécanisme permettant la survie des organisations complexes.

47 L'étude des conséquences de la séparation fonctionnelle est très ancienne, puisque le problème avait déjà fait été évoqué par A. Smith. Dans le cas da la firme managériale, cette étude a été particulièrement approfondie par Berle et Means (1932).

Tableau III-3 Théorie con tractuelle et séparation propriété/décision dans les organisations

Type d'organisation

Complexité
Taile
(1)

Séparation
Décision-contrôle
(2)

Répartition des
Titres
(3)

Organisations avec
séparation propriété-
décision

- le plus souvent complexes

- information spécifique diffuse

- grande taille

- Séparation des fonctions décision-contrôle

- diffuse

- les dirigeants n'ont qu'une faible part des titres

Organisations sans
séparation propriété-
décision

- non complexes

- information spécifique concentrée

- petite taille

- non séparation

- concentrée entre les mains des dirigeants

Type d'organisation

Nature des titres de
propriété
(4)

Systèmes de contrôle
(5)

Exemple-type
(6)

Organisations avec
séparation propriété-
décision

- facilement négociables

- conseil d'administration - hiérarchie

- surveillance mutuelle

- société anonyme avec
actionnariat diffus

Organisations sans
séparation propriété-
décision

- difficilement négociables

- pas de conseil
d'administration

- hiérarchie et surveillance mutuelle peu développées

- entreprise individuelle

 

Source: G. Charreaux (1997), Le gouvernement d'entreprise. Théories et faits, Economica, Paris, P.170

II-1-1 Conseil d'administration et contrôle des dirigeants

Dans les théories contractuelles, la firme est vue comme un centre contractant, un noeud de contrats regroupant les contrats établis par le dirigeant entre la firme et les apporteurs de ressources et les clients. En raison des conflits d'intérêts entre les différents cocontractants, des asymétries de l'information et de l'incomplétude des contrats (impossibilité d'établir des contrats permettant de prévoir toutes les éventualités), l'organisation de l'activité économique (intrafirme et interfirmes) est sous-optimale en ce sens qu'elle ne permet pas d'atteindre le niveau de création de

valeur permis par la coopération, celui qui aurait été obtenu dans l' « économie du Nirvana », dans un monde parfait sans conflits d'intérêts ni inégalités informationnelles et où les droits de propriété sur les actifs seraient parfaitement délimités et protégées. Selon la théorie considérée (théorie positive de l'agence, théorie des coûts de transaction, théorie des droits de propriété), ces pertes de valeur s'analysent comme des coûts d'agence, de transaction ou comme sous-valorisation des droits de propriété. Le système de gouvernance, selon la perspective contractuelle, s'explique par sa capacité à réduire ces pertes de valeur.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard