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Les OGM face à la question de la sécurité alimentaire: controverse et dilemme

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par Jean-Paul SIKELI
Université Cocody Abidjan en partenariat avec le Centre de Recherche et d'Action pour la Paix - DESS droits de l'homme 2005
  

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Paragraphe 2: Des risques toxicologiques

La lutte anti-OGM a atteint sa vitesse de croisière avec la publication des résultats des recherches entreprises par le Docteur Arpad PUSZTAI. Lorsqu'il était encore chercheur à Rowett Reasearch Institute à Aberdeen en Ecosse, PUSZTAI a obtenu des résultats préliminaires inquiétants : après avoir mangé des pommes de terre transgéniques, des rats ont souffert d'un retard de croissance, de problèmes de développement de plusieurs organes vitaux tels que le foie et le cerveau, et d'une déficience alarmante du système immunitaire.

Ses travaux allaient donner lieu à l'une des plus grandes querelles scientifiques (parce que largement médiatisée) de notre époque dans la mesure où les résultats des recherches concluaient à la nocivité des OGM94. De cette expérience, certains scientifiques déduiront des risques toxicologiques certains liés à la consommation de l'alimentation transgénique.

Le transfert horizontal de gène95, la technique qui consiste à transférer directement du matériel génétique dans le génome d'organismes d'espèces totalement différentes semble être le plus sérieux problème de sécurité que pose le génie génétique96. Cela est d'autant plus vrai que certaines constructions artificielles créées par le génie génétique nécessitent l'utilisation de virus et de bactéries qui ne sont en réalité que les véritables vecteurs de maladie97. Or selon des études, il n'est pas exclu qu'au cours d'une ingestion d'aliments transgéniques issus de la recombinaison de l'ADN de bactéries ou de virus, l'estomac humain soit infecté. On rapporte à ce sujet que des recherches, autorisées par le gouvernement du Royaume-Uni pour étudier l'éventualité d'un transfert de gène horizontal dans des bactéries de l'estomac de volontaires, ont donné lieu à des résultats positifs98. Les dangers les plus insidieux du génie génétique résideraient donc dans la technologie elle-même puisqu'elle augmente grandement la portée et la probabilité des transferts horizontaux de gènes et de recombinaison, la voie décrite comme idéale pour la création de virus et de bactéries qui pourraient provoquer des épidémies. Il semble que les techniques nouvelles, comme la recombinaison de l'ADN, permettent aux généticiens de créer en laboratoire, en quelques minutes, des millions de virus recombinants qui n'ont jamais existé durant les milliards d'années de l'évolution de notre monde. Or les virus et les bactéries susceptibles de provoquer des maladies et leur matériel génétique sont en toute hypothèse les matériaux et les outils prédominants du génie génétique, les mêmes sont utilisés pour la création intentionnelle d'armes biologiques. Diverses possibilités au service d'une attaque biologique seraient envisageables par manipulations génétiques : rendre pathogène une bactérie naturellement offensive, en y insérant des gènes de toxicité prélevées sur le génome de bactéries dangereuses, modifier une bactérie pathogène afin d'empêcher sa reconnaissance par le système immunitaire ou de la rendre résistante aux antibiotiques, introduire un virus silencieux dans une population ciblée puis réveiller ce virus par un signal chimique99 . Une autre forme de bioterrorisme pourrait être de déclencher des maladies dites agricoles, ce qui serait à la fois efficace et discret, un laboratoire agronomique se distinguant avec peine d'un laboratoire militaire et certains OGM agricoles présentant des points communs avec des agents bactériologiques militaires100. Le pire est donc à craindre.

De plus, l'ADN transgénique serait reconnu pour survivre à la digestion dans l'intestin et pour sa capacité à pénétrer dans le génome de cellules de mammifères, ce qui augmenterait la possibilité de déclencher le cancer101. Par ailleurs, il existe une ample documentation scientifique montrant que l'augmentation massive des produits chimiques et phytosanitaires dans le traitement des plantes fait courir un risque important sur la santé humaine. Et pourtant, des statistiques102 révèlent que, plus de soixante quinze pour cent des plantes génétiquement modifiées ont été conçues pour être tolérantes à des herbicides. On avance que non seulement ces herbicides tuent les plantes sans discrimination, mais ils sont également dangereux pour les animaux et les êtres humains. Certains herbicides à l'instar du glufosinate d'ammonium et du glufosate sont reconnus pour leur toxicité. Le glufosinate d'ammonium ou phosphinothricine utilisé dans le traitement de certaines plantes génétiquement modifiées est réputé pour sa nocivité pour les systèmes neurologiques, respiratoire, gastro-intestinal et hématologique et provoquerait des malformations chez les humains et les mammifères103. En ce qui concerne le glyphosate couramment utilisé dans le traitement des plantes transgéniques appelés «Roundup Ready» conçues par la firme MONSANTO, des études révèlent que ce produit constitue la cause principale d'empoisonnements et de plaintes au Royaume-Uni. En effet on rapporte que nombreuses sont les personnes qui après avoir inhibé ce produit par voie alimentaire ont perdu l'usage de certaines fonctions vitales : pertes d'équilibre, vertiges, réductions des capacités cognitives, troubles de la vue et perte de l'odorat, troubles de l'ouie et du goût, maux de tête, baisse de tension, paralysies des muscles, neuropathies, extrême fatigue104 ... Certains scientifiques vont jusqu'à faire admettre que l'exposition à ce produit peut doubler le risque de fausse couche105 et que les enfants de parents qui l'utilisent seraient plus aptes à développer des troubles de comportement106. Le Docteur Jorge KACKZEWER107, médecin à Buenos Aires note à ce propos que le glyphosate vendu aux agriculteurs n'est pas pur. En effet selon lui, « dans les formules commerciales, des ingrédients inertes sont ajoutés pour que le produit pénètre mieux dans la plante », lesquels pourraient également avoir des conséquences désastreuses sur la santé. Mais ce qui préoccupe surtout le médecin argentin, c'est leur combinaison avec le glyphosate car il « crée une synergie qui produit des symptômes nouveaux, non explicables par la symptomatologie de chacun des produits ». Enfin l'un des problèmes sérieux que soulève le génie génétique dans l'alimentation est le risque de résistance aux antibiotiques. De quoi s'agit-il ? En général, une expérience de transgénèse nécessite un grand nombre de cellules eu égard à son faible taux de réussite. Elle requiert en conséquence la présence d'un système de repérage permettant de sélectionner les organismes issus de cellules manipulées ayant intégré le transgène. Le plus souvent, les chercheurs introduisent avec le transgène un gène de résistance à un antibiotique, dit gène marqueur, ce qui permet, par application de l'antibiotique, de détruire les cellules non modifiées. La source du problème est la possibilité de transmission du gène de résistance d'une plante transgénique à des bactéries pathogènes pour l'homme par le phénomène des transferts horizontaux. Il en résulterait inéluctablement une recrudescence de la maladie causée par l'agent pathogène dans la mesure où il serait quasiment impossible de lutter contre ces gènes pathogènes résistants aux antibiotiques, transférés à l'organisme humain avec les antibiotiques actuels. Peut être alors faudra-t-il « surdoser » les antibiotiques pour espérer avoir la guérison. De ce point de vue, le développement de résistance aux antibiotiques peut être envisagé comme une fatalité. Si la recrudescence de microorganismes pathogènes due au développement de résistance aux antibiotiques est réelle, nous pouvons espérer une parade dans les progrès incessants de la biologie moléculaire, qui ne se contentera bientôt plus de produire en masse des substances antibiotiques naturelles, mais inventera certainement de nouvelles molécules entièrement synthétiques108. Compte tenu des problèmes posés par le

génétique en ce domaine, la Commission Européenne a entrepris des travaux en vue d'identifier les gènes de résistance aux antibiotiques qui devraient être éliminés des futures constructions génétiques parce que pouvant présenter un danger pour la santé humaine et l'environnement109.

Les OGM sont donc perçus ici comme une menace potentielle et réelle pour le consommateur. C'est ce qui ressort en tout cas des analyses de certains professionnels de la santé nutritionnelle.

A ce niveau de la réflexion, on retiendra que l'introduction des OGM dans l'alimentation et l'agriculture est a priori le domaine le plus controversé des biotechnologies modernes110.

Cette situation est liée à la place de choix qu'occupe l'alimentation dans les sociétés humaines. La question qui reste entière est de savoir si les motivations profondes qui animent les pro- et les anti-OGM dans ce débat d'une rare complexité, sont légitimes. Il est certain que derrière cette confusion totale se cache bien une guerre idéologique larvée, entretenue par des intérêts divergents. D'un côté, les promoteurs des OGM sont représentés par de grands groupes capitalistes à la recherche de profits, de l'autre côté, se trouvent des mouvements écologistes et les altermondialistes111 qui luttent contre le phénomène de mondialisation dont les OGM feraient partie. De toute évidence toutes ces contradictions méritent d'être prises en compte pour faire naître un minimum de consensus autour des opportunités réelles que pourraient offrir les biotechnologies modernes. Pour être plus juste, la plupart des partisans des biotechnologies modernes n'affirment pas que les cultures génétiquement modifiées peuvent résoudre tous les problèmes. Ils disent que le génie génétique est seulement un outil essentiel parmi tant d'autres et qu'il pourrait à cet effet ouvrir de grandes perspectives dans le domaine agroalimentaire. Mais le génie génétique entraîne une série de problèmes pour la sécurité biologique, ce qui exige forcément des ressources considérables pour en assurer la gestion. Il transfère la recherche développement en agriculture du secteur public au secteur privé via les firmes multinationales, et perturbe un processus collectif de sélection des plantes qui existait depuis des temps immémoriaux. C'est donc à juste titre que Richard HORTON éditeur de la revue scientifique anglaise The Lancet, affirme qu'« il y a un grand potentiel dans la recherche (...) qui pourrait venir des industries de technologies alimentaires et toute préoccupation sur la sécurité pourrait mettre en danger cet investissement gigantesque. On peut donc comprendre que les scientifiques soient inquiets de mettre en danger cet investissement » 112. En réalité, les OGM placent la société toute entière au coeur d'un profond dilemme entretenu par la volonté de résorber le déficit alimentaire grâce aux progrès de la science et les exigences de survie humaine qui réside dans le besoin de sécurité. Nous pensons avec Georges POSTE, directeur scientifique du groupe pharmaceutique SMITH KLINE BEECHMAN que « l'angoisse du public face à des évolutions technologiques que nous tenons désormais comme acquises ou plutôt non, que nous considérons et exigeons comme des droits inaliénables trouve sa source commune dans l'ignorance du public en matière scientifique, et dans la menace ressentie par les pouvoirs économiques et politiques établis lorsque (...) subsistent des incertitudes. On devrait tenir compte des ambiguïtés et prendre des mesures afin de réduire lesdites incertitudes ...»113. La communauté scientifique est donc appelée à construire le consensus nécessaire autour de la dialectique OGM / sécurité alimentaire. Certes toute technologie nouvelle est susceptible d'entraîner des risques directs ou indirects, cependant les problèmes posés par les OGM surtout dans l'alimentation exigent une surveillance plus accrue. Il ne s'agit pas pour nous de vouer cette technologie agricole aux gémonies, mais plutôt de tenir compte des préoccupations des uns et des autres pour faire avancer le débat. Sans pour autant entrer dans les considérations d'ordre scientifique, nous pensons en toute honnêteté que le principe de l'équivalence en substance est intellectuellement dépourvu de sens dans la mesure où la composition organique des aliments transgéniques est bien différente de celle des aliments conventionnels. Il faudra donc tenir compte de cet aspect des choses dans l'évaluation des risques sanitaires des aliments.

Somme toute, il faut avouer que la complexité du débat réside dans la difficulté de discerner entre la vérité et les rumeurs.

En tout état de cause, rien ne garantit que des plantes ayant absorbé une quantité importante d'herbicides ne soient pas toxiques. Les risques croissants d'allergies alimentaires ne sont pas à écarter, ainsi que la possibilité d'infection des cellules du corps humain par des vecteurs viraux après ingestion d'aliments transgéniques. Une recombinaison avec divers éléments génétiques ou des virus endogènes dans les cellules de l'hôte pourrait également favoriser l'émergence de virus pathogènes. Le risque le plus redouté pour l'homme, mais qui reste encore théorique, est le transfert aux microorganismes de la flore intestinale de gènes de résistance aux antibiotiques. De toute évidence, l'apparition très récente des OGM sur le marché ne permet pas d'avoir le recul suffisant pour évaluer tous les avantages et tous les risques qui en résulteraient. Tout ceci doit tempérer les euphories et les angoisses et pousser à la prudence.

La polémique actuelle sur les OGM, souvent réduite à leurs avantages et à leurs inconvénients dans leur rapport à la sécurité alimentaire, n'est rien d'autre que la partie visible de l'iceberg d'un débat qui intéresse divers domaines de la société. La question des OGM cache certains enjeux qui pourraient aussi bien expliquer les contradictions profondes qui existent entre les acteurs en présence. Il importe donc d'aborder ces questions qui gardent toute leur importance dans ce débat multidimensionnel.

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