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Les Comités de Défense de la Révolution(CDR) dans la politique du Conseil National de la Révolution(CNR)de 1983 à  1987: une approche historique à  partir de la ville de Ouagadougou

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par Kakiswendépoulmdé Marcel Marie Anselme LALSAGA
Université de Ouagadougou - Maîtrise 2007
  

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V.2.2. Halte a la desertification : les trois luttes

Le Burkina Faso est un pays sahélien. En dehors des régions du SudOuest qui bénéficie d'une pluviométrie relativement abondante, le reste du pays éprouve dans son ensemble un régime pluviométrique souvent précaire et capricieux. Le cas du

275 Ludo MARIENS, 1989, SANKARA, COMPAORE et la révolution, Paris, EPO International, page 168.

276 Helmut ASCHE, 1994, Le Burkina Faso contemporain : l'expérience d'un auto- développement, Paris, L'Harmattan, page 105.

277 Voir les comptes rendus du conseil des ministres du CNR dans CARREFOUR AFRICAIN ou SIDWAYA. Par exemple CARREFOUR AFRICAIN N° 892 du 19 juillet1985 et N° 974 du 13 février 1987 respectivement dans les pages 12 et 6.

101 Nord est très désolant avec un total pluviométrique atteignant difficilement 500mm par an. La végétation dans son ensemble qui résulte de cette situation n'a rien d'extraordinaire. Elle est caractérisée par une savane dégradant des régions Sud et Ouest aux localités de l'Est et du Nord. Le Nord est quasiment exsangue d'arbres et est dominé par le désert, raison pour laquelle le pays est reconnu comme un pays sahélien.

La population du Burkina Faso en pleine croissance a développé dans l'espace et dans le temps des agissements prédateurs à l'endroit de la nature favorisant la désertification.

Pour illustrer toute la gravité du dépérissement de la nature, Thomas SANKARA déclarait lors de la conférence internationale sur l'arbre et la forêt tenue le 05 février à Paris en 1986 : « Les Burkinabe ont regarde mourir des mares, des peres, des filles et des fils que la faim, la famine, la maladie et l'ignorance decimaient par centaines. Les larmes aux yeux, ils ont regarde les mares et les rivieres se dessecher, les arbres mourir et le desert les envahir a pas de geant. On estime a 7 km par an l'avancee du desert ».278

Pour combattre ce fléau, le CNR institua un ministère de l'environnement qui s'appuya sur les CDR : « La lutte contre la desertification est surtout et avant tout (...) une affaire qui concerne directement les CDR » affirmait la commission économique de la première conférence nationale des CDR.279 C'est ainsi que le mot d'ordre « les trois luttes » a été lancé. Trois luttes pour espérer venir à bout du phénomène de la désertification : il s'agissait de la lutte contre la coupe abusive du bois, la lutte contre la divagation des animaux et la lutte contre les feux de brousse.

Le bois constituait la principale ressource énergétique. Le pourcentage du bois dans la consommation énergétique annuelle était de 94% en moyenne.280 Pourtant, il fallait parcourir plusieurs dizaines de kilomètres autour de Ouagadougou pour trouver des arbres morts et les couper pour la consommation domestique. Ce qui n'était pas toujours le cas car les commerçants de bois n'hésitaient pas à couper des arbres verts au mépris de la flore. L'urgence de décourager cette pratique appelée coupe abusive du bois se posait au CNR. La solution fut le contrôle du commerce par les agents forestiers et les CDR qui taxèrent des amendes aux commerçants lorsque ceux-ci ne respectaient pas le règlement en vigueur. A partir de juillet 1985, les CDR obtenaient exclusivement le contrôle du commerce du bois ; les commerçants devaient désormais retirer des agréments de coupe et de vente du bois et du charbon auprès des CDR. Ces derniers acquirent de ce fait l'autorisation de sélectionner les demandes qui étaient

278 Thomas SANKARA, « Sauver l'arbre, l'environnement et la vie tout court », Discours prononcé lors de la tenue de la conférence internationale sur l'arbre et la forêt à Paris le 05/02/1986% in SIDWAYA N° 456 du 10 février 1986, pages 3 et 4.

279 Voir le rapport de la conférence à la page 62.

280 Bruno JAFFRE, Burkina Faso : les années sankara, Paris, L'Harmattan, page 131.

102 déposées au niveau des permanences, d'attribuer les certificats aux grossistes et aux détaillants, de contrôler les prix de vente et de revente sur les marchés.281

La volonté d'amoindrir l'usage du bois dans la consommation énergétique domestique s'accompagna d'une campagne pour amener la population citadine à utiliser le gaz. Toujours dans ce cadre, le Ministère de l'Essor familial en concertation étroite avec les CDR conçut et vulgarisa des foyers dits améliorés. « Cette campagne a été entreprise en vue de sensibiliser chaque famille a la nécessité d'avoir au moins un foyer amélioré permettant aux femmes d'économiser 40% de leur bois ».282

En 1986, on estimait à 1749, le nombre de formatrices initiées par le ministère de tutelle et les CDR.283 Enfin, des campagnes de reboisement furent organisées régulièrement. Le reboisement devint un cheval de bataille principal pour contrecarrer la désertification. Il ne se passa plus de cérémonies sans plantations d'arbres. Lorsqu'il y avait une cérémonie de mariage, les conjoints devaient se munir de plants à la permanence. Ainsi, on estime à 10 millions le nombre d'arbres qui ont été plantés dans le cadre du PPD.284 Effort louable jamais fait sous les régimes antérieurs.

Le cas de la lutte contre la divagation des animaux a suscité beaucoup de controverses et de frustrations. Le CNR estima que la part de destruction de l'environnement due à la divagation des animaux était considérable. Il chercha alors a sédentariser le bétail « afin de privilégier le caractere intensif de l'élevage pour lutter contre le nomadisme sauvage »285 dangereux pour l'environnement. D'après les informations dont nous disposons par rapport à cette guerre contre le fléau, les CDR avaient l'obligation d'abattre tout animal censé être dans un enclos en temps normal qui divaguait. Cependant, comme le souligne la première conférence des CDR, l'application de cette mesure à savoir l'abattage systématique des animaux avait connu une vraie désapprobation, notamment dans les milieux ruraux.286 Les heurts entre éleveurs et CDR étaient naturellement fréquents, les derniers exagéraient dans l'application de la mesure. En réalité, ils en abusaient pour disposer de la viande puisqu'ils se l'appropriaient chaque fois qu'un animal était abattu. Même entre CDR, les conflits ne manquaient pas au sujet des animaux abattus, notamment pour le partage de la viande obtenu, au niveau des permanences. Finalement, il en résultait une interprétation abusive de la mesure à des fins de gourmandise.

281 Voir Sylvy JAGLIN, 1995, Gestion urbaine partagée à Ouagadougou : pouvoirs et périphéries, Paris, Karthala, page 309.

282 Marcelline SAMA et Omar OUEDRAOGO, « Les femmes dans la RDP » in CARREFOUR AFRICAIN N° 894 du 2 août 1985, page 19.

283 Consulter le rapport de la 1ère conférence des CDR, page 64.

284 Confère Discours de Thomas SANKARA sur l'arbre et la forêt prononcé à Paris le 05 février 1986 in SIDWAYA N°456 du 06 février 1986, pages 3 et 4.

285 Ibidem.

286 Confère Rapport de la 1ère Conférence des CDR, page 69.

103

Enfin, en ce qui concerne les feux de brousse, il faut reconnaître qu'ils constituaient en vérité un phénomène dont les méfaits sur l'environnement étaient expressifs. Avant l'arrivée du CNR au pouvoir, le phénomène était fréquent surtout après la saison pluvieuse à cause des compagnes de chasse et des travaux champêtres. Au pouvoir, le CNR décida de faire abandonner cette pratique calamiteuse. En effet, les feux de brousse étaient utilisées comme techniques de défrichage ou de chasse. En collaboration avec le ministre de tutelle de l'environnement, les CDR organisèrent des campagnes de sensibilisation au niveau des villages au cours desquelles ils promirent de lourdes peines aux pyromanes.287 Dans l'ensemble, la diminution des feux a été une effectivité entre 1983 et 1987. Faite pacifiquement ou coercitivement, l'oeuvre sensibilisatrice avait porté du fruit. Cependant, après la chute du CNR, le phénomène allait reprendre de plus belle.288 La sensibilisation n'avait donc pas touché tout le monde ou du moins on avait respecté le mot d'ordre sans rien comprendre de sa vertu.

On ne peut certainement pas dresser un bilan négatif en ce qui concerne les trois luttes contre la désertification. Les trois luttes ont été des écoles dont la contribution à la responsabilisation du citoyen burkinabé vis-à-vis de son environnement a été possible au-delà des écueils qu'elles ont comportés avec l'action des CDR.

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