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Les Comités de Défense de la Révolution(CDR) dans la politique du Conseil National de la Révolution(CNR)de 1983 à  1987: une approche historique à  partir de la ville de Ouagadougou

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par Kakiswendépoulmdé Marcel Marie Anselme LALSAGA
Université de Ouagadougou - Maîtrise 2007
  

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V.2.4. L'education : l'ecole revolutionnaire et l'alphabetisation des masses

L'avènement du CNR ouvrit une nouvelle ère pour tout le système éducatif qui souffrait d'une précarité. La faiblesse du taux d'alphabétisation et celle de la scolarisation s'illustraient parmi les plus expressifs du monde.

Face à ce fléau, le pouvoir révolutionnaire mit en oeuvre une série de réformes pour faciliter l'accès à l'école. Dans ce sens, le CNR décida la baisse des frais de scolarité dès la rentrée 1984 : les frais du premier cycle au niveau des établissements privés passèrent de 70 000 F à 40 000 F, le second cycle de 79 000 F à 45 000 F et l'école primaire de 25 000 F à 10 000 F.305 Ensuite, il entama en même temps un vaste programme d'accroissement des équipements scolaires avec la contribution des structures populaires.

Dans les secteurs de la ville de Ouagadougou, les CDR se chargèrent du projet. Grâce à des cotisations, à des activités socio-économiques (kermesses, bals populaires ...), à l'appui d'ONG et à la gratuité de la main-d'oeuvre, des secteurs arrivèrent à se construire des écoles. Les exemples d'édification d'école ne sont pas rares dans la ville. Par exemple au secteur 29, les écoles B et C ont été construites grâce au dynamisme des CDR. A ce propos, Henry KABORE, responsable aux activités socioéconomiques, raconte que des cotisations, des briques, du ciment et du sable avaient été souvent sollicités aux habitants, surtout aux parents d'élèves. Le samedi, les CDR faisaient sortir les gens pour assurer la main d'oeuvre.306 Dans les secteurs 22 et 25, des écoles ont été également édifiées avec la contribution remarquable des CDR. Les responsables CDR du secteur 22 rapportèrent que leur contribution à la construction de leur première école en 1986 s'élevait à quatre millions de francs CFA, ceux du 25 dépensèrent une somme estimée à 3,5 millions en 1987.307

Globalement, on peut dire que la politique scolaire amorcée par le CNR peut se féliciter d'une certaine réussite ; les résultats obtenus en parlent aisément. A l'avènement de la révolution, 215 300 écoliers suivaient les cours dans 1176 écoles primaires et 32397 élèves s'instruisaient dans 89 établissements secondaires.308 A la rentrée 1987-1988, 411900 écoliers étaient enseignés dans 2108 écoles et 76872 élèves dans 137 établissements.309 Les 932 écoles primaires et les 48 établissements furent

305 Roger Bila KABORE, 2002, Histoire politique du Burkina Faso : 1919 - 2000, Paris, L'Harmattan, page 160.

306 Henri KABORE : entretien du 03 août 2004.

307 Sylvy JAGLIN, 1995, Gestion urbaine partagée à Ouagadougou : pouvoirs et périphéries, Paris, Karthala, page 315.

308 Chiffres du Ministère de l'Education cité par Ludo MARTENS, 1989, SANKARA, COMPAORE et la révolution, Paris, EPO International, page 213.

309 Ibidem.

109 réalisés grâce à la mobilisation populaire obtenue par les structures populaires de la révolution.310 De 16% au début de la révolution, le taux de scolarisation grimpa à 20%311, en 1986 et a 30% en 1993.312

Restons là pour mentionner la construction de garderies populaires qui entrait dans le cadre d'une recherche de l'éveil et de l'épanouissement de l'enfance. Le rapport de la 1ère conférence des CDR inventoria 17 garderies populaires édifiées dans la ville de Ouagadougou par les CDR.313 Des organisations internationales comme l'UNICEF, la Coopération italienne, le Lion's Club... financèrent la construction d'une dizaine au niveau des périphéries, mais avec l'apport en main-d'oeuvre des populations et la logistique des CDR.314

Le CNR lança également le Mouvement National Pionnier, une organisation de l'enfance, rattachée aux CDR, le 22 mai 1985 au Stade du 04-Août.315 La pédagogie de cette innovation fut d'oeuvrer à la création de la société nouvelle prônée par le DOP en agissant sur la conscience des tout petits. Le mouvement pionnier faisait partie donc des réformes initiées pour rénover le système éducatif qui constituait un créneau non négligeable pour la transmission de l'idéologie révolutionnaire dès la base.

Figure 12: Un rang de pionniers en 1987. Source : http://thomassankara.net

310 Chiffres du Ministère de l'Education cité par Ludo MARTENS, 1989, SANKARA, COMPAORE et la révolution, Paris, EPO International, page 213.

311 Bruno JAFFRE, 1989, Burkina Faso : les années sankara, Paris, L'Harmattan, page 93.

312 Basile GUISSOU, 1885, Burkina Faso : un espoir en Afrique, Paris, L'Harmattan, page 117.

313 Voir le rapport de la première conférence des CDR à la page 87.

314 Sylvy JAGLIN, 1995, Gestion urbaine partagée à Ouagadougou : pouvoirs et périphéries, Paris, Karthala, page 318.

315 François COMPAORE, « Lancement officiel du mouvement pionnier : nourrir les enfants de la seve révolutionnaire » in CARREFOUR AFRICAIN N° 885 du 31 mai 1885, page 14.

Le nerf de cette école était de contribuer au façonnement de l'homme nouveau pour l'édification de la société nouvelle tant défendue par le DOP. Il était donc question de nourrir les enfants de la sève révolutionnaire comme l'illustre éloquemment cette affirmation de la directive instituant le mouvement : « Si depuis le 04 aout 1983, le peuple burkinabé [...] s'est créé un cadre organisationnel - les CDR - pour exercer le pouvoir populaire, les plus jeunes camarades [...] devant respecter la philosophie du DOP et continuer la lutte pour atteindre les objectifs de la RDP en garantissant son aboutissement n'étaient pas encore dotés d'une structure propre d'expression. Il s'imposait donc un devoir révolutionnaire de leur créer ce cadre qu'est le Mouvement National des Pionniers qui constituera la pépinière des CDR, un cadre de formation politique, idéologique, socio-économique, et culturel, cadre oft ces jeunes seront édifiés en éléments intrépides, dynamiques, disciplinés, travailleurs et patriotiques ».316

Le mouvement pionnier selon les directives était structuré en trois niveaux ; les pionniers de chaque niveau se distinguant des autres par une dénomination particulière : les pionniers du niveau 1 qui concernait les élèves du CE2 s'appelaient Janto(expression dioula qui signifie rappelle-toi toujours de moi), ceux du niveau II qui regroupait les élèves du CM1 et CM2 étaient appelés Djambou(terme lélé signifiant enfant intrépide), enfin ceux du niveau III qui rassemblait les élèves de 6e et 5e des établissements secondaires étaient appelés Abga(panthere en langue mooré). Les encadreurs des pionniers étaient appelés Sofa et l'école qui était leur lieu de rassemblement s'appelait Keego(champ d'initiation en langue mooré).

Le mouvement pionnier à l'instar des CDR a réellement fonctionné et contribué notablement à l'éveil des consciences des enfants sous la révolution, surtout quant à ce qui était de leur capacité de production socio-économique et culturelle. On peut donner pour exemples leurs participations aux activités de production des CDR comme les champs collectifs, la confection de foyers améliorés.317

Sur le plan culturel, on peut mentionner leurs prestations appréciées (théâtres, chants, ballets...) à l'occasion des manifestations marquant les anniversaires de la Révolution ou d'autres évènements politiques.318 Précisons que ce mouvement avait permis la création de deux ensembles musicaux : les Petits chanteurs au poing levé et les Colombes de la révolution.

316 Capitaine Pierre OUEDRAOGO, « Directives sur le mouvement pionnier » in CARREFOUR AFRICAIN N° 885 du 31 mai 1985, page 17.

317 Voir le rapport de la 1ère conférence des CDR à la page 1.

318 CNR, SGN-CDR, 1986, Premier symposium sur le mouvement national des pionniers 13 et 14 mars 1986 : pour une action dynamique du Mouvement National des Pionniers, page 13.

On ne peut pas nier les performances réussies par la révolutionnarisation du monde scolaire en matière de statistiques. Les chiffres obtenus que nous avons déjà évoqués plus haut constituent des pièces à conviction.

Figure 13: Les petits chanteurs au poing levé pendant le diner gala du sommet de la CEAO en aoat 1986 a Ouagadougou. Source : Présidence du Faso /Archives nationales. Cote : 5Fi 571.

Toutefois, l'ensemble des initiatives développées par le CNR pour révolutionner le scolaire n'en demeure pas moins critiquable. On lui reproche d'avoir eu pour insuffisance la baisse de la qualité de l'enseignement. Certains spécialistes expliquèrent ce déclin par le licenciement massif des enseignants à l'issue de la crise qui avait opposé le régime au SNEAHV, puisque les militants qui avaient remplacé les disgrâciés ne disposaient pas d'un bagage pédagogique adéquat pour assurer l'instruction des écoliers.319 Cette dégradation de la qualité de l'enseignement peut être expliquée également par le recrutement massif et l'accroissement numérique des infrastructures non accompagnés par celui du personnel enseignant.

Tout en cherchant à garantir l'enseignement à tous les enfants scolarisables, le CNR déclencha une vaste campagne d'alphabétisation. Cette opération qui concerna tout le territoire national visait à faire reculer les frontières de l'ignorance et de l'obscurantisme surtout dans les milieux ruraux. Alphabétiser les masses, c'est leur confier la clé de leur épanouissement. Ceci étant, dès le mois de décembre 1983, le CNR adopta son premier programme d'alphabétisation de concert avec l'Institut

112 National d'Alphabétisation et de Formation des Adultes (INAFA) qui devint l'INA (Institut National d'Alphabétisation). Pour donner plus d'ampleur à cette croisade révolutionnaire contre l'obscurantisme, le CNR institutionnalisa l'expérience en la mettant sous la tutelle du Ministère de l'Education.

Le CNR, comme il était de son habitude, se servit de ses relais d'action. Les CDR conscientisèrent et mobilisèrent les incultes en matière d'alphabétisation. En février 1986, l'Opération Alpha commando est lancée avec pour mission de réussir en 48 jours l'apprentissage de l'écriture, de la lecture et du calcul aux analphabètes dans leurs langues maternelles.320 De février à avril 1986, 35000 responsables d'association et de coopérative et de groupements villageois bénéficièrent de l'alphabétisation dans neuf langues nationales.321 L'exaltation des gens pour l'opération a été plus observable dans les sphères rurales. Dans les villes comme Ouagadougou, l'opération ne connut effectivement pas la même « floraison » à cause de l'importance de la scolarisation qui battait tous les records des autres localités. Il n'en demeure pas moins que des citadins aient été alphabétisés. En 1986, 50 militants CDR reçurent une formation d'alphabétiseurs auprès de l'INA et purent s'occuper de l'alphabétisation des personnes nécessiteuses dans leurs secteurs.322

L'analyse de tout le système éducatif émanant de la révolution révèle un certain dynamisme stimulé avec le soutien des structures populaires qui à tout point de vue a été rentable. Au-delà des perspectives socio-économiques poursuivies, les stratégies usitées visaient à faire de l'institution éducative un véhicule politique et idéologique pour la consolidation de la révolution. La construction des équipements scolaires est à envelopper dans un autre dynamisme, celui de l'urbanisation que notre exposé se propose d'analyser à présent.

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