WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Les Comités de Défense de la Révolution(CDR) dans la politique du Conseil National de la Révolution(CNR)de 1983 à  1987: une approche historique à  partir de la ville de Ouagadougou

( Télécharger le fichier original )
par Kakiswendépoulmdé Marcel Marie Anselme LALSAGA
Université de Ouagadougou - Maîtrise 2007
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

VI.1.4. Citoyens! Au sport pour défendre la revolution

Le CNR mit le sport au centre de sa politique mobilisatrice et moralisante. Ceci étant, il inscrivit la construction de 7000 terrains de sport à travers le territoire national dans le PPD. En s'appuyant sur les CDR, le pouvoir invita vivement la population à souscrire à sa volonté sportive.

Cette incitation trouva un écho favorable au niveau des CDR, et ceux-ci s'engagèrent à l'aménagement de surfaces pour servir de terrains de sport. Dans la ville de Ouagadougou, chaque CDR devait doter d'un terrain de sport son secteur. L'animation sportive devint alors une constante dans la vie des CDR. Ce fut d'ailleurs pour cette raison que chaque bureau CDR avait responsabilisé un membre aux sports et loisirs. Ce dernier se chargeait de la coordination de toutes les initiatives qui concouraient à créer une ferveur sportive au niveau des masses. Par exemple, le budget 1986%1987 du secteur 30 consacra 60 000 F à l'achat de ballons de football.379. Les secteurs 15 et 29 ne s'étaient pas contentés de réaliser un seul terrain, mais deux. Les secteurs avaient des équipes de football qui s'affrontaient à l'occasion de tournois comme la coupe Amilcar CABRAL du haut-commissaire du Kadiogo.380 Sur le plan national, la contribution des CDR à la création d'infrastructures sportives pour

376 Voir le rapport de la 1ère conférence des CDR, page 94.

377 Henri KABORE : entretien du 03 août 2004 à son domicile au secteur 29.

378 Babou Paulin BAMOUNI, « Idéologie : le mot camarade », in CARREFOUR AFRICAIN N°808 du 09 décembre 1983, page 13.

379 Sylvy JAGLIN, 1995, Gestion urbaine partagée à Ouagadougou : pouvoirs et périphéries, Paris, Karthala, page 327.

380 Rapport de la 1ère conférence des CDR, page 122.

127 permettre une pratique vivante du sport dans toutes les localités peut être saluée comme une oeuvre extraordinaire. De 1983 à 1986, 3855 « stades » ont été construits à travers le territoire du Burkina Faso grâce à la mobilisation populaire exercée par les CDR.381

Le 24 septembre 1984, le CNR procéda à l'institution du sport de masse. Chaque jeudi, les citadins avaient ce devoir révolutionnaire de faire le sport sous la supervision des CDR. Au niveau des services comme au niveau des CDR géographiques, une cellule de dix militants dirigée par le responsable aux activités sportives et culturelles fut instruite pour engager une action de sensibilisation sur la nécessité de pratiquer le sport.382 Lors du deuxième anniversaire de la RDP en 1985, Thomas SANKARA justifiait l'institution du sport de masse en ces termes : « Parce que voulons une société saine, bien équilibrée, assurée sur ses jambes, fraiche d'esprit et de corps, la RDP a décidé d'introduire le sport a tous les niveaux de la vie de ce pays [...]. 2l a été décidé que le sport sera au cceur de toutes les préoccupations des Burkinabé ».383

Cependant, résumer l'essence de cette popularisation et cette « spectacularisation » du sport dans la seule recherche d'un bien-être physique signifie biaiser la face cachée d'une rhétorique qui se voulait incessamment politique. Le sport devenait ainsi un instrument de combat révolutionnaire qui permettait au pouvoir de s'approprier une conscience d'appartenance des masses : « Ce n'est pas un simple creuset du divertissement. 2l nous aide a effacer toutes nos divisions conjoncturelles et pousse tout le monde [...] a regarder la nécessité absolue d'unifier nos rangs ».384 Le sport apparaît alors comme un moyen de mobilisation populaire au bénéfice de la révolution.

En outre, la pratique du sport symbolisait les valeurs morales édictées par le CNR pour la construction de sa nouvelle société. Il s'agissait donc d'une campagne éducative à travers laquelle se profilaient le volontarisme, l'austérité, l'amour du travail, la combativité et la productivité : « Le sport, c'est la victoire sur soi-meme, la victoire sur nos instincts de paresse et de mollesse. Une lutte contre le défaitisme et la peur de perdre. Une lutte contre l'adversité, contre autrui ».385

L'analyse de la réaction des masses dont la ferveur révolutionnaire devait transparaître à travers la pratique du sport de masse est ici intéressante à faire. Très

381 Rapport de la 1ère conférence des CDR, page 121.

382 J.P. AUGUSTIN et Y.K. DRABO, « Au sport, citoyens ! » in POLITIQUE AFRICAINE N° 33, 1989, Retour au Burkina, Paris, Karthala, page 61.

383 Capitaine Thomas SANKARA, « Le deuxième anniversaire de la RDP ponctue une étape qualitative nouvelle dans notre marche en avant », discours de l'An II in SIDWAYA N°327 du 06 août 1985, page 4.

384 Thomas SANKARA, cité par J.P AUGUSTIN et Y.K. DRABO, in POLITIQUE AFRICAINE N° 33, 1989, Retour au Burkina, Paris, Karthala, page 64.

385 Propos de Thomas SANKARA cités par Pascal LABAZEE, « La société burkinabé vue par le pouvoir révolutionnaire : du discours a l'action » in CEAN, 24 juin 1986, Changement politique et ordre social au Burkina Faso, Bordeaux, pp. 20 - 21.

128 vite, l'exigence de la pratique du sport de masse avait nourri plusieurs intrigues au niveau de la société, notamment dans les services où elle était devenue un critère d'évaluation et d'allégeance politique. En effet, le CNR avait décidé de ne plus se baser seulement sur les compétences professionnelles pour avancer les fonctionnaires, mais de tenir compte de l'assiduité de ces derniers dans la pratique du sport de masse.386 « C'est dire que l'inaptitude totale de tout individu a la pratique du sport équivaut a une inaptitude totale de ce dernier a servir le peuple dans la fonction publique. Et il faut alors en tirer toutes les conclusions ».387 De ce fait, la pratique du sport de masse s'était révélée comme une réalité indéniable, mais dans quel climat ? Assurément dans un climat de coercition et de suspicion. Les fonctionnaires dans les services n'avaient certainement pas le choix.

Néanmoins, des résistances s'étaient dessinées. Effectivement, on assista à un télescopage entre les CDR et les syndicats dans les services. Même lorsque cette contestation n'était pas ouverte, elle s'exprimait de manière insidieuse. Ces résistances furent d'autant plus efficaces qu'elles tentèrent de contourner les décisions de l'Etat. Dans de nombreuses administrations, la protestation face aux mesures obligées prit des formes variées telles le retard aux exercices, la disparition discrète après l'appel, le non achat de la tenue exigée (le jogging frappé du sigle du CDR de l'administration). « Cette maniere de jouer avec les normes imposées par l'Etat peut prêter a sourire, mais elle cachait en réalité l'agacement d'une grande partie de la population qui reprochait au gouvernement de pratiquer la dialectique du vouloir et du non-vouloir ».388 L'utilisation du sport comme moyen de mobilisation populaire et de défense de la révolution s'insérait dans une réforme culturelle qui mettait au centre de ses préoccupations, les intérêts de la révolution.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon