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Régime virtuel équilibré pour jeunes placés

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par Olivier SINTEFF
Centre promotion sociale d' éducateurs ( C.P.S.E.) de Liège - Bachelier en éducation spécialisée en accompagnement psycho-éducatif 2013
  

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2.2. Cyberdépendance versus usage problématique

Le terme « cyberdépendance » est apparu vers le milieu des années nonante, au sens de « toxicomanie sans drogue » : expression déjà proposée par Otto Fenichel en 1949 (Minotte25, 2010 : 17). Elles s'inscrivent dans le registre des dépendances comportementales. L'addiction à Internet est apparue la première fois, en 1996, dans les propos de Kimberly Young (psychologue) lors de la réunion annuelle de l'Association Américaine de Psychologie (APA) qui se déroulait à Toronto.

« Désignant à l'origine, toute dépendance à l'ordinateur, ou plus largement à l'univers informatique, ce terme est aujourd'hui utilisé principalement pour désigner une dépendance qui s'instaure chez une personne faisant un usage distordu des moyens de communication offerts par Internet. Cette personne est dans la recherche constante de connexion au réseau informatique afin d'y établir une communication, d'y trouver une information, du sexe ou du jeu virtuel. Elle éprouve une anxiété désorganisatrice si elle ne peut se connecter, et sa vie personnelle et sociale s'organise autour de la connexion. A l'image d'une toxicodépendance, le cyberdépendant manifeste un phénomène de manque et peut recourir au mensonge pour réduire l'importance de son addiction. » (Nayebi, 2007 : 14-15).

L'adolescence ainsi que la période d'études sont réputées propices à l'apparition de la cyberdépendance. Les mondes virtuels, du fait de la malléabilité qu'ils proposent, peuvent servir à une mise à distance des modèles parentaux et à échapper à une réalité sociale mouvante qui ne propose plus des repères fiables et sécures (Nayebi, 2007 : 25). Le risque de dépendance est plus important pour les adolescents introvertis, qui ont généralement une faible estime et une mauvaise image d'eux-mêmes. Ceux-ci peuvent contourner leur questionnement identitaire par la connexion à la Toile pour se mettre dans la peau d'un avatar fort et vaillant s'il est un garçon ; quand il s'agit d'une fille, elle peut jouir d'une meilleure réputation ou avoir davantage d'amies par le blog, le forum ou le chat qu'à l'école (Nayebi, 2007 : 35).

Les parents ou éducateurs qui négligent la surveillance d'un jeune devant l'écran informatique lui font prendre beaucoup de risques. A cause de son manque de maturité, ce dernier ne mesure pas les conséquences de ces risques. Nous savons tous qu'Internet est truffé de contenus innombrables à caractère indésirable. Il faut bien reconnaître aussi que les consoles et « ordis » arrangent parfois les responsables de jeunes, surtout quand ces médias servent de tendres nounous. Les adultes pensent alors - à tort - que leurs protégés sont à l'abri des dangers parce qu'ils ne « traînent pas » n'importe où en dehors du giron domestique. En effet, à côté du risque pour l'enfant de tomber dans l'une ou l'autre forme de dépendance par une durée immodérée passée devant la machine, il y a aussi d'autres menaces permanentes qui pèsent sur lui en ligne, en dehors d'un regard adulte prévenant. Dans les blogs que les jeunes se créent - y divulguant des informations personnelles voire intimes - ou sur les forums juvéniles en ligne sur lesquels ils discutent, rôdent possiblement des prédateurs mal intentionnés - certains sous couverts d'une identité faussement juvénile. A savoir que « près de 70 % des services de dialogue ne sont pas modérés, ce qui n'empêche pas les adolescents de fréquenter assidûment les "chats", les forums, les blogs, n'hésitant pas à se confier à des interlocuteurs cachés derrière un pseudo » (Nayebi, 2007 : 36).

Le cybersexe se répand le plus fréquemment par les spams26 et autres SMS. Même un jeu en ligne, un salon de chat (prononcé « tchatte ») ou un site de films peut contenir des liens hypertexte à caractère érotique ou pornographique. L'individu qui commence à s'y livrer très tôt, finissant par en éprouver une appétence sans limites, risquera vite plus tard de se détacher de son partenaire sur le plan affectif et sentimental.

25Pascal Minotte est psychologue, psychothérapeute et chercheur à l'Institut Wallon pour la Santé Mentale. Il a réalisé, suite à une demande de la Région wallonne, une recherche sur les usages problématiques d'Internet et des jeux vidéo.

26Lorsqu'un internaute - par simple curiosité, voire accidentellement - clique sur un cyber-lien publicitaire apparaissant sur la page où il se trouve, il va généralement devoir introduire son e-mail dans une barre de fenêtre pour accéder au contenu de la nouvelle page. Cette identification électronique est alors fichée chez le « prestataire de service » qui pourra s'en servir pour relancer le listé via des messages publicitaires « personnalisés », les spams, déposés dans la boîte e-mail de ce dernier. Un fichier de consommateurs peut être partagé avec d'autres cyber-marchands, même d'un autre secteur de l'e-business. C'est ce qui explique qu'à un moment une boîte à lettres électronique peut être truffée de spams en tout genre, l'internaute étant fiché un peu partout avec ses principaux styles de consommation.

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Toujours est-il qu'un jeune, même bien cadré par ses tuteurs légaux, peut échapper à la vigilance de ces derniers en fréquentant un cyber-café pendant ses heures de fourche.

Par ailleurs, force est de constater le foisonnement des expressions et termes relatifs aux fragilités humaines depuis une vingtaine d'années. Lorsqu'un néologisme médical se répand dans l'opinion, notamment par les médias, nous l'intégrons progressivement pour finir par ne plus que percevoir certaines conduites via le prisme de l'étiquette lexicale : « Mon enfant est-il cyberdépendant ? Ou alors, a-t-il un haut potentiel ? », « Pouvons-nous accueillir un hyperkinétique dans cette classe ? », etc. Ainsi, « il est essentiel pour les professionnels de la santé mentale de faire preuve de sobriété et de prudence dans l'étiquetage, mais aussi d'avoir à l'esprit que celui-ci construit autant qu'il décrit une situation. La façon dont nous allons nommer les problématiques de santé mentale [doit], avant de satisfaire nos désirs de maîtrise et de classement, servir le bien être de tout un chacun. » (ibidem, pp18-20).

Il s'agit de ne pas associer systématiquement « cyberdépendance » à tout ce qui nous pose question en matière de cyberconsommation des jeunes. La cyberdépendance recèle en effet d'un éventail d'aspects diversifiés qui vont jusqu'aux jeux de hasard et d'argent. Par prudence, « nous serons plus efficients en termes de promotion du bien-être en parlant simplement d' "usages problématiques" ». Et, dans ces usages, il y a notamment le surinvestissement pour les jeux vidéo, dont ceux on line27. Cet engagement excessif, pour lequel de nombreux parents et éducateurs s'inquiètent, pourrait être qualifié de « passion obsessive » selon l'expression de Robert J. Vallerand (ibidem, pp 20-27).

Les adolescents jouent en moyenne une à deux heures par jour. Cette moyenne n'est pas problématique. Par contre, il y aurait vraiment lieu de s'inquiéter à partir de quatre heures consécutives de jeu vidéo (ibidem, p28). A ce propos, une étude statistique menée pour la Fédération Wallonie-Bruxelles, sur un échantillon représentatif des 12-20 ans, révèle que 12,9 % des interrogés s'adonnent à des jeux vidéo (sur console ou ordinateur) pendant au moins quatre heures par jour, contre 12,5 % en 2008 et 7,3 % en 2002 (Favresse & al, 2013 : 84). Bien qu'elle est loin de se généraliser, force est de constater que la tendance est en nette progression depuis une dizaine d'années.

L'usage problématique des jeux interactifs concerne davantage les garçons que les filles. Ces dernières ont tendances à préférer les IRC28 où elles peuvent « clavarder » (contraction de « clavier » et « bavarder »29) en toute liberté et anonymat, mais risquent toutefois de s'y perdre tout autant que les garçons le font dans les jeux vidéo (Minotte, 2010 : 29).

Comme je l'ai désormais quelques fois évoqué, un usage problématique des écrans numériques peut s'expliquer par une fracture dans l'histoire de certaines personnes. Mais cette cause ne doit pas s'envisager isolément d'autres. L'interactivité dans la structure des MMORPG, par exemple, est programmée pour l'établissement d'un lien fort entre joueurs d'une même « guilde »30. Cette relation solide serait de même nature que celle existant dans une coopération de confiance « réelle » (ibidem, p31).

Toujours est-il que, au regard de l'état lieu dont je viens de rendre compte, il est clair que les éducateurs ne doivent pas négliger - pour prévenir toute dérive - d'entretenir un dialogue aussi régulier que possible avec les jeunes dont la responsabilité leur incombe, même à propos d'un domaine dont certains aspects pourraient échapper à leurs maîtrise et connaissance.

27Anglicisme signifiant « en ligne », c'est-à-dire connecté à Internet.

28L'Internet Relay Chat est un protocole qui permet de dialoguer en temps réel avec d'autres utilisateurs en se connectant grâce à un

logiciel (appelé un « client ») à serveur IRC lui-même relié avec d'autres serveurs IRC. Toutes les personnes ainsi connectées peuvent

discuter sur des forums publics ou privés en respectant toutefois des règles d'utilisation.

Sources : http://www.commentcamarche.net/contents/1155-irc.

29Néologisme que j'ai rencontré à l'occasion d'une soirée d'information Webetic.

30Une guilde est un ensemble de joueurs formant une équipe de « collaborateurs ». L'un des membres en est le chef.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard