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La formation des enseignants et les enjeux de l'enseignement de l'histoire de 1880 à  1905 et leurs héritages.

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par Sophie VAN-WAESBERGE
URCA - Master 2 MEEF HG 2015
  

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2) La formation des enseignants du primaire de 1880 à 1905 : le cas de l'École Normale d'institutrices de Châlons-sur-Marne :

La mission première des institutrices et instituteurs de la fin du XIXème siècle est de sensibiliser leurs élèves aux valeurs républicaines et à l'histoire de leur pays de manière à en faire de futurs citoyens patriotes. Sous la IIIème République, les membres du gouvernement considèrent que pour élever l'enseignement du peuple, il faut d'abord améliorer la formation des maîtresses et maîtres. Jusqu'à présent délaissée par l'État, la formation des instituteurs et institutrices dans les Écoles Normales devient une priorité. Au cours des trois années de formation, les formateurs veillent à la bonne morale des élèves-maîtres. L'objectif est de recruter et former des personnes portant en elles l'amour de leur patrie de manière à ce qu'elles transmettent ensuite cet intérêt à leurs élèves. Des critères de recrutement au contenu des cours, en passant par les conférences pédagogiques, tout vise à préparer les élèves-maîtresses et élèves-maîtres à leurs futures missions civiques.

Le processus de scolarisation des filles s'entame réellement en 1836 La scolarisation des filles s'opère à deux niveaux, celui de l'école primaire et celui des Écoles Normales. Afin d'ouvrir l'enseignement primaire aux filles, il est d'abord nécessaire de former des institutrices. La loi GUIZOT de 1833 oblige chaque département à entretenir une École Normale pour garçons et délaisse les filles. Il faut attendre 1836 pour que l'accès aux Écoles Normales pour les filles soit facilité. En effet, la loi PELET du 23 juillet 1836 oblige chaque département à entretenir une École Normale de filles. Suite à cette loi, le nombre de candidates aux Écoles Normales augmente. De plus en plus de filles issues de familles d'agriculteurs ou d'ouvriers se portent candidates, comme en témoignent les procès verbaux dressés par l'École Normale de Châlons-sur-Marne à partir de 1881. La plupart sont issues de villages situés dans un rayon de cent kilomètres autour de l'École Normale. Après avoir ouvert l'accès au métier d'enseignant aux filles, le gouvernement leur ouvre l'accès à l'école primaire. La loi FALLOUX adoptée le 15 mars 1850 demande l'ouverture d'une école primaire pour filles dans chaque commune de plus de huit cents habitants. La loi DURUY du 10 avril 1867 encourage l'enseignement primaire féminin. Elle demande aux communes de proposer des impositions réduites aux familles à faibles revenus qui scolarisent leurs enfants. Peu à peu, le nombre d'enfants fréquentant les écoles primaires augmente. À la veille des lois scolaires de FERRY, une majorité des enfants français fréquentent déjà l'école primaire. Toutefois, les progrès de massification de l'école primaire sont plus présents chez les garçons que les filles. La loi du 28

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mars 1882 rend l'école obligatoire pour tout enfant âgé de six à treize ans, filles et garçons. La mixité dans les classes étant peu répandue et face à la massification de l'accès à l'école primaire pour les filles il a été nécessaire de former davantage d'institutrices. Afin d'accélérer le processus d'ouverture des Écoles Normales pour filles, la loi Jules FERRY du 9 août 1879 rend obligatoire l'ouverture d'une École Normale de filles dans chaque département dans un délais de quatre ans. C'est ainsi que l'École Normale d'institutrices de Châlons-sur-Marne voit le jour.

L'exemple de l'École Normale des institutrices de Châlons-sur-Marne ouverte le 4 octobre 1880 va être utilisé tout au long de ce développement pour nous permettre de comprendre comment les élèves-maîtresses sont préparées à former leurs élèves et à transmettre leur amour pour la France. Mon choix s'est porté sur cette École Normale afin de privilégier un exemple local. La difficile ouverture de l'École Normale d'institutrices de Châlons-sur-Marne est également révélatrice des contradictions de l'époque. Projets et réalité s'opposent. Dès 1808, sous le Premier Empire, un décret est adopté afin d'instaurer une formation des enseignants contrôlée par l'État. Si la première École Normale d'instituteurs ouvre en 1810 à Strasbourg, elle demeure la seule infrastructure de formation des maîtres jusque sous la Monarchie de Juillet. Face à ce retard, en 1833, le Ministre de l'Instruction Publique François GUIZOT oblige chaque département à entretenir une École Normale d'instituteurs. Il étend cette mesure aux Écoles Normales d'institutrices. Toutefois, cette nouvelle mesure ne suffit pas à développer un système de formation efficace. En 1879, lors de l'arrivée au Ministère de Jules FERRY, soixante-sept départements sont encore dépourvus d'École Normale de filles. La formation des maîtres, et notamment, la formation des institutrices peine donc à se mettre en place. Si la Marne possède une École Normale de garçons depuis 1838, elle ne possède toujours pas d'équivalent pour les filles à cette date. Face à l'augmentation de la fréquentation des écoles primaires, et à l'aube des grandes lois scolaires l'amélioration de la formation des instituteurs et institutrices devient une nécessité. C'est pourquoi en 1879 Jules FERRY oblige chaque département actuellement dépourvus d'École Normale de filles ou de garçons d'ouvrir une infrastructure dans un délais de quatre ans. L'École Normale d'institutrices de la Marne ouvre ses portes l'année suivante.

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a- Les conditions de recrutement : Des élèves-maîtresses devant être de

« bonne morale ».

Les candidates aux Écoles Normales doivent être habilitées à enseigner pour être recrutées. Pour ce faire, des règles strictes sont mises en place pour le recrutement des élèves-maîtresses, et ce notamment comme en témoignent les archives de l'École Normale des institutrices de Châlons-sur-Marne. Tout d'abord, depuis 1816, tout aspirant au métier d'enseignant doit fournir un « certificat de bonne vie et de bonnes moeurs ». Ce certificat est délivré par le maire de la commune dans laquelle habite l'aspirante à l'École Normale. Pour qu'il soit accordé, la personne doit justifier une durée minimale de trois ans de résidence dans ladite commune. Elle doit également répondre aux critères de « bonne vie et de bonnes moeurs ». Les fréquentations, le parcours scolaire et l'engagement de cette personne dans sa commune sont pris en compte. Le règlement des Écoles Normales du 2 juillet 1866 instaure un nouveau certificat à fournir pour entrer en École Normale, à savoir le certificat de moralité. Celui-ci est délivré par les chefs des établissements scolaires précédemment fréquenté par les candidates. Cette procédure est maintenue sous la IIIème République. Enfin, à partir de 1886, le Certificat d'Aptitude Pédagogique doit être obtenu par l'ensemble des élèves-maîtres et élèves-maîtresses pour qu'ils soient titularisés.

Sous la IIIème République, l'enquête visant à vérifier la bonne vie et les bonnes moeurs des candidats aux Écoles Normales est confiée aux inspecteurs académiques. Ils font part de leurs résultats lors de la réunion de commission de surveillance. Ces réunions se tiennent de manière régulière à l'École Normale de Châlons-sur-Marne. Elles se tiennent en présence de la directrice de l'École Normale, Madame GRANET, puis Madame BROCARD pour notre période, et de l'inspecteur académique, Monsieur MAUCOURT. L'inspection des dossiers des aspirantes a lieu en juillet, soit trois mois avant la rentrée scolaire. Le 15 juillet 1881, par exemple, la commission de surveillance se réunit pour établir la liste des aspirantes à l'École Normale d'institutrices de Châlons-sur-Marne pour l'année scolaire 1881-1882. Cette séance se tient en présence de la directrice, de l'inspecteur académique, de Monsieur MARSON et de Monsieur PELICIER (ordonnateur des dépenses). La commission procède à l'examen de l'ensemble de ces dossiers pour établir la liste des futures élèves-maîtresses.

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Illustration 1: Liste des aspirantes pour l'année 1881-1882. 1T1840.

Un premier examen a été réalisé par les inspecteurs primaires afin de vérifier les conditions morales de ces aspirantes. Chaque dossier est donc accompagné du procès-verbal individuel de l'enquête faite par les inspecteurs académiques. Il est parfois arrivé que des aspirantes ne répondent pas aux critères de bonne conduite et ne puissent donc pas intégrer l'École Normale. Nous pouvons ici mentionner le cas de Marguerite CHARLIER, aspirante à l'École Normale de Châlons-sur-Marne pour l'année scolaire 1882-1883. Cette jeune fille âgée de quinze ans n'a pas été retenue. Le motif fourni est celui de non respect des règles de bonne conduite. Aucun détail n'est fourni pour justifier le choix fait par la commission de surveillance le 13 juillet 1882.

Outre le fait de devoir fournir certains certificats attestant leur bonne moralité, les aspirantes à l'École Normale de Châlons-sur-Marne sont recrutées à un âge stratégique. Les aspirantes à

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l'École Normale ont entre quinze et seize ans. Cela signifie donc qu'elle ont quitté l'école primaire moins de trois ans avant leur recrutement. Elles ont donc encore en mémoire le fonctionnement de l'enseignement et notamment les finalités de l'enseignement de l'histoire et de la morale. Les aspirantes doivent posséder le certificat d'études, certificat perçu comme une récompense républicaine. Le fait de célébrer celles et ceux qui réussissent cet examen de fin d'études primaires permet de célébrer l'école et la République qui lui a donné une place importante. Les aspirantes ont donc obtenu ce certificat il y a deux ans en moyenne. L'âge minimal d'entrée à l'École Normale est de seize ans. Il est abaissé à quinze ans en 1888 face à une crise des vocations. En recrutant des élèves-maîtresses si jeunes, l'objectif est de recruter les meilleures élèves et ainsi éviter qu'elles ne choisissent une autre orientation à la sortie de l'école primaire. Cela permet également de recruter des jeunes filles célibataires, sans vie de famille. Ces aspirantes peuvent donc se consacrer entièrement à leur formation puis à leur métier. La commission de surveillance de l'École Normale de Châlons-sur-Marne vérifie si les aspirantes possèdent bien l'âge minimal requis lorsqu'elle procède à l'examen des dossiers. Lors de la commission du 15 juillet 1881, l'une des aspirantes âgée de 14 ans seulement est automatiquement ajournée puisqu'elle ne possède pas l'âge minimal requis18.

Enfin, pour intégrer l'École Normale d'institutrices de Châlons-sur-Marne, les aspirantes doivent réussir un concours. L'examen des dossiers vise à recruter des élèves-maîtresses de « bonnes moeurs ». L'obtention du concours vise à recruter des élèves de bon niveau. Rappelons que les membres du gouvernement de la IIIème République considèrent que pour élever l'enseignement du peuple, il faut élever le niveau des élèves-maîtresses. Afin de sélectionner les meilleures élèves, l'École Normale de Châlons-sur-Marne fait passer deux séries d'épreuves à ses aspirantes. La première série vise à établir la liste des élèves admissibles. Pour être admissibles, les élèves doivent réussir une dictée de vingt minutes, répondre aux questions qui suivent la dictée, réussir l'épreuve d'écriture, réussir l'exercice de composition française s'appuyant sur l'enseignement de la morale, réussir l'épreuve d'arithmétique et enfin réussir la composition de dessin. La seconde série d'épreuves permet de choisir les élèves admises. Elle comporte des interrogations, notamment sur l'histoire de la France, des résumés de leçons, un examen de chant, et des exercices de gymnastique. Chaque épreuve est notée de 0 à 20. Un classement est établi à l'issue des épreuves. Les élèves sont classées selon leur mérite.

18 Archives départementales, 1 T 1841, 15 juillet 1881.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway