WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La formation des enseignants et les enjeux de l'enseignement de l'histoire de 1880 à  1905 et leurs héritages.

( Télécharger le fichier original )
par Sophie VAN-WAESBERGE
URCA - Master 2 MEEF HG 2015
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

c- Les enjeux civiques des conférences pédagogiques :

Pour apprendre aux futurs maîtres et maîtresses à enseigner et à transmettre les valeurs républicaines ainsi qu'à former des futurs citoyens, les Écoles Normales départementales organisent mensuellement des conférences pédagogiques auxquelles participent le personnel de l'École Normale ainsi que ses élèves. Des instituteurs et institutrices déjà en poste peuvent également assister à ces conférences.

Chaque École Normale a pour obligation d'organiser des conférences pédagogiques pour son personnel et ses élèves-maîtresses. Une conférence est organisée chaque mois entre le mois de novembre et le mois de juin. Les conférences n'ont pas lieu en juillet car cette période est réservée aux examens de passage. De la même manière, aucune conférence n'est organisée en août et septembre, période de vacances. Le cycle des conférences reprend seulement au mois de novembre, soit un mois après la rentrée scolaire. D'ordinaire la première conférence de l'année scolaire prend la forme d'une réunion de présentation des thématiques qui seront abordées tout au long de l'année. Le choix des thématiques revient aux directeurs et directrices des Écoles Normales. Bien souvent, ils proposent des thèmes proches de ceux abordés dans les autres Écoles Normales de manière à ce qu'il y est une certaine cohérence dans la formation des différents instituteurs et institutrices. Ces conférences permettent d'offrir une dimension didactique et pédagogique à la formation des futurs instituteurs et institutrices. En effet, comme nous l'avons souligné précédemment, la pédagogie semble en marge dans les contenus des programmes des Écoles Normales.

L'objectif de ces conférences pédagogiques organisées dans toute la France est d'homogénéiser et de renforcer l'identité de l'instruction publique. Elles permettent de créer un esprit de corps. Le fait que chaque élève-maître, et chaque maître et maîtresse en poste puisse assister aux conférences pédagogiques leur permet de se retrouver et d'échanger sur les finalités de leur enseignement. Le 30 juin 1829, le Conseil royal de l'instruction publique a voté un arrêté offrant la possibilité à tout instituteur d'école primaire protestante d'assister : « à des conférences ayant pour but le perfectionnement des méthodes d'enseignement primaire ». Le terme de conférences pédagogiques apparaît en 1837, sous la Monarchie de Juillet et sous le Ministère de François GUIZOT. À cette époque, elles sont assurées par les inspecteurs primaires. Elles sont l'occasion pour les maîtresses et maîtres de nouer des liens avec leur hiérarchie autour de valeurs communes. L'arrêté du 10 février 1837 prévoie une conférence une fois par mois dans le semestre

39

d'hiver et deux fois par mois dans le semestre d'été. Toutefois, dès les premières conférences des problèmes sont dénoncés. Le manque d'organisation est reproché. Le coût des conférences fait également l'objet de critiques et a contribué à leur suppression. C'est pourquoi elles sont peu à peu délaissées, puis abandonnées sous la Seconde République. Elles sont rétablies par l'arrêté du 5 juin 1880 proposé par Jules FERRY. Cette réhabilitation a nécessité une réorganisation complète des conférences pédagogiques afin d'affiner leurs finalités et de les rendre plus efficaces. Selon Jules FERRY, les conférences pédagogiques doivent permettre aux instituteurs et institutrices de :

« discuter en commun les questions de méthode, les procédés et les livres ».

Jules FERRY mentionne dans cet arrêté qu'il conçoit la conférence pédagogique comme :

« une comparaison des expériences individuelles, une critique des procédés en usage, une mise en valeur de ceux qui comportent une part d'originalité »24.

Ces conférences doivent donc être un lieu d'échanges dans lesquels les maîtres et maîtresses, et les élèves-maîtres, élèves-maîtresses sont pleinement acteurs. Ils ne doivent pas se contenter d'assister à la conférence, mais doivent s'y impliquer. Ils prennent la parole pour échanger leurs expériences, leurs points de vue, leurs méthodes et notamment les manières utilisées pour former des futurs citoyens.

Ces conférences mensuelles sont également l'occasion de nouer des relations de fraternité entre instituteurs et institutrices. Le gouvernement républicain intervient dans les conférences pédagogiques car il souhaite créer une culture commune avec des valeurs et des idéaux communs à l'ensemble du corps enseignant.

Un cahier tenu par l'École Normale d'institutrices de Châlons-sur-Marne regroupant les procès verbaux et comptes-rendus des conférences pédagogiques ayant eu lieu à l'École Normale entre 1881 et 1893 nous permet de prendre connaissance du contenu de celles-ci. Par exemple, le 18 février 188925 les élèves-maîtresses ainsi que les enseignantes, les maîtresses-adjointes, les membres de la direction sont réunis pour assister à une conférence pédagogique qui a pour thème :

24 Arrêté du 5 juin 1880.

25 Carton 1T1866, Conférences pédagogiques, photo 6079, annexes.

40

«Un pédagogue contemporain a dit : « L'instituteur a deux sujets à étudier : les élèves et lui-même, deux buts à poursuivre : leur éducation et la sienne ». Quelles conclusions pratiques peut-on tirer de cette pensée ?». Cette conférence se déroule sous la présidence de Madame BONNET, directrice de l'École Normale d'institutrices à cette date. Les interventions sont réalisées par Madame la Directrice ainsi que par différents membres du personnel dont Madame BROCARD professeur, Madame BIDAULT, professeur, Madame MARCHAND, professeur, ainsi que l'économe et la secrétaire de l'École Normale. À l'issue de chaque conférence, la secrétaire dresse une analyse du rapport ainsi qu'un procès-verbal résumant le contenu de la séance. Le procès-verbal reprend le plan de la séance et note les éléments d'analyse apportés par les participants. La première partie de la conférence du 18 février 1889 porte sur : « la nécessité de connaître l'enfant pour le diriger ». Dans cette partie, les intervenants conseillent aux élèves-maîtresses de prendre le temps de « connaître les aptitudes intellectuelles et morales de l'élève ». Cette citation montre bien, une nouvelle fois, l'importance accordée à la morale des élèves. Celle-ci est en effet au coeur de leur formation de futurs citoyens.

La seconde partie de la conférence porte sur la « nécessité pour l'instituteur de se connaître lui-même ». Les intervenants abordent ici l'importance du comportement et de la posture à adopter en tant qu'enseignante. Ils rappellent qu'en premier lieu l'élève-maîtresse doit : « s'interroger pour savoir si elle a les qualités essentielles de l'éducatrice ». Il leur est également conseillé de procéder régulièrement à « leur examen de conscience », c'est-à-dire à vérifier s'ils sont eux-mêmes de bonne morale et s'ils constituent bien un bon exemple à suivre pour leurs élèves. Rappelons que le maître et la maîtresse doivent quotidiennement être des modèles civiques et moraux pour les élèves qu'ils forment.

La troisième partie de cette conférence s'intitule « l'éducation de l'élève est le but de l'école ». Cette formulation rappelle bien que l'école a un rôle éducatif et qu'il ne s'agit pas de former des élites, mais qu'il s'agit de former des citoyens responsables et éduqués. Il est également rappelé au cours de cette conférence que, bien souvent, les parents voient en l'école un lieu d'instruction. Or, la priorité de l'école et de l'institutrice est en premier lieu d'éduquer, de former les futurs citoyens et seulement ensuite d'instruire les élèves. Il est rappelé que : « l'institutrice doit veiller au développement moral de ses élèves ». La quatrième partie est consacrée à « la nécessité pour le maître de se perfectionner ». Au cours de cette partie, il est rappelé aux institutrices qu'elles doivent elles aussi travailler à leur éducation personnelle. L'enseignement de la morale contribue à ce perfectionnement individuel comme le souligne un intervenant de la conférence du 18 février

41

1889 : « L'enseignement moral profite autant à celui qui le donne qu'à ceux qui le reçoivent ». Le double intérêt de l'enseignement de la morale est ici mis en valeur.

La conférence du 20 mars 1890 soulève la problématique de l'enseignement en milieu rural. En effet, en milieu rural, les effectifs réduits des élèves entraînent le regroupement de différents niveaux de classes en un groupe. Ces rassemblements nécessitent l'utilisation de nouvelles pédagogies pour assurer l'enseignement et l'éducation des élèves. Les intervenants rappellent les avantages et les inconvénients des classes à plusieurs niveaux. Ils mentionnent que cette méthode peut être utilisée notamment pour les cours de « morale, d'histoire, de géographie, de leçons de choses ». Cette méthode pédagogique, issue de la tradition lassallienne permet notamment de développer certaines valeurs chez les élèves telles que la solidarité ou la fraternité. En effet, les élèves plus âgés vont ainsi venir en aide aux élèves les plus jeunes. Ils vont ainsi leur apporter leurs connaissances et leurs savoir-vivre. Dans les cours d'enseignement moral, les élèves apprennent notamment ce qu'est la fraternité, la solidarité. L'institutrice doit partir d'un cas concret, qui est familier aux élèves pour leur inculquer cette notion. Elle doit ensuite leur apprendre à appliquer cette valeur dans leur vie quotidienne. L'enseignement à plusieurs niveaux dans une même classe constitue un cas concret pour les élèves pour appliquer cette valeur qu'est la fraternité. Cette méthode est donc bénéfique aux élèves les plus jeunes mais également aux élèves les plus âgés. L'enseignement dans des classes à plusieurs niveaux permet aux plus âgés de réactiver leurs connaissances. Cela leur permet de mieux s'approprier les connaissances et valeurs évoquées en classe.

42

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon