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Terrorisme et géopolitique en Afrique. Sens et contresens.

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par Sékou COULIBALY
Alassane Ouattara de Côte dà¢â‚¬â„¢Ivoire - Master 2015
  

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PREMIÈRE PARTIE : TERRORISME ET REPRÉSENTATIVITÉ

Nous parlons de terrorisme aujourd'hui encore en Afrique comme d'un sujet de méfiance ou comme d'un tabou autour duquel l'on se doit d'observer le silence. Pourtant, aussi sensible que parait la notion de terrorisme, elle mérite d'être appréhendée surtout dans nos sociétés africaines qui semblent bien parties pour abriter ce phénomène dont la mondialisation est plus efficace que certaine. « Le syndrome de phobie islamiste »16(*) est bien réel autant en Occident qu'en Afrique. Pire, « les ralliements à l'EI continuent par ailleurs en zones de turbulence en Afrique et particulièrement au sahel »17(*) nous dira Hanif. De quoi s'agit-il réellement, le terrorisme en Afrique ?

CHAPITRE 1 : DÉSAGRÉGATION IDENTITAIREET VIOLENCE TERRORISTE EN AFRIQUE

Parler de désagrégation identitaire en rapport à la violence terroriste en Afrique, c'est questionner l'impact des effritements ethniques, culturels, religieux, sur l'avènement de la terreur qui tend à se transformer en système ; c'est montrer le lien étroit entre crises internes et violence terroriste. C'est, cherchant les causes profondes des nasses identitaires, faire incursion dans les fondements du terrorisme en tant que manifestation de crise de la représentation. Il s'agit, enfin, de démontrer que le terrorisme se nourri de dénis de reconnaissance.

D'ailleurs, c'est, en examen des conditions des guerres dites justes et injustes,ce que Walzerénonce : «  Nous justifions notre conduite ; nous jugeons celle des autres »18(*). Ce qui revient à dire que tout le monde se dédouane en inculpant l'autre au sujet des agis déplacés comme l'acte terroriste, par exemple. Quiest au juste terroriste si tout le monde tend à se justifier ? Qui envahit l'autre ? Qui est authentique et qui est cet autre, l'étranger ? Ces préoccupations, dans une société africaine ayant déjà du mal à s'identifier à une culture, à un groupe, à une opinion religieuse, méritent d'être posées. S'agit-il de parler de l'autre en tant qu'individu ou en tant que collectivité ? Dans tous les cas, c'est l'Identité qui est en cause. Ce par quoi, on identifie et on reconnait quelqu'un, son étiquette.

Contre toute attente, l'identité ou l'identification obéit à un principe de classification et de "clan-nification" qui a pour finalité, le rejet systématique de l'autre. « Il s'agit dans la rue ou en rase campagne, d'identifier un groupe ou un individu. Ami ou ennemi ? Qui déclares-tu que tu es ? Comment t'appelles-tu, de quelle appartenance sors-tu, au nom de qui t'avances-tu vers moi ? »19(*)L'identification, dans pareil circonstance, vise à isoler l'individu, à le saisir dans son appartenance ethnique, sociale ou même religieuse, à connaitre ses motivations afin de se rassurer qu'il constitue une menace ou un appui. On constate, pourtant, qu'en Afrique, cette sorte de désagrégation identitaire est en vogue. L'exemple le plus efficient, mais qui semble vouloir se faire passer anonymement, est celui de la croyance religieuse.

On identifie l'individu afin de lui coller une étiquette pour s'en rapprocher ou pour s'enméfier. En cela, imaginons un instant la conception que l'on se fera d'un musulman dans une société qui se méprend sur le terrorisme, faisant passer l'acte terroriste exclusivementpourdes manifestations de groupes islamistes. Le non musulman, parce que convaincu de ses préjugés, voit désormais en n'importe quel musulman, un potentiel terroriste. Son statut de fervent musulman fait de lui un être suspect, à-part. Ce qui semble d'ailleurs logique puisqu'à l'opposé, l'islamiste crée des fossés en présentant les autres (non-musulmans) comme des personnes n'ayant pas droit de vivre. C'est fort de cela qu'on pourrait expliquer aujourd'hui la montée du sentiment terroriste en Afrique. Qu'en est-il réellement ?

I. De la crise de la reconnaissance à la guerre entre identités

Il n'est plus d'une simple lapalissade que les sociétés africaines sont victimes de désagrégations identitaires qui ont pour corollaire, nombre de fois, des guerres tribales, ethniques ou religieuses. Du déni identitaire individuel, on en arrive à la création de scission entre individus. La négation induisant le manque d'amour et d'amitié envers l'autre, implique et justifie l'écart entre son agi et les normes sociales.Et cela, simplement, écrit l'auteur deLa réification, parce que

nous tendons à ne percevoir les autres hommes, dit Axel Honneth, que comme des objets dépourvus de sensibilité. Nous perdons l'aptitude, poursuit-il, à comprendre directement les expressions comportementales des autres personnes comme autant d'incitations à réagir de façon appropriée20(*).

La réification ou la chosification dont est victime l'individu apparait, pour ainsi dire, comme le fondement des frustrations qui occasionnent les crises. La mésinterprétation, l'incompréhension de l'autre, conduisant au dénigrement de celui-ci par la revalorisation de soi, conduitinéluctablementà la guerre entre identités. Samba Diakité, à travers son article "L'autre et sa langue : la langue du refus", le dit sans ambages lorsqu'il écrit« néantiser [...] l'Autre, c'est refuser sa culture ; c'est ne pas l'admettre comme un substrat humain ; c'est lui refuser toute appartenance à l'Humanité »21(*). Cet écart de conduite qu'est le refus d'appartenance à l'humanité dont l'on fait preuve vis-à-vis de son semblable, justifie la mise à mal de la stabilité sociale. Pourrait-on asserter, dès lors, que désagrégation identitaire est synonyme de crises en Afrique ou du moins, qu'elle en est le moteur. À preuve, nombre de conflits dont ont été victimes des sociétés africaines, trouvent leurs justifications dans les crises identitaires.

De surcroît, le conflit chronique, dont parle Honneth dans La lutte pour la reconnaissance, n'est, au fond que la manifestation d'une crise de la reconnaissance individuelle au sein d'une même société. Au fait, dans une société pluraliste, « les rapports d'estime sociale sont l'enjeu d'une lutte permanente, dans laquelle les différents groupes s'efforcent sur le plan symbolique de valoriser les capacités liées à leur mode de vie particulier et de démontrer leur importance pour les fins communes »22(*).Ici, l'estime sociale apparait comme la condition indispensable à la reconnaissance de l'importance des capacités et des qualités del'autre dans la construction d'une société commune.

Toujours est-il quel'estime de soi, qui implique le respect de l'autre, demandela confiance des autres dans une dynamique de solidarité entre les particularités. Cela s'avère nécessaire dans la mesure où la solidarité entre membres d'une même communauté reste « conditionnée par les relations d'estime symétrique entre sujets individualisés (et autonomes) »23(*).C'est justement cette estime de soi, la confiance en l'autre, quisemble faire défaut aux populations africaines. La crise de la reconnaissance survient lorsque, pour un intérêt particulier, un groupe se proclame le plus habilité à décider du sort de tous les autres. Elle est la manifestation d'un mépris, du rabaissement d'un individu ou d'un groupe d'individus à qui l'ontend à ne reconnaître aucun droit. L'exemple qui illustre cela, c'est bien le cas libyen. Au-delà du simple affrontement entre Tripoli (dominé par des islamistes) et Tobrouk (dominé par des laïcs fidèles à Mouammar Kadhafi), les ressortissants du sud de la Lybie (Touaregs, Toubous) reprochent aux autorités de Tripoli de les marginaliser. Le rapport entre cette crise inter-libyens, parmi tant d'autres crises en Afrique,etle terrorisme réside en le fait que la première a servi de support au second.

La marginalisation qui, provoquant des remous, caractérise l'effondrement de la reconnaissanceetest synonyme de trouble social en Afrique. C'est alors le lieu, ici, d'établir un lien entre mépris identitaire et les facteurs socioculturels des violences terroristes puisque les différentes représentations se nourrissent des convictions socioculturelles.

* 16 Mohammed HANIF, Le journal d'un moudjahid de l'Etat Islamique, (Penser le radicalisme dans le monde actuel), Québec, Différence Pérenne, 2015, p. 29.

* 17Idem, p. 30.

* 18 Michael WALZER, op.cit.,Paris, Gallimard, 2006,p. 36.

* 19 Michel SERRES, La guerre mondiale, Paris, Poche-Le Pommier, 2011, p.89.

* 20 Axel HONNETH, La réification, Petit traité de Théorie critique, Paris, Gallimard, 2007, p. 80.

* 21 Samba DIAKITÉ, "L'autre et sa langue : la langue du refus", article, paru dans « Rubrique Politique », 28 janvier 2007, http// : www.contrepointphilosophique.ch, consulté le 03 mars 2014 à 8 h 21 GMT.

* 22 Axel HONNETH, La lutte pour la reconnaissance, Trad. Pierre Rusch, Paris, Les éditions du CERF, 2000, p. 154.

* 23Idem, p. 157.

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo