WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Ressources non renouvelables et développement soutenable. L'or du Burkina est-il vraiment une bénédiction ?

( Télécharger le fichier original )
par Razamwendé Saturnin SAWADOGO
Université de Versailles Saint Quentin En Yvelines - Master 2 Economie Théorique et Appliquée du Développement Durable 2015
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

d) La mauvaise qualité institutionnelle

L'une des explications de la malédiction des ressources naturelles est la mauvaise qualité institutionnelle. Bien que la malédiction s'observe empiriquement dans les régressions de croissance sur tout les pays riches en ressources, lorsqu'on prend en compte la qualité institutionnelle, deux groupes apparaissent : d'un coté, les pays avec de mauvaises institutions apparaissent victimes de la malédiction, tandis que de l'autre coté, les pays avec de bonnes institutions réalisent des performances nettement supérieures à celles du premier groupe (graphique 1). Mehlum et al. (2006) affirment donc que la variance dans les performances de croissances entre les pays riches en ressources est principalement due à la façon dont la rente est distribuée via l'arrangement institutionnel. Ils distinguent ainsi des institutions dans lesquelles production et recherche de rentes sont complémentaires et des institutions ou la faiblesse des lois, le dysfonctionnement de la bureaucratie, et la corruption occasionnent des gains avec stratégies d'accaparement. Dans le premier cas les entrepreneurs sont incités à produire et donc soutenir la croissance tandis que dans le second cas, ils sont plutôt incités à quitter les activités productives vers des activités improductives.

Les auteurs construisent alors un modèle théorique qu'ils testent en utilisant les données de Sachs et Warner (1997b) et en introduisant un « terme d'interaction » correspondant à une pondération de l'abondance de ressource par la qualité des institutions. Ils constatent alors que dans ces conditions, la malédiction est d'autant plus faible que la qualité institutionnelle est élevée. Lorsque la qualité institutionnelle est supérieure au seuil de 0.93, la malédiction n'opère pas. Ce qui correspond au cas de 15 des 87 pays de l'échantillon.

17

Figure 1 : ressources et institutions

Source : H. Mehlum, K. Moene & R. Torvik (2006) « Institutions and the Resource Curse »,

page 2.

La qualité des institutions est mesurée par une moyenne non pondérée de cinq indices basés sur des données de Political Risk Services: un indice des règles de loi, un indice de qualité de la bureaucratie, un indice de corruption dans le gouvernement, un indice de risque d'expropriation et un indice sur la répudiation des contrats par le gouvernement. Malgré les risques de causalité inverse que les auteurs soulignent dans leur article, il n'en demeure pas moins que ces résultats viennent remettre en cause la position de Sachs et Warner (2001). Au sujet des institutions, ces derniers soutenaient en effet que le manque d'évidences empiriques rend la piste institutionnelle moins robuste pour expliquer la malédiction.

En outre, d'autres études viennent appuyer l'hypothèse d'une malédiction par la mauvaise qualité des institutions. Le succès du Botswana peut bien s'expliquer par ses bonnes institutions (Acemoglu et al. 2002). Ce pays détient en effet les meilleurs scores en terme de corruption et réalise depuis 1965, les taux de croissance les plus élevés au monde malgré une part des ressources naturelles de l'ordre de 40% du PIB. Lane et Tornell (1996,1999) expliquent les mauvaises performances du Nigeria, du Venezuela et du Mexique par un dysfonctionnement des institutions qui conduit à des comportements d'accaparement.

18

Par ailleurs, Frankel (2012) identifie également l'anarchie institutionnelle comme facteur explicatif de la malédiction. Il regroupe sous cette rubrique les théories relatives à l'exploitation insoutenable des ressources, les droits de propriétés inapplicables, et les guerres civiles comme mécanismes par lesquelles la malédiction opère.

La malédiction par l'épuisement rapide de la ressource concerne surtout les cas ou la gestion anarchique de la ressource conduit non seulement à son épuisement mais aussi au gaspillage de la rente. Dans la plupart des cas, ce sont les gouvernements chargés de la gestion de la ressource qui ont tendance à en extraire à un taux supérieur à celui du sentier optimale d'extraction (Hartwick 1977, Solow 1986), soit par ce qu'il anticipe qu'ils ne vont plus être réélu ou par ce qu'ils ont des préférences très élevées pour le présent. Le manque de réinvestissement de la rente et de diversification de l'économie condamne les générations futures à souffrir d'une baisse de consommation et de bien être. L'exemple de l'épuisement rapide des gisements de Phosphate de l'ile de Nauru dans le sud du pacifique illustre bien les effets pervers de l'abondance de ressources. Après avoir été source de haut revenu, les terres qui abritaient ces gisements ont été dévastées et l'île est maintenant dans un état de précarité relative.

La tragédie des biens communs traduit également des situations ou la faiblesse des droits de propriétés entraine des situations d'épuisement rapide. L'incapacité de l'Etat à définir les droits de propriété et à les sécuriser est alors identifiée comme le principal moteur de la malédiction. Lorsque la ressource est dispersée sur un vaste territoire tel que le cas des aires de pêches, des zones de pâturage ou des aquifères d'eau, une surexploitation collective de la ressource conduit à son épuisement rapide, accompagné d'une utilisation non contrôlé de la rente.

Le dernier mécanisme par lequel l'anarchie institutionnelle explique la malédiction concerne l'apparition de guerres civiles dans les Etats riches en ressources naturelles. Les analyses contemporaines des guerres civiles voient dans les ressources naturelles un déterminant majeur de l'apparition de guerres civiles : « Les guerres civiles s'expliquent alors par un comportement rationnel des agents,... (dont) les objectifs sont purement économiques » (Aknin 2009, p 16). Pour reprendre les propos de Collier (2000, 3), cité dans Aknin (2009), « les guerres civiles procèdent d'une « prédation à grande échelle » sur des activités économiques génératrices de revenus, dans le but de financer la rébellion ». L'accaparement de la rente liée aux ressources naturelles devient alors une condition sine qua non de la survie de la rebellion, d'autant plus, que les ressources naturelles issues de ces zones

19

de conflits sont « connectées aux marchés mondiaux » (Aknin 2009). Wick et Bulte (2006) ont pu montrer que dans un Etat sans ressources, la probabilité d'apparition de guerre civile se situe autour de 0.5%, tandis que dans un Etat qui tire un quart de son P11B des ressources naturelles, la probabilité d'apparition de conflit atteint 23%.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon