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L'identification juridique du navire sans équipage


par Pierrick ROGE
Université de Nantes - M1 Droit européen et international 2018
  

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Section 2 - Un statut assimilable à celui du capitaine

Dans la configuration envisagée jusqu'ici le télépilote sera le seul opérateur à avoir la direction du drone maritime ce qui permet d'émettre une comparaison avec la qualité de pilote qu'il s'agira d'appréhender en corrélation avec la qualité de capitaine au regard des responsabilités qui existent afin de déterminer si un changement ou une évolution sera nécessaire.

A cette fin il est obligatoire d'envisager l'ensemble des fonctions et attributions qui pourront être dévolues au télépilote (I). Ces dernières permettent de déterminer à quel degré de responsabilité ce nouvel acteur sera soumis (II).

I. L'étendue des compétences du télépilote

Il ne s'agit plus de refaire l'histoire et d'évoquer les circonstances qui ont fait que le capitaine est un acteur aussi important de nos jours même si cela doit être relativisé avec la réduction de

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ses attributions commerciales qu'il conserve malgré tout16. Cette réduction provient du fait que le capitaine est devenu le préposé de l'armateur au sens de l'article 1242 alinéa 5 du Code civil17, et que ses pouvoirs fussent limités tant sur sa capacité à agir concernant le degré de « besoins normaux du navire »18 ou encore sur les possibilités d'engagement au nom de l'armateur19.

L'apparition du télépilote ne pourrait qu'achever la perte de cette fonction qui disparaît peu à peu, conséquence des nouvelles techniques de communications.

Au-delà de la perte de cette attribution le télépilote ne pourra reprendre l'intégrité des fonctions qui sont aujourd'hui assignées au capitaine. Les raisons semblent logiques car du fait de l'absence des personnes à bord, ce dernier n'aurait pas à avoir des fonctions relatives à l'organisation du travail à bord entre les marins. Ainsi il en sera de même des exigences relatives à leur sécurité à bord.

Quid alors des attributions judiciaires ? Concernant ces attributions il suffit de reprendre l'adage latin « Ubis societas, Ibi jus »20 afin de conclure sur l'absence de ces dernières pour le télépilote, à considérer que l'équipage forme une micro société à bord du navire.

Concernant la nationalité la règle est en vérité relativement simple car l'article L. 5522-1 alinéa 2 prévoit que le capitaine peut être un ressortissant d'un Etat-membres de l'Union européenne.

La question de la représentation du pavillon reste entière mais il est possible d'imaginer que le navire sans équipage soit attaché à une exigence de commande depuis le territoire d'un Etat-membres de l'Union européenne. Il s'agirait donc de faire du télépilote et du drone maritime un ensemble unique afin de simplifier l'articulation entre ces régimes.

En revanche les attributions dites techniques ou relatives à la conduite et à la sécurité du navire entre évidemment de plein droit dans les fonctions qui vont être dévolu au télépilote. La particularité étant que ces attributions permettent également de prendre « toutes les mesures nécessaires et adaptées en vue d'assurer la préservation du navire et sa cargaison et

16 Article L. 5412-8 du Code des transports

17 Statut du capitaine, Civ. 18 juin 1951 sous l'article L. 5412-2 du Code des transports sur la désignation du capitaine par le propriétaire du navire ou l'armateur et de la répartition des responsabilités entre ces derniers et lui-même.

18 Article L. 5412-3 du Code des transports

19 Article L. 5421-4 du Code des transports

20 Traduction « Là où il y a une société, il y a du droit » par P. ROGÉ

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des personnes se trouvant à bord »21. S'en déduit logiquement une attribution relative à la conduite même du navire durant le voyage qui sera l'apanage du télépilote. Néanmoins la question de l'absence d'un pilote à bord pour l'entrée dans les zones portuaires reste entière même si pour des raisons évidentes de sécurité, la présence de ce dernier accompagnée d'une communication stable avec le télépilote pourrait permettre de respecter les règles actuellement en vigueurs22.

De manière plus pragmatique, le capitaine est « le patron ou toute autre personne qui exerce le commandement de faire du navire »23 ce qui correspond en partie à la fonction essentielle qui sera accordée au télépilote même si cette dernière se fera à distance.

Il reste néanmoins à dégager la responsabilité de ce dernier qui sera probablement à l'instar du droit social imaginé, hybride car il ne saurait être admis dans une des cases existantes.

II. Des responsabilités quasi-identiques à celles du capitaine

D'une part il convient d'opérer des comparaisons avec les régimes de responsabilités contractuelles et extracontractuelles :

Contractuellement, le principe issu de l'article L. 5412-2 du Code des transports est qu'il « répond de toute faute commise dans l'exercice de ses fonctions », ce qui signifie que le capitaine est responsable envers l'armateur lorsqu'il manque à ses obligations, c'est-à-dire en cas de faute lourde24, ce qui dans le droit commun s'exprime par une intention de nuire à l'employeur et donc en l'espèce à l'armateur. L'hypothèse est malgré tout rarement envisagée car le capitaine est considéré comme étant le préposé de l'armateur au sens de la jurisprudence de 195125. La responsabilité contractuelle devrait alors être parfaitement calquée pour le télépilote car il existe peu de différence entre le droit social maritime et le droit social terrestre.

Concernant la responsabilité extracontractuelle, la question est également simple puisque le capitaine est considéré comme étant un préposé tel que le sera le télépilote. En conséquence le régime applicable sera celui de l'article 1242 aliéna 5 du Code civil dont on peut tirer que le capitaine et par projection le télépilote exerce le commandement, non la garde de la chose. Il

21 Article 28 du code disciplinaire et pénal de la marine marchande abrogé par l'ordonnance du 2 novembre 2012 mais qui illustre bien cette attribution.

22 Article D. 5412-6 du Code des transports

23 Article L.5511-4 du Code des transports ; Soc. 15 mars 1972

24 Soc.18 janvier 2011

25 Civ. 18 juin 1951, Navire Lamoricière

ne faudrait pas oublier la prise en compte de la jurisprudence Costedoat26 de la Cour de Cassation qui précise que le préposé n'engage pas sa responsabilité à l'égard des tiers s'il n'excède pas les limites de ses missions. C'est-à-dire que le télépilote, à l'instar du capitaine n'engagerait pas sa responsabilité civile en cas d'abordage s'il a agit dans la mission de commandement du navire sans équipage. Cela signifie que la responsabilité civile pourra être considérée si le télépilote commet une infraction27 ou une faute intentionnelle.

D'autre part, la responsabilité pénale peut être recherchée dans le cadre de cette infraction qui peut être par exemple le non-respect du RIPAM28. Concernant la responsabilité pénale issue d'atteintes à l'environnement la question ne devrait pas se poser considérant que le drone maritime dans l'idéal se voudra comme répondant aux objectifs environnementaux recherchés dans le domaine maritime. Néanmoins le télépilote ne pourrait être tenu pour responsable de rejets polluants directement de son fait et encore moins concernant l'évacuation d'ordures en mer29. Il faudra alors se reporter exclusivement sur l'armateur ou le propriétaire du navire sans équipage qui n'aura pas été assez diligent dans l'entretien de ce dernier mais le sujet de cette responsabilité ne sera pas abordé ici.

Une dernière infraction peut faire l'objet de sanction pénale grave. Il s'agit du refus d'assistance qu'il s'agira d'étudier sous ses différents aspects. Néanmoins la question restera à traiter sur le bénéfice de la limitation de responsabilité.

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26 Assemblée Plénière, 25 février 2000, Costedoat

27 Assemblée Plénière, 14 décembre 2001, Cousin

28 Supra Partie 1 du mémoire

29 Article L. 218-11 et L. 218-15 du Code de l'environnement

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille