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Les différentes formes de fraudes et leurs impacts négatifs prévisibles sur la filière industrielle: L'exemple de la compagnie sucrière sénégalaise (CSS)

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par Abdoulaye Basse
Université Gaston Berger de Saint-Louis - Maitrise droit de l'entreprise 2004
  

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PREMIERE PARTIE :

L'organisation et le fonctionnement du marché face la problématique de la fraude dans le secteur du sucre.

PREMIERE PARTIE : L'organisation et le fonctionnement du marché face

à la problématique de la fraude dans le secteur du sucre.

Une des grandes priorités que les nouvelles autorités sénégalaises s'étaient fixées au lendemain des indépendances c'était de relever le défi de l'industrialisation en dotant le Sénégal d'entreprises viables, compétitives et pérennes. En ce sens l'installation de la CSS a contribué à concrétiser ce choix en favorisant la création de richesses pour l'ensemble de l'économie nationale. Toutefois l'existence d'une telle structure est aujourd'hui menacée par la poussée grandissante de la fraude. D'où l'intérêt de procéder à une analyse de la problématique de la fraude au regard des mutations subies par les règles d'organisation et de fonctionnement du marché du sucre.

Dans un premier temps l'accent sera mis sur la détermination des règles de fonctionnement et d'organisation du marché. En d'autres termes à une analyse du cadre institutionnel et réglementaire du marché avant et après la libéralisation.

Dans un second et dernier temps nous allons procéder à une analyse de la problématique de la fraude sur le marché du sucre à travers d'une part une description des différentes formes de fraude rencontrées sur le marché et d'autre part à démontrer dans quelle mesure la fraude se pose avec acuité dans le secteur du sucre.

CHAPITRE I :

LE CADRE INSTITUTIONNEL ET REGLEMENTAIRE DU MARCHE.

CHAPITRE I : LE CADRE INSTITUTIONNEL ET REGLEMENTAIRE DU MARCHE.

De prima bord, il convient de donner une définition de la notion de marché. Celle-ci est considérée, conformément à la note 4 de l'annexe N° 1 AU RÈGLEMENT N°03/2002/CM/UEMOA Relative aux procédures applicables aux ententes et abus de position dominante à l'intérieur de l'UEMOA: notes interprétatives de certaines notions comme le résultat de la combinaison entre le marché des produits en cause et le marché géographique en cause.

Cette même note définit dispose que : « Le marché de produits en cause comprend tous les produits et/ou services que le consommateur considère comme interchangeables ou substituables en raison de leurs caractéristiques, de leurs prix et de l'usage auquel ils sont destinés » alors que « le marché géographique en cause correspond quant à lui au territoire sur lequel les entreprises concernées contribuent à l'offre de produits et de services, qui présente des conditions de concurrence suffisamment homogènes et qui peut être distingué des territoires limitrophes par le fait notamment que les conditions de concurrence y sont sensiblement différentes. »

Deux étapes importantes ont marqué de façon considérable et indélébile le processus de création du marché du sucre au Sénégal.

La première était caractérisée par une situation de monopole conféré à la CSS par les textes réglementaires notamment la convention d'établissement du 29 juin 1970 modifiée à quatre reprises. Ces règles caractérisées pour l'essentiel par leur caractère protectionniste influaient considérablement sur la composition des acteurs du marché et les modes de détermination du prix du sucre sur le marché.

La deuxième étape repose pour l'essentiel sur des textes particulièrement favorables à la concurrence. Ils avaient vocation de favoriser la libre concurrence dans le secteur. Enclenchée après la dévaluation17(*) du FCFA18(*) en 1994, la libéralisation s'est poursuivie avec la mise en oeuvre du TEC de l'UEMOA. Toutefois, malgré la libéralisation des importations et du prix, les Etats ont mis en place un dispositif d'atténuation des effets de cette nouvelle donne. C'est le cas notamment de la Taxe Conjoncturelle à l'Importation (TCI).

Section I : le cadre juridique du marché avant la libéralisation

Analyser le cadre juridique du marché avant la libéralisation revient à apprécier les caractéristiques des règles régissant le marché puis déterminer leurs manifestations.

Ces règles sont constituées par celles de la convention d'établissement signée entre l'Etat sénégalais et la CSS. Elles subiront plusieurs modifications avant la libéralisation.

Leurs incidences portaient de façon significative sur la composition du marché et les modes de détermination du prix du sucre.

Paragraphe I : les caractéristiques de ces règles

L'étude portera sur les caractéristiques de la convention d'établissement du 29 juin 1970 d'une part et celles relatives aux différents avenants modifiant ladite convention.

A : les règles protectionnistes de la convention d'établissement du 29 juin

1970.

La convention d'établissement du 29 juin 1970 passée entre le gouvernement du Sénégal et la CSS, approuvée par le décret n° 70-898 du 20 juillet 1970 portant agrément de la CSS en qualité d'entreprise agrée est le texte de base qui organise les rapports entre les parties signataires à ladite convention.

Comme l'indique l'art.1 al.1 du texte sus visé : « l'objet de la présente convention est de définir les conditions dans lesquelles la société devra créer et gérer dans la zone de Richard-Toll une exploitation agro-industrielle destinée à la culture de la canne à sucre ainsi qu'à la fabrication du sucre, et d'autres produits dérivés, à partir de la canne produite par ladite société. »

La réalisation de ce projet d'un « investissement de neuf milliards de franc CFA au moins » vise d'une part à assurer l'équilibre extérieur de l'économie et d'autre part augmenter «  le bénéfice social que l'économie du Sénégal tire de cette région. » C'est pour cette raison qu'il a fallu nécessairement définir un certain nombre de garanties juridiques et d'avantages fiscaux conférés à la CSS pour favoriser son développement. Aussi il était prévu qu'elle allait bénéficier d'un bail emphytéotique d'une durée de 99 ans sur les terres qu'elle aura à exploiter.

C'est ce qui ressort des dispositions de l'art.1 al.2 de la présente convention : « les terres sur les quelles seront établies les installations agro-industrielles de la société resteront la propriété de l'Etat. Ces terres seront louées à bail emphytéotique, pendant une durée de quatre-vingt-dix neuf ans à la société pour la somme symbolique d'un franc (1). » Ce délai constitue au regard des règles relatives au droit des sociétés la durée légale de vie d'une société comme l'indique à cet effet l'art.28 infine de l'acte uniforme de l'OHADA sur les societés dispose : « la durée de la société ne peut excéder quatre-vingt-dix neuf ans. » Une gratuité dans l'approvisionnement et l'utilisation des eaux du Sénégal 19(*)et du lac de Guiers20(*) lui est aussi accordée.

Les art.3, 4 et 5 traitent respectivement des délais de réalisation du programme fixé entre l'Etat et la CSS, des conditions d'interventions de la caisse de péréquation et de celles relatives à l'utilisation des entreprises sénégalaises dans le cadre de la réalisation du programme.

La question de l'utilisation de la main d'oeuvre de nationalité sénégalaise et des conditions d'emploi du personnel est traitée par les arts. 6 et 7 de la même convention. Les intérêts qui s'attache à ce dernier article est qu'il met à la charge de la CSS l'obligation d'assurer à son personnel « le bénéfice des avantages sociaux et sanitaires prévus par la législation en vigueur. »

Par rapport aux garanties juridiques, cette convention constitue la première base textuelle du monopole accordé à la CSS aussi bien en ce qui concerne la production d'une part et les importations du sucre nécessaire à la réalisation du premier programme dont la durée maximum était de 7 ans. C'est l'art.11 de la convention initiale qui prévoyait expressément l'engagement de l'Etat à édicter des normes contraignantes et restrictives de concurrence afin de mettre la CSS dans une situation de monopole sur le marché national relativement à la production de sucre. De même, cet article faisait état de la position prise par l'Etat de n'accorder d'agrément à toute autre entreprise potentiellement concurrente de la CSS.

Pour ce faire le gouvernement s'était engagé à prendre toutes les mesures contraignantes devant permettre à la société créée d'écouler sa production destinée à assurer de façon prioritaire la couverture de la consommation nationale. Cette même convention détermine les modalités d'intervention de la caisse de péréquation et de stabilisation des prix, de l'utilisation de la main-d'oeuvre sénégalaise et l'emploi du personnel.

Outre les facilités accordées à la CSS pour son approvisionnement en combustible conformément à l'art.14 qui dispose : «  le gouvernement s'engage à permettre à la société, d'obtenir à un prix tout au plus égal au prix international, la totalité de ses besoins en fuel-oil nécessaires à la réalisation de son programme. », elle bénéficie de garanties financières relatives :

- au mouvement de capitaux entre le Sénégal et les pays de zone -franc,

- d'exonération sur les Bénéfices Industries commerciaux (BIC).

- sur les patentes et annexes,

- sur la contribution foncière des propriétés bâties et non bâties et taxes annexes.

Il faut rappeler que la convention étendait l'ensemble de ces avantages fiscaux aux filiales créées pour participer à la réalisation du programme confié à la société mère.

Des exonérations sur les droits de douanes portant sur « les matériels et matériaux ni produits, ni fabriqués dans l'union douanière des Etats de l'Afrique de l'ouest, importés et destinés à la réalisation des investissements du programme agrée » sont accordées à la société ou à ses filiales dés lors qu'il est fait la preuve de «  l'impossibilité de se procurer des matériels et matériaux équivalents originaires du Sénégal ou d'un pays de la zone franc. » Ce régime douanier préférentiel a été étendu à l'ensemble des pièces détachées spécifiques dudit matériel.

L'annexe 1 de la convention prévu pour une durée de 25 ans conformément aux dispositions de l'art.29 fixe les conditions de détermination des prix de vente garantis à la CSS. Le mécanisme de fixation repose sur une formule préfixée qui permet de mettre en jeu le système de la péréquation. De même l'annexe dispose que « les modalités de révision de prix garanti seront définies par arrêté du Ministre des Finances et des Affaires économiques. »

L'annexe 2 de la convention fixe la durée et taux des amortissements applicables aux immobilisations de la société.

En définitive, on peut dire que cette convention initiale comporte de nombreuses dispositions qui présentent un caractère purement avantageux pour la CSS. Cela s'explique en son temps par le fait qu'il fallait lui donner les moyens financiers juridiques nécessaires à la réalisation du complexe sucrier de RD-TOLL.

Du fait de l'évolution économique de la situation de la CSS et de l'économie nationale, ce texte a subi diverses modifications nécessaires à sa réadaptation.

B : Les différentes modifications apportées au texte initial

Quatre avenants ont été signés afin d'apporter de nouvelles modifications à la convention d'établissement du 29 Juin 1970. Il s'agit principalement des :

? Avenant N° 1 du 18 février 1972 modifiant la convention du 29 juin 1970 passé entre le gouvernement de la République du Sénégal et la CSS.

Elle visait à modifier sur initiative de la CSS certaines dispositions relatives aux :

- Conditions d'utilisation des ressources en eaux pour ses besoins.

La gratuité était certes maintenue mais l'emploi de cette eau est mieux réglementé avec la clé de répartition suivante : 23000 m3 pour le lac de Guiers et la Taouey21(*) et 8000 m3 à partir du fleuve.

L'art.1 de l'avenant apportait des aménagements relatifs au délai de réalisation du programme défini par la CSS et l'Etat. Des dispositions des arts.3 al.1, 2 et 3 ont modifié les délais de réalisation du programme pour les proroger.

Toutefois en ce qui concerne les conditions d'approvisionnement sur le marché international du sucre nécessaire à la réalisation des objectifs assignés, les dispositions restaient maintenues.

L'art.2 de l'avenant abrogeait l'art.14 du texte initial. Outre les engagements pris par le gouvernement pour faciliter un bon approvisionnement en combustible sur le marché international, celui-ci accorde à la société de nouvelles exonérations totales sur tous les droits et taxes portant sur ces produits sur une période de 10 ans.

- Aussi, l'Etat accorde de nouveaux privilèges portant sur les impôts sur BIC conformément aux art.3, 4, et 5 de cet avenant.

Les modifications apportées à l'art.19 étendaient le champ d'application de ces exonérations. En lieu et place des « sociétés ou entreprises d'études ou d'engineering » le texte actuel emploie les termes suivantes « les sociétés ainsi que les entreprises de toutes natures ». Il étaient aussi ajouté à l'art.19 infine qu' « elles seront en conséquence dispensées de produire aux services des contributions les déclarations fiscales correspondantes » à la seule condition qu' « elle n'exerceront aucune autre activité au Sénégal ». Cette extension avait pour conséquence logique de modifier les dispositions des art.24 portant sur le droit fiscal d'entrée, taxe forfaitaire représentative et taxe de statistique et art. 25 portant sur le chiffre d'affaire. Toutes ces exonérations ou privilèges fiscaux seront accordés à la   société, ses filiales ou toutes autres sociétés et entreprises visées à l'art.19 de la convention initiale.

- L'art.6 de l'avenant abroge l'annexe 1, partie intégrante de la convention, relative à la fixation des prix de vente garantis à la CSS. Des modifications étaient aussi apportées au mode de calcul du prix du sucre en pains. Il en était de même pour la formule d'indexation des prix garantis. L'annexe 2 relative à la durée et au taux d'amortissement n'avait subit aucune modification.

? Avenant N° 2 du 07 décembre 1984 à la convention d'établissement de la CSS passé le 29 juin 1970 et modifié le 18 février 1972.

La signature de cet avenant d'une durée de 10 ans approuvé par le décret 84- 1450 du 7 décembre 1984 entrait dans le cadre d'une adaptation des clauses conventionnelles de 1970 devenue nécessaire avec l'évolution de la situation économique générale et l'arrivée de la CSS à un niveau de production performant. A travers ces nouvelles dispositions plus réstrictives que les textes antérieurs, le gouvernement visait « une meilleure connaissance et dune maîtrise des prix de revient ». Ainsi, la CSS s'était vue soumise à l'exécution de nouvelles clauses contraignantes.

En ce qui concerne le maintien du monopole, elle implique pour la CSS la satisfaction totale de la demande nationale à partir du sucre raffiné issu de sa production. Celle-ci conditionne toute exportation future. C'est ce qui ressort des dispositions de l'a. 1 al. 1 et 2 modifiés « il ne peut être exporté qu'après satisfaction de la demande nationale ».

Quant aux droits et obligations, ils voyaient leur champ d'application mieux réglementé. L'art.2 al.3 exigeait leur application uniquement pour les filiales de la société créées « exclusivement pour la réalisation et l'exploitation directe de son programme et des activités connexes ».

L'avenant apportait aussi de nouvelles modifications à l'art.3 relatif au « délai de réalisation » du programme assigné à la CSS pour la période allant jusqu'au 31 juillet 1986 tel qu'indiqué à son annexe 1.

L'exclusivité dans les importations de sucre roux restait maintenue. Toutefois, les parties étaient convenues qu' « à compter du 1er août 1986, la société ne sera plus autoriser à importer du sucre roux pour atteindre lesdits tonnages, sauf en cas de force majeure . »

A la lecture de ces nouvelles dispositions, on constate que le gouvernement avait entendu restreindre les possibilités d'importations offertes jadis à la CSS. Cette dernière s'est engagée auprès des pouvoirs publics à couvrir la totalité de la consommation nationale à partir de sa canne. Il faut aussi préciser que même si l'interdiction de recourir à des importations n'est pas absolue et qu'en cas de force majeure la CSS devait en recourir pour respecter ses engagements, il reste que cette dernière possibilité est rigoureusement réglementée. Le pouvoir d'appréciation du cas de force majeure invoqué restant souverainement dévolu aux services gouvernementaux chargés du commerce.

Des modifications majeures sont apportées à l'art.11 notamment le prix. L'ancien système est remplacé par un nouveau mécanisme de fixation.

Contrairement à la législation antérieure, cet avenant intègre à travers l'art.11 (bis) ajouté à la convention, les sous-produits industriels. Leurs achats, commercialisation et utilisation entraient désormais dans les rapports entre la CSS et l'Etat à travers la Caisse de Péréquation et de Stabilisation des Prix (CPSP)22(*).

Le caractère restrictif des dispositions de cet avenant apparaît aussi dans le fait que désormais le gouvernement n'accorde aucune exonération sur les droits d'entrée sur le diesel destiné aux voitures de tourisme. Cette disposition s'applique aussi bien à la société qu'à ses filiales.

Les arts. 8, 9, 10, 11, 12, 13 et 14 venaient apporter des précisions supplémentaires sur la durée de validité de certains avantages et privilèges accordés à la CSS. A ce titre, les art.15 et 16 venaient modifier la durée des effets de la convention fixée au 31 juillet 2000. Ces modifications portaient aussi sur les modalités de sa révision.

L'art.17 intégrait à la convention une nouvelle annexe relative au « programme de mise en production pour la consommation nationale.»

? Avenant N°3 du 22 Mai 1987 à la convention d'établissement de la CSS passé le 29 juin 1970 et modifié les 18 février 1972 et 29 novembre 1984.

Il faut d'emblée préciser que la signature de cet avenant le 22 mai 1987 entre la République du Sénégal et la CSS et approuvé par la décret n° 87- 679 du 22 mai 1987 a été précédée par la signature d'un protocole d'accord le 3 mars de la même année.

Il s'agissait dans le cadre de cet accord préliminaire signé par la CSS et ses différents partenaires à savoir l'Etat et la Caisse Centrale de Coopération Economique (CCCE)23(*) de définir le projet relatif à la restructuration financière de la CSS. Les différentes réunions tenues à Dakar par les différents acteurs les 11, 12 et 13 février 1987 ont abouti à un certain nombre de mesures qui feront l'objet de cet avenant.

Au terme de celui-ci et conformément aux dispositions arrêtées par les parties lors de la signature du protocole d'accord, de nouvelles modifications ont été apportées à l'art.3 de la convention d'établissement : d'une part, la société s'engageait à satisfaire à partir de la canne locale la totalité de la consommation nationale avant le 1 août 1987, d'autre part elle conservait le monopole sur l'importation du sucre roux et du sucre blanc.

Dans ces relations avec l'administration de nouvelles charges pesaient sur la CSS notamment en ce qui concérne la livraison de renseignement statistique sur sa situation générale : production, main-d'oeuvre et utilisation de produits.

Au plan comptable, conformément au plan de restructuration financière, dont elle fait l'objet, la CSS était soumise à l'obligation de livraison annuelle de son bilan comptable. Le contrôle exercé sur elle étant plus rigoureux.

L'abandon du système de la péréquation était consacré par les modifications apportées à l'art.11 de la convention en ce sens que ces dispositions « cesseront de s'appliquer aux ventes opérées à partir du 1 novembre 1987 ».

Aussi, « ces ventes seront facturées au prix fixé par l'état selon les modalités prévues à l'annexe 3 qui fait partie intégrante de la convention ». C'est ce qui ressort de la lecture de l'art. 3 al. 1, 2°. Cette annexe fixe le prix de vente à partir du 1 novembre 1987.

L'art.5 de l'avenant proroge les échéances prévues les 31 juillet et les rapporte au 31 octobre suivant la même année. L'article 6 vient modifier les dispositions de l'art.31 de la convention, relative à l'arbitrage.

? Avenant N° 4 du 1er décembre 1992 à la convention d'établissement passée par le gouvernement du Sénégal et la CSS et modifié les 18 février 1972, 29 novembre 1984 et 22 mai 1987.

A travers la signature de cet avenant, les parties ont voulu harmoniser l'ensemble des dispositions antérieures et nouvelles de la convention dont la durée a été prorogée jusqu'au 31 octobre 2000 et celle de certains de ses effets au 31 octobre 2005.

En effet, avec la création de l'OMVS24(*) (Organisation pour la Mise en Valeur du fleuve Sénégal), le gouvernement a été dessaisie de tout pouvoir en matière de gestion des eaux du fleuve Sénégal au profit de la nouvelle entité créée. La CSS perdit alors un certain nombre d'avantages relatifs à la gratuité du pompage des eaux du fleuve et du lac de Guiers. L'utilisation de cette eau pour les besoins de son activité agricole étant désormais subordonnée au paiement à l'office de l'OMVS d'une taxe sous la forme de redevance. Pour compenser ces nouvelles charges, le gouvernement a senti la nécessité de consentir de nouveaux allègements fiscaux à la CSS. Dans ce cadre, l'Etat s'engageait à ce que les exonérations fiscales partielles sur les patentes et taxes annexes soient égales au montant de la redevance acquittée la même année par la société. Si les sommes effectivement versées sont supérieures au total des allègements fiscaux, de nouvelles exonérations seraient accordées à la CSS pour compenser ce différentiel intervenu lors du paiement de la redevance due à l'office.

Tel est l'objet principal de cet avenant n° 4 signé le 1 décembre 1992 et publié au Journal Officiel de la République du Sénégal (JORS) du 19 juin 1993.

Contrairement aux avenants 2 et3, il présentait un caractère favorable à la CSS dans la mesure où il venait compenser la pérte d'un certain nombre d'avantages accordés auparavant à la CSS par l'Etat.

Ces règles ont des incidences sur le marché.

Paragraphe II : Leurs maniféstations sur le marché

Leurs manifestations se perçoivent à travers l'étude de la composition du marché et des modes de détermination du prix du sucre sur le marché  avant la libéralisation.

A : Relativement à la composition des acteurs du marché

La période d'avant libéralisation du marché du sucre se caractérisait par une situation de monopole. Ce monopole de nature légale était conféré à la CSS par l'Etat du Sénégal à travers la signature de la convention d'établissement de 1970 et quatre autres avenants respectivement de 1972, 1984, 1987 et 1992 venus modifier certaines dispositions du texte initial.

Comme corollaire de cette situation, la CSS constituait l'acteur principal du marché qu'elle dominait. Cette position privilégiée lui offrait un double avantage : d'une part, elle détenait le monopole de la culture de la canne à sucre et de la production du sucre raffiné issu de cette activité, d'autre part la société détenait un monopole sur les importations lorsque celles-ci sont nécessaires à, la réalisation de son programme de couverture de l'ensemble de la consommation locale.

Relativement à la production, il faut dire que l'Etat du Sénégal avait pris divers engagements auprès de la CSS. Il visait pour l'essentiel à interdire l'arrivée d'un concurrent nouveau à ce titre, l'art. 11 infine de la convention de 1970 est très explicite « le gouvernement s'engage de même à n'accorder d'agréments à une autre entreprise similaire que si la situation du marché autorise une installation nouvelle sans porter atteinte à la rentabilité de la Compagnie Sucrière Sénégalaise ».

Jusqu'en 1995, début de la période de la libéralisation, cette disposition n'avait jamais fait l'objet d'une modification. Bien que l'article mentionne la possibilité d'accorder un agrément à une nouvelle entreprise, à la seule condition suffisante et nécessaire que la situation du marché l'exige, le constat est que la CSS constituait le seul producteur de sucre au Sénégal. L'Etat s'était aussi engagé à lui faciliter l'écoulement de sa production sur le marché intérieur notamment par un renforcement de la législation douanière et celle répressive afin de lutter contre la fraude. Cette immixtion très forte de l'Etat dans la régulation du marché constituait le principal obstacle à une multiplicité des sources locales d'approvisionnement en sucre. En d'autres termes cet intérventionnisme ne favorisait pas l'arrivée de nouveaux acteurs pouvant concurrencer directement la CSS. Le marché du sucre était placé sous le signe de la concurrence interdite.

Il y'a concurrence intérdite lorsqu'une personne est privée d'exercer telle activité proféssionnélle d'après le Pr. AZEMA25(*). Cette interdiction ne peut résulter que d'une loi. Des sanctions civiles et pénales pèsent sur les personnes qui violeraient ces dispositions légales.

Relativement aux importations, le gouvernement avait aussi accordé un monopole sur les importations du sucre. Des garanties ont été prises pour favoriser les approvisionnements que la société serait amenée à faire sur le marché international ou mondial du sucre. Elle devait y recourir pour combler le réste de la demande nationale. Toutefois les modifications apportées à l'av. 2 de la convention ont mieux encadré et limité cette opportunité.

En effet, l'art.3 al.3 modifié disposait « à compter du 1 août 1986, la société ne sera plus autorisée à importer du sucre roux pour atteindre lesdits tonnages hors le cas de force majeure ». L'al. 4 du même article ajoute « pendant la durée de la présente convention, la société sera seule autorisée à importer les tonnages complémentaires au sucre en provenance de RICHARD-TOLL... »

Il faut dire que ces importations étaient soumises au régime de la péréquation. Les restrictions découlaient en réalité de l'arrivée en pleine capacité des unités de production de la CSS. Ces mêmes articles consacraient l'interdiction faite à toute autre personne de recourir à des d'importations sur le sucre. Le monopole de la CSS sur les importations du sucre roux ou du sucre blanc sera maintenu par les avenants n° 3 et 4 sur la libéralisation.

En résumé on peut dire que le marché d'avant libéralisation était caractérisé par une domination absolue de la CSS. Celle-ci se manifestait par l'absence de concurrents légalement agrées tant au niveau de la production qu'au niveau du recours aux importations complémentaires de sucre. Cette situation était la conséquence directe des règles d'organisation du marché qui, en même temps qu'elle limitait le nombre d'acteurs, fixait les modes de détermination du prix du sucre sur le marché

B : Relativement aux modes détermination du prix

Les mêmes règles qui régissaient l'architecture et la composition du marché avaient par ailleurs vocation à fixer les modes de détermination du prix du sucre. Les relations financières entre l'Etat et la CSS étaient encadrées par la CPSP.

Le prix du sucre était garanti à la CSS. Ce prix garanti ou de référence faisait l'objet d'une réévaluation annuelle selon une formule convenue entre les parties.

Elle était de Mo÷Moo×0,60+1g÷Igo×0,10+ipi ÷Ipio×0,30 conformément à l'annexe 1 de la convention initiale. La prise d'effet de cette formule ne devait intervenir que pour une variation supérieure à 10%. Et dans ce cas de figure, un arrêté du ministre des finances et des affaires économiques d'alors devait fixer les modalités de cette révision. Cette formule n'était pas inchangeable et devait dans ce cas subir des modifications en fonction de l'évolution de l'environnement économique de la CSS et de l'économie nationale. L'indexation des prix garantis devait subir des variations.

Les premières modifications étaient intervenues avec l'avenant n°2 de la convention. L'ancienne formule adoptée lors de la signature de la convention de 1970 était remplacée par un système ou mécanisme à double niveau : la première variante était relative au prix de vente des produits raffinés d'origine sénégalaise. Le prix était garanti par le gouvernement sénégalais sur le marché local du sucre alors que la seconde variante concerne le différentiel entre le prix de vente et d'achat pour les produits raffinés à partir du sucre importé. A ce titre, l'intervention de la CPSP est déterminante dans la mesure ou l'art.11 al.1 modifié disposait que « la CSS versera à la caisse de péréquation ou de stabilisation des prix ou recevra d'elle selon les cas une péréquation calculée par rapport aux prix de vente du sucre et en outre, pour les produits d'origines extérieures, par rapport au coût d'achat réel rendu entrepôt de la société à Dakar.»

Les prix garantis et différentiels constituaient les prix de référence et comprenaient un coût de production et rémunération des capitaux. Ils étaient calculés à la tonne et faisait, conformément à l'annexe 2 de l'avenant n°2 du 7 décembre 1994 à la convention du 29 juin 1970, l'objet d'une réévaluation devant intervenir au 1er août de chaque année. Limitée à la composante main d'oeuvre du coût de production, celle-ci devait avoir lieu à chaque fois que le prix de la main -d'oeuvre calculée sur la base du SMIG et des charges sociales et fiscales enregistrait une hausse d'au moins 10% par rapport à la précédente réévaluation.

L'avenant n°3 à la convention d'établissement venait mettre fin au système de la péréquation basée sur un mécanisme de compensation des dettes mutuelles nées des relations entre les parties. Elle était effective depuis le 1er novembre 1989. En lieu et place de l'ancien système, un prix homologué allait entrer en vigueur. Il devait faire l'objet d'une révision périodique selon la formule suivante : P=Po×I×Y.

Po et P représentait respectivement le prix à réévaluer et le prix réévalué. Le terme Y renvoie correspond à la neutralisation partielle temporaire de l'indexation à partir du terme I égal à : aA/Ao+bB/Bo+cC/Co+dD/Do+eE/Eo.

Les lettres A et B représentent réspèctivement le prix de la main d'oeuvre et le prix facturé hors taxe du gasoil, au 1er juin précédent la réévaluation alors que C et D renvoient respectivement à l'indice des biens intermédiaires et à l'indice des prix à la consommation familiale.

E/Eo est égal à 1/3 K÷Ko+2/3 L÷Lo avec K et L représentant réspèctivement la somme de l'invérse des coefficient de réévaluation et l'indice provision pour le renouvellement du matériel fixé par le ministre de l'économie et des finances pour la même année tandis que Ao, Bo, Co, Do, Ko, Lo représentent les mêmes variables au même dates un an au paravent. Pour 1989, l'antériorité sera de deux ans. Pour les coefficients a, b, c, d, e, la somme est de 1.

Fixé à 0,98, il constituait une contrepartie normale de la situation de monopole dans la mesure ou il introduit pour la période 19989-1992 une variation correspondant à la part devant être répercutée aux consommateurs des gains de productivité du plan de restructuration 19987-1991. La réévaluation des prix de ventes intervenait à cet effet les 1er novembre de chaque année. Ce mode de calcul restera appliqué jusqu'à ce qu'intervienne la libéralisation.

On le voit donc, la période d'avant libéralisation était caractérisée par un dirigisme économique propre aux Etats ayant adoptés le système socialiste comme modèle de développement économique. L'analyse des différentes modes de détermination des prix du sucre montre l'absence de consécration du principe de la liberté des prix. La fixation du prix par les pouvoirs publics et non par le libre jeu du marché est une conséquence dirècte des règles contraignantes qui ont conférés le monopole à la CSS.

En résumé, il faut dire que le cadre juridique du marché avant la libéralisation n'était pas de nature à favoriser une concurrence dans le secteur du sucre. Les textes ont octroyé à la CSS un monopole sur la production et les importations. A cette situation, s'oppose une nouvelle phase caractérisée par l'ouverture du secteur à la concurrence. Il s'agit d'étudier le cadre juridique du marché après la libéralisation.

* 17 Mesure d'ordre économique prise par les Etats de l' UMOA le 11 Janvier 1994 à Dakar consistant à un changement de parité ente entre le FCFa et l'ancienne FF et qui a abouti à une perte de 50% de sa valeur. Elle est aujourd'hui indexée sur l'Euro : 1€=655,957 dont l'entrée n'a pas modifiée cette parité.

* 18 Monnaie nationale des 8 pays de la communauté financière africaine à savoir : Bénin, Burkina-Faso, Côte-d'Ivoire, Guinée -Bisseau, Mali, Niger, Sénégal, Togo.

* 19 Nom donné au fleuve du même nom d'une longueur de 1750 Km. Prenant sa source dans les montagnes du Fouta-djalon, il traverse la Guinée, le Mali, et sert de frontière entre le Sénégal et la Mauritanie.

* 20 D'une longueur de 50 Km, le Lac de Guiers est le plus grand lac du sénégal. Situé à proximité de Richard-Toll, constitue un grand réservoir d'eaux douces. Il alimente Dakar et sa région en eau potable.

* 21 Bras du fleuve Sénégal qui relie celui-ci au Lac de Guiers. Il traverse la ville de Richard-Toll.

* 22 Dissolue en Février 1996.

* 23 Organisme gouvernemental français devenu Caisse Française de Développement puis Agence Française de Développement intervenant sur des projets, soit sur participation à des programmes d'ajustement structurel bilatéraux (prêts).

* 24 Organisation sous régionale regroupant le Mali, la Mauritanie et le Sénégal. Elle est chargée de la gestion des eaux du Sénégal. Ses réalisations majeures restent la construction des barrages anti-sel de Diama et hydro-électrique de Manantali.

* 25 Consulter l'ouvrage du professeur AZEMA, Le Droit Français de la Concurrence, Thémis 1989, p.98.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore