Section 3 Aspects théoriques de quelques
politiques réglementaires de l'UEMOA
3.1. La politique industrielle
La politique industrielle peut être définie
comme l'ensemble des règles et des mesures instituées par
les pouvoirs publics pour créer des conditions favorables à la
compétitivité industrielle et favoriser certains secteurs
considérés comme porteurs, dans le but
d'accélérer la croissance économique nationale. La
politique industrielle revêt une importance capitale du fait des effets
d'entraînement qu'elle suscite et du rôle que joue l'industrie dans
la dynamique des autres secteurs (encadré 1).
Les pays dotés de tissus industriels plus
développés et de circuit de distribution plus
élaborés profitent plus des effets de l'intégration que
les pays à tissus industriels peu étoffés. Ceci
s'explique par le jeu des avantages comparatifs défavorables
à ces derniers. La loi des avantages comparatifs ou relatifs
voulant que chaque pays se spécialise dans les productions pour
lesquelles il dispose d'un avantage de coût relatif,
c'est-à-dire pour lesquelles son désavantage est relativement le
moins grand.
La mise en oeuvre effective de la politique
industrielle commune de l'UEMOA permettrait d'enclencher réellement
le processus d'industrialisation des économies des Etats membres.
L'industrialisation étant perçue comme le processus dynamique
de transformation des interactions productives (liaisons
amont/aval) permettant une intégration technico-économique et la
constitution d'un tissu industriel.
6 CEA (2004), Etat de l'intégration régionale
en Afrique
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Intégration régionale et promotion des
investissements dans l'espace UEMOA
Encadre 1 - Représentation simplifiée
du rôle de l'industrie dans la dynamique des secteurs
appel de main d'oeuvre
transferts de
surplus par le jeu des prix relatifs
AGRICULTURE
INDUSTRIE SERVICES
MARCHANDS
effet de modernisation
effet d'appel
« secondarisation du tertiaire et tertiarisation de
l'industrie »
ENERGIE
effet
d'entraînement
rôle moteur dans la formation des salaires
BTP
Source : Brémond et
Gélédan
3.2. Le rôle de la convergence
La réalisation de la convergence au sein
de l'Union vise à instaurer un environnement
macroéconomique favorable au développement de l'activité
économique dans tous les Etats membres de l'Union. En effet,
« relativement à un ensemble de pays, la convergence est
une condition nécessaire liée au pouvoir d'édifier
une union économique et monétaire de manière viable »
(Kassé, 2003).
L'analyse de la convergence au sein de l'Union
laissent transparaître à travers les indicateurs deux
aspects de politique économique essentiellement : la
maîtrise de l'inflation et la politique budgétaire.
3.2.1. La maîtrise de l'inflation
La maîtrise de l'inflation dans une
économie reste considérée comme un objectif
primordial du fait des conséquences de la hausse cumulative du niveau
des prix sur l'activité économique. Pour les keynésiens,
l'inflation est avant tout un phénomène macroéconomique.
La source de l'inflation se trouve dans l'incapacité de l'appareil
de production à accroître les biens
fournis. Ceci peut résulter soit de l'insuffisance des facteurs
productifs disponibles, soit de l'impossibilité d'accroître
l'efficacité des facteurs en fonction de l'augmentation des
quantités produites. En d'autres termes, la source véritable de
l'inflation se trouve dans la rigidité de l'offre face à la
demande. Pour les néo-classiques, le prix résultant de la
confrontation de l'offre et de la demande, une source importante
d'inflation réside dans le non respect des principes
Mémoire professionnel HOMEVOR Etsri
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Intégration régionale et promotion des
investissements dans l'espace UEMOA
de la concurrence pure et parfaite. Les entraves au libre
fonctionnement du marché
sont issues surtout de l'interventionnisme étatique
dans l'activité économique. Les
monétaristes quant à eux estiment que
l'inflation résulte d'un accroissement anormalement rapide de
la quantité de monnaie par rapport au volume de la
production.
La maîtrise de l'inflation est indispensable car,
une inflation élevée affaiblit la capacité des
économies à maintenir des conditions propices
à une expansion soutenue de l'activité économique
et à la création d'emploi. En outre elle peut susciter
des incertitudes chez les consommateurs et les investisseurs. Par
contre lorsqu'elle est relativement modérée, l'inflation
peut favoriser la croissance économique, notamment en
stimulant la consommation et l'investissement. Ainsi donc la
maîtrise de l'inflation au sein de l'Union révèle
toute son importance
(l'UEMOA recommande un niveau d'inflation d'au plus 3%),
car elle permettra
d'éviter les distorsions et les écarts de
compétitivité entre les Etats membres et de
préserver dans son ensemble la compétitivité de
l'Union.
3.2.2. La convergence budgétaire
La politique budgétaire
Divers courants de pensée économique
ont analysé l'efficacité des politiques
budgétaires de l'Etat. Selon la pensée orthodoxe
classique, l'Etat apparaît plus comme un consommateur de richesse
que comme un producteur de services non marchands. L'Etat ne contribue
pas à la richesse nationale et doit donc ajuster ses
dépenses à cette richesse tout en assurant certains devoirs
fondamentaux comme la protection de la nation, des individus et le maintien des
institutions publiques. Pour
les classiques, l'Etat ne peut durablement
dépenser plus qu'il n'a de recettes au risque d'engendrer des
déséquilibres dans l'économie. Le déficit,
lorsqu'il est financé par création monétaire, se traduit
par des tensions inflationnistes et une hausse des taux d'intérêt.
Ce qui décourage l'investissement privé et entraîne un
ralentissement
de l'activité économique.
Contrairement aux classiques, la pensée
keynésienne prône plutôt que l'Etat intervienne dans
l'économie à travers une politique budgétaire. Keynes
recommande que l'Etat manipule les instruments que sont les
impôts et les dépenses publiques pour moduler les oscillations
de l'activité économique. A travers l'effet multiplicateur,
Keynes montre qu'en période de récession, l'Etat doit augmenter
ses dépenses d'investissement pour soutenir la demande effective qui
agit positivement sur le volume de production et sur l'emploi. En
outre, les investissements publics
(infrastructures) sont source d'externalités positives de
production, une autre raison
de l'intervention publique. Ainsi, dans le cadre de la
surveillance multilatérale, la réduction de la masse salariale
et l'augmentation de la pression fiscale relèvent de la logique
d'accroître les ressources des Etats afin de financer une politique
budgétaire
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Intégration régionale et promotion des
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expansionniste qui s'exprime à travers
l'augmentation des investissements publics
que l'UEMOA fixe à au moins 20% des
recettes fiscales. Ces investissements
devraient accélérer l`accroissement de
l'activité économique et encourager les investissements
privés. Cette politique expansionniste se fait dans le cadre de
l'UEMOA dans l'optique d'un budget équilibré ou
excédentaire (critère du ratio solde budgétaire de base
au PIB nominal supérieur ou égale à zéro).
Autrement dit, il s'agit de stimuler l'économie sans qu'il y ait
déficit budgétaire. Le théorème de
Haavelmo7 établit, en effet, dans le cadre du
multiplicateur keynésien, que la politique économique qui
consiste à augmenter les dépenses publiques de l'Etat en
les finançant par un accroissement
équivalent des recettes fiscales (équilibre
budgétaire) n'est pas neutre mais permet également d'augmenter le
revenu national.
La politique de désendettement
En ce qui concerne la politique budgétaire de
l'Etat fondée sur l'endettement, ses
effets sur l'activité économique sont
différenciés. Pour les keynésiens, cette politique incite
la demande et, à travers les effets multiplicateur et
accélérateur, favorise la hausse des investissements et un
accroissement de la production. Mais pour les classiques, le
financement du déficit budgétaire par l'emprunt reste sans
effet sur l'activité économique surtout si les agents
économiques sont suffisamment tournés vers l'avenir. Dans ce
cas, ceux-ci anticipent une hausse future des impôts équivalant
au montant actuel de la dette publique
(théorème de l'équivalence ricardienne), ce qui peut
décourager les investissements et freiner l'activité
économique. Dans le long terme, un fort taux d'endettement ne peut
inévitablement que constituer un blocage dans le schéma de la
croissance. Du fait du problème de soutenabilité que
pose l'endettement, il s'avère nécessaire de préconiser
des taux d'endettement soutenables. L'UEMOA recommandant sur ce point
un taux d'endettement équivalent à 70% du PIB. En outre, la
non accumulation d'arriérés de paiement aussi bien
intérieur qu'extérieur s'inscrit dans la même logique et
permet, au plan externe,
de rétablir la crédibilité des Etats
membres au sein de la communauté financière internationale
et de relancer l'activité économique sur le plan
intérieur.
7 Du nom de l'économiste norvégien Trygve
Haavelmo, prix Nobel 1989 pour sa recherche en
économétrie.
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