Chapitre 2
Environnement réglementaire et
macroéconomique
Le Traité de l'Union Economique et Monétaire
Ouest Africaine prévoit de renforcer
la compétitivité des activités
économiques et financières des Etats membres par une
harmonisation de leurs législations dans le cadre d`un marché
ouvert et concurrentiel, et par la mise en oeuvre de politiques sectorielles
communes dans les secteurs essentiels de leur économie. L'objectif
visé est de maintenir un cadre macroéconomique assaini par
la convergence des performances et des politiques économiques.
La mise en oeuvre de ces législations qui visent à
promouvoir le développement économique a une influence
certaine sur les investissements et sur l'activité
économique.
Section 1. Environnement réglementaire
1.1. Les politiques sectorielles
Les politiques sectorielles s'inscrivent dans la logique
de l'intégration. Elles sont destinées à impulser le
développement des Etats membres de l'Union.
1.1.1. La politique commerciale
La réalisation de l'Union douanière dans
l'espace UEMOA a nécessité la mise en oeuvre de
réformes fiscalo-douanières qui visent la mise en place
d'un système tarifaire favorable à l'amélioration de
l'allocation des ressources productives, à la
compétitivité des économies et à
l'intensification des échanges commerciaux intra- communautaires.
Les principaux axes des réformes ont trait
à l'instauration d'une zone de libre échange par
l'élimination des barrières tarifaires et non tarifaires
entravant les échanges intra-communautaires, et à
l'harmonisation des politiques commerciales
vis-à-vis de pays tiers par l'institution d'un Tarif
Extérieur Commun (TEC).
La réglementation des échanges
intra-communautaires
L'Acte Additionnel n°04/1996 de l'UEMOA
met en place un régime préférentiel
transitoire destiné à régir les
échanges commerciaux au sein des pays membres de l'Union. Il
prévoit notamment :
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Intégration régionale et promotion des
investissements dans l'espace UEMOA
- la libéralisation des échanges entre
les Etats membres. Les importations et
exportations des produits originaires ou fabriqués dans
les Etats membres ne font
plus l'objet de restrictions quantitatives ou d'entraves non
tarifaires ;
- la libre circulation entre les Etats membres des produits du
cru et de l'artisanat traditionnel qui sont exonérés de tous
droits et taxes ;
- la réduction de 30% des droits d'entrée
pour les produits originaires8 agréés
importés de pays tiers. Cette taxe, la Taxe
Préférentielle Communautaire est passée à une
réduction équivalente de 80% en 1999. Par l'Acte
Additionnel n°04/1998 les mêmes produits
bénéficient de l'élimination totale des droits
d'entrée à partir du 1er janvier 2000.
- pour les produits originaires de l'Union, non
agréés, une réduction de 5% des droits
d'entrée applicables aux produits de l'espèce originaires de pays
tiers ;
- l'institution d'un Prélèvement Communautaire
de Solidarité (PCS) de 0,5% sur la valeur en douane des marchandises
importées des pays tiers par les Etats membres de l'Union. Ce
PCS est actuellement porté à 1% de la même valeur
suivant l'Acte Additionnel n° 07/99. Les ressources du PCS
sont destinées notamment à compenser les moins-values
fiscales, c'est-à-dire les pertes de recettes subies par les
Etats membres importateurs du fait de l'application du régime
préférentiel. Cette compensation est prévue pour prendre
fin en 2005 pour consacrer l'essentiel des ressources de la PCS au
financement du programme économique communautaire et notamment des
infrastructures communautaires
de base.
La réglementation des échanges
extra-communautaires
Elle s'effectue à travers le Tarif
Extérieur Commun (TEC). Le Tarif Extérieur
Commun a été instauré en 1998 suivant le
Règlement n°02/97/CM/UEMOA et est entré
en vigueur le 1er janvier 2000. Le TEC est
un tarif des douanes commun aux Etats membres de l'Union et
appliqué sur les produits et marchandises originaires de pays non
membres. Il comprend outre le PCS, un Droit de Douane et une
Redevance Statistique (RS) de 1% sur tous les produits,
exonérés ou non. Le TEC prévoit une tarification
des droits d'entrée (droits de douane) selon une nomenclature
des produits en quatre catégories9 :
- 0% pour les biens sociaux (catégories 0) ;
8 Sont considérés comme produits industriels
originaires :
. les produits industriels dans la fabrication desquels
sont incorporées des matières premières
communautaires représentant en quantité au moins 60 % de
l'ensemble des matières premières utilisées ;
. Les produits industriels obtenus à partir de
matières premières entièrement importées des pays
tiers
ou dans la fabrication desquels les matières
premières communautaires utilisées représentent en
quantité moins de 60% de l'ensemble des matières premières
mises en oeuvre, lorsque la valeur ajoutée
est au moins égale à 40 % du prix de revient
ex-usine hors taxes de ces produits.
9 Le critère principal de classification est
le degré de transformation des produits.
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15
Intégration régionale et promotion des
investissements dans l'espace UEMOA
- 5% pour la catégorie 1 des biens de première
nécessité (matière première de base,
bien d'équipement, intrants spécifiques) ;
- 10% pour la catégorie 2 des produits
intermédiaires (produits ayant subi un début de transformation et
nécessitant un apprêt avant tout usage) ;
- 20% pour la catégorie 3 des biens de consommation finale
et des autres produits non classés ailleurs.
Le TEC comprend également des droits à
caractères temporaires qui constituent des mesures de protection
à l'appui du tarif normalisé à savoir la Taxe
Conjoncturelle à l'Importation (TCI) et la Taxe Dégressive de
Protection (TDP).
La TDP (adoptée par le Règlement
n° 03/99/CM/UEMOA) est un mécanisme de protection
prévue pour compenser, de façon temporaire, la baisse
importante de protection tarifaire liée à la mise en
place du TEC. Elle permet aux branches d'activités fortement
affectées (industrie et agro-industrie) de se restructurer afin de
s'adapter à l'intensification des importations induites par le
désarmement tarifaire externe. Elle s'inscrit dans la logique des
Etats d'impulser les secteurs productifs pour un meilleur positionnement
sur le marché international.
La TCI quant à elle vise à
protéger les branches dont les produits (riz et sucre notamment)
sont influencés par les fluctuations des cours internationaux ou faisant
l'objet de subventions de la part de certains pays.
La mise en oeuvre du TEC fait partie des moyens
utilisés pour réaliser le marché
commun. Cette politique commune de tarification vise la
protection et la promotion
de la production communautaire. Elle peut contribuer en
outre à l'ouverture de l'Union vers l'extérieur et à
lutter contre le détournement de commerce10.
Le TEC ne fait pas l'objet d'une application totale de la part
des Etats membres. En effet, certains Etats gardent encore des lignes
tarifaires supplémentaires ou ne reprennent pas toutes les lignes
tarifaires du TEC. De même, certains tarifs nationaux laissent subsister
des droits qui ne relèvent pas du TEC. Par ailleurs, «
certaines entraves non tarifaires existent encore comme les normes
techniques imposées par certains Etats membres aux produits
communautaires, la multiplication des barrages routiers et la perception de
taxes illicites sur les corridors de l'Union11 ». De
plus l'intégration complète des marchés reste
entravée par des productions insuffisantes
et des capacités insuffisantes dans les transports, les
communications et l'énergie.
10 L'effet de détournement de commerce est une
situation qui se crée lorsque l'intégration induit une
réduction de commerce plus avantageux avec les pays
tiers.
11 UEMOA, Programme Economique Régional.
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Intégration régionale et promotion des
investissements dans l'espace UEMOA
Tableau 1 : Destination des exportations et origines
des importations de l'UEMOA,
1994-2000 (%)
Intra-
communautaire
Reste de
l'Afrique
Union
Etats-Unis
Européenne
Autres
pays
Exportations 11,2 12,2 45,9 4,9 25,8
Importations 7,9 12 41,7 4 34,4
Source : CEA, Etat de l'intégration en Afrique
Les échanges intra-communautaires formels restent peu
développés en comparaison avec les composantes des autres
régions du monde. Sur la période 1994-2000, les
exportations intra-communautaires n'ont représenté que
11,2% du volume des exportations totales des Etats membres de
l'Union, et seulement 7,9% des importations étaient d'origine
communautaire. En revanche, sur la même période, plus de
40% de ces échanges étaient à destination ou
provenaient de l'Union Européenne (tableau 1).
Pour ce qui concerne les échanges communautaires
de produits manufacturés, le principal pays exportateur est la
Côte d'Ivoire qui effectue à elle seule, d'après le
tableau 2, plus de 65% des exportations intra-communautaires. Quant au
Bénin et au Mali, ils sont les principaux importateurs de
produits manufacturés intra- communautaires (28,5% et 25,4% du total
des importations intra-communautaire).
Tableau 2 : Exportations et importations
intra-communautaires de produits manufacturés dans l'UEMOA, moyenne
de 1994-1999 (en millions de dollars)
Exportations
intra-communautaires
Valeur des échanges Principaux
pays
206,5 Côte d'Ivoire (135,7), Sénégal (52,9)
Togo (7,4), Mali (5,7)
Importations
intra-communautaires
97,3 Bénin (27,7), Mali (24,7), Niger (14,8)
Sénégal (12,4)
Source : CEA, Etat de l'intégration en Afrique, p.
105
1.1.2. La politique industrielle commune
Le secteur industriel des pays de l'UEMOA faiblement
développé ne participe que pour 12% à 27% au PIB de la
région dont 7% à 26% pour l'industrie manufacturière. Les
ressources de la zone restent peu transformées. Chacun des Etats membres
tire principalement ses recettes en devise par l'exportation de
produits primaires, agricoles ou miniers : le cacao pour la Côte
d'Ivoire, le coton pour le Burkina Faso, le Mali et le Bénin,
l'arachide pour le Sénégal et la Guinée-Bissau,
l'uranium pour le Niger, et le phosphate pour le Togo.
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Intégration régionale et promotion des
investissements dans l'espace UEMOA
La Politique industrielle commune (PIC) adoptée
par l'Acte additionnel n°05/99 et
élaborée dans le cadre du Protocole additionnel
n°II relatif aux politiques sectorielles
de l'UEMOA vise à accélérer le
développement industriel de l'Union. La PIC s'est fixée
plusieurs objectifs. Elle vise à assurer et consolider
la compétitivité des entreprises industrielles de l'Union
afin de préserver et développer les capacités
d'exportations des Etats membres, dans le cadre des nouvelles donnes du
commerce mondial. La PIC vise également à encourager la mise en
place d'un environnement favorable à l'initiative privée, la
création et le développement des entreprises, en
particulier des PME/PMI et favoriser la construction au sein de
l'Union d'un tissu industriel fortement intégré en
s'appuyant notamment sur les PME/PMI et la diversification et la
densification du tissu industriel de l'Union.
La Politique Industrielle Commune est fondée sur les
principes de concurrence entre
les entreprises, de coopération et de solidarité
entre les Etats membres. La mise en
oeuvre de la PIC dans l'espace UEMOA devrait concourir
à accélérer le développement industriel de l'Union,
et permettre aux Etats membres de l'Union de combler leur retard les uns par
rapport aux autres.
La Politique Industrielle Commune devrait permettre
à terme, si ses objectifs sont atteints, l'émergence
d'entreprises performantes, y compris communautaires, aptes à
satisfaire, à des conditions compétitives, la demande
intérieure, à affronter la concurrence internationale
et à favoriser le progrès social. De même,
la PIC permettrait la valorisation des ressources agricoles,
pastorales, halieutiques et minières des Etats de l'Union,
l'intensification des courants d'échanges intersectoriels
et le développement économique
équilibré des différentes régions de l'Union.
La mise en oeuvre effective de la politique
Industrielle Commune participe au processus de développement de
l'industrie au sein de l'Union à travers la mise à
niveau des entreprises et de leur environnement, le développement des
structures et des programmes de promotion de la qualité et
la promotion des réseaux d'informations. Ce programme
contribuera à la promotion des investissements et des exportations, le
développement des PME/PMI et le renforcement de la concertation
au niveau régional.
Des contraintes subsistent à la mise en oeuvre
de la PIC et au développement de l'industrie dans l'UEMOA. Le
poids de la fiscalité sur les entreprises dans les Etats membres,
l'étroitesse des marchés nationaux et le faible niveau de
développement technologique sont des freins potentiels à
la réussite de la PIC. Par ailleurs, les structures de production
sont inappropriées et le commerce entre les Etats de l'Union reste
faible. Les entreprises nationales produisent essentiellement pour le
marché interne plutôt que pour le marché régional,
leur faible compétitivité ne leur offrant pas encore
l'opportunité d'accéder au marché élargi. Il existe
également des freins à
la libre circulation des biens, des services et des personnes
à travers les frontières. Les
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Intégration régionale et promotion des
investissements dans l'espace UEMOA
coûts relativement élevés des facteurs
de production, notamment ceux de l'énergie et
l'insuffisance des infrastructures surtout dans le domaine des
transports participent à
la faible compétitivité des entreprises au sein
de l'Union. Une politique préférentielle sur les prix de
l'électricité et des hydrocarbures est en mesure de
favoriser et accélérer le développement du secteur
industriel. Enfin l'insuffisance de stabilité et la déficience de
sécurité juridique et judiciaire, marquée par le non
respect des lois et des règlements et leur non application par les
tribunaux ainsi que l'inefficacité et les lenteurs des voies de recours
ne militent pas en faveur du développement du secteur industriel dans la
sous région.
1.1.3. Les politiques énergétique et
minière communes
La mise en oeuvre de la Politique
énergétique commune comme le prévoit
l'Acte
Additionnel n° 04/2001 devrait contribuer à
la réduction des coûts et prix de l'énergie
en particulier ceux de l'électricité dans les
Etats membres, effet favorable aux entreprises et industries de l'Union.
La Politique énergétique commune va concourir
à la promotion des entreprises de services
éco-énergétiques dans les Etats membres
de l'Union et à l'instauration d'un environnement
favorable aux investissements énergétiques de l'Union.
La Politique minière commune
de l'Union telle que définie dans l'Acte
Additionnel n°01/2000 vise également à
contribuer, à travers l'harmonisation des cadres
réglementaires, à la diversification de la production
minière, à la transformation sur place des substances
minérales et à l'instauration d'un climat propice
aux investissements miniers dans l'espace UEMOA. Le développement
des échanges intra-africains de produits miniers couplé
avec un environnement favorable est en mesure d'inciter à la
création et le renforcement des industries locales et
régionales
de transformation.
Toutes les politiques sectorielles communautaires
nécessitent qu'elles s'inscrivent dans un ensemble
cohérent, orienté vers la compétitivité
et la promotion de l'investissement dans l'espace UEMOA, afin d'assurer
une réorientation et une plus grande coordination des priorités
en matière d'investissement.
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