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Tradition et rationnalité chez Hans-Georg Gadamer


par Pierre Luhata Lokadi
Université Saint Pierre Canisius - Bachelier en Philosophie 2006
  

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1.5. Wilhelm Dilthey

Dilthey21(*) reste un des esprits savants qui ont marqué l'histoire de l'humanité au 19e siècle. C'est le Kant des sciences de l'esprit. Il est préoccupé par le problème de connaissance dans les sciences de l'esprit. Influencé par la pensée de Kant, il cherche les conditions d'une connaissance scientifique possible de l'histoire. Il examine la valeur épistémologique des opératoires intellectuelles dont la combinaison permet au monde historique de « s'édifier » comme objet de connaissance. Ainsi, il procède par la critique de la raison historique. Pour Dilthey, la démarche compréhensive propre aux sciences de l'esprit et la démarche explicative des sciences de la nature ne se contredisent pas22(*). Au contraire, elles se complètent dans la connaissance historique. L'effort qu'entreprend Dilthey est, sans aucun doute, de trouver un fondement pour les sciences de l'esprit. Ce fondement est la psychologie.23(*)

Cependant selon Gadamer, Dilthey n'est que l'interprète de l'école historique. Il ne fait que reprendre les intuitions fondamentales de Ranke et de Droysen.24(*) Dilthey est resté prisonnier de la méthode inductive des sciences de la nature et surtout de l'empirisme de la logique de Mill :

Tout le travail, difficile, que Dilthey a consacré pendant des dizaines d'années à la fondation (grundlegung) des sciences de l'esprit, est en fait un débat ininterrompu avec l'exigence logique qui s'imposait, selon le célèbre dernier chapitre de Mill, aux sciences de l'esprit. Ce qui n'empêche pas cependant Dilthey de rester totalement sous l'emprise du modèle fourni par les sciences de la Nature, alors même qu'il veut précisément justifier l'autonomie des sciences de l'esprit25(*).

Dilthey cherche l'objectivité dans les sciences de l'esprit. En effet, selon lui, la connaissance implique la dissolution de notre engagement dans la vie, l'acquisition d'une distance par rapport à notre histoire propre, condition nécessaire de son objectivation.26(*) Voici quelques concepts-clés qui permettent de comprendre la pensée de Dilthey. Nous avons les concepts suivants : « expérience vécue »27(*), la notion de « structure »28(*), la « solidarité des individus 29(*)», le « donné »30(*). Par ailleurs, Ranke et Droysen avaient déjà proposé des catégories historiques pour fonder les sciences de l'esprit. Parmi ces catégories nous pouvons retenir : « scènes de liberté » (Ranke), « force », « puissance », « tendance déterminante ». Derrière ces catégories nous pouvons comprendre que toute individualité est déjà façonnée par la réalité qui lui fait obstacle. Dans ce sens, l'individualité n'est pas subjectivité, mais force vivante.

Les concepts de force, de puissance, de tendance déterminante, etc. employés par les historiens veulent tous rendre perceptible l'essence de l'être historique, en laissant entendre que l'idée ne trouve toujours qu'une représentation imparfaite dans l'histoire. Ce ne sont pas les plans et les opinions des acteurs qui représentent le sens du devenir ; ce sont au contraire les effets historiques qui font connaître les forces historiques. Ces forces qui constituent les véritables porteurs du développement de l'histoire, ne sont pas comme la subjectivité monadique de l'individu.31(*)

Aussi, Chez Droysen, la catégorie principale est celle qu'il baptise : « puissances éthiques »32(*).

Si l'induction est la méthode des sciences de la nature, la compréhension est propre aux sciences de l'esprit. En effet, pour Dilthey la tâche de l'herméneutique consiste à comprendre la vie à travers des expressions standardisées comme les écrits, l'art, la musique...Ainsi, la compréhension pour un historien de formation c'est de passer des expressions vécues aux impressions vécues par l'auteur33(*).

Cette herméneutique est purement épistémologique et constitue la méthodologie générale des sciences de l'esprit. Dilthey rattache l'herméneutique à la conscience historique. Pour lui, l'herméneutique est l'élément universel de la conscience historique pour laquelle il n' y a d'autres connaissances de la vérité que celle qui consiste à comprendre les expressions et en celle-ci, la vie. C'est la vie et comme conséquences, « l'ensemble de la tradition qui deviendra pour la conscience historique 34(*)une rencontre de l'esprit avec lui-même ».35(*)

* 21 Philosophe allemand, après avoir commencé ses études de théologie à Heidelberg, il les continue à Berlin où il s'intéresse de manière croissante à la philosophie en suivant les cours de Ranke. En 1867, il est nommé professeur à l'Université de Bâle. Il éprouvera un intérêt particulier aux travaux de Schleiermacher. Son ouvrage intitulé « introduction aux sciences de l'esprit » est un chef d'oeuvre dans lequel il se consacre sur la nature et les méthodes des sciences humaines. Il sied aussi de souligner que Dilthey fut le maître de Martin Buber. Cfr. J-C Merle, «Wilhelm Dilthey », in Encyclopédie Universelle, oeuvres philosophiques, Paris, P.U.F, pp. 1717-1721.

* 22 Pour Dilthey, la conscience historique est une connaissance de soi. Cette connaissance est intérieure. En effet, la vie est vouée à la réflexion. Ainsi, c'est la connaissance de soi( la conscience historique) qui donne naissance à la conscience scientifique qui est extérieure. La vie est antérieure à la l'objectivation scientifique. Mais, le lien entre ces deux connaissances est une donnée originaire. Cfr. Vérité et Méthode, pp.255-256.

* 23 Pour Dilthey la psychologie est capable d'universalisation. Elle est le point de départ de la réflexion des chacune des sciences de l'esprit. Cfr. Critique de la Raison historique, Introduction aux sciences de l'esprit. Essai de fondation de l'étude de la société et de l'histoire, Paris, Cerf, 1992, p.17.

* 24 Hans Georg Gadamer, Vérité et Méthode, Paris, Seuil, 1996, p. 218.

* 25 Ibid, p.22.

* 26 Ibid, p.23.

* 27 Par le concept d'  « expérience vécue » (Erlebnis), fait allusion à des contextes qui ont été vécus par un individu ou qui pourraient être vécus à nouveau par d'autres. Il n'y a chez Dilthey de sujet général, mais des individus historiques Cfr. Vérité et Méthode, p.242.

* 28 La notion de « structure chez Dilthey peut être comprise à la lumière de la doctrine de l'intentionnalité de la conscience de Husserl. C'est donc l'analyse husserlienne qui permet à Dilthey la distinction entre une « structure » et un « ensemble causal ». La structure nous permet de comprendre l'individu dans son historicité c'est-à-dire, la structure psychique de l'individu représente une unité intelligible. Cfr., Vérité et Méthode, p.245.

* 29 Ce concept permet de passer d u contexte de vie d'un « sujet réel » vers des « sujets logiques ». En d'autres termes, il s'agit fondamentalement du passage d'une fondation psychologique à une fondation herméneutique des sciences de l'esprit. Ici, c'est la compréhension est capitale. En effet, pour Dilthey la compréhension est compréhension d'une expression. Cfr. Vérité et Méthode, p.244.

* 30 Cette notion doit être rattachée à l'idée de l'intentionnalité chez Husserl. Avec l'enrichissement de cette notion de « donné » (Gegebenheit), la conscience se trouve toujours déjà insérée dans une structure (ensembles), ayant son être propre dans sa visée. Cfr. Vérité et Méthode, p.245.

* 31 Ibid, p. 226.

* 32 Cette catégorie permet d'étudier les individus dans ce qu'ils signifient en tant que moments dans le mouvement des puissances éthiques. Le concept de puissances éthiques est central dans la pensée de Droysen par ce que c'est à partir de ce concept qu'il fonde aussi bien le mode d'être de l'histoire que la possibilité de sa connaissance historique. Cfr. Vérité et Méthode, p.233.

* 33 Hegel fait une critique contre cette thèse de Dilthey au sujet de la compréhension. En effet, l'auteur de la « phénoménologie de l'esprit », affirme qu'une vraie compréhension engage toujours une dialectique du passé et du présent. Aussi, vouloir restaurer fidèlement le passé comme le pense Schleiermacher est une illusion. L'essence de l'esprit historique ne consiste que dans la restitution du passé, mais dans la médiation réfléchie avec la vie présente. Cfr. Vérité et Méthode, p. 188.

* 34 La conscience historique peut être comprise à travers l'idée de l'Esprit absolu chez Hegel. Elle (la conscience) ne considère tous les phénomènes du monde humain et historique que comme des objets qui permettent à l'esprit de se connaître lui-même plus profondément. Dans la mesure où elle les comprend comme objectivations de l'esprit, elle les retraduit « dans la vitalité spirituelle dont elles procèdent.

* 35 Hans Georg Gadamer, Vérité et Méthode, p.249.

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