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De l'être politique au droit à la politique: un essai de compréhension du sens de la politique chez Hannah Arendt

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par Tshis Osibowa Godefroy TALABULU
Faculté de philosophie Saint Pierre Canisius - Bachelier en philosophie 2007
  

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II.4. Un regard chez les modernes : l'ère de la pensée technique

H. Arendt, après avoir évoqué les Anciens, jette un regard scrutateur sur la situation politique de sa société. Elle en fait le constat selon lequel nous vivons l'ère de la pensée technique. Dans celle-ci, ajoute-t-elle, toute fin peut en effet devenir moyen pour une autre fin, et ainsi de suite à l'infini. Le mode de pensée qui, prenant appui sur l'activité de fabrication, prétend en faire le modèle de l'action, n'envisage la « valeur » des choses et des êtres que sous l'angle de leur utilité, c'est-à-dire en rapport avec la fin qui leur est assignable. L'homo faber ne risque-t-il pas d'être lui-même instrumentalisé et amené à servir un processus dont la signification lui échappe ? « Cette perplexité inhérente à l'utilitarisme , qui est par excellence la philosophie de l'homo faber, peut se diagnostiquer théoriquement comme une incapacité congénitale de comprendre la distinction entre l'utilité et le sens, distinction qu'on exprime linguistiquement en distinguant entre "afin de" et "en raison de". »28(*)

En réalité, ce n'est pas l'instrument en tant que telle qui est en cause ici, mais plutôt la généralisation de l'expérience de la fabrication à d'autres modes de l'agir humain, et à notre rapport au monde en général. La tentation humaine de la démesure naîtrait ainsi d'une méconnaissance de cette distinction principielle entre la fabrication instrumentale et l'action politique, que connaissaient les Grecs. « Dans La République de Platon, le roi-philosophe applique les idées comme l'artisan ses règles et ses mesures ; il "fait" sa cité comme le sculpteur sa statue ; et, pour finir, dans l'oeuvre de Platon ces idées deviennent des lois qu'il n'y a plus qu'à mettre en pratique. »29(*) Or, la modernité a accompli pleinement ce processus d'absorption de l'action politique dans le schéma instrumental de la fabrication. C'est seulement l'époque moderne qui a défini l'homme comme homo faber surtout, comme fabricant d'outils et producteur. Le schéma de la fabrication qui assigne une fin prévisible, car fixée d'avance à notre activité, s'est imposé aux yeux des modernes comme modèle de l'action politique. Les fabricateurs ne peuvent s'empêcher de considérer toutes choses comme moyens pour leurs fins ou, selon le cas, de juger toutes choses d'après leur utilité spécifique. 

Selon H. Arendt, ces changements conduisent à une dévaluation et à une incompréhension affectant le concept d'action qui est le concept central de toute pensée politique véritable. C'est précisément cette incompréhension du sens véritable de l'action qui aurait été brutalement mise au jour par le surgissement du totalitarisme. La conception « techno-poiétique » du pouvoir propre au nazisme résulte, en effet, d'une généralisation de la logique instrumentale de la fabrication  à l'intégralité du monde humain. Ce faisant, les conditions de l'action politique ne pouvaient qu'être détruites dans leur principe même.

H. Arendt remarque encore qu'avec le totalitarisme, l'homme moderne, ne se retrouvant pas dans les différents changements qui affectent sa société, tend à abandonner totalement le domaine politique à des gestionnaires technocratiques, et que ceux-ci ont pu devenir à l'occasion des «criminels de bureau». Inversement, c'est parce que le schéma instrumental de la fabrication s'est imposé comme mode de gouvernement à l'époque contemporaine, que les sociétés humaines sont peu à peu devenues des sociétés où les hommes apparaissaient comme superflus. C'est ce qui est au départ de l'étude de H. Arendt sur le totalitarisme. Le constat de Arendt est que le totalitarisme constitue un événement qui a bousculé toutes nos catégories de pensée. La nouveauté radicale et l'indicible horreur de ce qui s'est passé nous commandent de renoncer à toutes nos certitudes antérieures. D'où, la nécessité de repenser la politique.

* 28 « Hannah Arendt, philosophie politique » in Encyclopédie dl'Agorahttp://agoras.typepad.fr/espace

_et_politique/2006/08/hannah_arendt.html

* 29 Ibidem.

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