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La maladie sacrée, les parthenoi dans le regard de la médecine grecque

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par Virginie TORDEUX
Université Rennes 2 - Master 2006
  

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I.2. De par leur nature

La fille, alors qu'elle se développe plus lentement au sein du ventre de sa mère, vieillit prématurément après sa naissance, comme si l'ordre naturel mettait quelque hâte à la conduire à la puberté alors que la formation du garçon, précoce en ses origines, exige ensuite une maturation progressive sans rupture décisive. C'est que la fille, déterminée dès sa conception par un héritage physiologique, connaît une seconde naissance au moment de la puberté en exprimant la vocation fondamentale de son corps.

Le traité Maladies des jeunes filles explique que les difficultés commencent pour les femmes avec le début de la menarche si elle n'est pas mariée, à l'époque de l'âge du mariage, à la puberté ou un peu plus tard. Ces difficultés coïncident avec la descente des règles à travers le corps. L'auteur explique qu'il y a trop de sang dans le corps durant cette période de la vie des jeunes filles à cause de la nourriture et la poussée du corps.

Selon l'auteur, du fait de l'alimentation et de la croissance, il y a davantage de sang qu'il ne lui en est nécessaire. En effet, toujours selon l'auteur, les jeunes filles n'ayant pas d'activité difficile comme le travail des champs, elles n'ont pas besoin de beaucoup de sang pour alimenter le corps. Il présume certainement que, pour grandir, les jeunes filles utilisent beaucoup de nourriture et de sang. Une fois cette croissance achevée, elles n'ont plus besoin de ce sang ni d'autant de nourriture, par conséquent, il doit s'écouler à l'extérieur du corps. Or, la sortie se trouve au niveau du vagin. Si celui-ci est obstrué par une membrane que nous appelons aujourd'hui hymen, alors le sang ne peut être évacué et donne des désirs morbides aux jeunes filles. Par conséquent, il est nécessaire qu'elle soit mis en contact ave un homme ou plutôt qu'elle se marie.

« Quand l'orifice d'issue n'est pas ouvert et que le sang arrive en plus grande abondance, tant par les aliments que par l'accroissement440(*) »

Par contre, le médecin reste obscur sur le rapprochement de ces deux éléments avec la production de sang en excès pendant la puberté. Ce rôle de l'alimentation est suggéré dans Maladies des femmes quand le médecin affirme qu'une des raisons pour lesquelles les femmes produisent du sang menstruel, c'est qu'elle ne travaillent pas assez dur pour utiliser toute leur alimentation :

« l'homme puise ce que demande la nourriture du corps, et le corps n'étant pas mou, n'est sujet à un excès, ni de ton, ni de chaleur par l'effet de la pléthore comme chez la femme. Ce qui contribue grandement à cette effet chez l'homme, c'est qu'il fatigue bien plus que la femme ; la fatigue dissipe une partie du fluide441(*) »

Ce médecin semble croire qu'à la puberté, les filles utilisent tout ou la plupart de leur alimentation pour leur croissance et que le peu qu'il leur reste, même s'il reste emprisonné, ne présente aucun danger pour leur santé. Lorsque la croissance ralentit ou cesse, les filles n'utilisent plus toute leur nourriture, celle-ci se transforme en abondance en sang. Le volume produit devient trop important pour se « fondre » dans le corps, il commence alors à couler dans l'utérus pour être évacué.

Il peut sembler surprenant que la seconde raison que donne le médecin de Maladies des jeunes filles, en plus de la nourriture, soit la croissance. L'enfant grandit, les vaisseaux du corps grandissent avec lui, donc il y a davantage de place pour que les humeurs se mettent en mouvement :

« quand grandissent la fille et le garçon, les veines qui vont à la verge chez ce dernier et à la matrice chez la première deviennent coulantes à cause de la croissance et elles s'ouvrent : un va-et-vient s'y produit à travers les voies (encore) étroites. Alors l'humeur s'agite, puisqu'elle a de la place pour s'agiter442(*) »

Le sang menstruel est donc provoqué par une agitation soumise à l'influence des températures du corps :

« les mois diffèrent beaucoup entre eux pour le froid et la chaleur, et le corps de la femme s'en ressent, car il est plus humide que celui de l'homme. Le sang troublé remplissant les veines, il en sort une partie443(*) »

Les règles soulagent un corps saturé. C'est cet aspect de la croissance, motif initial de la menstruation auquel le médecin de Maladies des jeunes filles fait allusion.

Toutefois, il était seulement nécessaire au médecin de Maladies des jeunes filles de citer une seule de ces causes pour expliquer la menarche. L'utilisation de toute l'alimentation pour la croissance à la puberté est suffisante pour expliquer l'absence de menstruation des jeunes filles. D'ailleurs, le médecin de Maladies de femmes ne fait aucune référence à une expansion des vaisseaux du corps pour permettre la menstruation. Par contre, il prête fréquemment attention à l'étroitesse des passages dans le corps féminin avant qu'elle ait donné naissance. Pour l'auteur de Nature de l'enfant, les filles sont considérablement plus humides que les garçons à cet âge. Il doit nécessairement trouver une autre raison à l'absence de règles avant la puberté, qu'un manque de fluide en excès. Les traités embryologiques Génération et Nature de l'enfant décrivent les développements parallèles du mâle et de la femelle et leur explication de la puberté, et ainsi comparent la production des règles chez la fille et du sperme chez le garçon. En revanche, Maladies des femmes ne tente pas de corréler le processus menstruel avec une fonction physiologique normative chez l'homme. D'ailleurs, même dans les traités embryologiques, le parallélisme entre le sperme et les règles s'effondre s'il est poussé trop loin. Car le sperme est produit quand l'homme est stimulé sexuellement (comme l'est « la semence féminine »), mais ce n'est pas vrai des règles. Le médecin de Nature des enfants semble s'apercevoir des difficultés inhérentes à sa théorie, quand il atteste que

« la voie s'ouvre en même temps pour les règles et le sperme444(*) »

c'est-à-dire qu'au même moment, le chemin est ouvert chez les jeunes filles, pour le passage, non seulement des règles, mais aussi de la semence féminine : deux sécrétions là où l'homme n'en a qu'une. En général, tout au long du traité, le médecin hippocratique traite le sperme et la semence féminine comme étant semblables au sperme et aux règles, alors qu'il n'y a pas d'indication d'un processus où la semence féminine serait dérivée du fluide menstruel. Ailleurs dans le corpus hippocratique, le sperme correspond à la semence féminine, non aux règles. L'auteur de Nature de l'enfant fait l'équation additionnelle du sperme et des règles parce qu'ils apparaissent à peu près au même moment, chez les jeunes garçons et filles, alors qu'il n'y a pas nécessairement un signe extérieur de la semence féminine chez les filles pubères. La théorie ménarchale de Nature de l'enfant peut être combinée avec la théorie menstruelle de Maladies de femmes comme elle est exposée dans Maladies des jeunes filles, mais ensemble, elles produisent une surdétermination du phénomène de la menarche et de menstruation qui suggère que l'auteur de Maladies de jeunes filles essayait de prendre en compte deux théories séparées.

A ce moment de leur vie, les filles sont en danger. Elles connaissent ces états de terreur, de folie, que la raison ne parvient pas à contrôler : l'hystérie. Elles sont malades de désir. Le médecin hippocratique de Maladies des jeunes filles a attribué les tendances suicidaires des jeunes vierges au sang ménarchal, qui, emprisonné à l'intérieur de leur corps ne peut sortir ; alors, ce sang voyage de l'utérus au coeur et aux poumons, provoquant ces pathologies hystériques. Pour ce médecin, le meilleur soin à leur apporter : les marier afin que l'utérus soit ouvert, que le sang coule.

Les changements physiologiques de la puberté arrivent à peu près à la même période pour les jeunes garçons et les jeunes filles, mais alors que ces changements marquent le commencement d'une période étendue pour les garçons qui les mènera à la citoyenneté pleine et entière ; les filles sont censées être capables de remplir le rôle de femme adulte dans le mariage et dans la maternité souvent dès treize ans, voir plus tôt445(*).

Quels sont les maux qui guettent nos parthenoi ? On abordera ici la pendaison et l'épilepsie, qui touchent, toujours pour une raison de physis, plus les femmes que les hommes.

* 440 Hippocrate, Maladies des jeunes filles, Tome VIII, 14, 6-7.

* 441 Hippocrate, Maladies des femmes, Tome VIII, 14, 6-7.

* 442 Hippocrate, Génération, TomeVII, 472, 19-26.

* 443 Hippocrate, Nature de l'enfant, Tome VIII, 494, 18-24.

* 444 Ibid. Tome VII, 494, 13-15.

* 445 Amundsen, D.W. and Diers, C.J., « The age of Menarche in Classical Greece and Rome» Human Biology, Wayne State University Press, USA, 1969, pages 125-132.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry