WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

les limites des voies d'exécution eu égard à la protection des données personnelles

( Télécharger le fichier original )
par Cécile BARRA
Faculté de Droit et Science politique Aix Marseille III - Master II 2008
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

II La nature des renseignements obtenus

Les renseignements sont divers, ils peuvent toucher au patrimoine immobilier ou mobilier, concerner la domiciliation bancaire et le solde des comptes voire les revenus, l'adresse de l'employeur... En effet, selon les sites, en l'espèce www.juridis.org/recherches, comme la plupart des autres sociétés spécialisées, propose d'obtenir  « les coordonnées bancaires d'une personne physique ou morale », de « localiser les biens immobiliers d'une personne physique ou morale », de « déterminer la nature des revenus d'une personne physique », ou encore de se « renseigner sur la solvabilité d'une personne physique ou morale». « Nos enquêtes de solvabilité prévoient l'identification et l'analyse : des revenus, des comptes bancaires, du patrimoine immobilier, du patrimoine mobilier et roulant ».

Sur la base des premières informations données par leurs clients, les enquêteurs privés procèdent aux recherches demandées.

Le problème majeur est que ces sites ne font en aucun cas allusion au recours d'un huissier de justice pour obtenir ce genre de renseignements. Par ailleurs, dans un entretien téléphonique en date du mercredi 14 mai 2008, la société « Juridis »  a déclaré que ses services ne faisaient en aucun cas appel à un huissier de justice et que son personnel était là au contraire pour pallier à la lenteur des procédures de requêtes au procureur.

Certes, les huissiers de justice, comme cela a été souligné précédemment, ne sont pas des détectives privés mais ce sont malgré tout les garde-fous de l'exécution, dont ils ont le monopole.

Certains renseignements peuvent être obtenus après interrogation de tierces personnes : anciens voisins, concierge, membres de la famille... Il en va ainsi en ce qui concerne par exemple la localisation du débiteur à partir de sa dernière adresse connue. Même si en pratique, les cas restent rares, un débiteur peut avoir laissé en partant une adresse à un tiers. Obtenir l'adresse d'une résidence principale peut donc potentiellement rester dans le cadre légal.

Pour ce qui est des renseignements concernant la domiciliation bancaire et le solde du ou des comptes du débiteur, ces derniers ne sont probablement pas donnés par des membres de la famille ou des tiers même s'ils sont interrogés, alors comment sont ils obtenus ? Probablement frauduleusement eu égard aux informations qui suivent et comme vu précédemment29(*).

Selon toutes dispositions légales et plus précisément celles contenues dans la loi Informatique et Libertés de 1971 visant à protéger tous les fichiers de renseignements d'ordre privé, c'est le fichier FICOBA qui sert à recenser les comptes de toute nature (bancaires, postaux, d'épargne...) et à fournir aux personnes habilitées des informations sur les comptes détenus par une personne ou une société.

Pour ce qui est de la liste des personnes habilitées : autorités judiciaires, Banque de France, huissier de justice... De telles informations ne sont donc pas données à tout demandeur, alors sachant qu'elles sont obtenues, comment le sont-elles puisque aucun site ne laisse penser qu'il y a ne serait-ce qu'un recours à une personne habilitée à pouvoir obtenir de telles informations ?

Quelle peut être l'éthique de ces sites qui vendent des données touchant à la vie privée de personnes ? Le fait d'être cité comme étant débiteur dans une procédure ne permet pas pour autant une violation des droits de la personne par des tiers non habilités.

De plus, comment ces sites peuvent-ils obtenir un inventaire détaillé du patrimoine d'un tiers sachant que de nos jours la tendance est à la dématérialisation du patrimoine ? Ils peuvent sans doute interroger le cadastre, le bureau des hypothèques. Certes, ce moyen reste ouvert à tous mais comment interroger l'ensemble des bureaux existants dans la France entière ?

Quant aux données portant sur l'employeur, le salaire mensuel versé à l'employé « débiteur » qui touche selon la position de la jurisprudence actuelle à la vie privée, comment les obtiennent-ils ? Il est possible de rester dans le cadre du voisinage voire de l'entourage proche. Cependant, il faut être réaliste : quel pourcentage de la population française indique son salaire à ses voisins ? Cela doit approcher du taux zéro, quant au fait de le donner à sa famille et ses amis, certes le pourcentage peut être un plus élevé mais ces derniers ne le divulgueront certainement pas au premier venu. Les résultats ne peuvent donc pas être obtenus au moyen d'enquête auprès de tiers. Ces sociétés ne seraient donc pas si florissantes si elles n'avaient à leur portée que de tels moyens.

Ce marché parallèle de l'information est une question tout à fait d'actualité. Au mois de mai 2008, une affaire politique a éclaté, la personne visée étant M. Olivier BESANCENOT. Pendant plusieurs mois, d'octobre 2007 à janvier 2008 au moins, la vie de celui-ci a été épiée et mises en fiches de renseignements par une officine de renseignement privé. Différents documents de cette dernière recensent par exemple les numéros de compte bancaire de l'intéressé et de sa compagne ainsi que les sommes au centime près ou encore l'emplacement exact de son appartement avec sa fiche cadastrale, des informations quant à son véhicule... Ce dernier a déposé plainte pour violation du secret professionnel visant d'éventuels complices dans les administrations dont auraient pu bénéficier les commanditaires de cet espionnage. Il a également soulevé le chef d'atteinte aux droits des personnes pouvant résulter des fichiers et traitements informatiques. Cette affaire remet une fois de plus en question le problème des renseignements pouvant être obtenus et leur utilisation.

Ces enquêteurs arrivent à leurs fins mais comment peuvent-t-ils y parvenir sans avoir la possibilité de passer par la procédure de requête au procureur alors que les renseignements obtenus sont de même nature ? Le législateur se voilerait-il la face ? Sous toute logique, comment penser que ces sociétés ne se jouent pas de la légalité ?

A la suite de plaintes concernant les méthodes utilisées par des détectives privés pour retrouver les coordonnées d'un débiteur, la CNIL a réalisé cinq missions de contrôle afin de s'informer sur les pratiques et les traitements de données mis en oeuvre par ces professionnels. Elle a pu observer l'activité de ces sociétés et donc répondre à toutes les interrogations précédentes. Les recherches de débiteur ne se font pas dans le respect de l'article 6-1 de la loi du 6 janvier 1978.

Les investigations s'effectuent depuis les bureaux de la société en consultant des bases de données publiques ou par des appels téléphoniques auprès de tiers susceptibles de communiquer des renseignements sur les personnes concernées. Par ailleurs, les contrôles diligentés par la CNIL ont permis d'identifier des pratiques d'accès indirect à ces fichiers. Des copies de notes ont ainsi permis de révéler l'identité de certains fonctionnaires manifestement disposés à livrer des informations. De plus, des copies de scripts téléphoniques, dont l'utilisation était manifestement de permettre de procéder à des appels téléphoniques auprès d'administrations en usurpant des titres ou fonctions afin d'obtenir de façon détournée des informations sur des personnes recherchées.

Il a fallu attendre que des personnes abusées par les pratiques de ce genre de société portent plainte pour que la CNIL procède à des enquêtes et entre dans le quotidien de ces sociétés, quotidien qui se déroule en majeure partie dans l'illégalité.

Un autre problème tout aussi important que l'existence même de ces sociétés se trouve être que certains fonctionnaires soumis au respect du secret professionnel sont tout à fait disposés à donner des renseignements confidentiels en échange d'une contrepartie financière ou autre. Ces comportements illégaux sont certes sanctionnés lorsqu'ils sont avérés mais ils devraient être inexistants.

Mais ce système parallèle d'obtention de renseignements touchant à la vie privée est-il soumis à des règles déjà existantes ?

* 29 Titre I Section III page 21

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Tu supportes des injustices; Consoles-toi, le vrai malheur est d'en faire"   Démocrite